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Guest
Cet article est une composition de copier/coller et réécriture de différents paragraphes issus de différents articles. Je l'ai constitué pour proposer une approche simpliste mais se voulant la plus complète des instances freudiennes, revues par plusieurs générations de psychanalystes jusqu'à aujourd'hui. Les instances psychiques sont des élaborations métaphysiques faisant parties de l'appareil psychique, et offrant un système d'interprétation des mécanismes de l'esprit.
Article introducteur
ORIGINES
Freud pense la formation du Moi comme s'étalant en plusieurs phases.
Si le Moi institue la conscience et le principe de réalité, lequel rendra possible la capacité d'admettre des défauts fondant le Moi, il y a dans un premier temps un Moi bien plus archaïque qu'il nomme Moi Plaisir. Le Moi Plaisir, s'il dénote un premier travail de différenciation entre le dedans et le dehors, s'accorde en effet certains avantages quand il rejette à l'extérieur toute faute – ou plutôt tout déplaisir, toute imperfection – et se pense comme la somme de tout bien. Le Moi Plaisir décrit donc la tendance infantile à se reconnaitre comme le bien, à se prendre pour un idéal, et à désigner l'extérieur comme le mal. Il y a introjection du bon et projection du mauvais, lorsque l'enfant s'approprie ce qu'il juge de bon, et projette ou garde à l'extérieur de sa personne ce qu'il juge comme mauvais, autrement dit ce n'est jamais de sa faute, mais celle des autres ou des choses et objets autour de lui.
Nécessité de clarifier ce Moi Plaisir.
Au départ on pouvait penser que le Moi Plaisir émergeait dans l'union du Moi et du Ça, au moment où l'enfant prenait conscience de soi au travers de son image dans le miroir et d'une illusion de toute-puissance, mais la complexité de la psyché humaine fit comprendre au psychanalyste que le Moi Idéal s'articulait d'une autre manière. Ce qui est sur, c'est que d'après Nunberg, le Moi Idéal est une formation génétiquement antérieure au Surmoi : « Le moi encore inorganisé, qui se sent uni au Ça, correspond à une condition idéale… ». Au cours de son développement, le sujet laisserait derrière lui cet idéal narcissique tout en aspirerant à y retourner, ce qui se produit surtout, mais pas exclusivement, dans les psychoses.
Mais Lagache a souligné l’intérêt qu’il y avait à distinguer le pôle d’identifications représenté par le Moi Idéal de celui qui est constitué par le couple Surmoi-Idéal du Moi. Il s’agit aussi pour lui d’une formation narcissique inconsciente, sauf que la conception de Lagache ne coïncide pas avec celle de Nunberg : « Le Moi Idéal conçu comme un idéal narcissique de toute-puissance ne se réduit pas à l’union du Moi avec le Ça, mais comporte une identification primaire à un autre être, investi de la toute-puissance, c’est-à-dire à la mère ». Le Moi Idéal n'émerge donc pas de part lui-même dans la psyché, mais par l'identification à un pair extérieur, autre que soi (souvent il s'agit de la mère).
De cette identification à un autre, le Moi Idéal sert ensuite de support à ce que Lagache a décrit sous le nom d’identification héroïque (identification à des personnages exceptionnels et prestigieux), et qui fera fantasmée l'individu s'identifiant à des personnages aux pouvoirs extraordinaires : « Le Moi Idéal est encore révélé par des admirations passionnées pour de grands personnages de l’histoire ou de la vie contemporaine, que caractérisent leur indépendance, leur orgueil, leur ascendant. La cure progressant, on voit le Moi Idéal s’esquisser, émerger, comme une formation irréductible à l’Idéal du Moi ». Mais toujours selon Lagache, la formation du Moi Idéal a des implications sado-masochistes, notamment la négation de l’autre, corrélative à l’affirmation de soi quand l'individu se perd dans l'illusion de son fantasme de toute puissance, et qu'il n'arrive pas à se sortir de cette omnipotence en se croyant plus fort qu'autrui, alors que ça n'est pas le cas. Il en vient alors à ne plus reconnaitre autrui, en s'attribuant des mérites et autres forces n'existant que dans son délire de grandeur à tendance mégalomaniaque.
Le moi héroïque, reflet d'apparences idéalisées.
Le Moi Idéal est donc l'instance des identifications héroïques. Si le Moi se définit déjà comme une instance imaginaire, le Moi Idéal est triomphe du conte, s'exprimant par exemple dans le rêve, ou la rêverie diurne, exprimant toute la force du sujet qui se voit comme surhomme (au sens de Superman, concept différent du Surhomme de Nietzsche). En fait ce que le sujet salue dans l’image spéculaire (Qui réfléchit la lumière comme un miroir), c’est l’unité mentale qui lui est inhérente, à la manière d'une auto-satisfaction, en gros il se kiffe lui-même. Ce qu’il y reconnaît, c’est l’idéal de l’imago du double, à savoir la puissance qu'il éprouve à regarder un reflet qui le satisfait tel Narcisse, même si ça n'est pas le sien. Ce qu’il y acclame, c’est le triomphe de la tendance salutaire, en croyant que tout le monde l'apprécie autant qu'il se kiffe lui-même, parce que l'image rêvée qu'il admire dans le miroir de ses apparences incarne des idéaux qu'il surestime (un peu comme si un tel jetait son dévolu sur Batman, en l'idéalisant comme le meilleur des supers héros et tout en niant tous les autres qui vaudrait mois que lui). Dans la deuxième version du stade du miroir, l’image spéculaire est considérée comme le fondement premier au Je-idéal. Il s'agit de l’apparente maîtrise de l’image du miroir, virtuellement totale, c’est la maîtrise idéale d'une plus ou moins fausse croyance sur soi et propre à chacun, à savoir le Moi Idéal s'exprimant dans la plus grande subjectivité.
