J
Ji-doo
Guest
(Chapitre faisant partie du livre: "Périls et promesses de la vie spirituelle / de Jack Kornfield
Célèbre aux Etats-Unis dans les milieux de la psychologie et de la spiritualité en général et dans ceux du bouddhisme en particulier, Jack Kornfield partage dans cet ouvrage les fruits de son parcours. Après avoir été formé pendant cinq ans aux pratiques de méditation intensive dans un monastère bouddhiste de Thaïlande, il rentre aux Etats-Unis, persuadé d'avoir suivi une ascèse particulièrement efficace. Mais les états de conscience exceptionnels qu'il a connus ne l'ont en rien préparé à affronter ses propres problèmes existentiels. Ce constat douloureux l'amène à une profonde remise en cause de lui-même. Réalisant qu'un complément de formation lui est nécessaire pour se sentir aussi à l'aise dans l'effervescence de la vie contemporaine que dans les monastères d'Extrême-Orient, il explore en profondeur les approches psychologiques modernes.)
KUNDALINI ET AUTRES EFFETS SECONDAIRES
"L'éblouissement que nous causent lumières et visions, la libération intense d'extase et d'énergie nous annoncent une heureuse nouvelle: les vieilles structures de notre être, de notre corps et de notre mental ont étés démantelées.
Toutefois, en tant que tels, ils n'engendrent pas la sagesse."
Comment faut-il comprendre les récits d'expériences spirituelles spectaculaires et singulières qui abondent dans les écrits de grande tradition mystiques ?Connaît-on encore ce genre d'expériences à notre époque ? Quelle valeur faut-il leur accorder ? Dans les chapitres précédents, nous avons considéré les énergies physiques, les émotions et les schémas mentaux qui apparaissent dans un état de conscience relativement ordinaire. Lorsqu'on s'en affranchit, on atteint des niveaux de calme et de clarté jusqu'alors inconnus et, grâce à une pratique régulière, c'est parfois notre état de conscience tout entier qui change. En persévérant dans une pratique spirituelle systématique, on fait parfois de puissantes expériences d'états modifiés du corps, du coeur et de l'esprit.
De nouveaux domaines de la conscience peuvent s'ouvrir spontanément par l'intermédiaire de ce que l'on appelle la grâce ou sous la pression de circonstances particulières telles que l'expérience de mort imminente (N.D.E.).Cette ouverture peut-être stimulée par l'atmosphère intense de sites sacrés, par la présence de maîtres spirituels charismatiques ou par l'usage de substances psychédéliques, mais la pratique spirituelle constitue un autre moyen, direct et systématique, de la produire - en respectant une discipline spirituelle stricte, en étant assidu dans la méditation ou la prière, ou en recherchant des circonstances de profond silence.Lorsque que notre engagement dans de telles formes de pratique devient si profond que tout notre être se consume dans la pratique même, le corps et l'esprit peuvent s'ouvrir à des dimensions de la vie jusqu'alors inconnues.
Le présent chapitre essaye de décrire ces expériences essentiellement indescriptibles et de les placer en perspective dans notre démarche spirituelle.
Attitudes envers les états de conscience modifiée
Avant de pouvoir comprendre des états inhabituels, nous devons nous rendre compte que les traditions spirituelles adoptent deux perspectives largement divergentes quant à la valeur de ces états pour la transformation et la libération de notre conscience.
Certaines voies spirituelles maintiennent que si nous voulons découvrir une vision "transcendante" de a vie, nous ouvrir au-delà de notre corps et de notre mental et connaître la saveur sublime de la libération, nous devons passer par de profonds états de conscience modifiée.Ces écoles parlent de la nécessité de gravir la montagne, de parvenir à une vision cosmique, de transcender le petit moi, de faire l'expérience d'un éveil.
