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La dissociation (part1) - featuring la Petite Voix, Freud et Jamy

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Deleted-1

Guest
A la suite du travail de Ouroboros, j'ai voulu aller plus  loin dans  l'explication du phénomène de la dissociation (clivage) en  proposant  deux articles dédiés aux sujets. Le premier traite du concept  de clivage  en psychologie et psychanalyse, c'est à dire de la  dissociation au sein  de l'individu, et dans ses relations avec son  entourage ou son  environnement, d'un point de vue normal et  pathologique. Le second  article porte plus spécifiquement sur la prise  de produit psychoactif,  et aborde les effets et ressentis lors des  différentes phases de la  dissociation, ainsi que l'intérêt et les  désagréments liés au phénomène.




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- Hey Freud et Jamy ! youhou vous m’entendez ?!?​
- Oui la petite voix, on t’entend, mais où es tu ? on ne te voit pas...dit Jamy.​
-  C’est normal, je suis dans votre tête, en réalité je n’existe pas, je   ne suis que le produit de votre imagination, de votre appareil  psychique  qui me pousse à travailler inconsciemment pour vous.​
- Ah bon, mais  comment ça se fait que tu puisses nous parler si tu  n’existes pas alors ?  c’est comme si tu étais avec nous, en nous, mais  sans être là pour  autant, rajoute Freud.​
- Oui c’est étrange, mais c’est parce que j’ai  emprunté les mécaniques  de l’esprit pour dépasser quelques défenses et  autres censures, et  ainsi je peux vous parler comme si vous dialoguiez  avec vous-même, dans  votre for intérieur.​
- Des mécaniques de  l’esprit ? des défenses et des censures ? mais  qu’est-ce donc que cela  la petite voix ? s’étonne Jamy avec ses yeux  ronds, le buste légèrement  penché en avant et les poings posés sur ses  hanches.​
- C’est la dissociation, ou le clivage si tu préfères, tu ne connais pas ?​
-  Mais si la petite voix, avec Freud on a beaucoup étudié la question,  et  même expérimenté quelques états dissociatifs intenses, pas vrai  Freud ?​
-  C’est vrai répondit Freud, d’ailleurs c’est Janet qui en 1889 aborda  le  concept de clivage, avant qu’on ne s’y intéresse par la suite avec   Breuer. Aaah c’était à mes débuts, je m’en souviens très bien, on avait   alors définit le clivage comme une action mentale de séparation, de   division du Moi (clivage du Moi), ou de l’objet (clivage de l'objet),   par deux réactions simultanées et opposées sous l’influence angoissante   d’une menace. On a remarqué que l’une des deux réactions cherche la   satisfaction de ses désirs, quand l’autre tient compte des exigences de   la réalité. C’est un mécanisme qui sert à faire coexister dans l’esprit   les deux parties en même temps, mais de manière indépendante l'une de   l'autre, donc elles se méconnaissent, sans formation de compromis   possible. Comme ça l’individu éprouve l’angoisse sans la ressentir   consciemment en s’en détachant, en la mettant à distance en lui-même.​

-  Jamy enchainant : « Effectivement le clivage appartient à la  tradition  psychanalytique, et constitue une explication d'une des  modalités les  plus courantes de la formation de l'appareil psychique,  puisqu’il joue  un rôle organisateur important, présent dès le début et  tout au long de  la vie psychique. Il permet d'intégrer les règles  sociétales en séparant  les envies personnelles comme les désirs à court  terme, des  comportements socialement acceptables, et soutenus par des  mécanismes  comme l'imitation ou l'anticipation. Il organise ainsi la  vie psychique  de sorte qu'elle tienne compte de la réalité en  "effaçant"  temporairement les réactions spontanées. Disons que le  clivage est ce  qui masque à soi même et à autrui ce qui ne doit pas  être montré. »​

-  On peut donc affirmer que le mécanisme de clivage permet de maîtriser   l’angoisse, et sert d’issue lors d’ambivalence conflictuelle dans   l’esprit, surenchérit la Petite Voix.​
- Hé oui, valide Jamy, si  l’action de cliver renvoie aux notions de  fendre un corps, de dissocier  ou encore séparer, dédoubler, diviser, la  notion de clivage de l’esprit  s’inscrit directement en ces termes.  D’ailleurs, les premières  observations psychiatriques cliniques du  clivage, le définissaient en  termes de dédoublement de la personnalité.​
Freud poursuivit : « En  1894, j’ai écris dans Les psychonévroses de  défense, "Les patients que  j'ai analysés, en effet, se trouvaient en  état de bonne santé psychique,  jusqu'au moment où se produisit dans  leur vie représentative un cas  d'inconciliabilité, c'est-à-dire  jusqu'au moment où un événement, une  représentation, une sensation se  présenta à leur Moi, éveillant un  affect si pénible que la personne  décida d'oublier la chose, ne se  sentant pas la force de résoudre par  le travail de pensée la  contradiction entre cette représentation  inconciliable et son Moi". »​

-  Il y a donc dissociation lorsque s’opère un clivage entre la réalité  de  ses affects et l’idéalisation ou l’illusion dans laquelle on vit,   résume la Petite Voix. Ce mécanisme de défense peut se mettre en place,   lorsque face à une situation, ou un objet, on éprouve deux émotions   contradictoires ou conflictuelles, l'une ne pouvant pas, en toute   logique, exister avec l'autre dans le même système mental. Séparer ces   émotions (par exemple, ne penser qu'à une réaction possible, à un moment   donné, sans tenir compte de l'autre réaction qui pourrait nous venir à   l'esprit - la chasser, en quelque sorte) permet d'atténuer, voire   supprimer complètement, l'angoisse naissant de cette confrontation.   C’est vrai qu’il arrive parfois que l’on préfère s’en tenir à son idéal,   à un mensonge ou une illusion qui rassure, au lieu d’accepter la dure   réalité.​

- Tout à fait la Petite Voix conclue Jamy, et ce  processus est même  plus souvent à l’œuvre qu’on ne le croit, parce que  l’on ne s’en rend  pas compte, c’est le principe d’un mécanisme de  défense, rendant  inconsciemment inconscient ce que la conscience n’admet  pas, ce que le  Moi ne veut pas voir pour ne pas être angoissé. Par  exemple, lorsque  l'on se concentre sur une tâche tout en écoutant de la  musique,  l'esprit concentré clive la tâche à effectuer ou la musique, en   privilégiant l'une ou l'autre selon qu'il décide de travailler ou de   planer. Malgré tout on peut nuancer mon propos et celui de Freud, parce   que pour Laplanche et Pontalis, le clivage n'est pas à proprement  parler  un mécanisme de défense, mais plutôt une manière de faire  coexister  deux procédés de défense que sont le déni et le refoulement.  Selon les  circonstances, il est à supposer que c'est la prévalence du  rôle  structurant ou défensif qui fera de ce clivage "réussit", un  moteur de  développement ou un obstacle à la croissance psychique.​