En résumé le Moi Idéal rend l'individu avide de pouvoir, sans pour autant lui procurer une puissance nécessaire pour agir dans la vraie vie. Le problème étant qu'il ne s'en rend pas forcément compte, faute d'arriver à s'avouer ses faiblesses au travers d'une remise en cause de soi, qui est impossible tant que l'individu se leurre dans le miroir de ses apparences.
MOI IDÉAL ET LA SUBJECTIVATION DANS L’IDÉAL DU MOI
Afin de mettre en tension le paradigme psychogénétique, nombre d’auteurs parlent d’ailleurs aujourd’hui de subjectivation, « ce passage d’une prédominance du Moi Idéal (de l’omnipotence narcissique) à son effacement au profit d’un Idéal du Moi de plus en plus impersonnel et surmoïque ». Il s'agit là de sortir de ses illusions narcissiques d'omnipotence, pour s'identifier non plus à un personnage héroïque et à une image fantasmée de soi, mais à un idéal plus objectif (l'Idéal du Moi) et favorisant un renoncement à son autosatisfaction, dans l'intérêt d'accéder à un état d'émancipation plus harmonieux et satisfaisant par la suite. Se sortir de cette subjectivité en la reconnaissant, permet d'être moins dépendant de ses désirs et autres volontés d'enfant-roi imposant ses exigences, au profit d'un idéal aux intérêts toujours narcissiques, mais situé à l'extérieur de soi, donc qui ne se réfère plus à une image idéalisée et rêvée de soi, mais prend pour objet un idéal parental ou amical. Il en va donc de ne plus tourner en rond dans un délire mégalomaniaque d'idéalisation de soi (avec son lot d'irresponsabilités), mais de prendre autrui ou des valeurs morales, éthiques et symboliques pour modèle, et ainsi de passer par l'autre pour se reconnaitre soi-même. Cette étape est nécessaire pour s'assumer et se responsabiliser, en passant au delà du miroir des apparences trompeuses de son Moi Idéal, qui nous rassure lorsque l'on a peur ou que l'on ne veut pas se confronter à la réalité, et s'avouer quelques vérités qui nous feraient perdre cette idéalisation de soi.
Importance de la transmission parentale.
Beaucoup d’adolescents vivent par exemple douloureusement le déficit au niveau de la transmission de l’histoire de leur famille, souvent du côté de leur père, et cela particulièrement lorsque ce dernier est pris lui-même dans des difficultés familiales, professionnelles ou existentielles importantes. Cette transmission est à situer du côté du symbolique, et elle peut avoir des conséquences dans le rapport structural qu’entretient le Moi Idéal et l’Idéal du Moi, c’est à dire dans la dialectique de subjectivation entre ces deux instances (la subjectivisation permettant à l'individu d’entretenir un dialogue avec lui-même). Le Moi Idéal peut alors devenir une sorte de refuge, une représentation grandiose mais illusoire de soi, dont il est difficile de se détacher au profit d’idéaux auxquels il faudrait se conformer et qui seraient de nature « impersonnelle et surmoïque ». En refusant les idéaux liés à l'Idéal du Moi, le Moi Idéal peut subir une inflation aussi importante que la précarité de la représentation que l’adolescent a de lui-même, et de son identité...d'où des pétages de câble en cascades, un déni manifeste de ses torts avec une accusation systématique d'autrui pour se déresponsabiliser et préserver ses apparences, et un délire masqué de se croire plus grand et plus fort qu'il ne l'est. Ce sont les caractéristiques orgueilleuses d'une tendance égocentrique, et correspondant au portrait d'une personnalité narcissique.
Difficulté des adolescents face à l’échec.
Si le mouvement « normal » d’introjection du Moi Idéal et de l’Idéal du Moi, où le premier passe sous le contrôle du second se déroule classiquement sous l’effet de la peur de perdre l’amour de l’objet assurant à l'adolescent un sentiment d'existence et de continuité, pour finalement aboutir à le perte de l’admiration des autres (et en premier lieu, celle des parents de son enfance), il peut donc être difficile pour certains adolescents d’aborder le registre de la castration (symbolique) avec l’assurance qu’ils en ressortissent vivants. Face aux difficultés de se séparer de leur parents et d'habitudes enfantines, mieux vaut alors pour eux reculer, et reprendre le contrôle de la situation en érotisant des conduites de mise en échec, qui ne visent alors qu’à maintenir l’intégrité de la personne (il peut s'agir là d'auto destruction salvatrice). Car pour s’élancer, construire et entreprendre quelque projet, il faut accepter l’éventualité de l’échec. Dans les jeux vidéo par exemple, on peut perdre certes (et la sauvegarde existe), mais on en ressort toujours intègre, et on peut recommencer encore et encore, jusqu’à la victoire.
En résumé, on comprend que de l'enfant qui s'identifie à un personnage héroïque en se déguisant comme lui, l'adolescent en vient à revêtir un accoutrement le faisant s'identifier à une icône qu'il idolâtre (tel un gothique arborant la tenue vestimentaire de Marilyn Manson, ou un geek se taillant les cheveux et la barbe selon le modèle d'un personnage de son jeux favoris). De cette façon l'adolescent devenu adulescent se retrouve dans des groupes de pairs partageant les mêmes intérêts pour des stars ou icônes véhiculant des valeurs particulières (on peut aussi retracer des parcours de vie et des modèles familiaux et culturels similaires, d'où la convergence des individus vers une même passion et un même mode de vie), et ainsi l'adulte immature sous de nombreux aspects continue de vivre dans une réalité fantasmée où se confondent réel et imaginaire. La dialectique entre Moi Idéal et Idéal du Moi étant pauvre, les adulescents continuent de renier leur subjectivité et d'ainsi fuir un dialogue intérieur qui pourrait les amener à s'émanciper et à s'assumer en tant qu'individu adulte, au lieu de tout faire pour rester jeune et cool tel un adolescent auto-satisfait de se complaire dans le divertissement et les rêveries. Si les geeks peuvent être un exemple caricatural, cette tendance adulescente touche une grand majorité des individus, que ça soit dans n'importe quelle classe de la population.
