Yo les psycho !
Je partage avec vous ma première vrai expérience avec les hallucinogènes, c’est une histoire qui commence à dater (été 2011), et si je n’en ai jamais vraiment parlé avant c’est tout simplement parce que ça a été la plus grosse connerie de ma vie, et qu’il n’y a pas grand-chose à en retirer… Mais j’ai récemment eu l’occasion de poser tout ça par écrit, alors autant partager ici :mrgreen: !
Le style est assez froid et direct, déjà parce que ça correspond assez à l'ambiance de l'expérience, et puis j'ai écris ça en vitesse pour un pote .
Le Set’n’setting de l’arrogance
Le setting était vraiment propre, on passait une semaine dans une maison d’un de nos pote paumée dans les Pyrénées ariègeoises, on était six dans la baraque, le cadre était vraiment splendide. La maison est à 30min du premier village, y’a pas de réseau ni de téléphone (ça sera important pour la suite ^^).
Dans l’idée on allait tripper à deux : Arthur et moi, tandis que les autres seraient là pour nous surveiller (je sais pas si on peut appeler ça des sitters, vu la substance lol). Ils étaient au courant que le délire pourrait durer plus d’une journée entière, ça les dérangeait pas. C’est fou d’ailleurs quand j’y repense : aujourd’hui je ne connais plus personne qui accepterait de faire ça…
L’expérience s’est déroulée il y a plus de cinq ans, difficile de se rappeler du set après tout ce temps, mais j’imagine que c’était une sorte d’inconscience teinté de l’arrogance d’un jeune de 17 ans, il faut en avoir gros (et être con) pour vouloir rencontrer la Datura en étant pleinement conscient des risques de l’histoire. C’était la seconde fois qu’on en prenait, on avait tous les deux survécu au trip d’avant, surtout car la dose avait été trop faible et on avait pas senti grand-chose à part une légère défonce.
On était vraiment consciencieux en plus, afin de « limiter » les risques (si tant est qu’on puisse limiter quelque chose avant cette plante…) on avait préparé une sorte de pommade qu’on devrait s’étaler sur le corps. L’idée étant que la scopolamine passe assez bien la peau, au contraire de l’atropine, donc on « limite » un peu les dégâts sur le cœur.
Je pense que si on avait pris une dose équivalente en oral on y serait resté, clairement.
Ascension
On commence à s’étaler notre pommade sur les avant-bras en début d’après-midi, ça pue et c’est gluant. Sur le coup la chose qui nous perturbait le plus était qu’on ne savait pas combien de temps il fallait la laisser. Aujourd’hui ce qui me choque le plus c’est surtout qu’on avait aucune idée de la quantité à appliquer lol, mais non ça ne perturbait personne…
Le temps commence à passer, les autres boivent des coups et jouent aux cartes, on est avec eux et l’ambiance est plutôt cool, personne ne se pose de réelles questions, on a longuement parlé avec les sitters la veille et ils pensent être prêt à nous gérer. Eheh attendez quelques heures les gars, c’est pas pour rien que cinq ans après vous vous rappellerez toujours de ce jour-là comme le pire de votre vie XD.
Au bout d’une heure je commence à avoir la gorge ultra sèche, j’ai beau boire comme un chameau rien n’y fait. Arthur est dans le même état et on est assez content de comprendre que la pommade fait effectivement effet. A ce moment-là on aurait peut-être pu échapper au pire en se nettoyant les avant-bras pour limiter la casse, mais on voulait vraiment voir ce que la Datura avait à proposer, alors on décide de laisser la pommade encore quelques temps.
Rapidement je commence à me sentir défoncé, une sensation assez étrange, très différente de ce que j’ai pu ressentir par la suite avec des psychés classiques ou même de la weed. Je sens mon cœur battre plus vite et plus fort, c’est assez désagréable et je flippe un peu, mon corps me fait mal, comme si chaque fibre qui me compose était intoxiquée. Au bout d’un moment j’ai des sortes de flashs noir qui clignotent pendant quelques secondes, c’est vraiment violent et je déteste rapidement ça… je sais que c’est normal et que c’est à cause du produit…
Attendez là…
C’est normal ?
Ça veut dire que j’ai volontairement consommé un produit en sachant parfaitement que ça allait me faire du mal ? Eh mais… eh mais on est débile ou quoi ?
Je réalise à quel point on a fait de la merde, je me relève et me jette dans la cuisine pour virer cette foutue pommade sous l’eau du robinet, je gueule à Arthur de faire la même.
Putain en plus c’est dégueulasse ici, y’a des cafards dans l’évier ! J’essaye de les chasser mais ils reviennent dès que j’arrête… Arthur arrive et je lui dis d’attendre qu’on ait viré les insectes avant de se rincer.
- Quels cafards ?
Je me prend toute la violence de sa réponse dans la gueule : il n’y a pas de cafards, on a fait de la merde, et on l’a bien fait…
Je replonge mon regard dans l’évier, en effet il n’y a rien…
On retourne dehors avec les autres, j’ai du mal à marcher, en fait je marche mais c’est pas moi qui contrôle vraiment tout. C’est comme si j’avais dit à mon corps d’aller sur la terrasse et qu’il s’exécutait tout seul.
Je dis à mes potes que ça va pas, qu’on risque de prendre méga cher, qu’il faut qu’ils soient prêts à nous assumer. Je passe un bon moment à m’excuser pour les avoir entrainés là-dedans, jusqu’à ce que ça saoule l’un d’entre eux et qu’il me dise que c’est bon, ils ont captés, ils vont faire gaffe, là je suis juste relou pour rien.