De nombreuses traditions considèrent de telles expériences visionnaires et transcendantes comme le but de leur pratique.Dans le zen, l'école Rinzaï met l'accent sur de puissantes pratiques de koans et des retraites rigoureuses qui conduisent, au-delà de la conscience ordinnaire,à des expériences appelées satori et kensho, des moments de profond éveil.
Dans la traditon de la méditation Vipassanâ, certaines écoles ont recours à de puissantes techniques de concentration et à de longues retraites intensives pour conduire les participants à un éveil qui est au-delà de leur conscience quotidienne.Le râja yoga et le kundalini yoga, certaines pratiques chamaniques, la "nuit obscure" de la prière chrétienne intensive adoptent également cette approche de la pratique.Les techniques utilisées incluent la répétition, l'intensité, la douleur physique, de puissants exercices de respiration, la concentration sur un seul point, les koans, la privation de sommeil et les visions pour aider les participants à transcender la conscience ordinaire.
Cepandant, de nombreuses écoles, loin de chercher à gravir la montagne de la transcendance, s'efforcent au contraire d'amener l'esprit qui préside au sommet ici et maintenant, dans chaque instant de la vie.Leurs enseignements affirment qu'il faut découvrir la libération et la transcendance ici et maintenant car, si elles n'étaient pas ici dans l'instant, où pourrait-on les trouver ?Plutôt que de chercher à transcender, la perspective de "l'école de l'immancence" enseigne que l'expérience de la réalité, de l'éveil ou du divin n'est authentique que dans la mesure où elle illumine chaque instant.
Les écoles qui mettent l'accent sur la necessité de s'éveiller "ici et maintenant" enseignent que le divin et l'éveil sont toujours présents.
Seul le désir -y compris celui de la transcendance- et l'avidité de notre mental nous empêchent de faire l'expérience de cette réalité.L'école Soto du zen enseigne ceci parle biais d'une méditation appelée "simplement s'assoir", qui est une ouverture profonde à ce qui est vrai dans l'instant.
Dans cette pratique, on abandonne l'idée même d'obtenir l'éveil, le satori, ou de se retrouver dans un ailleurs quelquonque.Quand il enseignait, Suzuki Roshi, un des plus grands maîtres américains du Soto zen, ne parlait pas de satori.Dans sa tradition, toutes les perceptions modifiées ou visions sont appelées "makyo", illusion; elles ne sont pas prises en compte.Dans la tradion Vipassana, de nombreux maitres partage ce point de vue.A leurs yeux, des états de conscience modifiée ne sont qu'une expérience parmis tant d'autres, un phénomène impermanent ou, commele disait Achaan Chah, "encore une chose à laquelle il faut renoncer".
Faire l'expérience de ces états peut nous apporter un guérison et une transformation profondes, mais leurs dangers et le risque d'en faire mauvais usage sont tout aussi grands.
Nous pouvons nous sentir exeptionnels parce que nous avons connu ce genre d'expérience; parfois nous nous y attacherons et nous ne pourrons plus nous en passer; enfin, le côté spectaculaire, les sensations phyiques, l'exaltation et les visions peuvent créer une dépendance et ,en fin de compte, accentuer le sentiment de manque et la souffrance qui colore notre vécu.
Le risque le plus répandu est du au mythe selon lequel ces expériences vont nous transformer totalement, qu'à partir d'un moment "d'éveil" ou de transcendance, notre vie va changer du tout au tout, et pour le mieux.C'est rarement le cas, et l'attachement à ses expériences peut aisement engendrer la suffisance, l'orgeuil et l'aveuglement.
Grâce à la méditation ou à la prière régulière, à la pratique approfondie et assidus du yoga et de la concentration, à des exercices spéciaux de respiration- ou parfois à d'autres circonstances extrêmes telles qu'un accident corporel ou l'utilisation de drogues psychédéliques- nous nous sentirons intensément présents, sans être gêné par une quelquonque distraction intérieure.Avec la découverte de cette attention intégrale, notre conscience passera réellement à un niveau de perceptions différentes et radicalement nouvelles.