NORMAL/PATHOLOGIQUE​

-  Mais je me pose quand même une question Freud et Jamy, que ce soit au   sein du Moi ou par rapport à l'objet, j’ai compris que le mécanisme de   clivage répond au besoin de maîtriser l'angoisse par deux réactions   simultanées et opposées, l'une cherchant la satisfaction, l'autre tenant   compte de la réalité frustrante. Et que si ce procédé sert d'issue en   cas d'ambivalence conflictuelle, il est généralement réversible et   temporaire, parce que normalement présent dès les débuts de la vie   psychique. Mais si il joue un rôle organisateur important, poussé à   l'extrême, est-ce qu’il peut présenter un caractère déstructurant et   dangereux comme je l’ai lu sur doctissimo ? non pas qu’on y lisse que   des sottises, mais je préfère vous demander...​

- Très bonne  question dit Freud, avec les collègues, depuis un siècle  on a établit  d’évidentes différences entre le clivage dit normal, et le  clivage à  caractère pathologique !​

Le clivage normal :​

Grâce à la  capacité de discrimination et d'attention qu'il établit, le  clivage  normal permet l'organisation des émotions, des sensations et  des pensées  ou encore des objets, condition préalable à tout processus   d'intégration et de socialisation. C'est un mécanisme "déconfusionnant"   puisqu'il instaure une première séparation et distinction dans  l’esprit,  et à sa place tout au long de la vie. Plus que d'autres  mécanismes de  défense, son rôle est éminemment positif dans la  structuration de la  psyché comme dans l'instauration des modes  relationnels. Le clivage  inaugure la démarcation d'un appareil  psychique différencié, et les  premières relations objectales marquées  par l'ambivalence, lorsque  l’individu se repère dans son environnement  et dans son propre esprit,  en adaptant sa réalité intérieure  inconsciente au monde extérieur, par  le biais de sa conscience. Il  s’agit de trouver un équilibre en soi,  pour s’adapter au mieux en se  dissociant de certains affects dans  certaines situations.​

En situation classique, le clivage permet  de faire attention (capacité  d’attention) à une émotion ou à la mettre  de coté (capacité de  discrimination) afin de pouvoir simplement penser,  se forger un  jugement, initier une réaction adaptée à la réalité malgré  des désirs  antagonistes. Il autorise l’organisation des émotions, des  sensations  et des pensées, ou encore des objets extérieurs que  l’individu  investit. C’est comme lorsqu’il lit un livre puis en parle à  un ami  choisi, en ne lui donnant qu’un certain type ou une certaine  quantité  d’informations précises et choisies, qui sauront l’intéresser  ou lui  servir, et ainsi permettre par cette forme d’échange spécifique  l’accès  aux processus d’intégration et de socialisation.​

Le clivage à caractère pathologique :​

Mais  poussé à l’extrême et utilisé trop fréquemment, le clivage peut   étouffer les émotions, notamment celles qui ne sont pas adaptées à la   réalité, alors que pourtant elles reflètent notre condition véritable   dans le moment présent. La dissociation conduisant alors plus ou moins à   une désensibilisation, un émoussement voire un vide affectif apparent,   relatif à une état de dépersonnalisation ou de déréalisation.   Paradoxalement, l'adaptation à la réalité devient une inadaptation à la   vie sociétale : c'est par exemple le cas d'une personne prête à   sacrifier (activement) une autre personne pour en sauver deux, un choix   pour lequel tout homme dit "normal" éprouve de l'hésitation, de la   tension, et peut être incapable de faire ce choix. Une personne capable   de faire ce choix sans la moindre hésitation établit un clivage fort,   parfois adaptée au métier, ou à la situation, mais fondamentalement   anormal pour la psyché humaine, et par ailleurs, source de tension et de   conflit, que l'on rencontre par exemple chez les personnes ayant à un   moment donné, la vie d'autres entre leurs mains (militaires, médecins).​

-  Le clivage pathologique apparaît notamment dans la névrose   obsessionnelle, la psychose et les perversions, continue Freud. J’ai   d’ailleurs expliqué grâce à ce phénomène dissociatif, certaines actions   démesurées où la folie cohabite avec la réalité, exemples dont les   médias se montrent friands : un "homme ordinaire" étrangle plusieurs   prostituées puis va se dénoncer dans l’espoir de faire cesser ses   cauchemars, au cours desquels il revoit les femmes, vivantes. Il fut   étonné de son arrestation et n'estimait aucunement avoir commis quelque   chose de grave. Dans cet exemple, l'homme a complètement séparé et   étouffé ses réactions normales (d'intégration et de sociabilisation)   face à ses obsessions et désirs spontanés, ce dont on se rend compte non   seulement dans les actes commis, mais également dans sa perception de   ces actes. Or les processus d'intégration étaient bel et bien présents,   puisque l'homme était "ordinaire" auparavant.​

- Oui je comprends  mieux maintenant dit la Petite Voix. En fait le  clivage nous est utile,  mais faut pas trop abuser de la dissociation,  sinon on s’y perd. Mais ce  qui m’échappe, c’est lorsque tu as parlé de  clivage du Moi et de  clivage d’objet, c’est quoi la différence ?​
Freud répondant : « C’est  là que ça devient technique la Petite Voix,  on parle de clivage du Moi  lorsque deux attitudes distinctes et  opposées (c’est-à-dire qui  s’ignorent) coexistent au niveau du Moi.  Alors que le clivage de l’objet  est la séparation d’un objet en deux  objets différents : un bon-objet  et un mauvais-objet. Mais on va  détailler tout ça pour y voir plus  clair. A toi de jouer Jamy !​