J’essaye de jouer aux cartes avec eux, mais ça devient très chaud, ma mémoire immédiate part en couille, j’arrive plus à tenir un raisonnement cohérent, j’ai des idées cheloues qui m’apparaissent comme évidentes avant de les oublier. Mais ça n’a rien à voir avec une pensée sous LSD, c’est vraiment des flashs qui me disent : « il faut ranger la table » ou « les amérindiens sont très petits ». Je partage certains de ces trucs aux autres, qui se marrent allègrement.
Mais j’ai de plus en plus de mal à trouver ça étrange, plus ça monte et plus je perds le recul par rapport à ces pensées, je deviens une sorte de point de vue inconscient de mon propre esprit, j’ai de moins en moins de contrôle.
Arthur fume un joint, il me le passe, la fumée que j’aspire semble ressortir par ses oreilles. Un pote nous demande ce qu’on branle à faire semblant de fumer, à cet instant le joint disparait de mes mains, c’est pas grave : Arthur en rallume un autre et me le donne. Le truc disparait et réapparait, il change de main, un coup main droite un coup main gauche, je dois jouer à chasse taupe pour arriver à tirer dessus.
L’air est rempli de moustiques, ils sont fixes et forment une sorte de quadrillage mathématique autour de moi. J’essaye de les chasser de la main, mais ça ne marche pas, je passe au travers… je demande aux autre de m’aider mais ils me regardent avec un air bizarre, je leur dis que c’est pas cool d’avoir ramené des moustiques pile aujourd’hui…
Descente aux enfers
Là je commence à avoir de sérieux trous de mémoires, il s’est surement passé beaucoup plus de trucs dans ma tête mais je me rappelle de pas grand-chose aujourd’hui…
On continue de fumer des joints imaginaires avec Arthur, mon esprit est vraiment brouillé au possible, je comprends plus rien de ce qu’il se passe autour de moi.
Un de mes pote vient et me dit que je fume mal, que je n’aspire pas bien la fumée, que c’est pour ça que ça ne me fait rien. Je m’énerve un peu et lui dis que je sais ce que je fais, qu’il m’emmerde, on commence à s’engueuler sévère.
Deux autres potes arrivent et me demandent ce que je branle, je leur dis que Michael me fait chier, ils me répondent que Michael est parti acheter des trucs au village depuis dix minutes, que je parle dans le vide… je regarde autour de moi, plus de Michael…
Après trente secondes j’oublie ce qu’ils m’ont dit, et je recommence à fumer mon joint. Attend pourquoi je fume un joint moi ? Je ne fume presque jamais d’habitude, c’est complètement con ! Je regarde Artur, il essaye de toucher un truc dans le ciel, il parle à voix basse, je comprends pas ce qu’il dit.
Je regarde le ciel et je tombe sur de grands oiseaux qui volent en essaims, comme des nuages de chauves-souris. Eh mais non, c’est trop gros pour être des oiseaux ça, en plus ils ont des plumes rouges, y’a pas ça à notre époque dans les Pyrénées… Eh ouais ça doit être des oiseaux préhistoriques, un truc dans le style, c’est bon ça me parait clair.
Je demande à Arthur ce qu’il en pense, pour toute réponse il me tend sa main vide, comme s’il tenait un bédo et voulait me le passer.
Je commence à avoir mal aux yeux, la lumière m’agresse, je rentre donc dans la maison et me pose sur le canapé. A ce moment j’ai vraiment l’impression d’être dans un rêve, tout est trouble, le monde tangue comme sous alcool, je comprends rien à ce qu’il se passe, mais en même temps je ne saurais pas vraiment dire ce qu’il ne va pas, c’est vraiment une impression très très chelou.
Je suis dans le hall d’attente d’une gare.
Je me tourne vers le gars à ma droite, je lui demande quand est ce que le banquier arrive, il me répond des trucs bizarres mais ça ne me dérange pas, je commence à pas mal parler avec lui (je me rappelle pas de grand-chose). La gare est dégueulasse, il y a des insectes partout, ça grouilles, les gens autour de moi sont sales, je me sens très mal.
Je suis de retour sur mon canapé, je commence à parler à un pote, je comprends pas ses réponses, je m’en fou et je continue à parler dans le vide.
Il finit par se barrer, mais dès qu’il se lève du canapé il est remplacé par un autre qui s’assoit à sa place et je continue mon discours. Le cycle recommence un paquet de fois.
Je reviens dans la gare, le sol est de plus en plus horrible, on dirait que les dalles sont faites en os fossilisés et que les murs sont des empilements de crânes (en mode catacombes).
Tout d’un coup le plafond s’écroule, et des milliers d’insectes et d’araignées tombent sur le sol, ça grouille dans tous les sens, ça commence à me grimper dessus, je crois que je cris et que je me mets à courir.
J’ai un flash : je suis à quatre pattes dans le salon, je me sens hyper mal, qu’est-ce que je fous là bordel ?? Je regarde autour de moi et je vois des gens morts par terre, je vois Arthur et Kevin avec des crânes à la place du visage, des araignées pendent du plafond.
Je suis atteint par un semblant de lucidité, qu’est ce qu’il se passe ici merde ? Mais à aucun moment je repense à la datura. Au bout de quelques secondes je perds le truc et me remet à chasser les moustiques.
