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En 1936, Antonin Artaud par son expression, ne s'adresse plus à la postérité mais aux créatures de sa sorte, les seuls à décoder ses actes et son langage de junkie.
Ainsi il n'est pas tellement bien perçu du public mexicain présent à ses conférences... Les auditoires attendaient des arguments humanistes, révolutionnaires et des propos établissant l'Art surréaliste comme concurrent dans la course politique. Ils ont été déçus. AA jetait toutes ces foutaises dans le même lot parce que la préoccupation de l'héroïne importait avant tout.
La façon d'évoluer d'Antonin au fil des jours ne trompe pas. Elle est caractéristique pour les psychiatres ou pour qui veut bien admettre que son état se décode différemment du standard habituel. Il s'agit d'un sujet d'analyse bien connu. Il s'agit en fait d'un autre standard, avec ses intuitions et des aspirations différentes... Antonin Artaud est héroïnomane.
Ainsi le poète militant Cardoza y Aragon (aussi diplomate guatémaltèque) témoigne de cette extinction d'intérêt d'AA pour les choses de notre Monde. Lors de sa présence à Mexico, AA n'a pas établi de connaissances pour développer ses discours, ses écrits... Il n'a pas visité les musées ni les monuments. Il n'a pas cherché d'indices dans les bibliothèques. Il n'y a pas eu de quête archéologique (les pyramides) ni anthropologique pourtant sine qua non pour prétendre à défendre la valeur révolutionnaire mexicaine...
Le voyageur français a autre chose en tête. Il a quarante ans ; il n’a presque plus d’héro ; demain il part vers le nord, pour la sierra Tarahumara. Il laisse derrière lui vingt et un articles, qui continueront à paraître dans El National pendant son absence, et les formules qu’il a jetées lors de ses trois conférences dans l’amphithéâtre Bolivar de l’École normale de Mexico.
On reconnaît par contre le modus operandi des junkies déployant des procédures "automatiques" pour suppléer leur absence du Monde des Hommes lors des phases de manque. Cette façon de faire appartient aussi aux années 60 / 70. C'est la même chose.
La préoccupation de Antonin vis à vis de la drogue est reconnue mais mal décryptée selon la nature du lecteur... (expérience, connaissances, éducation, instruction...)
En 1936, il était déjà très malade, maigre, nerveux, le visage émacié, très drogué. Il mangeait très peu et vivait dans des conditions matérielles terribles [...] Peu après son arrivée il m’a confié qu’il avait un besoin urgent d’un peu de laudanum.
J’en ai parlé avec un ami médecin, poète, homme de la plus grande ouverture : Elias Nandino.
Ci-après nous sommes en 1936 (mais on se croirait en 1975...)
Il avait commencé à fréquenter la pègre de la place Garibaldi. Là-bas ou au café il trouvait des pistes pour acquérir de la drogue [...] Plus d’une fois il s’est fait rouler.
D m’a raconté l’histoire de la montre qui avait appartenu à son grand-père.
Des escrocs lui avaient négocié la montre pour un peu de drogue. Au moment de l’échange, impossible de vérifier la marchandise. Quand il l’a goûtée, c’était du bicarbonate.
Après tout ceci on pressent que AA n'a pas été chez les Indiens mais qu'il était un vrai drogué et qu'il a eu une expérience "mescaline". Même lors des 60 et des 70, la mescaline (et le LSD25) ont été le substitut hallucinogène des opiacés pour des sevrages. Les rapports psys devraient en être remplis. L'épisode mescaline de AA a t elle été imposée par une obédience complaisante vis à vis des influences montantes du fascisme? En France il y a eu une collaboration et naturellement aussi, dans la foulée et à la traîne, la "collaboration de la seconde heure". Plus tard et avec les aléas de la guerre ce mouvement se durcit avec la camisole de force. Ensuite à la Libération AA se venge et cela fait sa notoriété de victime d'exception.
(les extraits sont récupérés sur un ouvrage de JOANI HOCQUENGHEM)
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