Les valeurs de l'ancien Orient ont placé la consommation d'opium et de haschisch en une indifférence, à contrario du tabac, de l'alcool et le café. Les pouvoirs politiques dans ces pays ont souvent réprimé l'usage du café et de l'alcool comme causes de turbulence en des lieux de consommation. L'usage du tabac en société initiait la discussion critique et les commentaires à propos des princes et des édiles. La vivacité provoquée en des lieux publics entre les interlocuteurs était mal perçue par les pouvoirs en place redoutant la faculté de ces produits à initialiser l'agitation, souvent associée à une possible résistance populaire. Les lieux de consommation se plaçaient un peu comme épicentres de la pensée et de l'initiative indépendants du pouvoir politique.
L'opium et le haschich, c'était différent. Leur usage plongeait les consommateurs en un retrait du monde. Ceux-ci ne désiraient qu'une chose: rêver. Pour autant que la source de drogue ne se tarisse, la sphère des initiés exprimait l'effacement extatique et les velléités n'existaient pas. Ainsi l'usage de l'opium par exemple, ne gênait pas le pouvoir politique totalement indifférent. Prenons par exemple le Coran qui ne mentionne rien au sujet de l'opium ni du hashich (le 1er déjà en plein commerce) alors que l'alcool y finit diabolisé. C'est que les usagers de toutes les classes sociales en addiction à l'opium (et le hashich) finissent d'une manière générale en une sorte de tiers état que l'on ne prend même pas en considération...
Un usager des drogues existe en un domaine dissocié de la vie courante, laquelle se poursuit par ailleurs... (les Hachischins, leurs tenants et aboutissants vis à vis de la drogue est un sujet à développer en un autre thème).
Ainsi les champs de pavot s'étendaient sur de grandes surfaces des contrées de l'Inde, l'Afghanistan, la Perse (l'Iran), l'Asie Mineure (et la Turquie Ottomane). La culture, le commerce et la consommation étaient libres, sans bornes... Le cannabis, malgré les excès, est resté plus facilement associé à la pharmacopée paysanne et familiale que le pavot... Le chanvre poussait naturellement à proximité. L'apparition du tabac au 16me s (en provenance de l'Amérique du Sud et colporté par les marins) mute la consommation ingérée en inhalation de ces produits psychotropes. On a commencé à mélanger le cannabis au tabac dans le fourneau des pipes (et celles à eau). Le mode d'ingestion de l'opium et des produits du cannabis par la fumée datent de ce temps. Ils sont devenus autre chose que des remèdes traditionnels. Il s'agira en réalité d'un véritable phénomène social...
REMARQUE: Les images et documentations récupérées ça et là, au gré de la chance sur le Web, ont parfois une propriété morale et intellectuelle, mais souvent je ne sais même pas d'où elles viennent de ce fouillis des pionniers internautes et des webmasters... Je prends ce qui m'intéresse. Si un jour une réclamation devait incider, je retirerais l'illustration concernée et c'est tout.
J'ai récupéré des images et un peu arrangé les bidons pour présenter ce que j'aurais voulu trouver et voir sur Internet car sans cela n'existe pas (jusqu'à maintenant).
A titre d'exemple: l'opium de la Mer Noire
Cette carte ancienne du vilayet ottoman de Trébizonde bordant la Mer Noire découpe ce territoire administratif en 4 sandjaks. Le vilayet de Trébizonde correspond assez à l'Empire chrétien de Trébizonde qui fut, même après sa chute, une petite survivance identitaire de l'Empire Byzantin pour la tradition chrétienne de cette région...
cette carte ancienne est en français !