DIFFÉRENCES ENTRE MOI IDÉAL ET IDÉAL DU MOI - Le Moi Idéal est la forme originaire et narcissique de l’Idéal du Moi.
Le Moi Idéal est donc le lieu du fantasme héroïque, dans lequel le sujet se voit accomplissant maintes merveilles. L'Idéal du Moi contient les traits des futurs choix objectaux qui donnent des directions à l'individu. L'Idéal du Moi se présente alors comme "celui que j'aimerais être" d'après des idéaux extérieurs à sa personne, face au Moi Idéal se présentant comme "ce que j'ai été", sa majesté bébé. Une autre distinction serait que le Moi Idéal est en rapport avec un Sujet idéal, et l'Idéal du Moi est en rapport avec un Objet idéal. Le Moi Idéal, considéré comme un vestige du narcissisme primaire et de l’autre, se rapporte ainsi au sujet, quand l’Idéal du Moi et le Surmoi sont issus l’un et l’autre d’une identification à un objet extérieur au sujet.
Intérêt de la dialectique permettant de passer du Moi Idéal à l'Idéal du Moi.
Le Moi Idéal se constituerait durant l’étape où la mère investirait son enfant comme le prolongement d’elle-même, comme la partie d’elle-même qui lui manque et qui serait censée lui apporter toute satisfaction (à savoir son enfant). Puis, le mouvement censé succéder à cette étape, serait le désinvestissement par la mère de cet enfant, pour en faire un objet séparé d’elle. Se soumettant elle-même à la castration, l’enfant, qui pouvait être pour elle son objet de satisfaction, pourra désormais chercher à avoir de la satisfaction. En d'autre cas l'individu reste prisonnier d'une image maternelle lui empêchant de gagner en autonomie, et de s'émanciper pour trouver de la satisfaction par lui-même et pour lui-même, au lieu de toujours devoir se référer à sa mère, en recherchant au près d'elle de l'aide, de la bienveillance, de l'affection, une autorisation ou de la confrontation selon les modèles établis dans l'enfance.
Le Moi Idéal représente bien ce moment où l’enfant est identifié par la mère à ce qui lui manque. Et que se soumettre à la castration, ce qui se traduit entre autres pour la mère, à aller chercher satisfaction ailleurs que chez son enfant ou dans la relation qu’elle a avec lui, permet alors que s’enclenche chez l’enfant cette dialectique entre le Moi Idéal et l’Idéal du Moi. La mère doit donc impérativement se séparer symboliquement de son enfant pour lui faire comprendre qu'il doit gagner sa propre autonomie et devenir indépendant. Cet Idéal du Moi se substituant au Moi Idéal va donc représenter ce à quoi l’enfant devra désormais se soumettre pour obtenir à nouveau la satisfaction narcissique perdue, ou en devenir d’être perdue, et qui va donc se situer au-dehors de la relation à caractère incestueuse que représente le Moi Idéal (l'individu n'a pas envie de coucher avec sa mère, il est juste comme collé à elle parce qu'elle le rassure, faute d'avoir un autre idéal auquel se raccrocher). C’est la place du rôle imaginaire de la mère, en tant qu’élément symbolique qui doit changer dans la psyché de l'individu, et ainsi permettre la mise en route de la dialectique de la subjectivation. L'adolescent/adulescent s'assumera alors en tant qu'individu adulte et responsable, grâce à une confrontation à soi-même par une forme de dialogue intérieur entre ses instances psychiques (voyez ça comme un déclic, où enfin on se sent grand et fier de soi, à même d'affronter la vie et ses difficultés).
Nous pensons ainsi que le nécessaire désinvestissement de la mère quant à son enfant peut être entravé, et peut finir par devenir un obstacle à l’enclenchement de la dialectique d’introjection du Moi Idéal, et de son effacement au profit d’un Idéal du Moi symbolique et impersonnel. Nous avons vu que le Moi Idéal était une instance imaginaire, et qu’elle peut représenter une position de repli, de défense par rapport à l’impossibilité de se référer à cet Idéal du Moi, symbolique, sur la base d’une autorité paternelle. Rappelons également que ce qui vient fonder l’autorité, c’est le discours de la mère, qui va désigner le père comme porteur de son effectivité.
LE MOI IDÉAL ET LA MORT
Distinguer fonction et tendance à propos du principe de plaisir.
Le principe de plaisir est une tendance qui se trouve au service d’une fonction à laquelle il incombe de faire en sorte que l’appareil psychique soit absolument sans excitations ou de maintenir en lui constant ou le plus bas possible le quantum d’excitation. Freud se demande si l’état de repos des tensions psychosexuelles, atteint après la pleine satisfaction du désir, ne serait pas effectivement du côté de la mort, c’est-à-dire de l’aspiration la plus générale de tout ce qui vit à retourner au repos du monde anorganique. Nous avons tous fait, ajoute-t-il, l’expérience que le plus grand plaisir qui nous soit possible, celui de l’acte sexuel, est lié à l’extinction momentanée d’une excitation parvenue à un haut degré. Freud rejoint ici Ferenczi en considérant que le retour vers l’état d’apaisement des tensions satisfait une tendance de mort. Il sera rejoint à son tour par Lacan qui dénonce le risque de mort que représente tout retour à l'inanimé, fût-il partiel, à ces sécurités enfantines qu'est le fait de rester sous la protection de sa mère, et qui entraînerait des ruines sans proportions avec le bénéfice de ce retour (si il est rassurant de retrouver la sécurité qu'offre l'image de sa mère protectrice, cela n'aide pas vraiment l'individu à faire face à ses responsabilités). Pour Lacan, l’imago de la mère, salutaire à l’origine, devient facteur de mort, dès lors que l’on cède à la tentation d’y faire retour.