CLIVAGE DU MOI - C’est en quelque sorte comme penser en se regardant penser.​

-  Pour bien comprendre les différences de clivage, il faut d’abord se   visualiser là où le clivage va s’effectuer, pour mieux analyser comment   il opère ensuite. Ici on parlera du lieu psychique qu’est le Moi,   l’instance qui dans notre esprit, fait tampon entre la réalité extérieur   (l’environnement), et sa réalité intérieure (le Ça, qui dans   l’inconscient est le siège des affects et des pulsions). Le clivage du   Moi est le terme employé par Freud pour désigner un phénomène bien   particulier qu'il voit à l’œuvre surtout dans le fétichisme et les   psychoses, à savoir la coexistence au sein du Moi, de deux attitudes   psychiques à l'endroit de la réalité extérieure, en tant que celle-ci   vient contrarier une exigence pulsionnelle. Autrement dit, dans la tête   de l’individu un mécanisme dissocie son Moi, qui se représente alors la   réalité de deux manières distinctes, l'une tenant compte de la réalité   en étant pro-social, l'autre qui dénie la réalité en cause, parce   qu’elle produit des désirs pas toujours adaptés à la vie sociale, d’où   l’intérêt de s’en dissocier pour rester présentable. Donc d’un côté est   exposée une façade où l’individu parait «normal», quand de l’autre côté   ses pulsions sont refoulées parce que inappropriées dans le moment   présent, sinon l’individu se montre comme «délirant» en ne répondant pas   aux critères et aux normes sociaux-culturels de son milieu. Ces deux   attitudes persistent côte à côte sans s'influencer réciproquement, ce   qui permet au Moi d’accepter d’une part les exigences pulsionnelles de   sa réalité intérieure inconsciente, et d’autre part les exigences du   réel, de l’environnement extérieur.​

Freud précisant alors une différence entre clivage et ambivalence :​

-  L’ambivalence est une disposition à la simultanéité de deux  sentiments  ou de deux comportements opposés, lorsque le clivage ne  permet pas cette  simultanéité. Comprenez bien que dans le clivage, une  seule face de la  personnalité ou de la conscience apparaît  alternativement dans un objet  partiel (l’autre face étant refoulée ou  déniée, car affectivement trop  pénible ou inappropriée), alors que dans  l’ambivalence les deux faces  apparaissent dans un objet total, et donc  non dissocié. Par exemple,  dans lorsqu’un individu est pointé du doigt  et se retrouve honteux, dans  l’ambivalence on présenterait une gêne  émotionnelle tout en se sentant  bien comme si la honte ne nous  atteignait pas, alors que le clivage  n’offre la possibilité que de  montrer sincèrement la gêne, ou alors de  la masquer par un faux sourire  trompeur. L’ambivalence équivaudrait donc  à l’acceptation des choses  et objets qui peuvent être aussi bons que  mauvais selon la manière dont  on les éprouve et les interprète (donc une  vision tragique en voyant  le réel tel qu’il est, et non d’une manière  pessimiste ou optimiste),  quand le clivage équivaudrait à un état de ON  ou OFF, on éprouve  l’affect ou on est apathique, on aime ou on déteste,  on accepte ou on  fuit/critique, on présente sincèrement ou on pose un  masque soit en se  travestissant (par orgueil et vanité), soit en restant  insensible aux  affects (dépersonnalisation).​

- Ah d’accord  commente la Petite Voix, alors c’est pour cela que le  clivage du Moi est  très utile pour s’adapter en société, mais peut  néanmoins présenter un  caractère déstructurant et dangereux, quand  l’individu n’est pas  lui-même en présentant un faux-self, et allant  jusqu’à se déshumaniser  et mécaniser sa vie psychique pour se conforter  à un modèle  sociétal...ça fiche la frousse quand même vos travaux  Freud, et sinon  qu’en est-il du clivage de l’objet Jamy ?​

CLIVAGE DE L’OBJET​

-  Rassure toi la Petite Voix, on ne vit pas dans une société du  paraitre,  où l’on en serait à devoir se travestir pour être bien vu et  apprécié,  et ainsi espérer être reconnu, accepté et embauché. On le  saurait si la  société marchande libérale créait des clivages et autres  inégalités  équivalentes sur les plans anthropologiques et sociétaux, en  faisant que  dans le même temps les individus aspirent en eux à une vie  tournée sur  le social pour être estimé par autrui, mais aussi beaucoup  à la possession et à l’enrichissement personnel par le profit...Mais   maintenant écoutons Freud qui est parti interviewer Mélanie Klein,   fameuse psychanalyste, qui a détaillé le clivage de l’objet chez le   nourrisson entre bon et mauvais sein, et étant comme un processus normal   dans son développement psychoaffectif, particulièrement au cours de la   position schizo-paranoïde.​

- Bonjour Mélanie, pourriez-vous nous  expliquer votre démarche pour  comprendre ce qui se passe dans le  psychisme du nourrisson, apparemment  il serait question de bon sein et  de mauvais sein, peut on se demander  si cela dépend de si ils sont en  silicones ou bien ?​
- Ahah bonjour Sigmund, je vois que vous êtes  toujours aussi drôle, en  fait il ne s’agit pas de tâter physiquement des  seins mais d’observer  l’image qu’on se fait du sein quand on est  nourrisson, c’est comme pour  vos concepts d’œdipe et de phallus, il est  question d’une image  métaphysique, d’une métaphore ou d’une allégorie  pour se représenter  une idée à ropos d’un processus psychique, qui est  une réponse  défensive primitive du Moi contre l’angoisse, en  l’occurrence du  clivage d’objet.​
- Bien sur, partons sur cette idée  d’une schématisation, mais  dites-nous en plus quand au mécanisme du  processus clivant, peut être  pourriez-vous procéder à une sorte  généalogie du phénomène pour que  l’on saisisse bien de quoi il est  question, en allant de l’origine du  clivage dans la psyché du  nourrisson, jusqu’à ses effectivités une fois  adulte.​
- Le clivage  apparait lors des premiers mois dans la notion de plaisir  et de  déplaisir, suite à la frustration, par exemple lors de l’absence  du sein  nourricier au moment où le bébé à faim. Se développe alors une  relation  entre un sujet (le bébé) et un objet (le sein). En fonction  qu’il  éprouve du plaisir ou du déplaisir, le nourrisson associe l’une  ou  l’autre de ses positions à un "bon" ou un "mauvais" objet, le  plaisir  étant associé au "bon sein" et le déplaisir au "mauvais sein".  Il y a  ainsi un clivage de l’objet qu’est le sein pour le bébé, en un  bon et un  mauvais objet, le bon sein étant adoré quand le mauvais sein  est haï.​
- D’accord Mélanie, que se passe t-il ensuite ?​
-  Ensuite, le bébé qui jusque là avait une perception fantasmatique des   choses et des objets, commence à percevoir de mieux en mieux la  réalité  et donc l’objet dans son unicité, et le clivage se fait  désormais sur  l’objet total. Pour le formuler plus simplement, le bébé  va associer le  sein à la mère à qui il appartient, et la détester  autant qu’il  l’aimera, selon ses plaisirs et déplaisirs. Puis suivant  des jeux de  projections et d’introjections, lorsque le bébé s’identifie  à son  environnement et à ses proches, il construit sa personnalité en   rapportant et s’appropriant ce qu’il perçoit et voit, toujours sur un   mode binaire de «j’aime» ou «j’aime pas», on parle à ce moment là de   clivage du Moi.​
- En fin de compte, on grandit tous dans cette opposition basique ?​
-  En soi oui, même si en réalité c’est bien plus complexe que ça,  puisque  après que l’enfant qui a grandit en ayant investit les objets  de son  entourage, par ses pulsions érotiques et destructives, a scindé  ces  choses en "bon" et "mauvais" objets, et bien le clivage de l’objet   s'accompagne d'un clivage corrélatif du Moi en "bon" Moi et "mauvais"   Moi, quand on se prendrait pour un objet, en s’objectivant.​
- Il y a donc un clivage du Moi, en plus du clivage d’objet si j’ai bien compris ?​
-  Tout à fait, ils vont de pairs, lorsque le clivage d’objet s’opère   entre le sujet et l’objet, entre l’individu et les choses ou gens autour   de lui, alors que le clivage du Moi s’opère au sein même de  l’individu,  dans son Moi propre.​

