Date: 1967-04-28
Volume: IT-Volume-1
Issue: 12
page 5
une traduction / interprétation d'un article du magazine Underground
D’Algésiras ou de Gibraltar, ils descendent la passerelle du ferry, vêtus de leurs jeans déchirés, de leur chemise en jean délavé, de leurs sandales bien déchirées traînant à leurs pieds poussiéreux, avec leur peau bronzée assombrie par la saleté; encore High de leur dernière dose de Benzedrine espagnole, achetée en vente libre comme de l'Aspro en n’importe quelle Farmacia en Espagne (alors que de son vrai nom il s'agit de « Centramina » se vendant à 22 pesetas le tube.)
Avec leurs sacs à dos lourds, ils dépassent les porteurs arabes débraillés et courbés et se dépêchent de passer la douane, ne s’arrêtant pas pour changer leur monnaie restante au guichet de la Banque du Maroc - qui ne donne que 13 dirhams à la livre (UK), alors que vous pouvez en obtenir 16 pour le même montant auprès des changeurs d’argent du marché noir qui errent dans les rues étroites et sombres de la Médina et de la Kasbah.
Certains se dirigent vers l’auberge de jeunesse de la rue San Francisco, juste à côté du Grand Socco, où vous n’avez pas besoin de carte de membre, et où le gardien recommande à ses jeunes de fumer la « Holy Weed ». Certains avec leurs tentes en lambeaux vont au « Camping Miramonte »; certains dorment sur la plage. Certains, dès qu’ils ont trouvé un colporteur, prennent la route de Casablanca et de Marrakech ; certains vont jusqu’au Sahara, ou à travers l’Algérie et la Tunisie, même en Egypte. Mais la plupart restent à Tanger - la ville internationale des junkies.
Vous montez la colline du port vers le Grand Socco, il semble y avoir beaucoup moins de regards de femmes arabes voilées que ceux éprouvés dans les rues à bordels de Barcelone avec toutes ces senoritas à chair lourde. Ou même ces regards britanniques froids, de il y a quelques heures à peine, de retour à Gribraltar.
Et ainsi vous passez en vous interrogeant sur ces femmes marocaines, dont la chair et les visages restent un mystère ; car tout, sauf leurs mains et leurs yeux, qui font allusion à la beauté, sont cachés par le yashmak et le burnous souple.
Mais à ce moment-là, vous êtes distrait par les foules de petits enfants, qui se ressemblent tous, qui mendient des cigarettes, et vous suivent simplement en voulant vous montrer le chemin - puis exigent un dirham pour leurs services; ou qui vous entraînent dans le bazar méconnu d’Ali Baba, où vous pouvez troquer pendant des heures juste pour acheter
une ceinture, une femme ou un garçon. <<<
voir nota
Après avoir enfin rangé votre sac dans la rue San Francisco, vous descendez dans les rues qui mènent au Petit Socco et sous une arche dans les ruelles sinueuses, les ruelles sombres de la Médina et de la Kasbah, où de vieilles femmes arabes accroupies dans la poussière, épluchent des figues de barbarie pour les vendre au passant - tout vieil Arabe à barbe blanche broussailleuse, burnous en lambeaux, fez sur la tête ou juste une capuche, et des chaussures sans talon, sans lanière qui tiennent en quelque sorte sur ses pieds.
Et ainsi un tel se rapproche soudainement de vous, vous prend par le bras et dit:
"You want buy marijuana ? Make you feel happy."
"How much ?"
"Two hundred dirham for kilo"
"Get lost !! I'll give you TEN dirham a kilo, and not a cent more !"
and you walk on. But he follows:
"Alright; what your last price ?"
"You heard me TEN dirham"
and you walk on again... but he follows:
"Alright... hunderd dirham for half-kilo !"
Et ainsi de suite; vous pourriez marchander votre aller-retour pour l'enfer, mais si vous êtes patient, vous devriez obtenir votre kilo pour moins de vingt dirhams - ou si vous voulez, il a du haschich et du kef de qualité supérieure, tout des montagnes de l’Atlas, mais c’est plus cher.
Et on fume ainsi, jusqu’à ce que le trottoir se transforme en trampoline et que on fasse l’amour à la lune; puis les junkies redescendent vers la mer, traversent la voie ferrée et atteignent la plage - ce gigantesque sourire doré de la plage de Tanger. Puis ils s’enfoncent sur le sable et ont des visions de Jésus marchant sur les vagues.
nota: on fait allusion à de la pédophilie. Le premier réflexe était de passer outre cet article pour ne pas l'afficher... Mais une réflexion s'impose: dans ce texte, si on admet de la pédophilie d'une part (le touriste) alors comment déterminer l'intention banale ayant libre cours sur ce marché marocain?? Comme avec le kif. Parce que pour une telle transaction il faut accord mutuel de part et d'autre ! Comment est le Monde? Ou alors comment était le Monde?? Est ce que on n'a pas le droit de savoir?
Mettre en prison tout un pays c'est un peu beaucoup.