Nous sommes en mesure maintenant de concevoir à propos du Moi Idéal, dans le droit fil de la réflexion ouverte par Lou Andréas-Salomé et Ferenczi, un « idéal de mort » inscrit dans la psyché et dont l’aspiration serait d’exister dans un état d’immobilité, c’est-à-dire un état sans tension ni mouvement psycho-sexuel et de conserver un état proche, comme le dit Freud, de l’état anorganique. En tant qu’idéal de finalité, nous soutiendrons que l’« idéal de mort » recherche un certain état de satiété psychique. La relative positivité qu’il incarne, plutôt dans le sens d’une clôture ou d’une fermeture, côtoie paradoxalement la notion de désinvestissement.
Contrairement à ce qu’avance Freud au sujet de la pulsion de mort, il apparaît que l’« idéal de mort » que nous cherchons ici à mettre en lumière en tant qu’« idéal de retour à l’inanimé », n’aspire pas à la destructivité. En effet, dans sa définition des pulsions de mort, Freud ajoute habilement à la catégorie du retour à l’inanimé, celle de la destructivité. Or cet ajout sera déterminant car il va aboutir à un amalgame volontairement recherché qui confondra désinvestissement et destructivité. En d'autres termes, le Moi Idéal désinvestit les objets extérieurs en énergie psychique pour la tourner vers soi en se rêvant comme un héros, mais sans pour autant chercher à détruire son monde, comme pourraient le faire d'autres dynamiques de l'esprit. C’est pourquoi nous nous écartons de la notion de désinvestissement, l’action destructrice et auto-anéantisante des pulsions de mort, c'est à dire le désir de non désir, emblème du désinvestissement et qui est l’expression ultime de la pulsion de mort, reposant sur l’idée d’une haine radicale assortie d’une auto-mutilation.
MOI IDÉAL TYRANNIQUE EN RECHERCHE D'ABSOLU
Si avec Lacan le Moi Idéal s’origine sur l’assomption de l’image spéculaire, nous remarquerons qu’après lui, les auteurs ont rajouté, là aussi, une tonalité maternelle à cette forme précoce et narcissique d’Idéal du Moi. Certains insistent sur l’importance de l’investissement anti-désorganisant et anti-dépressif de l’image du double représentée par le visage ou le regard de la mère. Duparc pencherait plutôt pour distinguer nettement un Moi Idéal archaïque qui serait aussi tyrannique et primitif que le Surmoi précoce. L’aspiration de cet idéal pré-génital encore appelé Idéal de Soi par Guillaumin, pousserait le sujet à retrouver un état, qui, selon les auteurs, va de la fusion primaire avec la mère à la sécurité absolue, en passant par la plénitude, la complétude, la phase d’illusion, l’unité duelle ou l’unitude narcissiques. Aulagnier rejoint ce mouvement d’idées en parlant précisément de l’aspiration originaire à retrouver la totalité parfaite, c’est-à-dire, l’indissociabilité de la zone-objet complémentaire. Plus concrètement, les problèmes liés au Moi Idéal sont de rechercher un absolu en sa personne et dans son environnement, en faisant de soi une référence géniale et indépassable, imposant ses volontés et exigences à autrui, sans plus prendre en compte les réalités des autres individus (on a une pelleté de président narcissique comme un exemple clinique parfait).
On imagine donc bien qu'une société constituée d'individus individualistes et tous plus ou moins prisonniers de leur image spéculaire malgré eux, dépendant donc de leur Moi Idéal les faisant s’idéaliser sans plus assumer leur responsabilité, tendrait à promouvoir un modèle sociétal libéral où chacun serait mit en concurrence, dans le but d'être parmi les winners, au dessus des loosers...mais heureusement nous ne vivons pas dans ce monde narcissisé à l'extrême, où chacun mais tous ensemble pourrait se mettre en avant sur des réseaux sociaux, dans une représentation de soi charmante et virtuelle dont le but serait d'acquérir une hypothétique renommée et reconnaissance par le regard d'autrui, et au final sans plus que ça s'intéresser aux questions politiques, environnementales et sociétales, sinon imaginez un peu quel avenir nous réserverions nous alors........?
Voici un schéma explicatif regroupant les instances psychiques, que j'ai replacé dans une échelle de temps où l'on voit les différents stades de notre évolution enfantine, toujours d'après les théories de Freud, mais aussi d'après d'autres psychanalystes. Il s'agit d'un schéma vulgarisé comme cet article et ceux vers lesquels il renvoie pour tenter de comprendre l'organisation de notre psyché, d'un point de vue psychanalytique.
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Article introducteur
Le Moi Idéal désigne une formation intrapsychique que certains auteurs définissent comme un idéal de toute-puissance narcissique, de mégalomanie, forgé sur le modèle du narcissisme infantile, et appartenant au registre de l'imaginaire. Cette formation est représentative de la première ébauche du moi investie par l'énergie psychique qu'est la libido. Le moi idéal est donc une formation essentiellement narcissique trouvant son origine dans le stade du miroir, et qui se rapporte au sujet se percevant comme idéalisé.