- Ah je comprends mieux maintenant dit la  Petite Voix, c’est une  question de référentiel, selon que l’on adopte un  point de vue  relationnel ou alors inter-personnel, donc selon que l’on  observe la  mécanique du psychisme d’un individu directement dans sa  tête, ou bien  lors d’un échange avec une chose ou une autre personne. Tu  vois Jamy,  j’ai tout compris :grin:​

- Très bien la Petite Voix,  reste à préciser que cette phase de clivage  doit être dépassée lorsque  l’enfant grandit, sinon le fait de voir les  choses et les personnes  comme bonnes ou mauvaises peut devenir  handicapant par la suite, en  poussant à des jugements comparatifs.  C’est donc une phase de l’enfance  qui devra par la suite être  surmontée, lors d’un étayage du Moi sur le  bon objet et réparation du  mauvais objet détruit. Mais cela sera  d’autant plus difficile que  l’objet clivé est confiné dans ses extrêmes,  c’est-à-dire comme très  mauvais et comme très bon objet (autrement dit  il est idéalisé,  l’individu s’est fait un avis tranché et qui n’est pas  prêt de changer,  tant qu’il n’adopte pas un nouveau point de vue sur  l’objet en  question). Demandons à Mélanie un exemple...Mélanie, vous  êtes toujours  avec nous ?​

- Oui Jamy, prenez le rêve d'une  enfant, qui voit dans son imagination  une maman qui la persécute, alors  qu'en réalité le rapport mère-fille  est normal, puisque la mère protège  sa fille en lui donnant des  conseils et en lui interdisant certains  comportements malpolis, comme  tout parent le fait avec son enfant lors  de son éducation.  L'ambivalence ressentie face au côté protecteur et au  côté oppressif  peut alors donner lieu à un clivage, par la scission de  l'objet "mère"  en "bonne-mère" et en "mauvaise-mère", et qui se  formalise dans le  rêve. L’enfant est alors amené à autant apprécier que  déprécier sa  mère, qu’il juge coup à coup comme bonne ou mauvaise, avec  pour  conséquences de très bons moments passés ensemble à rire et  s’amuser,  et de mauvais moments de tensions, de disputes ou de rejets.  Pour gérer  l’ambivalence et l’angoisse qu’elle peut susciter, le clivage  de  l'objet permet ainsi d'accepter la nuance dans un rapport à l'objet  en  faisant coexister les deux faces du clivage, par exemple, continuer   d’aimer une personne tout en éprouvant une peur de la perdre ou de ne   pas la contrôler. C’est préférable au fait de n’engager aucune relation   pour être sur de ne pas être déçu d’une quelconque manière par la  suite.  En ceci le clivage est une bonne chose, à condition de sortir de   l’ambivalence amour/haine d’un « je t’aime, moi non plus », à moins  que  vous soyez fait pour vivre des relations houleuses.​

Freud  s’adressant à Jamy : « Il y a donc aussi un clivage d’objet  normal, et  un pathologique. Encore une fois tout est une question de  mesure et de  conditionnement par rapport à soi (clivage du Moi), à ses  proches, et à  son environnement (clivage d’objet). Si il est normal de  catégoriser les  choses et de véhiculer des clichés, ou des vérités  simplifiées, il faut  savoir reconnaitre ses préjugés afin de pouvoir  les remettre en cause,  et sortir de la dualité bien/mal, bon/mauvais,  qui caractérise les  rapports sociaux. Il s’agit de dépasser ses  croyances, ses illusions et  ses idéalisations, pour faire la part des  choses et se réconcilier avec  soi quand on rumine trop ou qu’on se  prend la tête, mais aussi avec ses  proches, notamment ses parents à qui  on pardonne parfois difficilement  faute de les avoir comprit, et de  les accepter en s’acceptant. Le  clivage peut se montrer difficile à  dépasser lorsqu'il s'établit entre  un très mauvais objet (aspect  pathologique du clivage d’objet) et un bon  objet idéalisé. Toute la  pathologie de l'idéalisation s'ouvre ici avec  ses multiples facettes  cliniques que l’on retrouve dans les tendances  narcissiques et  égocentriques. »​

- Et puis c’est pareil en sport  comme en amour enchaine Jamy, c’est  souvent la faute de l’autre alors  qu’on ne vaut pas toujours mieux,  mais par orgueil ou vanité nous  projetons naturellement nos torts sur  autrui dans une phase de clivage  qui peut déresponsabiliser. On  apprécie ou critique l’équipe adverse  comme on aime ou critique son ou  sa partenaire, sans même identifier la  joie, la rancœur ou la colère  qui nous anime (on baigne dans notre  subjectivité). Et il suffit  qu’autrui éveille des angoisses du passé en  nous, pour que se revivent  les difficultés irrésolues et enfouies de  l’enfance et de  l’adolescence, avec ses mécaniques de refoulement et  déni qui  constituent notre personnalité et nos caractères.​

Freud  reprenant l’interview : « Mélanie, auriez-vous d’autres exemples  plus  concrets de la vie courante pour finir de nous éclairer sur le  clivage  de l’objet ? »​