Torture et enfers
A partir de là je n’ai que des bribes de mémoires, j’ai très peu de restes de ce qu’il s’est passé durant les 7 ou 8 heures qui ont suivies.
Je me rappelle vaguement avoir alterné à l’infinie entre une gare, un plateau de cinéma, ma cuisine, un hôpital et le salon dans lequel je me trouvais.
Il y a une scène qui est restée par contre : je me trouvais sur ce plateau de cinéma chelou, et mon boulot était de ranger le truc pour préparer la scène suivante. Je devais donc jeter les cadavres qui s’y trouvaient dans une sorte de grosse benne à ordure. C’était ultra pénible à faire, les cadavres pesaient super lourd et se bloquaient sur le matos du studio.
Au bout d’un moment je vois des sortes de formes humanoïdes noires qui me regardent faire, puis elles me crient dessus, elles me disent que je fais mal mon travail, que je fais n’importe quoi. Alors j’essaie de m’appliquer de ne pas heurter trop les murs avec les cadavres, mais ça ne leur convient pas, elles me hurlent dessus, je ne comprends rien.
Je me souviens ensuite être dans un hôpital, j’ai mal, et ces démons sont encore là, je suis attaché sur le lit, je ne peux pas bouger, leurs bras sortent du lit et m’empoignent à l’infini dans un cauchemar sans fin. J’essaie de me débattre mais ça ne sert à rien, ils me font boire leurs potions, je la recrache mais ils reviennent encore et encore, toujours plus nombreux.
J’ai vraiment très peu de souvenirs de ces heure-là, juste quelques flashs qui me reviennent parfois. Mais les seules sensations que j’en ai gardées sont un vide total de sens, et une grande souffrance mentale et physique, l’impression d’être humilié à l’infini.
Retour sur Terre ?
J’ouvre les yeux
Je suis dans une chambre, sur un lit, des araignées grouillent sur le plafond et je suis toujours ultra défoncé, mais je ressens une sensation de lucidité que j’avais oubliée. J’essaie en vain de bouger, quelque chose me bloque.
A ce moment je me rends compte d’une douleur ENORME dans toutes les fibres de mon corps, j’ai mal partout, ma gorge et mes yeux sont des déserts arides, je ne me suis jamais senti aussi mal de ma vie…
Je tourne la tête et me rend compte que si je n’arrive pas à bouger c’est parce que je suis attaché au lit avec des cordes. Attend… quoi ? C’est quoi ce bordel ?!
Les cordes clignotent et se transforment en gros vers de terre qui m’enserrent, je vois encore ces silhouettes noires dans la chambre.
Je cris : A BOIRE BORDEL !!
Kevin rentre dans la chambre
K – Tisalut ? T’es là ?
T – Mais oui putain, c’est quoi ce merdier ??
K – Pardon ? C’est à toi de nous le dire mec, tu te rends compte de ce que t’as fait ?
Je prends soudainement conscience d’un truc : je suis au milieu d’un trip à la datura ! Oh putain qu’est-ce que j’ai foutu ??
Voici le récit qu’il me fait rapidement (il sera complété après le trip par les autres) :
J’ai commencé à vouloir faire la vaisselle dans la cuisine, j’ai lavé des assiettes déjà propres pendant une bonne demi-heure avant de décider que le sol était infecté de cafard, et qu’il fallait donc passer le balai. J’ai balayé toute la maison plusieurs fois, le sol, les murs, le plafond… puis tout à coup j’ai commencé à prendre une chaine et la balancer dans la cheminée (éteinte), en disant qu’il fallait nettoyer le plateau de tournage. Puis j’ai commencé à essayer de mettre toutes les chaises dans la cheminée, je les trainais dans la maison, dans les escaliers, j’ai défoncé un coin de mur et j’ai pété le pied d’une chaine en la balançant dans l’escalier.
Les autres ont essayé de m’arrêter, mais je n’entendais rien, ils ont ultra flippé sur le coup. Ils ont essayé de me forcer, m’obliger à m’assoir, mais j’ai commencé à me débattre en criant et j’ai foutu une droite à Michael, ils ont du s’y mettre à tous les quatre pour me maitriser et… m’attacher sur le lit… pourtant j’étais vraiment pas costaud à l’époque lol.
Là c’est la version longue complétée par un récit au calme deux jours après, sur le coup Kevin me raconte ça à l’arrache en me détachant. Je lui demande l’heur : il est trois heures du mat, ça fait plus de 12h que je trippe…
K – Bon c’est bien beau tout ça, mais maintenant que t’es calmé tu vas nous aider à trouver Arthur.
T – Pardon ?
K – Quand t’as commencé à faire de la grosse merde on a décidé de garder un œil sur lui, mais on a du te calmer à quatre, et il s’est barré à ce moment-là, on sait pas où il est, ça fait trois heures maintenant…
Les larmes me montent aux yeux au moment où il me dit ça, je me prends toute l’horreur de la situation en pleine gueule.
Je rouvre les yeux dans une gare.
Je suis un inconnu, il m’entraine sur les quais, il me dit qu’on a pas beaucoup de temps, je me rappelle de rien de plus.
Promenons-nous dans les bois
J’ai encore de gros trous de mémoire, je sais qu’on est sorti avec Kevin pour aider les autres à retrouver Artur, mais j’étais pas du tout clair dans ma tête. Je me rappelle que Kevin pensait que c’était terminé pour moi, et il me faisait confiance. Mais je repassais régulièrement dans mon monde alternatif, et il ne s’en rendait pas compte.
