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LES VOIES D’ACCÈS AU TOUT - L’ACTIVITÉ CRÉATRICE ET LA RECHERCHE DE SES IDÉAUX DANS LA QUÊTE DE SON IDENTITÉ
Nous voici abordant la partie la plus créative du narcissisme, pour essayer de déterminer quelles forces en soi poussent à créer, à unifier des idées et des objets, afin de donner du sens à une vision, et d'ainsi approcher la matrice.
L’ARTISTE ET LA VOLONTÉ D’ABSOLU, UNE PROBLÉMATIQUE D’IDÉAL NARCISSIQUE
Philosophiquement, le narcissisme contribue à revivre au travers d'un art, la beauté et le confort universels du stade originel, précédant la naissance. L’âme devenant la psyché, le symptôme remplaçant le symbole, c'est l’élévation esthétique qui par la sublimation tend à réaliser et retrouver un ordre parfait, un agencement de forme idéal, une dimension sacralisée incarnant l’absolu que l’humain ne peut exprimer et saisir dans sa totalité, tant ce qu’il ressent le dépasse. Ce serait comme vouloir représenter une émotion ou la vie, c'est impossible, mais les meilleurs artistes parviennent à condenser et réunir des fragments de la vie dans une œuvre, et offre leur vision la plus absolue de la vie, en exprimant un panel d'émotions sous différentes formes et au moyen de divers supports.
L’exemple type est l’art gothique, dont l’expression sublime ébahit les visiteurs des cathédrales du Moyen-âge. Les artistes sculpteurs et architectes ayant réussit à représenter et mettre en forme toute la puissance de leur croyance, la dimension spirituelle reliant chaque individu à une entité supérieure incarnant le Tout (ici Dieu, créateur de l’univers), dans un monument majestueux et qui apparait comme immuable, approchant les cieux éternels face au temps s'écoulant immanquablement. Aussi Lou Andreas Salomé rappelle qu’affirmer et conquérir sont une seule et même chose, l’activité évaluatrice par excellence, quand le créateur propose un idéal qui se veut absolu (mais faut-il encore dépasser la croyance que l’humain est la mesure de toute chose).
L’artiste créateur reflète cette même quête de sacralité, de représentation de ce qui nous transcende au plus profond de notre être.
« Être artiste, ce n’est qu’une façon d’être humain » : pareil à la femme, à l’enfant, il est cet être indifférencié qui perçoit la vie dans son immédiateté (complexe mélange de sensations et d’intuitions). Le plaisir de la création est lié à la vie, quand seul le créateur sait que son œuvre est le moyen de restaurer l’unité, ce qui en lui apparait comme brisé/morcelé et qui le sépare du Tout. Ce principe participe de la reconstitution de son moi morcelé, de son âme égarée, d’une volonté d’un esthétisme absolu et exigeant lorsqu'il s’agit de créer et mettre en forme du lien, du sens à partir d’analyses de causes et de faits, de maux et autres symptômes. Il est impératif de comprendre que l'acte créateur est réparateur, qu'il part des tripes, d'une angoisse existentielle, que seul l’œuvre parfaite pourra dépasser afin de s'en sentir rassuré. L'artiste se console alors de sa création, avant que son corps et son esprit ne le pousse à nouveau à s'exprimer pour créer et donner du sens à ce qui l'anime de l’intérieur.
De la même façon, l’être pieux a recours à l’imaginaire afin de retrouver la voie des origines : l’enfant, semblable à l’homme primitif, crée son dieu (qu’il s’agisse de Dieu ou de Superman), instance médiatrice entre l’être humain et son entourage. Le symbolique entretient par la suite le délire se perpétuant de proche en proche, de croyance en croyance, et les créations du beau (la valeur esthétique omniprésente dans notre société) servent aussi à se compléter, entre autre pour atteindre cette totalité narcissique à laquelle chacun de nous aspire depuis toujours.
L'intérêt du dialogue intérêt, renouer avec son enfant intérieur
Mais l’Eros, l’art et la religion comme remèdes à l’identité morcelée de l’homme moderne ne peuvent lutter contre la régression dont il est menacé à chaque instant (cette volonté nihiliste d’annihilation, de tout détruire en y prenant autant de plaisir qu'à construire). Le désir d’union est affirmation en un sens Nietzschéen : pour l’enfant dans ses jeux comme pour l’artiste dans sa création, les forces plastiques du rêve et de l’action se confondent dans une expression sublimée de ses instincts et passions. Il est donc impératif à tout homme de renouer avec son enfant intérieur lorsque son esprit appelle à un repli introspectif lors de période de « crise », afin qu’il puisse retrouver un « Je » lui assurant une subjectivation essentielle à une compréhension de ses affects. Il s’agit d’établir en soi un dialogue intérieur nécessaire pour se réunifier en cas de morcellement virant à la pathologie (angoisse, anxiété, honte, culpabilité, et les multiples symptômes et répétitions en découlant).