- Bien sur, au delà de l’aspect bon/mauvais, on  peut être attiré par  tel ou tel objet selon ses humeurs et affects du  moment. A ce niveau là  il est intéressant de différencier le désir de  l’amour, lorsque l’on  est partagé entre deux personnes qui nous  attireraient de deux manières  différentes. Le désir serait plus animal  et instinctif dans une  volonté de posséder l’objet de ses envies, par  exemple cette fille ou  ce garçon que les autres désirent aussi, ce qui  ne fait qu’accentuer  son désir de possession, d’avoir cet objet pour  soi. A l’opposé l’amour  de ce même objet, de cette fille ou de ce garçon  en vue, serait de  l’apprécier pour ce qu’il est, et non de vouloir le  posséder ou le  contrôler pour satisfaire ses propres pulsions et envies  sexuelles par  exemple. L’on peut aussi prendre les exemples des  différentes drogues  et de l’hypocrisie se manifestant entre celles qui  sont légalisées,  comme l’alcool et le tabac, et celles qui sont  pénalisées, comme le  cannabis. L’alcool devenant alors une bonne drogue  parce que accepté  dans les mœurs, alors que le cannabis en serait une  mauvaise parce que  diabolisé, et ce malgré le fait que l’alcool est  directement  responsable de milliers de morts chaque année, quand le  cannabis n’a  jamais directement tué personne. Une autre opposition  commune serait de  voir la police comme un organisme répressif et avide  de violence, ou  bien comme des protecteurs des concitoyens, donc soit  comme des «  Forces de l’ordre », soit comme des « Gardiens de la paix ».​

-  J’ai un autre exemple pour toi Freud, propose Jamy, on retrouve la   notion de clivage dans des expressions populaires, tel que « je sais   bien…mais quand même… », mais aussi dans le « en même temps » de Macron,   c’est une très bonne formulation pour cliver son discours et jouer sur   tous les tableaux, lorsque chaque auditeur ne retiendra que la partie  de  la phrase qui l’intéressera, par un processus d’attention sélective.   L’auditeur ne retient que ce qui l’arrange, et les équipes de   communication de Macron l’ayant bien comprit, ont usé de cette   rhétorique pour mieux manipuler ces gens crédules et peu critiques quand   au discours des politiciens.​

MANIFESTATIONS CLINIQUES DANS DIFFÉRENTS DEGRÉS​

Jamy,  les mains posées sur ses genoux, est assit en tailleur au centre  du  camion plongé dans l’obscurité, un halo de lumière traversant  l’espace  de gauche à droite et illuminant une face de sa personne : «  Écoutons  maintenant l’intriguant Lacan, à propos des manifestations  cliniques de  la dissociation. »​

La voix de Lacan débutant : « Au niveau des  manifestations cliniques,  l’hallucination serait le moyen d’expression  dans la réalité d’un  refoulé forclos, refoulé qu’on dira exclu ou  rejeté. Le clivage se  retrouve aussi associé au déni dans certains  mécanismes psychotiques.  C’est le cas du fétichisme pour la perversion,  de la schizophrénie, de  l’autisme pour les psychoses. Si on se place  d’un point de vue  vertical, on retrouve finalement différents degrés au  clivage du  psychisme. En premier lieu il y a clivage comme dissociation  au niveau  du Moi, exemple de la schizophrénie. À un degré supérieur,  s’ajoute le  déni. Le Moi retrouve ainsi une certaine unicité englobant  deux parties  opposées qui s’ignorent, exemple du fétichisme. Mais le  clivage fait  aussi partie du processus de pensée : le Moi est pour ainsi  dire clivé  sur lui-même, c’est en quelque sorte comme penser en se  regardant  penser. À un degré ultime, le clivage serait dans le cadre  analytique  le moyen pour le Moi de former son identité sur trois parties   distinctes : ce Moi qui se regarde en train de penser et de ressentir   (deux parties orientées l’une vers l’esprit (le mental et la raison) et   l’autre vers le corps (les sensations et émotions)) et une partie   identifiée au psychanalyste qui se pose des questions. Freud a utilisé   aussi ce terme à un niveau spatial pour désigner la séparation des   différentes instances ou systèmes de l’appareil psychique ; mais on peut   aussi envisager le clivage au niveau temporel. »​

- Oula mais  c’est compliqué tout ça, est-ce qu’on en sait plus pour ce  qui est du  déni et du refoulement, et pourquoi est-ce qu’on parle de  point de vue  vertical ? demande la Petite Voix.​

CLIVAGE VERTICAL ET HORIZONTAL - Déni et refoulement.​

Jamy  présentant de nouveau son Moi professeur : « Arnold Goldberg part  du  fait que la psyché est souvent illustrée de façon imagée, et le  clivage  est l'une des façons de la représenter. Il dit que " Si le  clivage est  horizontal, on s'en sert pour mettre en évidence une  division entre le  haut et le bas. S'il est vertical, il doit montrer  une séparation côte à  côte. Le premier clivage, horizontal, représente  le refoulement. Le  second, vertical, peut être considéré comme une  représentation du déni.  Un clivage horizontal, la barrière du  refoulement, sépare les matériaux  inconscients des contenus  préconscients, tandis que le clivage vertical  divise pour l'essentiel  un matériau plus ou moins accessible à la  conscience ". Jamy  poursuivant, il reprend donc la première topique de  Freud et explique  que si les idées freudiennes sur le refoulement et les  forces qui  l'entretiennent sont familières, l'idée d'un clivage  vertical est un  peu moins connue. Selon Heinz Kohut, ce dernier clivage  se caractérise  par l'existence côte à côte d'attitudes disparates en  profondeur,  lorsque le clivage émerge du sentiment d’ambivalence.  Généralement, un  versant de cette existence parallèle est jugé plus en  accord avec la  réalité, tandis que l'autre peut être jugé infantile ou  tourné vers une  gratification immédiate.​

Freud terminant en  citant Kohut : « L'une des façons de considérer ces  attitudes parallèles  de la personnalité consiste à dire que la réalité  de l’une est mieux  structurée et/ou plus neutralisée tandis que l'autre  est relativement  peu structurée et/ou non neutralisée. Ce secteur  moins structuré est  parfois impliqué dans un fantasme, mais avec encore  moins de structure  il peut déboucher sur une action manifeste. Tel est  le cas dans des  troubles de comportement comme les addictions, la  délinquance et les  perversions. Avec un clivage horizontal, le matériau  infantile et non  structuré est tenu en respect. Avec un clivage  vertical, il parvient à  s'exprimer. Le comportement pathologique est la  manifestation de ce  secteur clivé. »​

- Notre assistante technique Laura a fait des  schémas explicatifs, pour  comprendre plus en détails les clivages  vertical et horizontal, que  voici :​

Le déni : Action de dénier, de refuser de reconnaître la vérité  ou la valeur d'une chose. Mode de défense consistant en un refus par le  sujet de reconnaître la réalité d'une perception traumatisante.




