Tiens, ben d'ailleurs, j'avais même mis en mots cette expérience de surdose sous forme de TR. J'ai écrit ça au moment où j'étais fiévreux, après la (sur)consommation de RC's mais AVANT que ne survienne, et s'enclenche, la phase de dépersonnalisation/HPPD, qui, j'en ai l'intime conviction, est apparue quelques jours après, quand la fièvre est redescendue, et après avoir pris des somnifères (je sais pas si ça peut-être lié)... Je serais bien incapable d'expliquer ce "décalage". La part de mental et par extention d'anxiété doit sans doute être prépondérante. Voici donc ci-après un peu de trash prose. La morale de l'histoire, c'est que j'ai mis ma Tanita en vente sur ebay. Savoir gérer les drogues doit pas faire partie de mes principales qualités.
Reçu mardi matin 2 g de 5-APB et 1 g de 5-MAPB (2x250 mg + 1x500 mg), en provenance d'un site particulièrement bien noté par SoS, je me fais pas de souci quant à la qualité. Curiosité et excitation. L'envie de bien triper, de découvrir comme celle de s'évader ailleurs, loin et longtemps si possible, sont bien présentes. Dehors y a même du soleil.
37 ans tout juste, 1m78 pour 62 kilos, je suis donc pas précisément doté d'un corps d'athlète (ou alors, à la limite, celui d'un coureur de fond). D'ailleurs j'ai presque rien mangé depuis un bout de temps, presque 24 h (un simple manque d'appétit). Je suis au RSA depuis novembre dernier (après avoir été graphiste pendant 7 ans, en France et à l'étranger). Vis aujourd'hui dans un trou perdu où les filles sont toutes, et uniformément, écolos à tendance bouddhistes et, surtout, mamans passés 25 ans, ce qui est pas pour ainsi dire particulièrement rock 'n' roll. Sans même évoquer, en conséquence, l'absence totale de fêtes, de soirées, de vie nocturne ou autre séduisante movida. En gros j'ai donc pas grand-chose à foutre de mes journées ni de mes nuits (ni même de ma solitude), en parfait parasite pris en charge par l'état français
Du coup j'ai la possibilité de consommer de la drogue à peu près n'importe quand – sauf exceptions.
Dans l'après-midi (genre 15 h) je gobe un petit parachute de 35 mg de 5-APB. Pas envie de rester seultou entre 4 murs, je vais me dégourdir les jambes dehors, le soleil, même un peu timide, est toujours présent. Je me balade comme ça à peu près 1 h, mais au final c'est pas non plus la panacée, les rues sont à peu près désertes, y a quelque chose de triste dedans et autour. A vrai dire je me fais un peu chier, et décide, faute de mieux, de retourner dans l'obscure cage qui me sert de chambre.
J'avais lu ici et là que la 5-MAPB se poutrait bien, je commence par me faire des traces de 15-20 mg à intervalles réguliers, à peu près toutes les demi-heures. La grosse différence avec les drogues "classiques" (la coke en particulier) c'est que l'effet n'est pas immédiat (ou quasi-immédiat) ; c'est du coup par essence plus difficile à gérer, il y a le piège de se faire happer par l'impatience.
Du coup la montée se fait clairement sentir, à partir de 17-18 h plus ou moins. C'est sympa car chaleureux et euphorisant, mais cependant bien bourrin. De l'euphorie abrutissante, on est pas dans cette "lucidité" (certes autre) que procure le mdma ou encore la coke. Une sorte d'ivresse précisément, on est à l'ouest mais c'est somme toute franchement marrant, puisqu'il n'y a progressivement plus rien de grave, qu'il vaut mieux après tout rire de l'absurdité, puisque l'absurdité est drôle. Progressivement ça part en couilles : je me prépare "la dernière trace" qui, en réalité, ne sera jamais effective : j'enchaîne ces "dernières traces" l'une après l'autre, sans plus parvenir à m'arrêter. Au contraire le rythme s'accélère et les quantités grimpent. L'abrutissement continuant de croître participe de cette logique. Je suis quand même pas naïf ni couard au point de tout imputer au produit, je sais bien que c'est moi tout seul, comme un parfait petit connard, qui commence à jouer avec le feu. Ça reste difficile, pour ne pas dire impossible, d'y résister.
