"oui mais quand il parle des femmes il parle des femelle alors que quand il parle des hommes ils parlent des humains" mais faut bien comprendre que quand il écrivait, tous les concepts dont tu parles n'avaient même pas lieu d'être à l'époque
Je ne crois pas ! Un grand penseur de l’Église, Thomas d'Aquin, disait ainsi que l'homme et la femme sont à l'image de Dieu en tant qu'ils ont une âme ; mais en ce qui concerne les corps - la vie réelle, physique - c'est l'homme est à l'image de Dieu mais pas la femme. Or tout l’idéal du christianisme tourne autour d'un lien particulier entre le Créateur et ses créatures, entre Dieu et les humains. Il y a dans ces cercles-là l'idée très claire que l'homme (masculin) se confond avec l'humain (ne dit-on pas encore : l'Homme ?), et que la femme est son auxiliaire, son exception. Ces concepts existent et ils sont formulés. htt://www.womenpriests.org/fr/theology/aqui_wom.asp
" Thomas d’Aquin suivait Aristote dans l’attribution de la conception de la femme à un défaut d’une semence particulière. Le sperme veut produire un être humain complet, un homme, mais parfois, il n’y réussit pas et produit une femme. Une femme est dès lors un mas occasionatus, un mâle manqué. Thomas insiste sur le fait que cela n’implique pas que les femmes ne font pas partie du grand plan de la création de Dieu. Cependant, une femelle n’est pas parfaite. "
Alors quand on sait que la plupart de nos philosophes étaient théologiens ou du moins croyants, la boucle est vite bouclée.
Pour l'idéal-objet. Mais pour le coup j'ai la flemme de te chercher des références. Celles de mon message précédant peuvent suffire dans une certaine mesure : très peu d'auteurs ont renié la joliesse des femmes, beaucoup même l'ont décrétée supérieure à celle des hommes, relevé sa grâce, écrit des flots de textes amoureux ... Et pourtant beaucoup de ces auteurs étaient profondément sexistes, parce que la société était basée sur ce principe-là que chacun doit rester à sa place. C'étaient souvent les mêmes qui décrivaient pendant deux pages les jolies jambes d'une donzelle, et la renvoyaient ensuite à son fuseau de peur qu'une discussion d'hommes ne gâte son innocence. Kierkegaard dans son
Journal du Séducteur en est un très bon exemple (quelle que soit la profondeur de ce livre par ailleurs, qu'il choisisse cette enveloppe-ci pour sa pensée est révélatrice d'une époque, et d'une conception des rapports de genre). Ou alors Byron qui, tout en écrivant des personnages féminins idéaux, assumait de détester profondément les femmes
réelles.
Ou, pour rester chez Thomas, dans la page que je t'ai linké : "pour que l’homme puisse d’autant plus aimer la femme et tenir encore plus à elle sachant qu’elle a été façonnée à partir de lui…" ("La supériorité de l’homme sur la femme découle du fait qu’il a été créé en premier")
Je ne sais pas ce qu'il en est d'Esmeralda, je ne l'ai pas lu. Mais de toute façon je ne visais pas
ce livre, ni même
un livre. Mais une idée qui court de livres en pièces en films en essais...
Tu fais bien de soulever le problème du changement de paradigme. Bien sûr, le contexte n'est pas le même, il faut replacer les choses dans leur époque, toussa. Mais ça n'empêche pas de faire le bilan. Je ne suis pas en train de dire que ces penseurs et écrivains étaient des
méchants (quoi que l'époque ne soit pas un argument suffisant, car d'autres se sont élevés contre ces valeurs).
Ce n'est pas une déformation anachronique que d'interroger ces textes. Notre conception a changé parce que les concepts de base ont changé : le
sujette à, la femme est devenue
sujet qui. De
seconde de l'équation, elle est devenue
première ex aequo. La contradiction est frontale. Or, c'est à cette contradiction que nous nous heurtons lorsque nous étudions la culture classique (qui continue de nous irriguer, comme tu le fais remarquer). Nos modes de pensée actuels tendent à s'émanciper du mode de pensée ancien. Comment le vivre si l'on ne prend pas de la distance, pour critiquer ? N'y a-t-il pas une certaine dissonance cognitive à vivre dans une société à volonté égalitaire, mais construite sur une culture à
volonté déclarée d'inégalité ? C'est une chose que nous pouvons assumer, mais encore faut-il le comprendre. Et pour le comprendre, l'étudier, en parler.