Célèbre aux Etats-Unis dans les milieux de la psychologie et de la spiritualité en général et dans ceux du bouddhisme en particulier, Jack Kornfield partage dans cet ouvrage les fruits de son parcours. Après avoir été formé pendant cinq ans aux pratiques de méditation intensive dans un monastère bouddhiste de Thaïlande, il rentre aux Etats-Unis, persuadé d'avoir suivi une ascèse particulièrement efficace. Mais les états de conscience exceptionnels qu'il a connus ne l'ont en rien préparé à affronter ses propres problèmes existentiels. Ce constat douloureux l'amène à une profonde remise en cause de lui-même. Réalisant qu'un complément de formation lui est nécessaire pour se sentir aussi à l'aise dans l'effervescence de la vie contemporaine que dans les monastères d'Extrême-Orient, il explore en profondeur les approches psychologiques modernes.)
KUNDALINI ET AUTRES EFFETS SECONDAIRES
"L'éblouissement que nous causent lumières et visions, la libération intense d'extase et d'énergie nous annoncent une heureuse nouvelle: les vieilles structures de notre être, de notre corps et de notre mental ont étés démantelées.
Toutefois, en tant que tels, ils n'engendrent pas la sagesse."
Comment faut-il comprendre les récits d'expériences spirituelles spectaculaires et singulières qui abondent dans les écrits de grande tradition mystiques ?Connaît-on encore ce genre d'expériences à notre époque ? Quelle valeur faut-il leur accorder ? Dans les chapitres précédents, nous avons considéré les énergies physiques, les émotions et les schémas mentaux qui apparaissent dans un état de conscience relativement ordinaire. Lorsqu'on s'en affranchit, on atteint des niveaux de calme et de clarté jusqu'alors inconnus et, grâce à une pratique régulière, c'est parfois notre état de conscience tout entier qui change. En persévérant dans une pratique spirituelle systématique, on fait parfois de puissantes expériences d'états modifiés du corps, du coeur et de l'esprit.
De nouveaux domaines de la conscience peuvent s'ouvrir spontanément par l'intermédiaire de ce que l'on appelle la grâce ou sous la pression de circonstances particulières telles que l'expérience de mort imminente (N.D.E.).Cette ouverture peut-être stimulée par l'atmosphère intense de sites sacrés, par la présence de maîtres spirituels charismatiques ou par l'usage de substances psychédéliques, mais la pratique spirituelle constitue un autre moyen, direct et systématique, de la produire - en respectant une discipline spirituelle stricte, en étant assidu dans la méditation ou la prière, ou en recherchant des circonstances de profond silence.Lorsque que notre engagement dans de telles formes de pratique devient si profond que tout notre être se consume dans la pratique même, le corps et l'esprit peuvent s'ouvrir à des dimensions de la vie jusqu'alors inconnues.
Le présent chapitre essaye de décrire ces expériences essentiellement indescriptibles et de les placer en perspective dans notre démarche spirituelle.
Attitudes envers les états de conscience modifiée
Avant de pouvoir comprendre des états inhabituels, nous devons nous rendre compte que les traditions spirituelles adoptent deux perspectives largement divergentes quant à la valeur de ces états pour la transformation et la libération de notre conscience.
Certaines voies spirituelles maintiennent que si nous voulons découvrir une vision "transcendante" de a vie, nous ouvrir au-delà de notre corps et de notre mental et connaître la saveur sublime de la libération, nous devons passer par de profonds états de conscience modifiée.Ces écoles parlent de la nécessité de gravir la montagne, de parvenir à une vision cosmique, de transcender le petit moi, de faire l'expérience d'un éveil.
De nombreuses traditions considèrent de telles expériences visionnaires et transcendantes comme le but de leur pratique.Dans le zen, l'école Rinzaï met l'accent sur de puissantes pratiques de koans et des retraites rigoureuses qui conduisent, au-delà de la conscience ordinnaire,à des expériences appelées satori et kensho, des moments de profond éveil.