En y repensant je m'y attendais franchement pas, je pensais au moins avoir fait quelques pas en avant par rapport à de vieilles (pas tant que ça, mais quand même) pulsions autodestructrices. Par exemple ça fait plus d'un mois que j'ai pas touché à une goutte d'alcool, et sans que ça me manque. Au contraire être un peu plus stable émotionnellement, au quotidien, ça donne un peu d'air, ça aide à se mépriser quand même un peu moins. J'ai fait pas mal de recherches concernant les RC's, curieux d'apprendre et de découvrir, sans qu'il n'y ait rien de morbide dedans, au contraire. Acheté une jolie Tanita histoire de "réduire les risques". Désireux de pas déconner. Véritablement naïf, pour le coup.
Je me rappelle plus grand-chose de cette nuit (trous noirs, trous dans la mémoire) de mardi à mercredi. Un flash où je me rends compte que j'ai fini le premier paquet de 250 g. Pas de souci : y en a un deuxième. Je le consomme plutôt rapidement, sans trop plus d'effets additionnels, j'imagine que mon corps est désormais "tolérant". Ça m'empêche pas de continuer à poutrer, c'est désormais mécanique. Les effets physiques, forcément pas franchement agréables : en particulier les dents qui claquent et se resserrent les unes contre les autres, rangée de haut vs rangée de bas, "toutes seules" et avec une violence inouïe : à force de serrer "involontairement" les dents je suis même parvenu à m'en abîmer une (j'ai senti un bout, comme ça, gicler). Les yeux qui partent en vrille, rythme cardiaque plutôt élevé, anxiété palpable. Des fois je sens qu'elle monte un peu trop en moi, pour me calmer je vais bouquiner par fragments, sur mon lit, le salvateur "Retour au collège" de l'excellent Riad Sattouf. Un peu d'air. Un peu de musique aussi, et beaucoup d'écran, assis, tout au long de la nuit.
A un moment je me sens sombrer dans la somnolence, il est 7 h du mat. Direction mon lit, sur lequel je dors une petite heure, puis m'en échappe. J'ai grave la tête dans le cul. La sensation d'avoir flingué ma mémoire, en particulier à court terme : impossible désormais d'imprimer mentalement le passé immédiat. Vraiment à l'ouest, des vertiges et pertes d'équilibre si j'essaye de marcher. J'ai bu beaucoup d'eau pendant la nuit (par contre j'ai toujours pas bouffé, toujours aucune faim) ; ma pine, cette sombre garce, est alors toute petite et fripée et, quand je vais aux chiottes, je dois me concentrer au moins un quart d'heure avant de parvenir à faire sortir une ridicule gouttelette. C'est douloureux de surcroît car l'envie voire le besoin de se vider la vessie sont bien présents, mais le corps le refuse, y a clairement quelque chose de québlo, un affrontement à l'intérieur. Ce qui est sûr c'est que globalement l'abus de RC's me semble bien plus sale et crade qu'un abus de drogues "classiques", tu sens clairement que ton cerveau paye, et fissa, pour tes conneries. Le corps aussi, j'ai des courbatures et douleurs à peu près partout. Le moindre mouvement voire la moindre pensée demandent beaucoup d'efforts et de concentration, de sacrifice presque.