Je suis dans la foret, seul. Une chose me surprend : j’y vois assez bien alors que je n’ai pas de lampe torche. Je n’ai aucune idée de ce que je fais ici, je crois que je dois chercher quelque chose mais je ne sais pas quoi. La foret est pleine de monstres, je les vois entre les arbres, ils me regardent et parlent entre eux.
Plusieurs fois j’ai des flashs de lucidité, ce sont les moments les plus terribles : je me rappelle tout à coup de presque tout ce qu’on m’a dit, je suis sous datura, Arthur est perdu, j’ai fait de la merde, et… et je suis tout seul ?
Je pleure, je ne sais pas où aller, j’ai encore des visions d’insectes un peu partout, j’ai peur, je veux rentrer, je cours en criant le nom de mes amis. Je suis encore méga éclaté, je perds l’équilibre, je me cogne dans les arbres.
Et tout à coup je sens le brouillard remonter, je me sens repartir, je sais que je vais retourner dans mon monde.
Je recommence à marcher à quatre patte en bredouillant au milieu des monstres.
Je me rappelle avoir eu au moins quatre fois ce schéma de lucidité partielle qui repart ensuite dans le trip, mais si ça se trouve ça s’est produit bien plus souvent.
Au milieu d’un moment de lucidité je fini par entendre la voix de Michael au loin, il m’entend aussi ! Il me rejoint, il est bleu de peur, je le supplie de me ramener à la maison, je lui explique que Kevin a cru que s’était fini pour moi mais que c’est tout l’inverse, que je peux replonger dans quelques secondes.
Lente redescente
J’ai quasiment aucun souvenir de la journée qui a suivi. Apparemment Michael m’a retrouvé vers 5h du mat, j’ai donc passé à peu près deux heures tout seul dans la fôret (lol).
Ils ont finalement retrouvé Arthur vers 6h, roulé en boule sur le bord de la route pour aller au bled, heureusement que c’était l’été sinon il se serait tapé une sympathique hypothermie…
Arthur et moi avons passé toute la journée sur le canapé, il trippait constamment tandis que j’alternais entre des phases de trip et des phases de lucidité. J’ai zéro souvenir de ça, donc c’est mes potes qui m’ont fait le retour. J’avais des phases lucides qui duraient quelques minutes et qui survenaient toutes les deux ou trois heures. Apparemment je passais tout ce temps-là à boire et à pisser, et d’après eux je luttais constamment pour ne pas repartir.
Le premier souvenir qui me revient date du soir de la seconde journée, et je ne crois pas être retombé dans mon monde après ça, c’était donc 30h après la prise. J’ai passé la nuit sans pouvoir dormir, en regardant les cafards grouiller au plafond. J’ai réussi à trouver le sommeil en fin de matinée, après une quarantaine d’heure de délire… j’ai dormis 15h XD.
Le jour d’après j’étais vidé, incapable de bouger, j’avais mal partout, je voyais encore parfois des moustiques, Arthur était dans le même état. On avait tellement honte qu’on osait pas se parler pour raconter ce dont on se souvenait mdr.
Bilan
Finalement je me suis remis assez vite sur pied physiquement, ça m’a pas mal surpris d’ailleurs. Par contre je me suis tapé une mydriase monstrueuse jusqu’à la fin de la semaine, j’étais obligé de porter des lunettes de soleil pour éviter de me griller les yeux. Même chose pour Arthur.
Ce qui m’avait le plus choqué c’était la réaction de mes potes, parce qu’il faut bien avouer qu’ils ont fait n’importe quoi (enfin avant tout c’est surtout nous qui avions fait n’importe quoi). Ils n’ont pas voulu appeler la police pour retrouver Artur car pour cela il fallait descendre au village. La maison où nous étions était celle des parents de David, et tout le monde les connaissait au village, il ne pouvait pas envisager que tout le bled apprenne que des potes à David avait tapé un hallucinogène et s’étaient perdu dans les bois, ils ont clairement paniqué sans trop savoir quoi faire. J’aurais clairement pas fait mieux à leur place…
Ce délire a quand même eu des conséquences : ça a commencé par des flashs noir qui durent quelques secondes et qui se produisaient plusieurs fois par jour. Ça a commencé la semaine suivante et ça a bien duré six mois, la fréquence du truc allant en décroissant avec le temps.
Ensuite j’ai commencé à avoir des douleurs à la poitrine deux semaines après le trip, comme si mon cœur devenait une pierre et grossissait, au début je devais carrément arreter de respirer pour supporter la douleur. Ça se produisait plusieurs fois par jours durant une semaine, et puis ça a progressivement disparu en un mois. Mais durant trois ans j’ai eu cette douleur qui revenait de temps en temps, genre une fois par mois….
Ce qui est étonnant c’est que j’ai été assez peu marqué par ce trip, en fait tout le délire ressemblait tellement à un rêve que le souvenir n’a jamais été très vif, contrairement à certaines expériences avec l’acide.
Néanmoins ça a vachement orienté mes consommation : la datura a été le premier hallucinogène que j’ai consommé, et vu le bordel du truc ça nous a vachement calmé Arthur et moi. On a toujours essayé de faire gaffe à tout par la suite (avec plus ou moins de succès ^^).
Bon voilà, de toute façon tout le monde ici sait qu’il ne faut pas s’approcher de cette plante. Mais je le redis au cas où des gens passeraient par hasard dans le coin : DECONNEZ PAS PUTAIN ! On est vraiment passé à pas grand-chose de la grande faucheuse.