L’artiste en puissance cherchera à cumuler plus de sens, en allant au-delà de ses apparences propres (se teindre les cheveux, portés un vêtement design, ou afficher une photo de soi avec un filtre Instagram ne lui suffit pas). Il recherche une esthétique dans sa manière d’être, dans son œuvre qu’il voudrait qu’elle soit sa propre vie, à part entière. Il est question de transcender son ego, son moi, pour ne pas jouer à l’artiste mais être artiste, ne pas se dire artiste en parlant de soi à tout va, mais créer et œuvrer dans le bien et dans le mal, en commençant par briser les valeurs afin d’en inventer et en proposer de nouvelles. Ici réside la dimension anarchique de l'artiste véritable.
Il est question d’un jeu d’esprit permettant de renouer avec le « Je » en soi
Dans une démarche psychonautique et introspective, c’est au travers de désillusion, qu’il s’agit de s’avouer sincèrement en dépassant ses illusions, son ego, en découvrant sa part de déni et de refoulement, ses hontes et ses culpabilités, c'est-à-dire ce qui jusque là bloquait l’individu angoissé, dans des schémas répétitifs et nocifs à son développement, à son épanouissement. L’artiste vrai, dans sa quête de sublimation, cherche à se dépasser lui-même, pour accéder à cet absolu qui le fascine, qui éveille en lui toutes les passions le motivant à passer à l’action plutôt que de rester dans la réaction passive, ses mêmes passions qui lui donnent espoir qu’une fois son œuvre achevée, il ne se subira plus en ayant retrouvé la paix originelle, le calme émotionnel dans une harmonie entre sa raison et ses émotions, maintenant qu’il a pu représenter clairement et avec lucidité, sa vision du Tout.
DES MUSIQUES QUI TRANSCENDENT
La musique semble inévitable dans cette quête du Tout, parce qu’inhérente à l’acte créateur. Elle exalte les sens et sublime l’esprit dans des au-delà, loin dans son propre imaginaire. Et elle favorise l’imagination entre intuition et raison, entre intellect et émotion. Je ne pense pas qu’il y est de musique particulière qui amènerait au Tout coûte que coûte, mais plutôt qu’il y a différentes musiques vibrant à diverses variations, et qui lorsque ces vibrations rentrent en symbiose avec ses propres variations, déclenche dans l’esprit une transe pouvant amener au Tout, par la voie des sens et des intuitions…après libre à chacun d’y voir Dieu, la nature, ou des entités extraterrestres.
Le sentiment de l’infini, avec toutes ses expansions mystiques, cosmiques et spiritualistes (ainsi que le fameux sentiment océanique dont le nom est d’ailleurs directement lié à l’eau amniotique), se ramène à une élaboration de cette donnée biologique fondamentale qu’est la vie fœtale. Vasarely parlant de l’émotion artistique remarque qu’« on interprète ce phénomène comme une élévation, comme la présence d’une émotion d’essence spirituelle ». Les musiques calmes et procurant un sentiment océanique dans une volupté supplémentaire de planer un peu plus haut, sont néanmoins des plus propices à des phases de méditation. Pour ma part j’ai longtemps gravité dans ces sonorités tant chéries :
Avant d'aborder la seconde partie de l'article, il me faut préciser que la pratique sportive, et notamment la marche est aussi un puissant moyen de se connecter à soi. Nietzsche disait que " Seules les pensées qu'on a en marchant valent quelque chose ".
IMPORTANCE DE LA NARRATION IDENTITAIRE DANS LA RECHERCHE D’UNE IDENTITÉ RELATIVE OU ABSOLUE
Rechercher le Tout c’est tendre vers un idéal, dans une recherche de sa personnalité se réactualisant indéfinement au fur et à mesure qu’on se l’imagine, se la représente intérieurement. Dans cette démarche introspective, tout ce qui soutiendra la constitution de cette narration identitaire favorisera le développement d’un narcissisme constructif, et corrélativement le sentiment d’identité personnelle, l’identification du sujet à lui-même. À l’inverse, dans les cas de blessures narcissiques itératives et faisant alterner s’image que l’on a de soi selon des humeurs changeantes, l’individu cherchant à trouver une cohésion en lui, un sens à sa destiné, sera alors à la recherche d’une identité fixe, d’une identité non pas relative mais absolue, qui le mette à l’abri des affres de la dépersonnalisation et des revécus traumatiques (ses angoisses passées). Donc soit l’individu est confiant, et comprend que sa personnalité est multiple et changeante du fait qu’il évolue perpétuellement en s’adaptant plus ou moins facilement à son environnement, soit l’individu est peu assuré, et cherche un cadre fixe pour délimiter sa personnalité qu’il n’arrive pas à cerner. En s’échappant à lui-même, il idéalise une personnalité absolue et immuable, où enfin il saurait qui il est sans plus se poser de question.
L’adolescent en général, et certains adultes préférant la naïveté à la vérité, croient à l’existence d’objet de désir et/ou d’amour, au fait que l’Objet idéal (de leur désir) existe.
