Procyon
Glandeuse Pinéale
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Yo,
Il y a quelques temps, mon meilleur pote a fait un très gros bad avec un blend de cannabinoïdes synthétiques, ça lui a permis de passer une journée pas des plus agréables aux urgences.
Évidemment après m'être renseigné sur ce blend, pas moyen de savoir quels cannabinoïdes étaient réellement présents à l'intérieur (le genre de truc déjà pas rassurant à la base...).
Après s'être remis de ce gros bad trip, il a rédigé un TR qu'il m'a demandé de publier sur Psychonaut pour avertir les potentiels consommateurs de ce truc. Mis à part cette petite introduction, c'est lui qui a écrit tout le texte qui va suivre, avec ses mots, ses connaissances, ses ressentis, ses peurs ; je n'ai rien modifié. Pas besoin de préciser que ce TR n'a rien d'apologique, et que mon pote a, depuis cette expérience, rallié mon point de vue sur les cannabinoïdes synthétiques, à savoir : jamais !
Bonne lecture.
Ce trip report portera sur un produit en particulier : le Mary Joy, un blend de cannabinoïdes synthétiques. A mes yeux, l’utilité du trip report réside plus dans la prévention de consommateur à consommateur que dans le partage de récits d’expériences plaisantes sous une drogue quelconque. C’est pourquoi j’ai décidé de poser sur papier et de partager mon infernal bad trip (mon tout premier, soit dit en passant) sous Mary Joy, afin d’avertir que ce produit est une vraie saleté, à ne surtout pas expérimenter. Ni un petit peu, ni entre amis, ni en bang : N’EN FUMEZ JAMAIS !
Le contexte
Il est midi passé, nous sommes avec des potes de ma classe devant notre école. L’ambiance est à la fête et à la légèreté : du soleil et plus que 3 heures cours cet après-midi, et pour une grande partie d’entre nous, nous sommes en vacances à la fin de la journée. Ce jour-là, j’avais suffisamment mangé et bu au cours de la journée et je n’étais pas spécialement malade ou fatigué. Comme à l’accoutumée depuis plusieurs mois maintenant, j’ai déjà fumé 2/3 joints de weed légèrement dosés au cours de la journée.
Une fois nos sandwichs terminés, Julien (prénom modifié) nous dit qu’il a reçu sa petite commande: 3 grammes de Mary Joy. A l’écouter, il s’agit d’un dérivé de cannabis cultivé à l’aide d’engrais chimiques, à doser bien plus légèrement qu’un joint ordinaire, et dont les effets sont immédiats et semblables à ceux de la weed, quoique plus puissants. Le produit se présentait sous la forme de cannabis le plus ordinaire qui soit.
La prise
Etant un usager très régulier de drogues depuis maintenant un peu plus d’un an (cannabis, psychédéliques variés, amphétamines, kétamine), cette « weed synthétique » (car peu importe ce que vous pourrez entendre concernant cette drogue, sachez que ce n’est rien de plus que cela) me paraissait totalement inoffensive au premier abord. Julien en roule donc un joint sur une petite feuille et l’allume. Nous étions 5 ou 6 en cercle, je fais remarquer que pour le nombre que nous étions, ça n’allait peut être pas suffire, mais Julien m’affirme qu’avec cette quantité, on rigolera bien pendant le cours à venir.
Le joint arrive jusqu’à moi, je tire trois taffes assez grosses que je garde un moment dans les poumons afin d’amplifier les effets. Un goût acre se fait sentir immédiatement, Julien me passe sa cannette d’Ice Tea, plusieurs gorgées ne font pas partir ce goût vraiment désagréable. Mes potes ayant fumé avant moi sur le joint sont immédiatement victimes d’un gros coup de barre, et s’assoient par terre en rigolant sous les effets du produit.
Le cosmos que t'as pas envie de visiter
En quinze secondes à peine après avoir fumé, mes jambes me lâchent, et je me retrouve assis par terre sur le trottoir avec les autres. Vous réciter dans l’ordre et clairement ce que je me souviens avoir vu, entendu, ressenti et imaginé à partir de cet instant est impossible, mais je vais faire de mon mieux.