Je partage avec vous ma première vrai expérience avec les hallucinogènes, c’est une histoire qui commence à dater (été 2011), et si je n’en ai jamais vraiment parlé avant c’est tout simplement parce que ça a été la plus grosse connerie de ma vie, et qu’il n’y a pas grand-chose à en retirer… Mais j’ai récemment eu l’occasion de poser tout ça par écrit, alors autant partager ici :mrgreen: !
Le style est assez froid et direct, déjà parce que ça correspond assez à l'ambiance de l'expérience, et puis j'ai écris ça en vitesse pour un pote .
Le Set’n’setting de l’arrogance
Le setting était vraiment propre, on passait une semaine dans une maison d’un de nos pote paumée dans les Pyrénées ariègeoises, on était six dans la baraque, le cadre était vraiment splendide. La maison est à 30min du premier village, y’a pas de réseau ni de téléphone (ça sera important pour la suite ^^).
Dans l’idée on allait tripper à deux : Arthur et moi, tandis que les autres seraient là pour nous surveiller (je sais pas si on peut appeler ça des sitters, vu la substance lol). Ils étaient au courant que le délire pourrait durer plus d’une journée entière, ça les dérangeait pas. C’est fou d’ailleurs quand j’y repense : aujourd’hui je ne connais plus personne qui accepterait de faire ça…
L’expérience s’est déroulée il y a plus de cinq ans, difficile de se rappeler du set après tout ce temps, mais j’imagine que c’était une sorte d’inconscience teinté de l’arrogance d’un jeune de 17 ans, il faut en avoir gros (et être con) pour vouloir rencontrer la Datura en étant pleinement conscient des risques de l’histoire. C’était la seconde fois qu’on en prenait, on avait tous les deux survécu au trip d’avant, surtout car la dose avait été trop faible et on avait pas senti grand-chose à part une légère défonce.
On était vraiment consciencieux en plus, afin de « limiter » les risques (si tant est qu’on puisse limiter quelque chose avant cette plante…) on avait préparé une sorte de pommade qu’on devrait s’étaler sur le corps. L’idée étant que la scopolamine passe assez bien la peau, au contraire de l’atropine, donc on « limite » un peu les dégâts sur le cœur.
Je pense que si on avait pris une dose équivalente en oral on y serait resté, clairement.
Ascension
On commence à s’étaler notre pommade sur les avant-bras en début d’après-midi, ça pue et c’est gluant. Sur le coup la chose qui nous perturbait le plus était qu’on ne savait pas combien de temps il fallait la laisser. Aujourd’hui ce qui me choque le plus c’est surtout qu’on avait aucune idée de la quantité à appliquer lol, mais non ça ne perturbait personne…
Le temps commence à passer, les autres boivent des coups et jouent aux cartes, on est avec eux et l’ambiance est plutôt cool, personne ne se pose de réelles questions, on a longuement parlé avec les sitters la veille et ils pensent être prêt à nous gérer. Eheh attendez quelques heures les gars, c’est pas pour rien que cinq ans après vous vous rappellerez toujours de ce jour-là comme le pire de votre vie XD.
Au bout d’une heure je commence à avoir la gorge ultra sèche, j’ai beau boire comme un chameau rien n’y fait. Arthur est dans le même état et on est assez content de comprendre que la pommade fait effectivement effet. A ce moment-là on aurait peut-être pu échapper au pire en se nettoyant les avant-bras pour limiter la casse, mais on voulait vraiment voir ce que la Datura avait à proposer, alors on décide de laisser la pommade encore quelques temps.
Rapidement je commence à me sentir défoncé, une sensation assez étrange, très différente de ce que j’ai pu ressentir par la suite avec des psychés classiques ou même de la weed. Je sens mon cœur battre plus vite et plus fort, c’est assez désagréable et je flippe un peu, mon corps me fait mal, comme si chaque fibre qui me compose était intoxiquée. Au bout d’un moment j’ai des sortes de flashs noir qui clignotent pendant quelques secondes, c’est vraiment violent et je déteste rapidement ça… je sais que c’est normal et que c’est à cause du produit…
Attendez là…
C’est normal ?
Ça veut dire que j’ai volontairement consommé un produit en sachant parfaitement que ça allait me faire du mal ? Eh mais… eh mais on est débile ou quoi ?
Je réalise à quel point on a fait de la merde, je me relève et me jette dans la cuisine pour virer cette foutue pommade sous l’eau du robinet, je gueule à Arthur de faire la même.
Putain en plus c’est dégueulasse ici, y’a des cafards dans l’évier ! J’essaye de les chasser mais ils reviennent dès que j’arrête… Arthur arrive et je lui dis d’attendre qu’on ait viré les insectes avant de se rincer.
- Quels cafards ?
Je me prend toute la violence de sa réponse dans la gueule : il n’y a pas de cafards, on a fait de la merde, et on l’a bien fait…
Je replonge mon regard dans l’évier, en effet il n’y a rien…
On retourne dehors avec les autres, j’ai du mal à marcher, en fait je marche mais c’est pas moi qui contrôle vraiment tout. C’est comme si j’avais dit à mon corps d’aller sur la terrasse et qu’il s’exécutait tout seul.
Je dis à mes potes que ça va pas, qu’on risque de prendre méga cher, qu’il faut qu’ils soient prêts à nous assumer. Je passe un bon moment à m’excuser pour les avoir entrainés là-dedans, jusqu’à ce que ça saoule l’un d’entre eux et qu’il me dise que c’est bon, ils ont captés, ils vont faire gaffe, là je suis juste relou pour rien.