De cette croyance en un objet idéal (le plus souvent non identifié, quand seule l’idée qu’un objet parfait puisse exister, fait rêver le rêveur), débute alors une quête de cet objet, parce que l’individu est convaincu qu’il doit exister. Il y a là une quête de soi, pour trouver cette fameuse identité miracle, dont dépend aussi son sentiment d’existence, lorsque l’entreprise d’une quête donne un sens à sa vie. L’individu n’est pas sur à 100% que cet absolu désiré existe, mais pour sa survie, pour entretenir ses illusions d’un monde meilleur, cet objet idéal doit exister (par exemple d’un garçon ou d’une fille parfaite, nous correspondant en tout point et avec qui l’on formerait un couple idéal, symbiotique). Nous sommes croyants quand nous sommes passionnés d’absolu, lorsque nous voulons croire qu’il y a quelque chose au-delà du monde réel, et les idéaux ne sont pas réels.
Les conséquences du manque d’absolu
Quand le fantasme d’un idéal, d’un trip qui ne nous a pas apporté ce qu’on espérait, échoue à prendre la voie d’un processus de sublimation dans une réalisation de soi, l’échec du syndrome paradisiaque conduit immanquablement à la dépressivité, qui revêt la forme banalisée de l’ennui : « Si je n’ai pas Tout, je m’ennuie ». Cela ouvre la voie à des conduites punitives qui sont autant de réparations de l’ennui. Ainsi, lorsque le désir est menacé et que la pulsion est mise en échec, la passion de la relation d’objet s’inverse alors en punition et/ou en autopunition. La logique nihiliste est aussi souvent au rendez-vous, lorsque l’on passe de la simple déception à la déprime, dans un possible basculement vers une dépression essentielle et non de type mélancolique (avec des envies de suicide si affinité). Dont les conséquences prendraient des formes communes comme les consommations abusives et répétées de drogues en tout genre, les syndromes anorexiques, et autres manières sadomasochistes pour se trouver un cadre, en donnant un sens à sa vie.
Dans un contexte politique actuel, se retrouve la poussée destructrice de soi-avec-l’autre dans le syndrome du kamikaze. Qu’il s’agisse d’attentat suicide, où par exemple de ce pilote d’avion qui, en 2015, après s’être enfermé dans la cabine, a crashé l’appareil dans les Alpes et fait 150 victimes…c’était ce qu’on appelle un suicide altruiste, lorsqu’en tuant tous l’équipage et les passagers, le pilote les a libéré de leur condition d’être vivant au nom de son propre idéal de mort…mais sans leur demander leur avis…ici réside toute la problématique de la croyance en un idéal que l’on imposerait aux autres.
L’adolescent, éternel croyant nihiliste
Rappelons que l’adolescence s’est échappée de l’enfance au moment où l’individu s’est persuadé qu’il y a un autre idéal pour lui, dans un désaveu des parents. L’objet idéal est un(e) ami(e), un(e) époux(se), un idéal professionnel-politique-idéologique-religieux, un idéal matériel comme une voiture ou un smartphone. Cette idéalité plus ou moins superficielle s’est déjà installée dans l’inconscient, et l’inconscient adolescent est structuré comme cette idéalité, aussi superficielle qu’intensément passioné, parce que rien ne peut arrêter la croyance d’un adolescent sur de lui. Il ne peut pas ne pas y voir un absolu satisfaisant toutes ses envies et besoins : telle est la foi, la passion de l’inconscient adolescent. Ce fanatisme ne résiste évidemment ni à l’épreuve de réalité (le mur du réel), ni à l’assaut pulsionnel qui fragilisent ladite croyance, quand ils ne l’inversent pas en son contraire en s’en prenant à lui-même faute d’avoir saisi son idéal (auto-destruction).
Puisque Ça existe (Ça étant l’idéal méconnu mais qui existe assurément), c’est parce qu’ « ils » ou « elles » me déçoivent que je ne peux que « leur » en vouloir et me venger – l’agressivité envers autrui s’ensuit.
Ou, puisque Ça existe, c’est parce qu’ « ils » ou « elles » me déçoivent, ou me manquent, que je ne peux que m’en vouloir et me venger sur moi-même contre eux – les mutilations et les attitudes autodestructrices s’ensuivent, toujours en dépendant du regard d’un tiers qui constatera l’effet destructeur de la culpabilité sur l’adolescent.
Cette croyance fanatique en l’existence du partenaire idéal et de la satisfaction absolue est la source d’un grand nombre de nos maux, de nos contradictions, et de nos errances psychiques. Autant dire qu’une croyance est un fantasme de satisfaction maximale et d’une nécessité inexorable, fatale pour le vécu du sujet qui n’y accède pas : autrement dit, il est à mi-chemin entre le délire et le scénario imaginaire qui figure un désir. La croyance n’est pas elle-même délirante, mais elle en porte les potentialités. Or, tandis qu’on peut voir dans la schizophrénie un échec du nouage idéalité/pulsion quand ses instincts ne s’y retrouvent pas, l’adolescent investit d’ordinaire ce nouage et s’en sert nécessairement en se projetant corps et âme dans ce stabilisateur de son excitabilité qu’est la croyance dans l’existence de l’Objet idéal. Il y croit dur comme fer, l’adolescent en proie à ces désirs est un mystique de l’Objet idéal et absolu.