Au début, tout semble embrumé, légèrement euphorique, ralenti mais une oppression certaine se faisait sentir. J’ai conscience d’être bien plus défoncé que mes potes, que c’est quand même moyen d’être assis par terre devant l’école où passent mes profs et d’autres élèves et que l’on risque tous d’être repérables en cours tant nous sommes défoncés, à rire bêtement. Juste histoire de m’auto rassurer, je demande à Juliette (prénom modifié) assise en face de moi combien de temps il nous reste avant de devoir aller en cours, qui me répond qu’il nous reste 20 minutes. A côté de moi, mon pote Jérôme (p. m.) dit « J’aime pas, j’aime pas du tout. »
Et c’est à partir de cette phrase que tout a commencé à vriller dans mon esprit. Le mal être est au début une sorte de paranoïa sociale (désolé, je ne vois pas d’autre terme), je suis mal pour mes potes qui n’apprécient pas leur défonce, je me dis que cette expérience commune va détruire notre amitié, que c’était une mauvaise idée, alors que tout autour de moi semble se détacher de la réalité pour se coincer entre deux niveaux de perception distincts : je regarde mes amis mais je ne les vois pas, je les écoute mais je ne les entends pas, je veux leur répondre mais je n’y arrive pas. Je suis comme éteint, refermé hermétiquement sur moi-même, mais tout ça contre ma volonté.
J’ai l’impression de tomber petit à petit dans un trou sans fond, des images et des sons s’apparentant plus à des flashs s’impriment sur mon cerveau, je crois réussir à les percevoir mais tout cela ne signifie rien pour moi, je ne sais pas ce que c’est car je ne fais plus partie intégrante de cette réalité. Julien et les autres me demandent si je vais bien, Juliette me regarde inquiète avec un air de « Je savais que ça allait finir comme ça. ». Je me souviens m’être dit que ce que je souhaite de plus cher à cet instant donné, plus que la dissolution du Front National, c’est de parler à mes potes qui me semblent être avec moi, de communiquer avec des éléments de cette réalité que j’aime, de leur dire de m’aider et de faire que cette défonce absolument pas agréable s’arrête.
Le plus angoissant, c’était ça : perdre pied avec la réalité tout en ayant l’impression d’être éveillé et de le vivre. Mes potes essaient de me relever, continuent de me demander comment je vais, alors que je suis incapable de communiquer ou de prendre n’importe quelle décision qui soit. Et c’est à partir de là que je crois, aux dires des présentes personnes, avoir commencé à m’évanouir, convulser et vomir, car je ne me souviens que de très rares images.
Le souvenir que j’ai de la suite s’apparente à une déambulation infernale et sans fin, à voguer entre la douleur, l’angoisse et la peur. Je suis maintenant coincé dans une dimension dont le décor s’apparente à ce que l’on pourrait appeler le néant, je souffre, j’ai mal, ça me déchire, je veux que ça s’arrête, je ne sais pas ce que c’est ou d’où ça provient, mais je veux que ça s’arrête. Je chute sans fin, des gargouilles sorties des abysses de l’immondice sont là pour me tourmenter encore et encore. C’est comme si tout ce que j’avais fait de mauvais pour les autres et pour moi-même au cours de ma courte vie m’était infligé, comme une sanction que l’on n’a pas le droit de contredire. Je suis noyé sous un tsunami de noirceur et à présent, plus jamais je ne pourrais remettre la tête en dehors de l’eau. Pourquoi je ne peux pas retrouver ma vie d’avant ?
Un autre déchirement, se rapportant probablement à mes vomissements. Ca y’est, c’est la fin, je vais mourir. Mourir ? La notion de mort ne me vient à l’esprit que maintenant, alors que pourtant, c’est ce dont je suis le plus proche en terme de ressentis (non pas que je prétende avoir effleuré la mort physiquement, mais plutôt psychologiquement). Pour ne pas mourir, il faut sortir de cet univers. Pour sortir de cet univers, il faut se raccrocher à des choses réelles et terrestres.
Et à cet instant, j’entends la voix du directeur, mes potes inquiets et des bruits de machines médicales. La mort squattant encore mon esprit à ce moment donné fait se projeter une vision absolument horrible : le bruit des machines médicales, c’est parce que je suis dans une chambre d’hôpital, rongé et dévoré par cette saloperie que j’ai fumé, inconscient, aveugle, à moitié sourd, l’organisme gangrené. Je vais mourir, c’est certain. Je ne suis plus humain, je suis une masse rosâtre, sanguinolente se recroquevillant sur elle-même. Mes parents, mon frère, ma sœur et mes deux meilleurs amis sont là, ils pleurent. Je pleure aussi, et je leur demande pardon. Pardon, mille fois pardon. Pour vous et pour moi, plus jamais de cette merde, Ô grand Dieu plus jamais.