Interprété de l'anglais:
"l'opium doux du Nord. Il est produit dans les provinces de Tokat, Amasya et Corum. La meilleure qualité connue est le Gümüşhacıköy. L'opium doux du Nord prend la forme d’une pâte fine et onctueuse qui est collante, graisseuse et plutôt douce. Cet opium peut être brun doré, ou clair ou foncé. Les couleurs sombres sont causées par la rosée qui se produit fréquemment dans ce domaine. La teneur en morphine est élevée et varie de 13 à 16 %. Dans certains cas, il peut atteindre 28,6 pour cent. La production de l’opium doux du Nord n’a pas souffert de la mise en place du Bureau de Produits du Sol. Car ils ont une teneur élevée de morphine, et le monopole ne paie que peu plus pour eux que pour l’opium de droguiste."
nota: tous les noms de lieux cités dans ce texte ne sont pas imprimés sur la carte mais en réalité ces lieux (comme Gümüşhacıköy) se situent tout près d'Amassia (imprimé), à son Ouest... A remarquer comme Amassia est important aux yeux des Samssouliotes. La seule route véritable de l'époque mène en zone de cultures...
à titre d'exemple: un petit tableau comparatif des teneurs en morphine.
Morphine content of single plant (per cent)
origine Amasya (ou Amassia) | Minimum=7.30 Maximum=28.60 Moyenne=21.58 |
origine Afyon | Minimum=11.70 Maximum=24.10 Moyenne=19.32 |
origine Denizli | Minimum=8.90 Maximum=25.70 Moyenne=19.50 |
D'habitude on parle ponctuellement de tabac, de pavot ou de cannabis... Mais ici on va envisager ces 3 cultures d'un coup d’œil pour faire le constat suivant: elles se situent sur la même zone. Les 3 cartes sont un peu disparates. Elles proviennent de sources variées mais on peut voir que le vilayet de Trébizonde (et son arrière pays) correspond chaque x à la même zone prolifique pour chacune des trois cultures différentes.
tabac, pavot et cannabis
Les usages répandus et généralisés de la drogue:
"vers 1620, des Hollandais établis dans l’île de Taïwan, en face de la Chine, ont l’idée de mélanger l’opium et le tabac. L’opium brut ne pouvant se fumer pur car il carbonise"
Récupéré du Web et traduit:
Turquie, au sujet des petites cultures disséminées (il y en a de grandes aussi): "une rotation n'est pas précisément planifiée sur les petites fermes où le pavot est cultivé. Sur ces exploitations le pavot est très souvent précédé par une culture de l’orge ou, dans les cas où la récolte de printemps est coutumière (dépend du climat), à force de fumier, le melon, pastèque, maïs ou le tabac. Pour ces cultures, entre trente et quarante tonnes de fumier par hectare sont utilisés."
Au hasard du Web se trouvait cette carte postale à l'image du sultan Abdul Hamid (dit "sultan rouge" à cause du sang des chrétiens). Accessoirement on peut voir la pipe à eau (chicha) pour faire le folklore oriental excentrique...
Produit d'une traduction automatique et un peu corrigé en français, il s'agit de l'éthymologie de "chicha":
"la forme originale du mot est le persan schische/شيشه / «verre». Cela a été entré dans le turc (Şişe « bouteille ») ainsi que dans l’arabe (شيشة, dmg Šīša), où, dans les dialectes nord-africain de l’arabe, le corps en verre du narguilé et l'embout buccal dans son ensemble.
Or sur cette photographie de famille récupérée dans un carton à chapeau au grenier, et scannée, on remarque quasi le même modèle de chicha que celui d'Abdul Hamid. Pourtant ici, sur la photo présente il s'agit de Chrétiens de Samsoun (comme le certifie le drapeau déployé en fond de décor). Il s'agit en fait d'une prise de vue du staff d'entreprise de la manufacture de tabac de l'époque. On commence à en déduire que l'habitude de fumer était commune à toutes les communautés composant la mosaïque ottomane. La prise de vue est juste antérieure au génocide de 1915 mais ne sachant jamais à quelle heure (traditionnelle julienne ou à l'anglaise de Greenwich) se conforment les destins, il aurait pu s'agir d'un gros bizness encore en 1920.
oui il y a des aïeux familiaux dans ce groupe... chapeau bas pleez.
Cette recherche expérimentale comme interrogation bien légitime et j'espère que on ne l'attribuera pas à un égo prononcé, ni à aucune autre tare... Ce qui serait une bêtise puisque il ne reste plus rien: la spoliation a battu son plein lors des années 20 et non seulement cela mais aussi il n'y a plus de champs d'opium aujourd'hui... Tout cela n'est plus qu'un songe. Il y a juste encore que des questions.