Le refoulement : Action de repousser plus ou moins consciemment  des désirs, des sentiments que l'on ne peut ou que l'on ne veut pas  exprimer. Mécanisme psychologique, généralement  inconscient, qui serait  à la base de nombreuses névroses et  s'observerait plus accessoirement  dans certaines psychoses. Il s'agit  d'une opération psychique par  laquelle le sujet repousse ou maintient  dans l'inconscient des pensées,  des images mentales ou des souvenirs  liés à un désir profond et  instinctif (pulsion) senti comme interdit ou  contraire à certaines  exigences morales.



 
Ultra méga intéressant mais un poil dur a suivre pour un ignare comme moi :finger:
 
Laura Zerty a dit:
La petite voix [...]
On ne te voit pas.
Mec tu m'as refait ma soirée.

(Désolé c'est du putain de flood de merde, je vais lire ça, promis ^^)
 
Indica a dit:
Ultra méga intéressant mais un poil dur a suivre pour un ignare comme moi :finger:

J'essaye de vulgariser au plus simple avec des exemples concrets, tout en laissant des infos complexes à comprendre pour pouvoir aller plus loin quand on a capté l'essentiel ou la base de l'article. Mais c'est sur qu'il faut être "dans" le délire pour faire assez preuve d'abstraction et comprendre les propos énoncés. J'ai parfois moi-même du mal à saisir ce que j'ai pu écrire ou à comprendre des bouts d'articles que j'ai gardé, quand ça fait plusieurs semaines que je ne les ai pas lu et que je ne suis plus dans le mode de pensée que j'avais au moment de leur lecture ou écriture.

Ce que je veux dire c'est que je ne l'ai pas pondu comme ça l'article, ça fait des mois que j'y pense, et j'en viens à l'écrire en ayant lu pas mal de documentation sur le sujet avant. Si au début ça donne l'impression de faire mal au crâne le fait de se triturer la tête pour saisir un concept inconnu, à la longue et surtout à force de lecture/relecture, on commence à maitriser le sujet et tout s'éclaire dans l'esprit, au point que ça en devient plaisant et non plus rebutant. Disons que c'est là où tu peux voir l'effort dont tu es capable pour t'intéresser à un sujet que tu ne connais ou maitrises pas :D
 
Ce que je veux dire c'est que je ne l'ai pas pondu comme ça l'article, ça fait des mois que j'y pense, et j'en viens à l'écrire en ayant lu pas mal de documentation sur le sujet avant.
Ça ce voit bien je t'assure su tu fais un vrai boulot de vulgarisation documenté et pas un travail de chawi !

Et c'est vrai que c'est enrichissant de se creuser la tête pour comprendre un truc qu'on ne maitrise pas .

Oh et je voulais pas oublier de te remercier pour tous tes articles de vulgarisation que tu offre au forum, je trouve sincèrement la démarche géniale et puis on le sent que tu y prend du temps ! Chapeau bas .
 
J'ai lu que la moitié et j'ai déjà plein de questions ^^

Bon déjà c'est super intéressant, j'ai jamais eu la volonté de lire tes pâtés freudiens sur le fofo, mais je suis surpris en bien là. Ouais y a deux-trois phrases que j'ai dû relire mais rien d'insurmontable, et encore je suis pas bien réveillé là. Joli boulot de vulgarisation, nice.

Sinon ouais questions:
1) Tu parlais du rapport entre le clivage du moi pathologique et le fait d'être psychopathe (l'exemple du mec qui tuait des femmes, putain d'ailleurs c'est grave cliché ça, sexisme mondieu ^^). Est-ce qu'on peut dire que le clivage pathologique provoque donc aussi un manque voir une absence d'empathie pour satisfaire ses désirs inconscients refoulés?

2)Bah je suis juste surpris que tu parles pas de dissos dans ton texte. Concrètement un disso ça fait quoi au niveau clivage du moi? Est-ce que l'effet permet de s'affranchir du clivage ou au contraire est-ce qu'il le renforce et fait apparaitre uniquement la partie inconsciente ou consciente du mental?

J'aurais tendance à dire que ça permet de faire coexister inconscient et conscient et donc que ça fait un gros bordel parce qu'on est pas habitué à ça, mais j'en suis pas sûr.

Bon demain je me tape la suite. Et je me taperai aussi une trace de 3-miaou dans le pif avant de lire. C'est pour la science hahaha.
(Ceci n'est pas vrai et même si c'était le cas, ceci aurait été réalisé par des psychonautes professionnels)
 
snap2 a dit:
1) Tu parlais du rapport entre le clivage du moi pathologique et le fait d'être psychopathe (l'exemple du mec qui tuait des femmes, putain d'ailleurs c'est grave cliché ça, sexisme mondieu ^^). Est-ce qu'on peut dire que le clivage pathologique provoque donc aussi un manque voir une absence d'empathie pour satisfaire ses désirs inconscients refoulés?

Oui dans un sens :

La dissociation conduisant alors plus ou moins à une désensibilisation, un émoussement voire un vide affectif apparent, relatif à une état de dépersonnalisation ou de déréalisation. Paradoxalement, l'adaptation à la réalité devient une inadaptation à la vie sociétale

La désensibilisation est un manque d'empathie, voire d'apathie dans le pire des cas. Après pour ce qui est de vouloir satisfaire ses désirs inconscients, la dissociation du Moi en l'occurrence, permet d'en même temps satisfaire ses désirs, tout en restant présentable en apparence, et serein dans sa tête.

Pour prendre l'exemple d'une consommation de drogue, au fond de nous je pense qu'on a tous un petit remord à satisfaire une pulsion de défonce, quand dans le même temps on kiffe ça. La dissociation opèrerait lorsque d'un côté on se dit c'est cool la drogue, et que d'un autre côté on en vient à la consommer. Il y a là un petit déni des risques liés à la consommation de stup, déni qui permet cette consommation (en partant du principe que si l'individu connait les règles de la RdR, la majorité du temps il ne les respecte pas pour satisfaire ses pulsions).

Disons qu'avec la dissociation tu peux réguler ton état psychique entre tes pulsions qui te travaillent de l'intérieur, et les exigences de la réalité extérieure. Pour continuer sur l'exemple de la conso, plus en détails si t'es pris dans un état conflictuel de manque ou d'envie de défonce, alors que tu sais qu'il est préférable que tu n'en prennes pas pour X raisons, ou que tu ne devrais pas en prendre autant, quand tu arrives à un point de saturation entre "j'en prends pas" et "je déglingue le pochon", la dissociation peut te faire basculer d'un côté ou d'un autre en déniant l'autre partie.