Dans la traditon de la méditation Vipassanâ, certaines écoles ont recours à de puissantes techniques de concentration et à de longues retraites intensives pour conduire les participants à un éveil qui est au-delà de leur conscience quotidienne.Le râja yoga et le kundalini yoga, certaines pratiques chamaniques, la "nuit obscure" de la prière chrétienne intensive adoptent également cette approche de la pratique.Les techniques utilisées incluent la répétition, l'intensité, la douleur physique, de puissants exercices de respiration, la concentration sur un seul point, les koans, la privation de sommeil et les visions pour aider les participants à transcender la conscience ordinaire.
Cepandant, de nombreuses écoles, loin de chercher à gravir la montagne de la transcendance, s'efforcent au contraire d'amener l'esprit qui préside au sommet ici et maintenant, dans chaque instant de la vie.Leurs enseignements affirment qu'il faut découvrir la libération et la transcendance ici et maintenant car, si elles n'étaient pas ici dans l'instant, où pourrait-on les trouver ?Plutôt que de chercher à transcender, la perspective de "l'école de l'immancence" enseigne que l'expérience de la réalité, de l'éveil ou du divin n'est authentique que dans la mesure où elle illumine chaque instant.
Les écoles qui mettent l'accent sur la necessité de s'éveiller "ici et maintenant" enseignent que le divin et l'éveil sont toujours présents.
Seul le désir -y compris celui de la transcendance- et l'avidité de notre mental nous empêchent de faire l'expérience de cette réalité.L'école Soto du zen enseigne ceci parle biais d'une méditation appelée "simplement s'assoir", qui est une ouverture profonde à ce qui est vrai dans l'instant.
Dans cette pratique, on abandonne l'idée même d'obtenir l'éveil, le satori, ou de se retrouver dans un ailleurs quelquonque.Quand il enseignait, Suzuki Roshi, un des plus grands maîtres américains du Soto zen, ne parlait pas de satori.Dans sa tradition, toutes les perceptions modifiées ou visions sont appelées "makyo", illusion; elles ne sont pas prises en compte.Dans la tradion Vipassana, de nombreux maitres partage ce point de vue.A leurs yeux, des états de conscience modifiée ne sont qu'une expérience parmis tant d'autres, un phénomène impermanent ou, commele disait Achaan Chah, "encore une chose à laquelle il faut renoncer".
Faire l'expérience de ces états peut nous apporter un guérison et une transformation profondes, mais leurs dangers et le risque d'en faire mauvais usage sont tout aussi grands.
Nous pouvons nous sentir exeptionnels parce que nous avons connu ce genre d'expérience; parfois nous nous y attacherons et nous ne pourrons plus nous en passer; enfin, le côté spectaculaire, les sensations phyiques, l'exaltation et les visions peuvent créer une dépendance et ,en fin de compte, accentuer le sentiment de manque et la souffrance qui colore notre vécu.
Le risque le plus répandu est du au mythe selon lequel ces expériences vont nous transformer totalement, qu'à partir d'un moment "d'éveil" ou de transcendance, notre vie va changer du tout au tout, et pour le mieux.C'est rarement le cas, et l'attachement à ses expériences peut aisement engendrer la suffisance, l'orgeuil et l'aveuglement.
Grâce à la méditation ou à la prière régulière, à la pratique approfondie et assidus du yoga et de la concentration, à des exercices spéciaux de respiration- ou parfois à d'autres circonstances extrêmes telles qu'un accident corporel ou l'utilisation de drogues psychédéliques- nous nous sentirons intensément présents, sans être gêné par une quelquonque distraction intérieure.Avec la découverte de cette attention intégrale, notre conscience passera réellement à un niveau de perceptions différentes et radicalement nouvelles.