Le Moi Idéal désigne le Moi qui aurait été l'objet des toutes premières satisfactions narcissiques, dans un état d'omnipotence où le petit enfant se croyait tout puissant. Plus tard, l'individu tend à retrouver ce Moi Idéal, caractéristique de l'état, dit de toute-puissance, du narcissisme infantile, du temps où l'enfant « était à lui-même son propre idéal ». Le Moi Idéal est élaboré à partir de l'image du corps propre dans le miroir. Cette image est le support de l'identification primaire de l'enfant à son semblable, et constitue le point inaugural de l'aliénation de l'individu dans la capture imaginaire. En outre, cette image sera la souche des identifications secondaires où le "je" s'objective dans son rapport à la culture et au langage, par la médiation de l'autre. En d'autre terme, de la manière la plus simplifiée, le Moi Idéal est la part fantasmée et subjective de l'individu.
ORIGINES
Freud pense la formation du Moi comme s'étalant en plusieurs phases.
Si le Moi institue la conscience et le principe de réalité, lequel rendra possible la capacité d'admettre des défauts fondant le Moi, il y a dans un premier temps un Moi bien plus archaïque qu'il nomme Moi Plaisir. Le Moi Plaisir, s'il dénote un premier travail de différenciation entre le dedans et le dehors, s'accorde en effet certains avantages quand il rejette à l'extérieur toute faute – ou plutôt tout déplaisir, toute imperfection – et se pense comme la somme de tout bien. Le Moi Plaisir décrit donc la tendance infantile à se reconnaitre comme le bien, à se prendre pour un idéal, et à désigner l'extérieur comme le mal. Il y a introjection du bon et projection du mauvais, lorsque l'enfant s'approprie ce qu'il juge de bon, et projette ou garde à l'extérieur de sa personne ce qu'il juge comme mauvais, autrement dit ce n'est jamais de sa faute, mais celle des autres ou des choses et objets autour de lui.
Nécessité de clarifier ce Moi Plaisir.
Au départ on pouvait penser que le Moi Plaisir émergeait dans l'union du Moi et du Ça, au moment où l'enfant prenait conscience de soi au travers de son image dans le miroir et d'une illusion de toute-puissance, mais la complexité de la psyché humaine fit comprendre au psychanalyste que le Moi Idéal s'articulait d'une autre manière. Ce qui est sur, c'est que d'après Nunberg, le Moi Idéal est une formation génétiquement antérieure au Surmoi : « Le moi encore inorganisé, qui se sent uni au Ça, correspond à une condition idéale… ». Au cours de son développement, le sujet laisserait derrière lui cet idéal narcissique tout en aspirerant à y retourner, ce qui se produit surtout, mais pas exclusivement, dans les psychoses.
Mais Lagache a souligné l’intérêt qu’il y avait à distinguer le pôle d’identifications représenté par le Moi Idéal de celui qui est constitué par le couple Surmoi-Idéal du Moi. Il s’agit aussi pour lui d’une formation narcissique inconsciente, sauf que la conception de Lagache ne coïncide pas avec celle de Nunberg : « Le Moi Idéal conçu comme un idéal narcissique de toute-puissance ne se réduit pas à l’union du Moi avec le Ça, mais comporte une identification primaire à un autre être, investi de la toute-puissance, c’est-à-dire à la mère ». Le Moi Idéal n'émerge donc pas de part lui-même dans la psyché, mais par l'identification à un pair extérieur, autre que soi (souvent il s'agit de la mère).
De cette identification à un autre, le Moi Idéal sert ensuite de support à ce que Lagache a décrit sous le nom d’identification héroïque (identification à des personnages exceptionnels et prestigieux), et qui fera fantasmée l'individu s'identifiant à des personnages aux pouvoirs extraordinaires : « Le Moi Idéal est encore révélé par des admirations passionnées pour de grands personnages de l’histoire ou de la vie contemporaine, que caractérisent leur indépendance, leur orgueil, leur ascendant. La cure progressant, on voit le Moi Idéal s’esquisser, émerger, comme une formation irréductible à l’Idéal du Moi ». Mais toujours selon Lagache, la formation du Moi Idéal a des implications sado-masochistes, notamment la négation de l’autre, corrélative à l’affirmation de soi quand l'individu se perd dans l'illusion de son fantasme de toute puissance, et qu'il n'arrive pas à se sortir de cette omnipotence en se croyant plus fort qu'autrui, alors que ça n'est pas le cas. Il en vient alors à ne plus reconnaitre autrui, en s'attribuant des mérites et autres forces n'existant que dans son délire de grandeur à tendance mégalomaniaque.
Le moi héroïque, reflet d'apparences idéalisées.
Le Moi Idéal est donc l'instance des identifications héroïques. Si le Moi se définit déjà comme une instance imaginaire, le Moi Idéal est triomphe du conte, s'exprimant par exemple dans le rêve, ou la rêverie diurne, exprimant toute la force du sujet qui se voit comme surhomme (au sens de Superman, concept différent du Surhomme de Nietzsche). En fait ce que le sujet salue dans l’image spéculaire (Qui réfléchit la lumière comme un miroir), c’est l’unité mentale qui lui est inhérente, à la manière d'une auto-satisfaction, en gros il se kiffe lui-même. Ce qu’il y reconnaît, c’est l’idéal de l’imago du double, à savoir la puissance qu'il éprouve à regarder un reflet qui le satisfait tel Narcisse, même si ça n'est pas le sien. Ce qu’il y acclame, c’est le triomphe de la tendance salutaire, en croyant que tout le monde l'apprécie autant qu'il se kiffe lui-même, parce que l'image rêvée qu'il admire dans le miroir de ses apparences incarne des idéaux qu'il surestime (un peu comme si un tel jetait son dévolu sur Batman, en l'idéalisant comme le meilleur des supers héros et tout en niant tous les autres qui vaudrait mois que lui). Dans la deuxième version du stade du miroir, l’image spéculaire est considérée comme le fondement premier au Je-idéal. Il s'agit de l’apparente maîtrise de l’image du miroir, virtuellement totale, c’est la maîtrise idéale d'une plus ou moins fausse croyance sur soi et propre à chacun, à savoir le Moi Idéal s'exprimant dans la plus grande subjectivité.