J’essaye de jouer aux cartes avec eux, mais ça devient très chaud, ma mémoire immédiate part en couille, j’arrive plus à tenir un raisonnement cohérent, j’ai des idées cheloues qui m’apparaissent comme évidentes avant de les oublier. Mais ça n’a rien à voir avec une pensée sous LSD, c’est vraiment des flashs qui me disent : « il faut ranger la table » ou « les amérindiens sont très petits ». Je partage certains de ces trucs aux autres, qui se marrent allègrement.
Mais j’ai de plus en plus de mal à trouver ça étrange, plus ça monte et plus je perds le recul par rapport à ces pensées, je deviens une sorte de point de vue inconscient de mon propre esprit, j’ai de moins en moins de contrôle.
Arthur fume un joint, il me le passe, la fumée que j’aspire semble ressortir par ses oreilles. Un pote nous demande ce qu’on branle à faire semblant de fumer, à cet instant le joint disparait de mes mains, c’est pas grave : Arthur en rallume un autre et me le donne. Le truc disparait et réapparait, il change de main, un coup main droite un coup main gauche, je dois jouer à chasse taupe pour arriver à tirer dessus.
L’air est rempli de moustiques, ils sont fixes et forment une sorte de quadrillage mathématique autour de moi. J’essaye de les chasser de la main, mais ça ne marche pas, je passe au travers… je demande aux autre de m’aider mais ils me regardent avec un air bizarre, je leur dis que c’est pas cool d’avoir ramené des moustiques pile aujourd’hui…
Descente aux enfers
Là je commence à avoir de sérieux trous de mémoires, il s’est surement passé beaucoup plus de trucs dans ma tête mais je me rappelle de pas grand-chose aujourd’hui…
On continue de fumer des joints imaginaires avec Arthur, mon esprit est vraiment brouillé au possible, je comprends plus rien de ce qu’il se passe autour de moi.
Un de mes pote vient et me dit que je fume mal, que je n’aspire pas bien la fumée, que c’est pour ça que ça ne me fait rien. Je m’énerve un peu et lui dis que je sais ce que je fais, qu’il m’emmerde, on commence à s’engueuler sévère.
Deux autres potes arrivent et me demandent ce que je branle, je leur dis que Michael me fait chier, ils me répondent que Michael est parti acheter des trucs au village depuis dix minutes, que je parle dans le vide… je regarde autour de moi, plus de Michael…
Après trente secondes j’oublie ce qu’ils m’ont dit, et je recommence à fumer mon joint. Attend pourquoi je fume un joint moi ? Je ne fume presque jamais d’habitude, c’est complètement con ! Je regarde Artur, il essaye de toucher un truc dans le ciel, il parle à voix basse, je comprends pas ce qu’il dit.
Je regarde le ciel et je tombe sur de grands oiseaux qui volent en essaims, comme des nuages de chauves-souris. Eh mais non, c’est trop gros pour être des oiseaux ça, en plus ils ont des plumes rouges, y’a pas ça à notre époque dans les Pyrénées… Eh ouais ça doit être des oiseaux préhistoriques, un truc dans le style, c’est bon ça me parait clair.
Je demande à Arthur ce qu’il en pense, pour toute réponse il me tend sa main vide, comme s’il tenait un bédo et voulait me le passer.
Je commence à avoir mal aux yeux, la lumière m’agresse, je rentre donc dans la maison et me pose sur le canapé. A ce moment j’ai vraiment l’impression d’être dans un rêve, tout est trouble, le monde tangue comme sous alcool, je comprends rien à ce qu’il se passe, mais en même temps je ne saurais pas vraiment dire ce qu’il ne va pas, c’est vraiment une impression très très chelou.
Je suis dans le hall d’attente d’une gare.
Je me tourne vers le gars à ma droite, je lui demande quand est ce que le banquier arrive, il me répond des trucs bizarres mais ça ne me dérange pas, je commence à pas mal parler avec lui (je me rappelle pas de grand-chose). La gare est dégueulasse, il y a des insectes partout, ça grouilles, les gens autour de moi sont sales, je me sens très mal.
Je suis de retour sur mon canapé, je commence à parler à un pote, je comprends pas ses réponses, je m’en fou et je continue à parler dans le vide.
Il finit par se barrer, mais dès qu’il se lève du canapé il est remplacé par un autre qui s’assoit à sa place et je continue mon discours. Le cycle recommence un paquet de fois.
Je reviens dans la gare, le sol est de plus en plus horrible, on dirait que les dalles sont faites en os fossilisés et que les murs sont des empilements de crânes (en mode catacombes).
Tout d’un coup le plafond s’écroule, et des milliers d’insectes et d’araignées tombent sur le sol, ça grouille dans tous les sens, ça commence à me grimper dessus, je crois que je cris et que je me mets à courir.
J’ai un flash : je suis à quatre pattes dans le salon, je me sens hyper mal, qu’est-ce que je fous là bordel ?? Je regarde autour de moi et je vois des gens morts par terre, je vois Arthur et Kevin avec des crânes à la place du visage, des araignées pendent du plafond.
Je suis atteint par un semblant de lucidité, qu’est ce qu’il se passe ici merde ? Mais à aucun moment je repense à la datura. Au bout de quelques secondes je perds le truc et me remet à chasser les moustiques.