L’INDISPENSABLE IDÉAL POUR DÉPASSER SON NIHILISME – Redonner de la valeur à soi, à son environnement, par la recherche du Tout
Il y a dans cette quête du Tout absolu, une recherche transcendantale. Non pas que le cosmos soit au dessus de nous, et qu’il nous assigne à une transcendance verticale, mais bien qu’en étant tout autour de nous et en nous, il y a là une transcendance horizontale, immanente. La notion de transcendance verticale se retrouverait plutôt à un autre degré, au sein même de l’esprit de l’individu, dans une hiérarchisation des valeurs et du sens qu’il donne aux choses, à soi-même, et à son environnement (la nature). Par exemple, le cosmos et ses lois naturelles auxquelles nous sommes soumis, pourrait être une notion divine ou sacrée à respecter, pour son enseignement et son infinie puissance. Cette foi en l’autorité immuable des lois naturelles, pourrait être mise au premier plan dans l’ordre de priorités de nos idées, bien avant les notions de consommation et de possession, en replaçant l’idéologie capitaliste libérale, par une idéologie portée sur la nature et la connaissance de soi, pour faire une comparaison simpliste.
Il y aurait là une revalorisation du vivant, de l’essence même des choses qui nous entourent et nous constituent, et peut-être l’individu lambda sortirait de son nihilisme, de son je-m’en-foutisme, en retrouvant espoir dans une certaine croyance, en des valeurs fortes et immuables. Et ce même s’il est plus aisé de rester autocentré sur sa petite personne, que chacun aimerait grande au fond de lui (le syndrome d’idéalité). Je ne parle pas d’un retour du religieux comme certains le prônent à coup d’attentat, ni d’imposer la démocratie à grand coup de bombe, mais de sortir de cette vanité scientifique qui enlève leurs valeurs aux choses en les dénaturant, pour les rendre utiles et profitables. Je parle d’accepter l’idée que l’on ne puisse pas tout maitriser, parce qu’il y aura toujours des forces plus grande que soi, ce qui revient à dépasser l’idéologie que la technologie est une fin ultime, sans parler du fait de nier les conséquences de certaines prises de décisions politiques et économiques.
Pour donner un exemple concret, au lieu de consommer les ressources de la planète à perte, de gaspiller en jetant des produits faits pour ne pas durer, pourquoi pas mettre en place des systèmes utilisant des énergies renouvelables (et heureusement la transition énergéticologique a déjà commencé), ou alors empêcher des groupes comme Monsanto de jouer avec le génome des graines afin qu’elles ne se reproduisent pas, et ainsi obliger les agriculteurs à en racheter chaque année, à Monsanto bien sur. Il en va d’une éthique de vie responsable et morale, où il n’est ni question de profit avant tout, ni de figer le monde dans l’éternité. Il s’agit d’une éthique de vie s’adaptant à son environnement (à une échelle plus et moins locale), et qui corrobore avec lui dans des dynamiques respectueuses de l’ordre du vivant, c'est-à-dire des manières d’être ni polluantes, ni destructrices des écosystèmes en place, ni anxyogènes et dépressives pour l’humanité. Resterait à gérer la répartition où chacun aurait son rôle à jouer et sa place attitrée, mais là va falloir encore rêver et continuer d’imaginer le meilleur des mondes possibles…
L'IMPORTANCE DE LA TEMPORALITÉ DANS LES VOIES D’ACCÈS AU TOUT - Le chemin de l’éternité est courbe.
Il faut maintenant prendre conscience que le point de vue occidental définit le temps linéairement, alors qu’il est en fait cyclique. Le temps peut aussi être représenté tel une spirale qui n’en finit jamais de tourner en boucle, différant du temps inscrit dans des coordonnées cartésiennes.
Pénétrer le Tout c’est prendre conscience que tout est répétition, déjà-vu, parce tout se répète, les représentations, les fantasmes, les intuitions, les actes en tout genre, la procréation, le meurtre, la paix, la guerre, les pensées et les idées. Les passions et les émotions, les hontes et les culpabilités, tous les affects se répètent de jour en jour, de proche en proche, au travers de types de personnalité qui eux aussi se répètent dans des attitudes et caractères similaires, et ce depuis des milliers d’années en ce qui concerne l’être humain.
Certains cherchent à retrouver un état d’élation absolu, d’omnipotence où l’on est puissant dans son immobilité (dans un état inorganique, ou quand tout est bien fixé, rangé, bien à sa place lorsque l’autorité absolue de leur réalité idéale est respectée), alors pour se rassurer ils fixent le temps dans un idéal parfait, où plus rien ne serait à changer, parce que tout y serait exactement à sa place et figé pour l’éternité. De cette manière de penser, il se prive partiellement de l’idée que tout est retour sur soi, parce que nous gravitons dans des boucles dont nous sommes plus ou moins conscients, toutes imbriquées les unes dans les autres. Et remonter le fil des causes pour trouver du sens à sa vie, c’est aller de cercle en cercle, c’est boucler en s’en rendant plus ou moins compte, jusqu’à arriver au Tout, à son absolu, mais gare à la désillusion quand l’on se rend compte que son idéal le plus intime n’est qu’une illusion...le défi de se confronter à la vérité, à sa vérité, est de taille, et personne ne sait de quelle force il va falloir être, avant d’être revenu du bon côté du miroir : ainsi libre à chacun de choisir la pilule bleue, ou la pilule rouge...