Donc soit tu déglingues ton pochon en niant ta santé et en te ruinant le crâne en plus d'envoyé bouler la RdR (je grossit le trait), soit tu ne prodes pas et niant tes envies de défonce, et par l'action de la raison "tu restes zen, sans t'en foutre plein le zen".

La dissociation est là pour t'aider quand t'es indécis ou prit dans une tourmente psychique, après pour ce qui est des conséquences, là faut voir les choix que tu as fais en niant telle ou telle partie dans ton esprit.


snap2 a dit:
2)Bah je suis juste surpris que tu parles pas de dissos dans ton texte. Concrètement un disso ça fait quoi au niveau clivage du moi? Est-ce que l'effet permet de s'affranchir du clivage ou au contraire est-ce qu'il le renforce et fait apparaitre uniquement la partie inconsciente ou consciente du mental?

Dans le préambule j'ai marqué que je ferais deux articles, un premier porté sur la clinique plutôt, et un second sur la drogue, avec les effets ressentis et l'action des drogues sur l'esprit, avec les intérêts, désintérêts et conséquences de la disso.

Quand j'ai commencé à chercher des infos sur la dissociation j'ai rien trouvé, avant d'en arriver au clivage, et j'y comprenais rien, enfin je ne voyais pas le lien avec la dissociation, jusqu'à ce que je me rende compte que ce qu'on appelle communément la disso ici, c'est le clivage, avec ses mécanismes bien particuliers qui dans leurs explications détaillées, vont bien plus loin que la simple dissociation corps/esprit. Non pas que la disso corps/esprit soit fausse, mais pour l'expliquer il faut en fait passer par le clivage du Moi et de l'objet, pour pouvoir théoriser un minimum la chose, et t'as vu que c'est aussi facile que difficile à comprendre (enfin pour ma part j'ai besoin de comprendre les mécanismes de fond pour aller voir plus en détails l'action des phéénomènes psychiques sur le corps et l'esprit).

Pour répondre à ta question, sans avoir trouvé de documentation en lien entre le clivage et la drogue, je te répondrai avec ma propre pensée : de ce que j'ai compris, la disso opère d'abord une affirmation de soi, donc un renforcement du Moi qui se montre alors très sur de lui (typique de la montée d'un disso, quand on prend la confiance et qu'on se croit invincible), puis le trip bascule dans une perte de repères identitaire, spatial et temporel, et là on en arrive à l'état dit "dissocié". On ne se reconnait plus, on galère à se repérer dans l'espace et dans le temps, on bouge bizarrement, on fait des gestes et des actions aussi sensées que incohérentes, aussi précises que désordonnées, aussi réfléchies qu'impulsives. Les idées fusant à 1000 à l'heure, on alterne des phases d'assurance et des phases de perdition dans notre for intérieur, c'est un peu comme un délire bi-polaire, en alternant les phases maniaques et déprimantes, quand un coup on entreprend une action comme si elle était super trop génial cette idée, et l'instant d'après on sombre dans la plus grande vanité qui soit en se disant que tout est inutile et on disparait dans son propre esprit, comme si on était mort et revenu à l'état de poussière d'étoile dans le cosmos (le Tout si tu préfères). A partir de là y a moyen de s'intéresser aux différentes phases de vie/mort/renaissance, et à l'intérêt psychonautique de l'état de dissociation...

Mais j'en dis pas plus, je vais pas spoiler tout mon prochain article non plus ahah 8)
 
Merci pour les réponses ^^

Yep hâte de lire la suite du coup, ça risque fort d'être intéressant.
 
Intéressant, étant moi même diagnostiqué "dissocié". Terme qui en psychanalyse n'a rien à voir avec la prise de produits dits "dissociatifs".

Imaginez bien mon amour des drogues dissociatives et ma gueule quand elle m'a annoncé (la psy) que j'étais dissocié. J'ai éclaté de rire et lui ai expliqué directement que je prenais beaucoup de dissociatifs, pensant faire un PaRaLLeL. Mais non, les deux n'ont strictement rien à voir.

Chez moi, la dissociation en terme de psychanalyse c'est que je tourne en boucle et recréé les mêmes schéma, surtout négatifs. Et je le vérifie encore dans mes prises de produits, qui font des hauts et des bas perpétuellement parce qu'inconsciemment j'aimerais me détacher de mes addictions, mais étant en contradiction intérieurement je recommence toujours et encore. Et ça se répète. Ces schémas se retrouvent dans mes relations avec autrui également. Cette pathologie, selon la psy, me fait également faire/dire l'inverse de ce que je voudrais vraiment. Et tout ça je ne m'en rend pas compte, enfin un peu plus depuis cette thérapie, mais en vrai je m'en branle et j'ai décidé d'en faire un trait de caractère (en écrivant ça je me dis que j'suis un vrai timbré, mais c'est pas grave).

Enfin bref, tout ça pour dire qu'entre dissociation au sens psychanalytique et la dissociation au travers de produits il n'y a aucun rapport. Vraiment.
 
Chapeau l'artiste. Là tu as poussé le degré de vulgarisation bien plus loin que je ne l'imaginais. C'est très clair et très exhaustif à la fois (du moins ça a l'air, de mes yeux de profane du clivage).
 
Ave, camarades psychonautes avides de comprendre et Laura Zerty en particulier (je peux en conclure que tu es une fille, ou pas ?) !

Boulot fort trapu, bravo, et intelligente mise en scène pédagogique avec le concours d'un "Jamy" virtuel familier à la plupart d'entre nous. Sauf que, pour moi, le fond du propos est irresponsable. (Grand) Respect pour ton engagement dans la grande durée sur Psychonaut France et tes 5936 contributions qui, au vu de celle-ci, ont dû à la fois proposer un max de contenu et coûter un engagement en temps plutôt admirable.

C'est en 2012-2013 que je fréquentais régulièrement Psychonaut ("baba cool" de l'époque, je suis venu aux "néo-psychédéliques" en 2011 et ai testé pas mal de trucs entre 2011 et 2013), ma présence y est maintenant beaucoup plus rare (je n'ai pris depuis 2013 -- en dehors de mon joint du soir quotidien depuis 45 ans, parfois plus avec des potes -- que de la MD, beaucoup moins fréquemment), mais j'ai toujours plaisir à y revenir contribuer un peu quand un mail m'y invite.

Ainsi, avant-hier, j'ai fait une prestation "grand frère" (pour ne pas dire "père", on va dire "Tonton" ;) ) dans "Présentations" pour tenter de contribuer à la "réduction des risques" d'un petit nouveau dont le texte n'a pas inquiété que moi.