En résumé le Moi Idéal rend l'individu avide de pouvoir, sans pour autant lui procurer une puissance nécessaire pour agir dans la vraie vie. Le problème étant qu'il ne s'en rend pas forcément compte, faute d'arriver à s'avouer ses faiblesses au travers d'une remise en cause de soi, qui est impossible tant que l'individu se leurre dans le miroir de ses apparences.
MOI IDÉAL ET LA SUBJECTIVATION DANS L’IDÉAL DU MOI
Afin de mettre en tension le paradigme psychogénétique, nombre d’auteurs parlent d’ailleurs aujourd’hui de subjectivation, « ce passage d’une prédominance du Moi Idéal (de l’omnipotence narcissique) à son effacement au profit d’un Idéal du Moi de plus en plus impersonnel et surmoïque ». Il s'agit là de sortir de ses illusions narcissiques d'omnipotence, pour s'identifier non plus à un personnage héroïque et à une image fantasmée de soi, mais à un idéal plus objectif (l'Idéal du Moi) et favorisant un renoncement à son autosatisfaction, dans l'intérêt d'accéder à un état d'émancipation plus harmonieux et satisfaisant par la suite. Se sortir de cette subjectivité en la reconnaissant, permet d'être moins dépendant de ses désirs et autres volontés d'enfant-roi imposant ses exigences, au profit d'un idéal aux intérêts toujours narcissiques, mais situé à l'extérieur de soi, donc qui ne se réfère plus à une image idéalisée et rêvée de soi, mais prend pour objet un idéal parental ou amical. Il en va donc de ne plus tourner en rond dans un délire mégalomaniaque d'idéalisation de soi (avec son lot d'irresponsabilités), mais de prendre autrui ou des valeurs morales, éthiques et symboliques pour modèle, et ainsi de passer par l'autre pour se reconnaitre soi-même. Cette étape est nécessaire pour s'assumer et se responsabiliser, en passant au delà du miroir des apparences trompeuses de son Moi Idéal, qui nous rassure lorsque l'on a peur ou que l'on ne veut pas se confronter à la réalité, et s'avouer quelques vérités qui nous feraient perdre cette idéalisation de soi.
Importance de la transmission parentale.
Beaucoup d’adolescents vivent par exemple douloureusement le déficit au niveau de la transmission de l’histoire de leur famille, souvent du côté de leur père, et cela particulièrement lorsque ce dernier est pris lui-même dans des difficultés familiales, professionnelles ou existentielles importantes. Cette transmission est à situer du côté du symbolique, et elle peut avoir des conséquences dans le rapport structural qu’entretient le Moi Idéal et l’Idéal du Moi, c’est à dire dans la dialectique de subjectivation entre ces deux instances (la subjectivisation permettant à l'individu d’entretenir un dialogue avec lui-même). Le Moi Idéal peut alors devenir une sorte de refuge, une représentation grandiose mais illusoire de soi, dont il est difficile de se détacher au profit d’idéaux auxquels il faudrait se conformer et qui seraient de nature « impersonnelle et surmoïque ». En refusant les idéaux liés à l'Idéal du Moi, le Moi Idéal peut subir une inflation aussi importante que la précarité de la représentation que l’adolescent a de lui-même, et de son identité...d'où des pétages de câble en cascades, un déni manifeste de ses torts avec une accusation systématique d'autrui pour se déresponsabiliser et préserver ses apparences, et un délire masqué de se croire plus grand et plus fort qu'il ne l'est. Ce sont les caractéristiques orgueilleuses d'une tendance égocentrique, et correspondant au portrait d'une personnalité narcissique.
Difficulté des adolescents face à l’échec.
Si le mouvement « normal » d’introjection du Moi Idéal et de l’Idéal du Moi, où le premier passe sous le contrôle du second se déroule classiquement sous l’effet de la peur de perdre l’amour de l’objet assurant à l'adolescent un sentiment d'existence et de continuité, pour finalement aboutir à le perte de l’admiration des autres (et en premier lieu, celle des parents de son enfance), il peut donc être difficile pour certains adolescents d’aborder le registre de la castration (symbolique) avec l’assurance qu’ils en ressortissent vivants. Face aux difficultés de se séparer de leur parents et d'habitudes enfantines, mieux vaut alors pour eux reculer, et reprendre le contrôle de la situation en érotisant des conduites de mise en échec, qui ne visent alors qu’à maintenir l’intégrité de la personne (il peut s'agir là d'auto destruction salvatrice). Car pour s’élancer, construire et entreprendre quelque projet, il faut accepter l’éventualité de l’échec. Dans les jeux vidéo par exemple, on peut perdre certes (et la sauvegarde existe), mais on en ressort toujours intègre, et on peut recommencer encore et encore, jusqu’à la victoire.