Prochaine article : Les boucles macroscopiques
Nous voici abordant la partie la plus créative du narcissisme, pour essayer de déterminer quelles forces en soi poussent à créer, à unifier des idées et des objets, afin de donner du sens à une vision, et d'ainsi approcher la matrice.
L’ARTISTE ET LA VOLONTÉ D’ABSOLU, UNE PROBLÉMATIQUE D’IDÉAL NARCISSIQUE
Philosophiquement, le narcissisme contribue à revivre au travers d'un art, la beauté et le confort universels du stade originel, précédant la naissance. L’âme devenant la psyché, le symptôme remplaçant le symbole, c'est l’élévation esthétique qui par la sublimation tend à réaliser et retrouver un ordre parfait, un agencement de forme idéal, une dimension sacralisée incarnant l’absolu que l’humain ne peut exprimer et saisir dans sa totalité, tant ce qu’il ressent le dépasse. Ce serait comme vouloir représenter une émotion ou la vie, c'est impossible, mais les meilleurs artistes parviennent à condenser et réunir des fragments de la vie dans une œuvre, et offre leur vision la plus absolue de la vie, en exprimant un panel d'émotions sous différentes formes et au moyen de divers supports.
L’exemple type est l’art gothique, dont l’expression sublime ébahit les visiteurs des cathédrales du Moyen-âge. Les artistes sculpteurs et architectes ayant réussit à représenter et mettre en forme toute la puissance de leur croyance, la dimension spirituelle reliant chaque individu à une entité supérieure incarnant le Tout (ici Dieu, créateur de l’univers), dans un monument majestueux et qui apparait comme immuable, approchant les cieux éternels face au temps s'écoulant immanquablement. Aussi Lou Andreas Salomé rappelle qu’affirmer et conquérir sont une seule et même chose, l’activité évaluatrice par excellence, quand le créateur propose un idéal qui se veut absolu (mais faut-il encore dépasser la croyance que l’humain est la mesure de toute chose).
L’artiste créateur reflète cette même quête de sacralité, de représentation de ce qui nous transcende au plus profond de notre être.
« Être artiste, ce n’est qu’une façon d’être humain » : pareil à la femme, à l’enfant, il est cet être indifférencié qui perçoit la vie dans son immédiateté (complexe mélange de sensations et d’intuitions). Le plaisir de la création est lié à la vie, quand seul le créateur sait que son œuvre est le moyen de restaurer l’unité, ce qui en lui apparait comme brisé/morcelé et qui le sépare du Tout. Ce principe participe de la reconstitution de son moi morcelé, de son âme égarée, d’une volonté d’un esthétisme absolu et exigeant lorsqu'il s’agit de créer et mettre en forme du lien, du sens à partir d’analyses de causes et de faits, de maux et autres symptômes. Il est impératif de comprendre que l'acte créateur est réparateur, qu'il part des tripes, d'une angoisse existentielle, que seul l’œuvre parfaite pourra dépasser afin de s'en sentir rassuré. L'artiste se console alors de sa création, avant que son corps et son esprit ne le pousse à nouveau à s'exprimer pour créer et donner du sens à ce qui l'anime de l’intérieur.
De la même façon, l’être pieux a recours à l’imaginaire afin de retrouver la voie des origines : l’enfant, semblable à l’homme primitif, crée son dieu (qu’il s’agisse de Dieu ou de Superman), instance médiatrice entre l’être humain et son entourage. Le symbolique entretient par la suite le délire se perpétuant de proche en proche, de croyance en croyance, et les créations du beau (la valeur esthétique omniprésente dans notre société) servent aussi à se compléter, entre autre pour atteindre cette totalité narcissique à laquelle chacun de nous aspire depuis toujours.
L'intérêt du dialogue intérêt, renouer avec son enfant intérieur
Mais l’Eros, l’art et la religion comme remèdes à l’identité morcelée de l’homme moderne ne peuvent lutter contre la régression dont il est menacé à chaque instant (cette volonté nihiliste d’annihilation, de tout détruire en y prenant autant de plaisir qu'à construire). Le désir d’union est affirmation en un sens Nietzschéen : pour l’enfant dans ses jeux comme pour l’artiste dans sa création, les forces plastiques du rêve et de l’action se confondent dans une expression sublimée de ses instincts et passions. Il est donc impératif à tout homme de renouer avec son enfant intérieur lorsque son esprit appelle à un repli introspectif lors de période de « crise », afin qu’il puisse retrouver un « Je » lui assurant une subjectivation essentielle à une compréhension de ses affects. Il s’agit d’établir en soi un dialogue intérieur nécessaire pour se réunifier en cas de morcellement virant à la pathologie (angoisse, anxiété, honte, culpabilité, et les multiples symptômes et répétitions en découlant).
