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Merci de cette longue réponse, Azerty, qui comme les deux précédentes, se lit avec intérêt, et nous fait rentrer un peu plus dans un débat philosophique existentiel de bon niveau. Je ne vais pas y répondre longuement tout de suite, et il m'est tombé un boulot de rédaction à faire entre demain et dimanche soir, donc ça ne sera pas ces 3 jours non plus. Au point où on en est, si tu habites comme moi en région parisienne, ça pourrait être plus intéressant de nous rencontrer. Plutôt que de repasser 3h à formuler une réponse sérieuse devant mon PC, je préfère discuter de façon interactive en face à face.
Hier matin, il m'est venu encore un "PS" à ma contrib' précédente, mais ça faisait trop à placer encore dans le même message. Je te le mets ci-dessous :
=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=
-= PPS du matin =-
Pour tout dire et étoffer un peu plus les recoupements de nos pensées : dans le fond, "en interne", je suis aussi en colère que toi vis-à-vis de mes congénères (ou que "Fridriech"). En majorité écrasante, ils choisissent la pente de la facilité et de l'auto-aveuglement. Moi, j'ai le sentiment d'avoir fait l'inverse, dans la durée, et putain le désert de semblables pareillement engagés, toutes ces décennies !
Une honte. Mais exprimer telle quelle cette colère justifiée serait... une honte pour moi. Et regarde : si je le faisais, ça voudrait dire que je privilégie mon égo au sens où tu en parles. Un discours public de ce type reviendrait à poser, "Vous n'êtes rien, vous êtes des loques, il n'y a qu'un Je fondé à parler ici, et je vous fustige éloquemment parce que vous le méritez". (Pour le tenir réellement, devant une large audience, il faudrait être "fou". Nietzsche ne l'était heureusement pas assez. Il a sublimé en le tenant "en littérature", en produisant un poème philosophique existentiel unique.)
Cette colère doit être entretenue comme carburant intérieur, comme aiguillon me faisant ressentir, dans la durée, l'état des choses comme scandaleusement insupportable, de sorte que je ne cède jamais au découragement ni me démissionne.
Théoriquement, elle ne doit être exprimée que lorsqu'elle est entièrement maîtrisée, qu'elle sert un but dont la bienveillance pour autrui est la finalité et pas le but de faire surgir, pour le tribun, un puissant geyser de jouissance égotiste.
Je dis "théoriquement" parce cette démarche de se mettre en situation de pouvoir parler aux autres dans un souci de bien général aboutit logiquement, quand les choses sont prêtes, à une forme de discours qui ne peut plus être teintée de colère.
Le principe humain salvateur est prodigieusement limpide, et chaque être humain, chaque jour, doit ou devrait avoir le souci de ne jamais s'en déprendre : "Aime ton prochain comme toi-même" !
Il prime même sur le souci de vérité. Les "contorsions" morales intimes auxquelles cela peut obliger -- jusqu'à un certain point -- sont nécessaires. Nous sommes chacun dépositaires de ce trésor, de ces braises d'humanité pure qu'il ne faut pas laisser s'éteindre.
=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=
Rapidement :
- Ça me paraît évidemment de l'ordre de la facilité mal avisée de réduire ma démarche de vie à du narcissisme suspect de déni et de refoulement. Les échanges que nous avons eus me paraissent caractériser 2 individus logiquement tenus, de façon similaire, par ce qui les agit et "gigotant" pour tenter de dépasser une part de ces déterminations.
- Dans l'ordre de ces déterminations, nos orientations ont largement à voir au départ avec ce dont nous ont nourri nos parents respectifs et "la différence est une richesse".
- Bien sûr que Descartes développe plein d'idées bien à côté de la plaque. Je ne m'exprimais, puisqu'on était parti à son sujet de "Je pense, donc je suis", que sur son grand oeuvre pleinement valide déjà cité. Dans la série de ses errements, tu as cité les "animaux-machines", moi je cite plus souvent la croyance en un esprit totalement clair à lui-même, n'ayant aucune notion de lapart subconsciente.
- Heureusement, à peine 30 ans après lui, celui qui met tout le monde d'accord en matière de philosophie existentielle reprend la matière de Descartes en la corrigeant. Au fil des ans, je me suis trouvé de plus en plus spinoziste, et si Nietzsche a en effet bien identifié une certaine identité de sa pensée avec le Béni, pour moi c'est un "gamin" touchant mais agité, à côté.
- J'ai été heureux de lire sous tes doigts l'admission que sans égo, il n'y a pas d'être humain pensant et agissant ; j'étais parti pour le souligner, sinon. D'où mes appels à la prudence dans le traitement qu'on envisage de lui infliger.
- Il est vrai que je n'ai pas testé les substances dont tu parles ; je m'exprimais sur la notion générique de "produit induisant un effet dissociatif".
- Enfin, pour revenir à "égo", la meilleure analyse qu'il m'ait été donné de lire à ce "sujet" est le livre qu'a publié le sociologue Jean-Claude Kaufmann et que je te recommande chaudement. Voici sa couverture, et puis une double page de l'avant-dernier chapitre sur "L'enveloppement de soi", qui mentionne brièvement les addictions de tous ordres.
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(PS : Comme la majorité des auteurs dans ce domaine, et comme je le fais moi-même, il utilise indifféremment "individualisation" (comme à la 7ème ligne de la page 250) et "individuation" pour désigner la même chose. Dans la distinction que tu as faite, c'est "individualisme", ou 'tendance à l'individualisme" qu'il conviendrait mieux d'opposer à "individuation" ou à "individualisation". Et d'ailleurs, le bouquin de Kaufmann est aussi un historique du processus d'individuation, c'est-à-dire la tendance historique, à mesure du développement civilisationnel, pour chaque individu, de se sentir et vouloir de plus en plus singulier, tenant de moins en moins son identité de sa fonction ou de son origine sociale)
Merci, GuyGeorges, de ton intervention. "Pas du tout ça" me semble excessif comme commentaire, et nous pourrons éventuellement approfondir la question quand tu seras intervenu plus substantiellement.