En résumé, on comprend que de l'enfant qui s'identifie à un personnage héroïque en se déguisant comme lui, l'adolescent en vient à revêtir un accoutrement le faisant s'identifier à une icône qu'il idolâtre (tel un gothique arborant la tenue vestimentaire de Marilyn Manson, ou un geek se taillant les cheveux et la barbe selon le modèle d'un personnage de son jeux favoris). De cette façon l'adolescent devenu adulescent se retrouve dans des groupes de pairs partageant les mêmes intérêts pour des stars ou icônes véhiculant des valeurs particulières (on peut aussi retracer des parcours de vie et des modèles familiaux et culturels similaires, d'où la convergence des individus vers une même passion et un même mode de vie), et ainsi l'adulte immature sous de nombreux aspects continue de vivre dans une réalité fantasmée où se confondent réel et imaginaire. La dialectique entre Moi Idéal et Idéal du Moi étant pauvre, les adulescents continuent de renier leur subjectivité et d'ainsi fuir un dialogue intérieur qui pourrait les amener à s'émanciper et à s'assumer en tant qu'individu adulte, au lieu de tout faire pour rester jeune et cool tel un adolescent auto-satisfait de se complaire dans le divertissement et les rêveries. Si les geeks peuvent être un exemple caricatural, cette tendance adulescente touche une grand majorité des individus, que ça soit dans n'importe quelle classe de la population.
DIFFÉRENCES ENTRE MOI IDÉAL ET IDÉAL DU MOI - Le Moi Idéal est la forme originaire et narcissique de l’Idéal du Moi.
Le Moi Idéal est donc le lieu du fantasme héroïque, dans lequel le sujet se voit accomplissant maintes merveilles. L'Idéal du Moi contient les traits des futurs choix objectaux qui donnent des directions à l'individu. L'Idéal du Moi se présente alors comme "celui que j'aimerais être" d'après des idéaux extérieurs à sa personne, face au Moi Idéal se présentant comme "ce que j'ai été", sa majesté bébé. Une autre distinction serait que le Moi Idéal est en rapport avec un Sujet idéal, et l'Idéal du Moi est en rapport avec un Objet idéal. Le Moi Idéal, considéré comme un vestige du narcissisme primaire et de l’autre, se rapporte ainsi au sujet, quand l’Idéal du Moi et le Surmoi sont issus l’un et l’autre d’une identification à un objet extérieur au sujet.
Intérêt de la dialectique permettant de passer du Moi Idéal à l'Idéal du Moi.
Le Moi Idéal se constituerait durant l’étape où la mère investirait son enfant comme le prolongement d’elle-même, comme la partie d’elle-même qui lui manque et qui serait censée lui apporter toute satisfaction (à savoir son enfant). Puis, le mouvement censé succéder à cette étape, serait le désinvestissement par la mère de cet enfant, pour en faire un objet séparé d’elle. Se soumettant elle-même à la castration, l’enfant, qui pouvait être pour elle son objet de satisfaction, pourra désormais chercher à avoir de la satisfaction. En d'autre cas l'individu reste prisonnier d'une image maternelle lui empêchant de gagner en autonomie, et de s'émanciper pour trouver de la satisfaction par lui-même et pour lui-même, au lieu de toujours devoir se référer à sa mère, en recherchant au près d'elle de l'aide, de la bienveillance, de l'affection, une autorisation ou de la confrontation selon les modèles établis dans l'enfance.
Le Moi Idéal représente bien ce moment où l’enfant est identifié par la mère à ce qui lui manque. Et que se soumettre à la castration, ce qui se traduit entre autres pour la mère, à aller chercher satisfaction ailleurs que chez son enfant ou dans la relation qu’elle a avec lui, permet alors que s’enclenche chez l’enfant cette dialectique entre le Moi Idéal et l’Idéal du Moi. La mère doit donc impérativement se séparer symboliquement de son enfant pour lui faire comprendre qu'il doit gagner sa propre autonomie et devenir indépendant. Cet Idéal du Moi se substituant au Moi Idéal va donc représenter ce à quoi l’enfant devra désormais se soumettre pour obtenir à nouveau la satisfaction narcissique perdue, ou en devenir d’être perdue, et qui va donc se situer au-dehors de la relation à caractère incestueuse que représente le Moi Idéal (l'individu n'a pas envie de coucher avec sa mère, il est juste comme collé à elle parce qu'elle le rassure, faute d'avoir un autre idéal auquel se raccrocher). C’est la place du rôle imaginaire de la mère, en tant qu’élément symbolique qui doit changer dans la psyché de l'individu, et ainsi permettre la mise en route de la dialectique de la subjectivation. L'adolescent/adulescent s'assumera alors en tant qu'individu adulte et responsable, grâce à une confrontation à soi-même par une forme de dialogue intérieur entre ses instances psychiques (voyez ça comme un déclic, où enfin on se sent grand et fier de soi, à même d'affronter la vie et ses difficultés).
Nous pensons ainsi que le nécessaire désinvestissement de la mère quant à son enfant peut être entravé, et peut finir par devenir un obstacle à l’enclenchement de la dialectique d’introjection du Moi Idéal, et de son effacement au profit d’un Idéal du Moi symbolique et impersonnel. Nous avons vu que le Moi Idéal était une instance imaginaire, et qu’elle peut représenter une position de repli, de défense par rapport à l’impossibilité de se référer à cet Idéal du Moi, symbolique, sur la base d’une autorité paternelle. Rappelons également que ce qui vient fonder l’autorité, c’est le discours de la mère, qui va désigner le père comme porteur de son effectivité.
LE MOI IDÉAL ET LA MORT
Distinguer fonction et tendance à propos du principe de plaisir.