Il est un peu plus de 8h, je sais toujours pas non plus quoi foutre. Bah, allez, j'entame le sachet de 500 mg de 5-MAPB. Les traces succèdent aux poutres et les poutres aux traces. Y a un peu d'euphorie mais ça reste léger, il y a cette complaisance dans l'abrutissement qui croît, parce qu'une place y est cependant faite pour la légèreté, à défaut d'un ailleurs véritable. J'ai plus de souvenirs précis de cette défonce qui dure jusqu'à 15 h environ (trous noirs encore) ; dans le sachet il reste alors à peu près 50 mg. Ce qui me pousse à sortir enfin de ma cage obscure, c'est l'anxiété et l'angoisse qui grandissent progressivement en moi, jusqu'à l'évidence que le trip n'est plus bon du tout : chez moi ça se concentre dans la gorge (traumatismes enfouis liés à des œdèmes allergiques consécutifs au combo surdose de mdma / excès d'alcool fort : œdèmes de la glotte et dans la gorge pouvant entraîner la mort par étouffement, d'où nombre de soirées passées s'achevant, au petit matin, aux urgences, piqûres de cortisone, haine et honte de soi, ce genre de machins) ; il y a cette sensation, toujours plus nette et oppressante, que ma gorge se gonfle, qu'un truc coincé dans ma gorge s'amplifierait petit à petit, jusqu'à bloquer le passage de l'air, juste avant de provoquer l'étouffement. Toute la question est là : parvenir à comprendre si ce que je ressens alors est juste d'ordre paranoïaque (depuis cette première crise œdémique, en juin 2011, je souffre de reflux gastriques, de reflux de mucus ponctuellement québlos dans ma gorge ; et vu que je fume comme un porc depuis la première montée, hier en fin d'aprèm, ajouté à un état de stress plus ou moins continu, j'ai forcément la gorge irritée, et suis beaucoup plus sensible à cette gène puisque défoncé) ou s'il s'agit d'un problème sérieux et réel, qu'il s'agit d'écouter. Pas facile de trancher avec certitude quand on est fin fonzdé, passablement à l'ouest, en pleine et accomplie montée de parano. La direction de cette petite promenade du mercredi après-midi ? Les urgences ! Dans la joie et, évidemment, la bonne humeur. La dignité aussi. Je n'y pénètre pas mais demeure tout proche, "au cas où", près de la porte d'entrée où je fume des clopes et bois de l'eau. J'essaye de me calmer seultou comme un grand, j'en ai un peu marre quand même de ces humiliations déplacées, sordides. Je trouve un siège à l'abri du vent (glacial) sur lequel je parviens à m'assoupir une petite heure à peu près. Lorsque j'ouvre les yeux, la boule dans la gorge s'est sensiblement estompée. Je peux rentrer chez moi, j'y arrive à peu près vers 17h. Parviens à manger un croissant et un yaourt.
Là, en 2h, je m'enfile 4 poutres totalisant 200 mg de 5-APB (4x50 mg séparées chacune d'une demi-heure), devant l'écran toujours, et avec un peu de musique. Ça monte bien, l'effet est bien meilleur que celui provoqué par les traces de 5-MAPB, c'est beaucoup plus délicat, plus fin, moins bourrin et abrutissant. Un bourdonnement lancinant vient ponctuellement me caresser les oreilles, c'est pas du tout désagréable, au contraire doux voire même un peu charnel, ça ressemble un peu aux sensations sonores qu'on rencontre dans les avions, au moment du vol. Et puis vraiment de l'euphorie, du pétillement. Un truc propre. 2 heures après la dernière poutre, il est à peu près 21h, l'angoisse focalisée sur la gorge remonte subitement, très intense. Je sens le bad trip revenir, rejaillir soudainement. A peine 5 minutes après, une douleur, extrêmement réelle, extrêmement violente, m'irradie le milieu du dos. Elle s'accompagne d'une douleur tout aussi forte et oppressante au niveau du palpitant. Ce cœur qui bat soudain beaucoup trop vite, beaucoup trop fort, qui fait clairement mal. Il y a cette sensation que c'est ma poitrine tout entière qui subit une pression démesurée, enfermée dans un étau toujours plus oppressant, cloisonnant, étouffant, à mesure que le temps passe. Cette sensation encore que tout ce qui est alors en ébullition à l'intérieur de moi pourrait exploser d'une seconde à l'autre. Je fais alors pas franchement le malin, c'est un truc que j'avais encore jamais ressenti et c'est pas non plus vraiment jouissif. Me lève fissa, je sens bien que je pourrais défaillir à tout moment. Pas franchement de temps à perdre, pas vraiment d'autre issue que de quitter ma chambre. Je descends des escaliers, manque de tomber à peu près 15 fois, parvient en claudiquant péniblement, lentement, par miracle presque, jusqu'en bas des marches. Que faire alors ? Ma mère et mon grand-frère habitent pas très loin (pas ensemble non plus, hein), l'idée de base, portée par un genre d'instinct de survie, c'est de surgir chez l'un ou l'autre, qu'ils appellent une ambulance (j'ai certes pas non plus une imagination débordante), et fissa si possible, vu le caractère insoutenable de ces douleurs, et la panique consécutive. Je fais cependant le choix de m'asseoir en bas des marches. Allez vieux, on se calme maintenant, on respire. On essaye au moins encore une fois. Quelques minutes passent, un ange peut-être aussi. Les douleurs perdent petit à petit, doucement, lentement, leur caractère exclusif et oppressant. C'est un moment assez beau : à la fois extrêmement pathétique et pourtant, parallèlement, je sens monter en moi une forme d'apaisement, c'est pas le genre de trucs qui m'arrive souvent. Enveloppé dans une obscurité douce, mystérieuse et bienveillante, en face de moi la porte d'entrée, décorée par un vitrail, certes un peu sommaire. Les couleurs du vitrail dansent devant mes yeux, une image en mouvement vraiment belle, j'essaye de profiter de l'instant autant que possible, de l'imprimer en moi. D'autres minutes passent, toujours plus douces.