Torture et enfers
A partir de là je n’ai que des bribes de mémoires, j’ai très peu de restes de ce qu’il s’est passé durant les 7 ou 8 heures qui ont suivies.
Je me rappelle vaguement avoir alterné à l’infinie entre une gare, un plateau de cinéma, ma cuisine, un hôpital et le salon dans lequel je me trouvais.
Il y a une scène qui est restée par contre : je me trouvais sur ce plateau de cinéma chelou, et mon boulot était de ranger le truc pour préparer la scène suivante. Je devais donc jeter les cadavres qui s’y trouvaient dans une sorte de grosse benne à ordure. C’était ultra pénible à faire, les cadavres pesaient super lourd et se bloquaient sur le matos du studio.
Au bout d’un moment je vois des sortes de formes humanoïdes noires qui me regardent faire, puis elles me crient dessus, elles me disent que je fais mal mon travail, que je fais n’importe quoi. Alors j’essaie de m’appliquer de ne pas heurter trop les murs avec les cadavres, mais ça ne leur convient pas, elles me hurlent dessus, je ne comprends rien.
Je me souviens ensuite être dans un hôpital, j’ai mal, et ces démons sont encore là, je suis attaché sur le lit, je ne peux pas bouger, leurs bras sortent du lit et m’empoignent à l’infini dans un cauchemar sans fin. J’essaie de me débattre mais ça ne sert à rien, ils me font boire leurs potions, je la recrache mais ils reviennent encore et encore, toujours plus nombreux.
J’ai vraiment très peu de souvenirs de ces heure-là, juste quelques flashs qui me reviennent parfois. Mais les seules sensations que j’en ai gardées sont un vide total de sens, et une grande souffrance mentale et physique, l’impression d’être humilié à l’infini.
Retour sur Terre ?
J’ouvre les yeux
Je suis dans une chambre, sur un lit, des araignées grouillent sur le plafond et je suis toujours ultra défoncé, mais je ressens une sensation de lucidité que j’avais oubliée. J’essaie en vain de bouger, quelque chose me bloque.
A ce moment je me rends compte d’une douleur ENORME dans toutes les fibres de mon corps, j’ai mal partout, ma gorge et mes yeux sont des déserts arides, je ne me suis jamais senti aussi mal de ma vie…
Je tourne la tête et me rend compte que si je n’arrive pas à bouger c’est parce que je suis attaché au lit avec des cordes. Attend… quoi ? C’est quoi ce bordel ?!
Les cordes clignotent et se transforment en gros vers de terre qui m’enserrent, je vois encore ces silhouettes noires dans la chambre.
Je cris : A BOIRE BORDEL !!
Kevin rentre dans la chambre
K – Tisalut ? T’es là ?
T – Mais oui putain, c’est quoi ce merdier ??
K – Pardon ? C’est à toi de nous le dire mec, tu te rends compte de ce que t’as fait ?
Je prends soudainement conscience d’un truc : je suis au milieu d’un trip à la datura ! Oh putain qu’est-ce que j’ai foutu ??
Voici le récit qu’il me fait rapidement (il sera complété après le trip par les autres) :
J’ai commencé à vouloir faire la vaisselle dans la cuisine, j’ai lavé des assiettes déjà propres pendant une bonne demi-heure avant de décider que le sol était infecté de cafard, et qu’il fallait donc passer le balai. J’ai balayé toute la maison plusieurs fois, le sol, les murs, le plafond… puis tout à coup j’ai commencé à prendre une chaine et la balancer dans la cheminée (éteinte), en disant qu’il fallait nettoyer le plateau de tournage. Puis j’ai commencé à essayer de mettre toutes les chaises dans la cheminée, je les trainais dans la maison, dans les escaliers, j’ai défoncé un coin de mur et j’ai pété le pied d’une chaine en la balançant dans l’escalier.
Les autres ont essayé de m’arrêter, mais je n’entendais rien, ils ont ultra flippé sur le coup. Ils ont essayé de me forcer, m’obliger à m’assoir, mais j’ai commencé à me débattre en criant et j’ai foutu une droite à Michael, ils ont du s’y mettre à tous les quatre pour me maitriser et… m’attacher sur le lit… pourtant j’étais vraiment pas costaud à l’époque lol.
Là c’est la version longue complétée par un récit au calme deux jours après, sur le coup Kevin me raconte ça à l’arrache en me détachant. Je lui demande l’heur : il est trois heures du mat, ça fait plus de 12h que je trippe…
K – Bon c’est bien beau tout ça, mais maintenant que t’es calmé tu vas nous aider à trouver Arthur.
T – Pardon ?
K – Quand t’as commencé à faire de la grosse merde on a décidé de garder un œil sur lui, mais on a du te calmer à quatre, et il s’est barré à ce moment-là, on sait pas où il est, ça fait trois heures maintenant…
Les larmes me montent aux yeux au moment où il me dit ça, je me prends toute l’horreur de la situation en pleine gueule.
Je rouvre les yeux dans une gare.
Je suis un inconnu, il m’entraine sur les quais, il me dit qu’on a pas beaucoup de temps, je me rappelle de rien de plus.
Promenons-nous dans les bois
J’ai encore de gros trous de mémoire, je sais qu’on est sorti avec Kevin pour aider les autres à retrouver Artur, mais j’étais pas du tout clair dans ma tête. Je me rappelle que Kevin pensait que c’était terminé pour moi, et il me faisait confiance. Mais je repassais régulièrement dans mon monde alternatif, et il ne s’en rendait pas compte.