Le retour à la réalité
La douleur commence à s’estomper, je crois me détendre, mais je préfère garder les yeux fermés pour le moment. Ca y’est, c’est terminé, le cauchemar a pris fin et c’est maintenant la douce réalité qui prévaut. Je suis allongé, aucune idée d’où est ce que je peux bien me trouver, mais peu importe, tout plutôt que ce que je viens de visiter. J’entends quelqu’un me demander si je suis V.R. (mes initiales), et si j’habite bien à M. (nom de ma ville). « Oui ! » je hurle « Oui, chez mes parents ! ». Quel soulagement de pouvoir le dire, de pouvoir parler, entendre, de se rendre compte que le monde réel est toujours là.
Je suis encore bien dans le gaz, mais avec du recul, les effets que j’ai pu ressentir à partir de là s’apparentent à une défonce au cannabis à peu près normale. Toujours les yeux fermés, j’entends des voix d’hommes autour, 3 ou 4. Elles sont rassurantes, pas paniquées (du moins, il me semble). Même si je ne connais pas les propriétaires de ces voix, je peux leur faire confiance.
Il me faut quelque chose. De la musique. Oui, ça pourrait m’aider à me concentrer sur autre chose et à visualiser d’autres univers que je connais et dans lesquels je me plais à me réfugier, seul ou à plusieurs. Je demande aux personnes qui sont autour de moi si elles peuvent chanter quelque chose. L’air qui parvient à mes oreilles sonne faux, mal callé, je ne le connais pas, mais il est apaisant et n’importe quelle sorte de douceur serait bonne à prendre de toute manière. Un peu comme quand l’on veut manger un bout de pain pour faire passer le goût amer du médicament.
J’ouvre les yeux, et je reconnais sans difficulté l’endroit où je suis : dans un camion de pompiers, devant mon école. Je suis en PLS sur le côté droit, les pieds attachés à un brancard. J’essaye de remuer un à un mes membres. Et tout à coup, une douleur aigue se fait sentir dans mon bras gauche, j’ai l’impression qu’il gonfle et va exploser. Je hurle, je supplie les pompiers de faire quelque chose. Un d’eux m’affirme que mon bras va bien, et m’aide à le laisser étendu le long de mon corps. Quelques courtes minutes après, tout revint à la normale.
Un goût immonde se fait sentir dans ma bouche. En voyant de nombreuses traces sur mon pull, il ne me faut pas longtemps pour comprendre que je me suis élégamment gerbé dessus. Et que j’ai encore envie de vomir. Donnez-moi un sac plastique rapidement sinon il va arriver quelque chose de franchement pas rigolo à votre camion. Jamais un vomissement ne m’a fait autant de bien ou ne m’a autant donné l’impression de me purger, de me libérer. Merci messieurs, j’adore ce que vous faites ! L’un d’entre eux me demande ce qu’il m’est arrivé, je leur explique et me traite d’idiot moi-même en leur expliquant que mon meilleur ami (propriétaire de ce compte Psychonaut) m’avait averti sur les dangers de cette drogue.
L’un d’entre eux, le conducteur je crois, demande à quel hôpital il faut aller. Je leur demande si c’est possible d’aller à l’hôpital G… B…, car ce dernier est sur la ligne de métro me permettant de rentrer chez moi. Ça me soulage de parler de toutes ces choses concrètes du quotidien. En parlant de ça, où sont mes affaires ? Mon sac ? Il est au bout du brancard, avec le pull de Victor (p.m.). C’est vrai que j’étais avec mes potes au début. Il faudra que je les appelle, ils doivent être inquiets. J’ai l’impression de revenir de tellement loin, tout est encore un peu abstrait. Mais c’est fini, et bien fini.
Tout s’est à présent arrangé, j’ai eu de la chance de ne pas avoir la moindre séquelle et de ne pas devoir subir la moindre sanction de la part de mon école. Quoi qu’il en soit, je tiens à ré insister sur le danger de cette drogue. Les quantités que nous avons fumées étaient très légères et pourtant, nous nous sommes tous plus ou moins sentis mal. Je n’ose même pas imaginer ce qu’il aurait pu en advenir si nous l’avions fumé avec un bang par exemple.
Et puis de toute manière, entre un OGM et un produit Bio, le choix est vite vu non ?