Je cherche à connaître l'implication de la culture du pavot dans le quotidien, les luttes, les guerres en Arménie, dans l'Empire Ottoman. On ne m'a jamais rien dit. Pour le tabac, la région de Samsun était réputée. Je n'obtiendrai évidemment pas d'informations à l'ambassade turque actuelle sur ma famille ottomane qui a fui le génocide en 1920 et je tâtonne un peu dans tous les sens pour trouver une piste... J'ai vu sur le Web que l'opium le plus fin provenait de l'arrière pays en cette région. Avec sa haute teneur en morphine il contribuait à normaliser la somme mélangée des opiums des 4 coins de la Turquie pour le commerce international officiel. Pour préciser les recherches sur l'opium il faudrait en savoir plus que les marques de cigarettes et autres produits finis attenants au tabac. Si un produit courant du pavot a existé au temps des Ottomans on serait alors amené à envisager l'implication intégrale des acteurs du tabac en un aspect du folklore de l'Orient que l'on zappe aujourd'hui à cause de la War on Drugs (les cultures turques de l'opium sont interdites depuis les années 70 en accord avec le Pentagone).
Mes ancêtres et l'opium, avec quelle mission attribuée ??
En fait laissons mes ancêtres mais juste savoir si une marque, un label égyptien, turc, ou perse, indien... définissait des cigarettes mixées ou saucées à l'opium.
Quand on scrute les anciens textes du 17me s et après, jusqu'à ceux du 19me et 20me siècles, on apprend un usage généralisé de l'opium depuis l'Extrême-Orient en passant par l'Inde et la Perse jusqu'à la Turquie... La méthode de mélange du tabac et de l'opium était généralisée partout pour les chichas, narguilés et les pipes. Dès lors, si on veut être logique, on devrait envisager une évolution vers la cigarette comme cela a été le cas pour le tabac. Or je cherche un témoignage, une documentation, à ce sujet. Y a t il eu un tel mix (tabac opium) commercialisé et présenté en conditionnement semblable aux blagues à tabac, aux paquets de cigarettes, ou en boîte, dans certains pays d'orient?
Du papier à cigarettes... ou à joints ottomans tant que nous y sommes??
Bafra est le nom d'un lieu lisible sur la carte (placée ci plus haut) du sandjak de Samsun.
Cette ville était le site de la manufacture de tabac (la photo du staff de l'usine). Aujourd'hui les Turcs l'ont recyclée en centre commercial.
nous on ne connait quasi que le Rizzla...
On trouve beaucoup de marques de cigarettes de l'ancien temps mais on ne connait pas l'éventualité de présence d'opium dans les compositions, souvent celles-ci ne sont pas précisées sur les anciens conditionnements. Or on sait que l'opium était un élément courant pour faire l'environnement social, depuis les toxicomanes jusque au commerce de gros en passant par une application pharmaceutique répandue dans les préparations et remèdes de toutes sortes. On a peine à croire que l'opium ait zappé la cigarette au 19 et 20me s.
ANECDOTE:
La seule évocation de source académique admettant "officiellement" les cigarettes mixant le tabac à l'opium, est de nature historique. En 1917, en prémices à la 3me bataille de Gaza comme épisode du siège de Jérusalem, un stratège britannique (Meinertzhagen) adopta une méthode psychologique de bienfaiteur pour inciter les Ottomans assiégés à incliner leurs aspirations guerrières. L'officier Meinertzhagen fit charger des aéroplanes avec des tracts invitant les Ottomans à finir la guerre. Comme argument déterminant, les tracts s'accompagnaient de cigarettes mixées à l'opium. Meinertzhagen avait visé juste !! La fatalité de l'opium s'identifiant si fort à l'esprit de l'Orient, les Turcs s'abandonnèrent en des promesses de félicité produites par la consommation des cigarettes, pour le moins, spéciales. C'est ainsi que les Britanniques investirent la place sans bataille. En fait de résistance ils trouvèrent une garnison stoned abandonnée aux rêves les plus sublimes...