Le principe de plaisir est une tendance qui se trouve au service d’une fonction à laquelle il incombe de faire en sorte que l’appareil psychique soit absolument sans excitations ou de maintenir en lui constant ou le plus bas possible le quantum d’excitation. Freud se demande si l’état de repos des tensions psychosexuelles, atteint après la pleine satisfaction du désir, ne serait pas effectivement du côté de la mort, c’est-à-dire de l’aspiration la plus générale de tout ce qui vit à retourner au repos du monde anorganique. Nous avons tous fait, ajoute-t-il, l’expérience que le plus grand plaisir qui nous soit possible, celui de l’acte sexuel, est lié à l’extinction momentanée d’une excitation parvenue à un haut degré. Freud rejoint ici Ferenczi en considérant que le retour vers l’état d’apaisement des tensions satisfait une tendance de mort. Il sera rejoint à son tour par Lacan qui dénonce le risque de mort que représente tout retour à l'inanimé, fût-il partiel, à ces sécurités enfantines qu'est le fait de rester sous la protection de sa mère, et qui entraînerait des ruines sans proportions avec le bénéfice de ce retour (si il est rassurant de retrouver la sécurité qu'offre l'image de sa mère protectrice, cela n'aide pas vraiment l'individu à faire face à ses responsabilités). Pour Lacan, l’imago de la mère, salutaire à l’origine, devient facteur de mort, dès lors que l’on cède à la tentation d’y faire retour.
Nous sommes en mesure maintenant de concevoir à propos du Moi Idéal, dans le droit fil de la réflexion ouverte par Lou Andréas-Salomé et Ferenczi, un « idéal de mort » inscrit dans la psyché et dont l’aspiration serait d’exister dans un état d’immobilité, c’est-à-dire un état sans tension ni mouvement psycho-sexuel et de conserver un état proche, comme le dit Freud, de l’état anorganique. En tant qu’idéal de finalité, nous soutiendrons que l’« idéal de mort » recherche un certain état de satiété psychique. La relative positivité qu’il incarne, plutôt dans le sens d’une clôture ou d’une fermeture, côtoie paradoxalement la notion de désinvestissement.
Contrairement à ce qu’avance Freud au sujet de la pulsion de mort, il apparaît que l’« idéal de mort » que nous cherchons ici à mettre en lumière en tant qu’« idéal de retour à l’inanimé », n’aspire pas à la destructivité. En effet, dans sa définition des pulsions de mort, Freud ajoute habilement à la catégorie du retour à l’inanimé, celle de la destructivité. Or cet ajout sera déterminant car il va aboutir à un amalgame volontairement recherché qui confondra désinvestissement et destructivité. En d'autres termes, le Moi Idéal désinvestit les objets extérieurs en énergie psychique pour la tourner vers soi en se rêvant comme un héros, mais sans pour autant chercher à détruire son monde, comme pourraient le faire d'autres dynamiques de l'esprit. C’est pourquoi nous nous écartons de la notion de désinvestissement, l’action destructrice et auto-anéantisante des pulsions de mort, c'est à dire le désir de non désir, emblème du désinvestissement et qui est l’expression ultime de la pulsion de mort, reposant sur l’idée d’une haine radicale assortie d’une auto-mutilation.
MOI IDÉAL TYRANNIQUE EN RECHERCHE D'ABSOLU
Si avec Lacan le Moi Idéal s’origine sur l’assomption de l’image spéculaire, nous remarquerons qu’après lui, les auteurs ont rajouté, là aussi, une tonalité maternelle à cette forme précoce et narcissique d’Idéal du Moi. Certains insistent sur l’importance de l’investissement anti-désorganisant et anti-dépressif de l’image du double représentée par le visage ou le regard de la mère. Duparc pencherait plutôt pour distinguer nettement un Moi Idéal archaïque qui serait aussi tyrannique et primitif que le Surmoi précoce. L’aspiration de cet idéal pré-génital encore appelé Idéal de Soi par Guillaumin, pousserait le sujet à retrouver un état, qui, selon les auteurs, va de la fusion primaire avec la mère à la sécurité absolue, en passant par la plénitude, la complétude, la phase d’illusion, l’unité duelle ou l’unitude narcissiques. Aulagnier rejoint ce mouvement d’idées en parlant précisément de l’aspiration originaire à retrouver la totalité parfaite, c’est-à-dire, l’indissociabilité de la zone-objet complémentaire. Plus concrètement, les problèmes liés au Moi Idéal sont de rechercher un absolu en sa personne et dans son environnement, en faisant de soi une référence géniale et indépassable, imposant ses volontés et exigences à autrui, sans plus prendre en compte les réalités des autres individus (on a une pelleté de président narcissique comme un exemple clinique parfait).
On imagine donc bien qu'une société constituée d'individus individualistes et tous plus ou moins prisonniers de leur image spéculaire malgré eux, dépendant donc de leur Moi Idéal les faisant s’idéaliser sans plus assumer leur responsabilité, tendrait à promouvoir un modèle sociétal libéral où chacun serait mit en concurrence, dans le but d'être parmi les winners, au dessus des loosers...mais heureusement nous ne vivons pas dans ce monde narcissisé à l'extrême, où chacun mais tous ensemble pourrait se mettre en avant sur des réseaux sociaux, dans une représentation de soi charmante et virtuelle dont le but serait d'acquérir une hypothétique renommée et reconnaissance par le regard d'autrui, et au final sans plus que ça s'intéresser aux questions politiques, environnementales et sociétales, sinon imaginez un peu quel avenir nous réserverions nous alors........?
Voici un schéma explicatif regroupant les instances psychiques, que j'ai replacé dans une échelle de temps où l'on voit les différents stades de notre évolution enfantine, toujours d'après les théories de Freud, mais aussi d'après d'autres psychanalystes. Il s'agit d'un schéma vulgarisé comme cet article et ceux vers lesquels il renvoie pour tenter de comprendre l'organisation de notre psyché, d'un point de vue psychanalytique.
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