Je peux alors remonter dans ma chambre, claudiquant encore. Il doit être un truc genre 21h30-22h. Il est temps de payer mon gars, on peut dire que tu l'as particulièrement recherché, avec application ; it's time to pay. La redescente commence à s'enclencher, très progressivement. Parallèlement de vilaines douleurs dans le corps et dans le crâne réapparaissent. Courbatures lancinantes, insidieuses, mon corps est celui d'un vieillard. Je suis rapidement complètement à l'ouest dans ma tête, je comprends à peu près rien à pas grand-chose. Peu avant minuit je prends conscience que j'ai un rendez-vous le lendemain matin, à 9h30, avec ma toute nouvelle conseillère de Pôle Emploi. Disons que j'hésite entre sauter de joie et sauter de joie. Je parviens tant bien que mal à répondre à quelques mails, je finis par parvenir à imprimer un genre de cv, une lettre de motivation, histoire de pas arriver les mains vides, hein, ça manquerait tout de même d'urbanité. Je vais au lit à 3h.
Ce qui me marque encore le lendemain matin, outre des difficultés psychomotrices particulièrement peu reluisantes (cette sensation d'autisme corporel, les mouvements avortés, maladroits, les pertes d'équilibre), c'est ma gueule toute cadavérique, toute triste, toute flippée, dans le miroir. J'ai dû prendre facile 10 ans en un peu plus de 36 heures. Mes cheveux aussi sont cramés, dans un piteux état, y a un effet Tchernobyl du plus bel effet (ça m'était déjà arrivé, également, suite à des abus de mdma ou de coke). J'arrache des plaques de cheveux par pleine poignée, c'est impressionnant, répugnant surtout. Pas franchement sexy non plus.
Ensuite je parviens malgré tout, assez miraculeusement, à faire preuve de dignité (certes relative) une fois à Pôle Emploi. Retour chez moi. Je parviens enfin à faire un "vrai" repas (ou avoisinant), puis commence à écrire ce post. A travers la fenêtre, dehors, sans prévenir, c'est la neige qui s'invite, tourbillonnante, ce vent glacial encore qui la fait danser. Le froid dehors finit par m'envahir. Arrive progressivement la fièvre, de nouvelles douleurs dans le cœur, certes beaucoup moins violentes qu'hier mais plus longues et régulières, de fortes douleurs dans la poitrine lorsque je tousse (j'ai précisément la gorge défoncée et le palais brûlé d'avoir, perché, fumé comme un porc), je crache un peu de sang, régulièrement, tout ça est pas non plus particulièrement glamour. Je m'allonge près d'un feu de cheminée où j'essaye en vain de m'endormir, enveloppé de froid et de frissons malgré les 15 couvertures sur moi posées. Sueurs éparses sur mon corps, qui mouillent mon front. Alors que je suis littéralement ko, dans l'aprèm, arrivent par la poste 1g de méthylone accompagné d'1 g de mephédrone. Plus tard je me lève, finis d'écrire ce post.