Il y a quelques temps, mon meilleur pote a fait un très gros bad avec un blend de cannabinoïdes synthétiques, ça lui a permis de passer une journée pas des plus agréables aux urgences.
Évidemment après m'être renseigné sur ce blend, pas moyen de savoir quels cannabinoïdes étaient réellement présents à l'intérieur (le genre de truc déjà pas rassurant à la base...).
Après s'être remis de ce gros bad trip, il a rédigé un TR qu'il m'a demandé de publier sur Psychonaut pour avertir les potentiels consommateurs de ce truc. Mis à part cette petite introduction, c'est lui qui a écrit tout le texte qui va suivre, avec ses mots, ses connaissances, ses ressentis, ses peurs ; je n'ai rien modifié. Pas besoin de préciser que ce TR n'a rien d'apologique, et que mon pote a, depuis cette expérience, rallié mon point de vue sur les cannabinoïdes synthétiques, à savoir : jamais !
Bonne lecture.
Ce trip report portera sur un produit en particulier : le Mary Joy, un blend de cannabinoïdes synthétiques. A mes yeux, l’utilité du trip report réside plus dans la prévention de consommateur à consommateur que dans le partage de récits d’expériences plaisantes sous une drogue quelconque. C’est pourquoi j’ai décidé de poser sur papier et de partager mon infernal bad trip (mon tout premier, soit dit en passant) sous Mary Joy, afin d’avertir que ce produit est une vraie saleté, à ne surtout pas expérimenter. Ni un petit peu, ni entre amis, ni en bang : N’EN FUMEZ JAMAIS !
Le contexte
Il est midi passé, nous sommes avec des potes de ma classe devant notre école. L’ambiance est à la fête et à la légèreté : du soleil et plus que 3 heures cours cet après-midi, et pour une grande partie d’entre nous, nous sommes en vacances à la fin de la journée. Ce jour-là, j’avais suffisamment mangé et bu au cours de la journée et je n’étais pas spécialement malade ou fatigué. Comme à l’accoutumée depuis plusieurs mois maintenant, j’ai déjà fumé 2/3 joints de weed légèrement dosés au cours de la journée.
Une fois nos sandwichs terminés, Julien (prénom modifié) nous dit qu’il a reçu sa petite commande: 3 grammes de Mary Joy. A l’écouter, il s’agit d’un dérivé de cannabis cultivé à l’aide d’engrais chimiques, à doser bien plus légèrement qu’un joint ordinaire, et dont les effets sont immédiats et semblables à ceux de la weed, quoique plus puissants. Le produit se présentait sous la forme de cannabis le plus ordinaire qui soit.
La prise
Etant un usager très régulier de drogues depuis maintenant un peu plus d’un an (cannabis, psychédéliques variés, amphétamines, kétamine), cette « weed synthétique » (car peu importe ce que vous pourrez entendre concernant cette drogue, sachez que ce n’est rien de plus que cela) me paraissait totalement inoffensive au premier abord. Julien en roule donc un joint sur une petite feuille et l’allume. Nous étions 5 ou 6 en cercle, je fais remarquer que pour le nombre que nous étions, ça n’allait peut être pas suffire, mais Julien m’affirme qu’avec cette quantité, on rigolera bien pendant le cours à venir.
Le joint arrive jusqu’à moi, je tire trois taffes assez grosses que je garde un moment dans les poumons afin d’amplifier les effets. Un goût acre se fait sentir immédiatement, Julien me passe sa cannette d’Ice Tea, plusieurs gorgées ne font pas partir ce goût vraiment désagréable. Mes potes ayant fumé avant moi sur le joint sont immédiatement victimes d’un gros coup de barre, et s’assoient par terre en rigolant sous les effets du produit.
Le cosmos que t'as pas envie de visiter
En quinze secondes à peine après avoir fumé, mes jambes me lâchent, et je me retrouve assis par terre sur le trottoir avec les autres. Vous réciter dans l’ordre et clairement ce que je me souviens avoir vu, entendu, ressenti et imaginé à partir de cet instant est impossible, mais je vais faire de mon mieux.