L’artiste en puissance cherchera à cumuler plus de sens, en allant au-delà de ses apparences propres (se teindre les cheveux, portés un vêtement design, ou afficher une photo de soi avec un filtre Instagram ne lui suffit pas). Il recherche une esthétique dans sa manière d’être, dans son œuvre qu’il voudrait qu’elle soit sa propre vie, à part entière. Il est question de transcender son ego, son moi, pour ne pas jouer à l’artiste mais être artiste, ne pas se dire artiste en parlant de soi à tout va, mais créer et œuvrer dans le bien et dans le mal, en commençant par briser les valeurs afin d’en inventer et en proposer de nouvelles. Ici réside la dimension anarchique de l'artiste véritable.
Il est question d’un jeu d’esprit permettant de renouer avec le « Je » en soi
Dans une démarche psychonautique et introspective, c’est au travers de désillusion, qu’il s’agit de s’avouer sincèrement en dépassant ses illusions, son ego, en découvrant sa part de déni et de refoulement, ses hontes et ses culpabilités, c'est-à-dire ce qui jusque là bloquait l’individu angoissé, dans des schémas répétitifs et nocifs à son développement, à son épanouissement. L’artiste vrai, dans sa quête de sublimation, cherche à se dépasser lui-même, pour accéder à cet absolu qui le fascine, qui éveille en lui toutes les passions le motivant à passer à l’action plutôt que de rester dans la réaction passive, ses mêmes passions qui lui donnent espoir qu’une fois son œuvre achevée, il ne se subira plus en ayant retrouvé la paix originelle, le calme émotionnel dans une harmonie entre sa raison et ses émotions, maintenant qu’il a pu représenter clairement et avec lucidité, sa vision du Tout.
DES MUSIQUES QUI TRANSCENDENT
La musique semble inévitable dans cette quête du Tout, parce qu’inhérente à l’acte créateur. Elle exalte les sens et sublime l’esprit dans des au-delà, loin dans son propre imaginaire. Et elle favorise l’imagination entre intuition et raison, entre intellect et émotion. Je ne pense pas qu’il y est de musique particulière qui amènerait au Tout coûte que coûte, mais plutôt qu’il y a différentes musiques vibrant à diverses variations, et qui lorsque ces vibrations rentrent en symbiose avec ses propres variations, déclenche dans l’esprit une transe pouvant amener au Tout, par la voie des sens et des intuitions…après libre à chacun d’y voir Dieu, la nature, ou des entités extraterrestres.
Le sentiment de l’infini, avec toutes ses expansions mystiques, cosmiques et spiritualistes (ainsi que le fameux sentiment océanique dont le nom est d’ailleurs directement lié à l’eau amniotique), se ramène à une élaboration de cette donnée biologique fondamentale qu’est la vie fœtale. Vasarely parlant de l’émotion artistique remarque qu’« on interprète ce phénomène comme une élévation, comme la présence d’une émotion d’essence spirituelle ». Les musiques calmes et procurant un sentiment océanique dans une volupté supplémentaire de planer un peu plus haut, sont néanmoins des plus propices à des phases de méditation. Pour ma part j’ai longtemps gravité dans ces sonorités tant chéries :
Avant d'aborder la seconde partie de l'article, il me faut préciser que la pratique sportive, et notamment la marche est aussi un puissant moyen de se connecter à soi. Nietzsche disait que " Seules les pensées qu'on a en marchant valent quelque chose ".
IMPORTANCE DE LA NARRATION IDENTITAIRE DANS LA RECHERCHE D’UNE IDENTITÉ RELATIVE OU ABSOLUE
Rechercher le Tout c’est tendre vers un idéal, dans une recherche de sa personnalité se réactualisant indéfinement au fur et à mesure qu’on se l’imagine, se la représente intérieurement. Dans cette démarche introspective, tout ce qui soutiendra la constitution de cette narration identitaire favorisera le développement d’un narcissisme constructif, et corrélativement le sentiment d’identité personnelle, l’identification du sujet à lui-même. À l’inverse, dans les cas de blessures narcissiques itératives et faisant alterner s’image que l’on a de soi selon des humeurs changeantes, l’individu cherchant à trouver une cohésion en lui, un sens à sa destiné, sera alors à la recherche d’une identité fixe, d’une identité non pas relative mais absolue, qui le mette à l’abri des affres de la dépersonnalisation et des revécus traumatiques (ses angoisses passées). Donc soit l’individu est confiant, et comprend que sa personnalité est multiple et changeante du fait qu’il évolue perpétuellement en s’adaptant plus ou moins facilement à son environnement, soit l’individu est peu assuré, et cherche un cadre fixe pour délimiter sa personnalité qu’il n’arrive pas à cerner. En s’échappant à lui-même, il idéalise une personnalité absolue et immuable, où enfin il saurait qui il est sans plus se poser de question.
L’adolescent en général, et certains adultes préférant la naïveté à la vérité, croient à l’existence d’objet de désir et/ou d’amour, au fait que l’Objet idéal (de leur désir) existe.