Je suis dans la foret, seul. Une chose me surprend : j’y vois assez bien alors que je n’ai pas de lampe torche. Je n’ai aucune idée de ce que je fais ici, je crois que je dois chercher quelque chose mais je ne sais pas quoi. La foret est pleine de monstres, je les vois entre les arbres, ils me regardent et parlent entre eux.
Plusieurs fois j’ai des flashs de lucidité, ce sont les moments les plus terribles : je me rappelle tout à coup de presque tout ce qu’on m’a dit, je suis sous datura, Arthur est perdu, j’ai fait de la merde, et… et je suis tout seul ?
Je pleure, je ne sais pas où aller, j’ai encore des visions d’insectes un peu partout, j’ai peur, je veux rentrer, je cours en criant le nom de mes amis. Je suis encore méga éclaté, je perds l’équilibre, je me cogne dans les arbres.
Et tout à coup je sens le brouillard remonter, je me sens repartir, je sais que je vais retourner dans mon monde.
Je recommence à marcher à quatre patte en bredouillant au milieu des monstres.
Je me rappelle avoir eu au moins quatre fois ce schéma de lucidité partielle qui repart ensuite dans le trip, mais si ça se trouve ça s’est produit bien plus souvent.
Au milieu d’un moment de lucidité je fini par entendre la voix de Michael au loin, il m’entend aussi ! Il me rejoint, il est bleu de peur, je le supplie de me ramener à la maison, je lui explique que Kevin a cru que s’était fini pour moi mais que c’est tout l’inverse, que je peux replonger dans quelques secondes.
Lente redescente
J’ai quasiment aucun souvenir de la journée qui a suivi. Apparemment Michael m’a retrouvé vers 5h du mat, j’ai donc passé à peu près deux heures tout seul dans la fôret (lol).
Ils ont finalement retrouvé Arthur vers 6h, roulé en boule sur le bord de la route pour aller au bled, heureusement que c’était l’été sinon il se serait tapé une sympathique hypothermie…
Arthur et moi avons passé toute la journée sur le canapé, il trippait constamment tandis que j’alternais entre des phases de trip et des phases de lucidité. J’ai zéro souvenir de ça, donc c’est mes potes qui m’ont fait le retour. J’avais des phases lucides qui duraient quelques minutes et qui survenaient toutes les deux ou trois heures. Apparemment je passais tout ce temps-là à boire et à pisser, et d’après eux je luttais constamment pour ne pas repartir.
Le premier souvenir qui me revient date du soir de la seconde journée, et je ne crois pas être retombé dans mon monde après ça, c’était donc 30h après la prise. J’ai passé la nuit sans pouvoir dormir, en regardant les cafards grouiller au plafond. J’ai réussi à trouver le sommeil en fin de matinée, après une quarantaine d’heure de délire… j’ai dormis 15h XD.
Le jour d’après j’étais vidé, incapable de bouger, j’avais mal partout, je voyais encore parfois des moustiques, Arthur était dans le même état. On avait tellement honte qu’on osait pas se parler pour raconter ce dont on se souvenait mdr.
Bilan
Finalement je me suis remis assez vite sur pied physiquement, ça m’a pas mal surpris d’ailleurs. Par contre je me suis tapé une mydriase monstrueuse jusqu’à la fin de la semaine, j’étais obligé de porter des lunettes de soleil pour éviter de me griller les yeux. Même chose pour Arthur.
Ce qui m’avait le plus choqué c’était la réaction de mes potes, parce qu’il faut bien avouer qu’ils ont fait n’importe quoi (enfin avant tout c’est surtout nous qui avions fait n’importe quoi). Ils n’ont pas voulu appeler la police pour retrouver Artur car pour cela il fallait descendre au village. La maison où nous étions était celle des parents de David, et tout le monde les connaissait au village, il ne pouvait pas envisager que tout le bled apprenne que des potes à David avait tapé un hallucinogène et s’étaient perdu dans les bois, ils ont clairement paniqué sans trop savoir quoi faire. J’aurais clairement pas fait mieux à leur place…
Ce délire a quand même eu des conséquences : ça a commencé par des flashs noir qui durent quelques secondes et qui se produisaient plusieurs fois par jour. Ça a commencé la semaine suivante et ça a bien duré six mois, la fréquence du truc allant en décroissant avec le temps.
Ensuite j’ai commencé à avoir des douleurs à la poitrine deux semaines après le trip, comme si mon cœur devenait une pierre et grossissait, au début je devais carrément arreter de respirer pour supporter la douleur. Ça se produisait plusieurs fois par jours durant une semaine, et puis ça a progressivement disparu en un mois. Mais durant trois ans j’ai eu cette douleur qui revenait de temps en temps, genre une fois par mois….
Ce qui est étonnant c’est que j’ai été assez peu marqué par ce trip, en fait tout le délire ressemblait tellement à un rêve que le souvenir n’a jamais été très vif, contrairement à certaines expériences avec l’acide.
Néanmoins ça a vachement orienté mes consommation : la datura a été le premier hallucinogène que j’ai consommé, et vu le bordel du truc ça nous a vachement calmé Arthur et moi. On a toujours essayé de faire gaffe à tout par la suite (avec plus ou moins de succès ^^).
Bon voilà, de toute façon tout le monde ici sait qu’il ne faut pas s’approcher de cette plante. Mais je le redis au cas où des gens passeraient par hasard dans le coin : DECONNEZ PAS PUTAIN ! On est vraiment passé à pas grand-chose de la grande faucheuse.