Au début, tout semble embrumé, légèrement euphorique, ralenti mais une oppression certaine se faisait sentir. J’ai conscience d’être bien plus défoncé que mes potes, que c’est quand même moyen d’être assis par terre devant l’école où passent mes profs et d’autres élèves et que l’on risque tous d’être repérables en cours tant nous sommes défoncés, à rire bêtement. Juste histoire de m’auto rassurer, je demande à Juliette (prénom modifié) assise en face de moi combien de temps il nous reste avant de devoir aller en cours, qui me répond qu’il nous reste 20 minutes. A côté de moi, mon pote Jérôme (p. m.) dit « J’aime pas, j’aime pas du tout. »
Et c’est à partir de cette phrase que tout a commencé à vriller dans mon esprit. Le mal être est au début une sorte de paranoïa sociale (désolé, je ne vois pas d’autre terme), je suis mal pour mes potes qui n’apprécient pas leur défonce, je me dis que cette expérience commune va détruire notre amitié, que c’était une mauvaise idée, alors que tout autour de moi semble se détacher de la réalité pour se coincer entre deux niveaux de perception distincts : je regarde mes amis mais je ne les vois pas, je les écoute mais je ne les entends pas, je veux leur répondre mais je n’y arrive pas. Je suis comme éteint, refermé hermétiquement sur moi-même, mais tout ça contre ma volonté.
J’ai l’impression de tomber petit à petit dans un trou sans fond, des images et des sons s’apparentant plus à des flashs s’impriment sur mon cerveau, je crois réussir à les percevoir mais tout cela ne signifie rien pour moi, je ne sais pas ce que c’est car je ne fais plus partie intégrante de cette réalité. Julien et les autres me demandent si je vais bien, Juliette me regarde inquiète avec un air de « Je savais que ça allait finir comme ça. ». Je me souviens m’être dit que ce que je souhaite de plus cher à cet instant donné, plus que la dissolution du Front National, c’est de parler à mes potes qui me semblent être avec moi, de communiquer avec des éléments de cette réalité que j’aime, de leur dire de m’aider et de faire que cette défonce absolument pas agréable s’arrête.
Le plus angoissant, c’était ça : perdre pied avec la réalité tout en ayant l’impression d’être éveillé et de le vivre. Mes potes essaient de me relever, continuent de me demander comment je vais, alors que je suis incapable de communiquer ou de prendre n’importe quelle décision qui soit. Et c’est à partir de là que je crois, aux dires des présentes personnes, avoir commencé à m’évanouir, convulser et vomir, car je ne me souviens que de très rares images.
Le souvenir que j’ai de la suite s’apparente à une déambulation infernale et sans fin, à voguer entre la douleur, l’angoisse et la peur. Je suis maintenant coincé dans une dimension dont le décor s’apparente à ce que l’on pourrait appeler le néant, je souffre, j’ai mal, ça me déchire, je veux que ça s’arrête, je ne sais pas ce que c’est ou d’où ça provient, mais je veux que ça s’arrête. Je chute sans fin, des gargouilles sorties des abysses de l’immondice sont là pour me tourmenter encore et encore. C’est comme si tout ce que j’avais fait de mauvais pour les autres et pour moi-même au cours de ma courte vie m’était infligé, comme une sanction que l’on n’a pas le droit de contredire. Je suis noyé sous un tsunami de noirceur et à présent, plus jamais je ne pourrais remettre la tête en dehors de l’eau. Pourquoi je ne peux pas retrouver ma vie d’avant ?
Un autre déchirement, se rapportant probablement à mes vomissements. Ca y’est, c’est la fin, je vais mourir. Mourir ? La notion de mort ne me vient à l’esprit que maintenant, alors que pourtant, c’est ce dont je suis le plus proche en terme de ressentis (non pas que je prétende avoir effleuré la mort physiquement, mais plutôt psychologiquement). Pour ne pas mourir, il faut sortir de cet univers. Pour sortir de cet univers, il faut se raccrocher à des choses réelles et terrestres.
Et à cet instant, j’entends la voix du directeur, mes potes inquiets et des bruits de machines médicales. La mort squattant encore mon esprit à ce moment donné fait se projeter une vision absolument horrible : le bruit des machines médicales, c’est parce que je suis dans une chambre d’hôpital, rongé et dévoré par cette saloperie que j’ai fumé, inconscient, aveugle, à moitié sourd, l’organisme gangrené. Je vais mourir, c’est certain. Je ne suis plus humain, je suis une masse rosâtre, sanguinolente se recroquevillant sur elle-même. Mes parents, mon frère, ma sœur et mes deux meilleurs amis sont là, ils pleurent. Je pleure aussi, et je leur demande pardon. Pardon, mille fois pardon. Pour vous et pour moi, plus jamais de cette merde, Ô grand Dieu plus jamais.