De cette croyance en un objet idéal (le plus souvent non identifié, quand seule l’idée qu’un objet parfait puisse exister, fait rêver le rêveur), débute alors une quête de cet objet, parce que l’individu est convaincu qu’il doit exister. Il y a là une quête de soi, pour trouver cette fameuse identité miracle, dont dépend aussi son sentiment d’existence, lorsque l’entreprise d’une quête donne un sens à sa vie. L’individu n’est pas sur à 100% que cet absolu désiré existe, mais pour sa survie, pour entretenir ses illusions d’un monde meilleur, cet objet idéal doit exister (par exemple d’un garçon ou d’une fille parfaite, nous correspondant en tout point et avec qui l’on formerait un couple idéal, symbiotique). Nous sommes croyants quand nous sommes passionnés d’absolu, lorsque nous voulons croire qu’il y a quelque chose au-delà du monde réel, et les idéaux ne sont pas réels.
Les conséquences du manque d’absolu
Quand le fantasme d’un idéal, d’un trip qui ne nous a pas apporté ce qu’on espérait, échoue à prendre la voie d’un processus de sublimation dans une réalisation de soi, l’échec du syndrome paradisiaque conduit immanquablement à la dépressivité, qui revêt la forme banalisée de l’ennui : « Si je n’ai pas Tout, je m’ennuie ». Cela ouvre la voie à des conduites punitives qui sont autant de réparations de l’ennui. Ainsi, lorsque le désir est menacé et que la pulsion est mise en échec, la passion de la relation d’objet s’inverse alors en punition et/ou en autopunition. La logique nihiliste est aussi souvent au rendez-vous, lorsque l’on passe de la simple déception à la déprime, dans un possible basculement vers une dépression essentielle et non de type mélancolique (avec des envies de suicide si affinité). Dont les conséquences prendraient des formes communes comme les consommations abusives et répétées de drogues en tout genre, les syndromes anorexiques, et autres manières sadomasochistes pour se trouver un cadre, en donnant un sens à sa vie.
Dans un contexte politique actuel, se retrouve la poussée destructrice de soi-avec-l’autre dans le syndrome du kamikaze. Qu’il s’agisse d’attentat suicide, où par exemple de ce pilote d’avion qui, en 2015, après s’être enfermé dans la cabine, a crashé l’appareil dans les Alpes et fait 150 victimes…c’était ce qu’on appelle un suicide altruiste, lorsqu’en tuant tous l’équipage et les passagers, le pilote les a libéré de leur condition d’être vivant au nom de son propre idéal de mort…mais sans leur demander leur avis…ici réside toute la problématique de la croyance en un idéal que l’on imposerait aux autres.
L’adolescent, éternel croyant nihiliste
Rappelons que l’adolescence s’est échappée de l’enfance au moment où l’individu s’est persuadé qu’il y a un autre idéal pour lui, dans un désaveu des parents. L’objet idéal est un(e) ami(e), un(e) époux(se), un idéal professionnel-politique-idéologique-religieux, un idéal matériel comme une voiture ou un smartphone. Cette idéalité plus ou moins superficielle s’est déjà installée dans l’inconscient, et l’inconscient adolescent est structuré comme cette idéalité, aussi superficielle qu’intensément passioné, parce que rien ne peut arrêter la croyance d’un adolescent sur de lui. Il ne peut pas ne pas y voir un absolu satisfaisant toutes ses envies et besoins : telle est la foi, la passion de l’inconscient adolescent. Ce fanatisme ne résiste évidemment ni à l’épreuve de réalité (le mur du réel), ni à l’assaut pulsionnel qui fragilisent ladite croyance, quand ils ne l’inversent pas en son contraire en s’en prenant à lui-même faute d’avoir saisi son idéal (auto-destruction).
Puisque Ça existe (Ça étant l’idéal méconnu mais qui existe assurément), c’est parce qu’ « ils » ou « elles » me déçoivent que je ne peux que « leur » en vouloir et me venger – l’agressivité envers autrui s’ensuit.
Ou, puisque Ça existe, c’est parce qu’ « ils » ou « elles » me déçoivent, ou me manquent, que je ne peux que m’en vouloir et me venger sur moi-même contre eux – les mutilations et les attitudes autodestructrices s’ensuivent, toujours en dépendant du regard d’un tiers qui constatera l’effet destructeur de la culpabilité sur l’adolescent.
Cette croyance fanatique en l’existence du partenaire idéal et de la satisfaction absolue est la source d’un grand nombre de nos maux, de nos contradictions, et de nos errances psychiques. Autant dire qu’une croyance est un fantasme de satisfaction maximale et d’une nécessité inexorable, fatale pour le vécu du sujet qui n’y accède pas : autrement dit, il est à mi-chemin entre le délire et le scénario imaginaire qui figure un désir. La croyance n’est pas elle-même délirante, mais elle en porte les potentialités. Or, tandis qu’on peut voir dans la schizophrénie un échec du nouage idéalité/pulsion quand ses instincts ne s’y retrouvent pas, l’adolescent investit d’ordinaire ce nouage et s’en sert nécessairement en se projetant corps et âme dans ce stabilisateur de son excitabilité qu’est la croyance dans l’existence de l’Objet idéal. Il y croit dur comme fer, l’adolescent en proie à ces désirs est un mystique de l’Objet idéal et absolu.