Hier matin, il m'est venu encore un "PS" à ma contrib' précédente, mais ça faisait trop à placer encore dans le même message. Je te le mets ci-dessous :
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-= PPS du matin =-
Pour tout dire et étoffer un peu plus les recoupements de nos pensées : dans le fond, "en interne", je suis aussi en colère que toi vis-à-vis de mes congénères (ou que "Fridriech"). En majorité écrasante, ils choisissent la pente de la facilité et de l'auto-aveuglement. Moi, j'ai le sentiment d'avoir fait l'inverse, dans la durée, et putain le désert de semblables pareillement engagés, toutes ces décennies !
Une honte. Mais exprimer telle quelle cette colère justifiée serait... une honte pour moi. Et regarde : si je le faisais, ça voudrait dire que je privilégie mon égo au sens où tu en parles. Un discours public de ce type reviendrait à poser, "Vous n'êtes rien, vous êtes des loques, il n'y a qu'un Je fondé à parler ici, et je vous fustige éloquemment parce que vous le méritez". (Pour le tenir réellement, devant une large audience, il faudrait être "fou". Nietzsche ne l'était heureusement pas assez. Il a sublimé en le tenant "en littérature", en produisant un poème philosophique existentiel unique.)
Cette colère doit être entretenue comme carburant intérieur, comme aiguillon me faisant ressentir, dans la durée, l'état des choses comme scandaleusement insupportable, de sorte que je ne cède jamais au découragement ni me démissionne.
Théoriquement, elle ne doit être exprimée que lorsqu'elle est entièrement maîtrisée, qu'elle sert un but dont la bienveillance pour autrui est la finalité et pas le but de faire surgir, pour le tribun, un puissant geyser de jouissance égotiste.
Je dis "théoriquement" parce cette démarche de se mettre en situation de pouvoir parler aux autres dans un souci de bien général aboutit logiquement, quand les choses sont prêtes, à une forme de discours qui ne peut plus être teintée de colère.
Le principe humain salvateur est prodigieusement limpide, et chaque être humain, chaque jour, doit ou devrait avoir le souci de ne jamais s'en déprendre : "Aime ton prochain comme toi-même" !
Il prime même sur le souci de vérité. Les "contorsions" morales intimes auxquelles cela peut obliger -- jusqu'à un certain point -- sont nécessaires. Nous sommes chacun dépositaires de ce trésor, de ces braises d'humanité pure qu'il ne faut pas laisser s'éteindre.
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Rapidement :
- Ça me paraît évidemment de l'ordre de la facilité mal avisée de réduire ma démarche de vie à du narcissisme suspect de déni et de refoulement. Les échanges que nous avons eus me paraissent caractériser 2 individus logiquement tenus, de façon similaire, par ce qui les agit et "gigotant" pour tenter de dépasser une part de ces déterminations.
- Dans l'ordre de ces déterminations, nos orientations ont largement à voir au départ avec ce dont nous ont nourri nos parents respectifs et "la différence est une richesse".
- Bien sûr que Descartes développe plein d'idées bien à côté de la plaque. Je ne m'exprimais, puisqu'on était parti à son sujet de "Je pense, donc je suis", que sur son grand oeuvre pleinement valide déjà cité. Dans la série de ses errements, tu as cité les "animaux-machines", moi je cite plus souvent la croyance en un esprit totalement clair à lui-même, n'ayant aucune notion de lapart subconsciente.
- Heureusement, à peine 30 ans après lui, celui qui met tout le monde d'accord en matière de philosophie existentielle reprend la matière de Descartes en la corrigeant. Au fil des ans, je me suis trouvé de plus en plus spinoziste, et si Nietzsche a en effet bien identifié une certaine identité de sa pensée avec le Béni, pour moi c'est un "gamin" touchant mais agité, à côté.
- J'ai été heureux de lire sous tes doigts l'admission que sans égo, il n'y a pas d'être humain pensant et agissant ; j'étais parti pour le souligner, sinon. D'où mes appels à la prudence dans le traitement qu'on envisage de lui infliger.
- Il est vrai que je n'ai pas testé les substances dont tu parles ; je m'exprimais sur la notion générique de "produit induisant un effet dissociatif".
- Enfin, pour revenir à "égo", la meilleure analyse qu'il m'ait été donné de lire à ce "sujet" est le livre qu'a publié le sociologue Jean-Claude Kaufmann et que je te recommande chaudement. Voici sa couverture, et puis une double page de l'avant-dernier chapitre sur "L'enveloppement de soi", qui mentionne brièvement les addictions de tous ordres.
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(PS : Comme la majorité des auteurs dans ce domaine, et comme je le fais moi-même, il utilise indifféremment "individualisation" (comme à la 7ème ligne de la page 250) et "individuation" pour désigner la même chose. Dans la distinction que tu as faite, c'est "individualisme", ou 'tendance à l'individualisme" qu'il conviendrait mieux d'opposer à "individuation" ou à "individualisation". Et d'ailleurs, le bouquin de Kaufmann est aussi un historique du processus d'individuation, c'est-à-dire la tendance historique, à mesure du développement civilisationnel, pour chaque individu, de se sentir et vouloir de plus en plus singulier, tenant de moins en moins son identité de sa fonction ou de son origine sociale)
oOo
Merci, GuyGeorges, de ton intervention. "Pas du tout ça" me semble excessif comme commentaire, et nous pourrons éventuellement approfondir la question quand tu seras intervenu plus substantiellement.