Le retour à la réalité
La douleur commence à s’estomper, je crois me détendre, mais je préfère garder les yeux fermés pour le moment. Ca y’est, c’est terminé, le cauchemar a pris fin et c’est maintenant la douce réalité qui prévaut. Je suis allongé, aucune idée d’où est ce que je peux bien me trouver, mais peu importe, tout plutôt que ce que je viens de visiter. J’entends quelqu’un me demander si je suis V.R. (mes initiales), et si j’habite bien à M. (nom de ma ville). « Oui ! » je hurle « Oui, chez mes parents ! ». Quel soulagement de pouvoir le dire, de pouvoir parler, entendre, de se rendre compte que le monde réel est toujours là.
Je suis encore bien dans le gaz, mais avec du recul, les effets que j’ai pu ressentir à partir de là s’apparentent à une défonce au cannabis à peu près normale. Toujours les yeux fermés, j’entends des voix d’hommes autour, 3 ou 4. Elles sont rassurantes, pas paniquées (du moins, il me semble). Même si je ne connais pas les propriétaires de ces voix, je peux leur faire confiance.
Il me faut quelque chose. De la musique. Oui, ça pourrait m’aider à me concentrer sur autre chose et à visualiser d’autres univers que je connais et dans lesquels je me plais à me réfugier, seul ou à plusieurs. Je demande aux personnes qui sont autour de moi si elles peuvent chanter quelque chose. L’air qui parvient à mes oreilles sonne faux, mal callé, je ne le connais pas, mais il est apaisant et n’importe quelle sorte de douceur serait bonne à prendre de toute manière. Un peu comme quand l’on veut manger un bout de pain pour faire passer le goût amer du médicament.
J’ouvre les yeux, et je reconnais sans difficulté l’endroit où je suis : dans un camion de pompiers, devant mon école. Je suis en PLS sur le côté droit, les pieds attachés à un brancard. J’essaye de remuer un à un mes membres. Et tout à coup, une douleur aigue se fait sentir dans mon bras gauche, j’ai l’impression qu’il gonfle et va exploser. Je hurle, je supplie les pompiers de faire quelque chose. Un d’eux m’affirme que mon bras va bien, et m’aide à le laisser étendu le long de mon corps. Quelques courtes minutes après, tout revint à la normale.
Un goût immonde se fait sentir dans ma bouche. En voyant de nombreuses traces sur mon pull, il ne me faut pas longtemps pour comprendre que je me suis élégamment gerbé dessus. Et que j’ai encore envie de vomir. Donnez-moi un sac plastique rapidement sinon il va arriver quelque chose de franchement pas rigolo à votre camion. Jamais un vomissement ne m’a fait autant de bien ou ne m’a autant donné l’impression de me purger, de me libérer. Merci messieurs, j’adore ce que vous faites ! L’un d’entre eux me demande ce qu’il m’est arrivé, je leur explique et me traite d’idiot moi-même en leur expliquant que mon meilleur ami (propriétaire de ce compte Psychonaut) m’avait averti sur les dangers de cette drogue.
L’un d’entre eux, le conducteur je crois, demande à quel hôpital il faut aller. Je leur demande si c’est possible d’aller à l’hôpital G… B…, car ce dernier est sur la ligne de métro me permettant de rentrer chez moi. Ça me soulage de parler de toutes ces choses concrètes du quotidien. En parlant de ça, où sont mes affaires ? Mon sac ? Il est au bout du brancard, avec le pull de Victor (p.m.). C’est vrai que j’étais avec mes potes au début. Il faudra que je les appelle, ils doivent être inquiets. J’ai l’impression de revenir de tellement loin, tout est encore un peu abstrait. Mais c’est fini, et bien fini.
Tout s’est à présent arrangé, j’ai eu de la chance de ne pas avoir la moindre séquelle et de ne pas devoir subir la moindre sanction de la part de mon école. Quoi qu’il en soit, je tiens à ré insister sur le danger de cette drogue. Les quantités que nous avons fumées étaient très légères et pourtant, nous nous sommes tous plus ou moins sentis mal. Je n’ose même pas imaginer ce qu’il aurait pu en advenir si nous l’avions fumé avec un bang par exemple.
Et puis de toute manière, entre un OGM et un produit Bio, le choix est vite vu non ?