L’INDISPENSABLE IDÉAL POUR DÉPASSER SON NIHILISME – Redonner de la valeur à soi, à son environnement, par la recherche du Tout
Il y a dans cette quête du Tout absolu, une recherche transcendantale. Non pas que le cosmos soit au dessus de nous, et qu’il nous assigne à une transcendance verticale, mais bien qu’en étant tout autour de nous et en nous, il y a là une transcendance horizontale, immanente. La notion de transcendance verticale se retrouverait plutôt à un autre degré, au sein même de l’esprit de l’individu, dans une hiérarchisation des valeurs et du sens qu’il donne aux choses, à soi-même, et à son environnement (la nature). Par exemple, le cosmos et ses lois naturelles auxquelles nous sommes soumis, pourrait être une notion divine ou sacrée à respecter, pour son enseignement et son infinie puissance. Cette foi en l’autorité immuable des lois naturelles, pourrait être mise au premier plan dans l’ordre de priorités de nos idées, bien avant les notions de consommation et de possession, en replaçant l’idéologie capitaliste libérale, par une idéologie portée sur la nature et la connaissance de soi, pour faire une comparaison simpliste.
Il y aurait là une revalorisation du vivant, de l’essence même des choses qui nous entourent et nous constituent, et peut-être l’individu lambda sortirait de son nihilisme, de son je-m’en-foutisme, en retrouvant espoir dans une certaine croyance, en des valeurs fortes et immuables. Et ce même s’il est plus aisé de rester autocentré sur sa petite personne, que chacun aimerait grande au fond de lui (le syndrome d’idéalité). Je ne parle pas d’un retour du religieux comme certains le prônent à coup d’attentat, ni d’imposer la démocratie à grand coup de bombe, mais de sortir de cette vanité scientifique qui enlève leurs valeurs aux choses en les dénaturant, pour les rendre utiles et profitables. Je parle d’accepter l’idée que l’on ne puisse pas tout maitriser, parce qu’il y aura toujours des forces plus grande que soi, ce qui revient à dépasser l’idéologie que la technologie est une fin ultime, sans parler du fait de nier les conséquences de certaines prises de décisions politiques et économiques.
Pour donner un exemple concret, au lieu de consommer les ressources de la planète à perte, de gaspiller en jetant des produits faits pour ne pas durer, pourquoi pas mettre en place des systèmes utilisant des énergies renouvelables (et heureusement la transition énergéticologique a déjà commencé), ou alors empêcher des groupes comme Monsanto de jouer avec le génome des graines afin qu’elles ne se reproduisent pas, et ainsi obliger les agriculteurs à en racheter chaque année, à Monsanto bien sur. Il en va d’une éthique de vie responsable et morale, où il n’est ni question de profit avant tout, ni de figer le monde dans l’éternité. Il s’agit d’une éthique de vie s’adaptant à son environnement (à une échelle plus et moins locale), et qui corrobore avec lui dans des dynamiques respectueuses de l’ordre du vivant, c'est-à-dire des manières d’être ni polluantes, ni destructrices des écosystèmes en place, ni anxyogènes et dépressives pour l’humanité. Resterait à gérer la répartition où chacun aurait son rôle à jouer et sa place attitrée, mais là va falloir encore rêver et continuer d’imaginer le meilleur des mondes possibles…
L'IMPORTANCE DE LA TEMPORALITÉ DANS LES VOIES D’ACCÈS AU TOUT - Le chemin de l’éternité est courbe.
Il faut maintenant prendre conscience que le point de vue occidental définit le temps linéairement, alors qu’il est en fait cyclique. Le temps peut aussi être représenté tel une spirale qui n’en finit jamais de tourner en boucle, différant du temps inscrit dans des coordonnées cartésiennes.
Pénétrer le Tout c’est prendre conscience que tout est répétition, déjà-vu, parce tout se répète, les représentations, les fantasmes, les intuitions, les actes en tout genre, la procréation, le meurtre, la paix, la guerre, les pensées et les idées. Les passions et les émotions, les hontes et les culpabilités, tous les affects se répètent de jour en jour, de proche en proche, au travers de types de personnalité qui eux aussi se répètent dans des attitudes et caractères similaires, et ce depuis des milliers d’années en ce qui concerne l’être humain.
Certains cherchent à retrouver un état d’élation absolu, d’omnipotence où l’on est puissant dans son immobilité (dans un état inorganique, ou quand tout est bien fixé, rangé, bien à sa place lorsque l’autorité absolue de leur réalité idéale est respectée), alors pour se rassurer ils fixent le temps dans un idéal parfait, où plus rien ne serait à changer, parce que tout y serait exactement à sa place et figé pour l’éternité. De cette manière de penser, il se prive partiellement de l’idée que tout est retour sur soi, parce que nous gravitons dans des boucles dont nous sommes plus ou moins conscients, toutes imbriquées les unes dans les autres. Et remonter le fil des causes pour trouver du sens à sa vie, c’est aller de cercle en cercle, c’est boucler en s’en rendant plus ou moins compte, jusqu’à arriver au Tout, à son absolu, mais gare à la désillusion quand l’on se rend compte que son idéal le plus intime n’est qu’une illusion...le défi de se confronter à la vérité, à sa vérité, est de taille, et personne ne sait de quelle force il va falloir être, avant d’être revenu du bon côté du miroir : ainsi libre à chacun de choisir la pilule bleue, ou la pilule rouge...
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