J'y ai écrit notamment :

Essaye de ne rien prendre qui soit "dissociatif". C'est comme dire, "En fait, je m'en branle de la quête, de savoir qui je suis, autant m'éparpiller façon puzzle, mes souffrances en seront raccourcies" !

(Pour lire tout le post, c'est à la page 442 de "Présentations", contrib' #13248 )

Pour tout dire, je suis cohérent : les conseils que je donne, je les suis moi-même, donc je n'ai quasiment pas d'expérience des "dissociatifs". Je me souviens néanmoins d'un trip au 2C-P assez terrible (et looooong, bordel !), et je ne sais pas si ceux qui connaissent cette catégorie de produits classent ce dernier dans les "dissociatifs", mais pour moi, l'effet que ça m'a fait correspondait plutôt bien au mot. Et cet effet n'était vraiment ni utile ni dépourvu de risques psychologiques plutôt graves.

oOo​

Le boulot que tu as fait est vraiment assez sérieux, Laura, même s'il est un peu trop "scolaire" et pas assez complété d'éléments de CR subjectif sur ces sujets pour faire pièce à la théorie, d'une voix qui parle d'expérience. Du coup, en sortant de sa lecture pas complète mais mettons de 60% de ton texte, mon hypothèse privilégiée, c'est que ta démarche -- que tu en sois consciente ou pas --, c'est de justifier l'intérêt d'user de ces produits. Pas de faire un vrai point sur ces questions, un point objectif parlant du point de vue de "l'utilisateur de prods" mais aussi, plus généralement, de celui de l'être humain face à ses problèmes existentiels, ou encore de celui du thérapeute en nous, notamment d'ordre freudien.

Je reprends quelques-uns de tes propos que j'ai sélectionnés, avec mon commentaire à chaque fois derrière, pour poser la nature de ma contestation et voir si on peut dialoguer là-dessus :

On peut donc affirmer que le mécanisme de clivage permet de maîtriser l’angoisse, et sert d’issue lors d’ambivalence conflictuelle dans l’esprit, [...]
c’est le principe d’un mécanisme de défense, rendant inconsciemment inconscient ce que la conscience n’admet pas, ce que le Moi ne veut pas voir pour ne pas être angoissé.

OK, aucune contestation là-dessus, c'est très bien résumé.

Grâce à la capacité de discrimination et d'attention qu'il établit, le clivage normal permet l'organisation des émotions, des sensations et des pensées ou encore des objets, [...]
son rôle est éminemment positif dans la structuration de la psyché comme dans l'instauration des modes relationnels. [...] Il s’agit de trouver un équilibre en soi, pour s’adapter au mieux en se dissociant de certains affects dans certaines situations.

Là, ça commence à coincer, pour moi, parce que tu fais une présentation trop positive de ce dispositif psychologique humain standard. C'est un des éléments qui m'ont fait penser que ta motivation infraconsciente est de justifier positivement l'utilisation de ces prods, alors qu'à mon sens, c'est le contraire qu'il faut faire (en décourager fortement l'usage). (Et à ce compte, je suis content que les circonstances m'aient permis d'intervenir avant la publication de ta Partie 2. ;->)

Plutôt que de dire que ce mécanisme est "éminemment positif", je dirai que c'est un pis-aller, qu'il évite que notre psychè s'effondre (au sens de "perdre dangereusement en vitalité"). Autrement dit (et franchement, pas la peine de s'intéresser à Freud si l'on ne comprend pas ça), le refoulement n'est en rien constructif pour la personne ; c'est un mécanisme de défense du Moi, de l'égo, une mesure "conservatoire". Plus on a besoin de refouler, et plus, pour avancer positivement dans le sens de la libération (des noeuds névrotiques) et de l'accomplissement de soi, on aura de travail ultérieurement pour annuler et comprendre ces mensonges que l'on a été contraint de se faire à soi-même pour se préserver face à des évènements traumatiques (par la méthode freudienne et aucune autre).

Mais poussé à l’extrême et utilisé trop fréquemment, le clivage peut étouffer les émotions, notamment celles qui ne sont pas adaptées à la réalité

Là, c'est encore plus flagrant que tu ne maîtrises pas tant que ça ce dont tu parles (<-- ça n'est pas une agression de ma part, on cause, j'essaye d'établir des faits par l'argumentation en raison). En effet, par la formulation "Mais poussé à l’extrême et utilisé trop fréquemment...", tu donnes bien trop l'impression que le sujet est aux commandes de ce mécanisme (--> "Tu sais, je trouve que tu clives trop, ces derniers temps ; le refoulement, c'est utile, mais c'est comme pour tout... pas d'excès, please !" ;D). Bon, alors c'est peut-être une maladresse de formulation, tu me diras. Les faits, comme toi et "Jamy" l'avez tout de même établi sous différentes formules dans ton texte, c'est que c'est un mécanisme inconscient sur lequel notre conscient n'a pas de prise.

on ne vit pas dans une société du paraitre, où l’on en serait à devoir se travestir pour être bien vu et apprécié, et ainsi espérer être reconnu, accepté et embauché

Alors, ça, c'est marrant à lire, parce que, pour moi, la réalité, c'est quasiment le contraire de ce que tu avances là ! La société, les discours publics, surtout actuellement, sont en gros déficit de vérité et l'interprétation "instrumentalisée" des faits est un "sport" très répandu (= plutôt que de présenter aussi objectivement que possible telle problématique, en mentionnant toutes les visions ayant cours et en s'efforçant de ne pas prendre parti, ou de ne prendre parti que dans la transparence, après avoir mentionné tous les points de vue, et en expliquant ensuite pourquoi on prend parti pour celui-ci ou celui-là, la majorité des prises de parole "truquent" leur discours par rapport à ce standard vertueux de la parole publique, usent de tous les moyens rhétoriques fallacieux dans un but qu'on peut dire "fourbe" et non dans une démarche politique de bien collectif). Et au niveau des personnes, celles qui sont dans l'exigence de vérité à soi (donc potentiellement de vérité aux autres) et qui font leur boulot de "Connais-toi toi-même" pour toute une série de bénéfices qui prennent des années voire des décennies à se concrétiser -- ne plus avoir honte de certains de nos traits intimes qui ne justifient pas qu'on en ait honte [parce que quand on a honte, on ne peut pas se présenter en vérité à l'autre, il y a une charge psychoaffective trop forte, on est obligé de camoufler ce dont on a honte, de s'inventer un "paraître"], être plus conscient de ce qui se joue quand on est face à l'autre et moins "projeter" de soi sur lui, ce qu'on passe tous des décennies à faire dans un bordel pathétique pour tous, etc. -- sont en bien petite minorité.

Disons qu'avec la dissociation tu peux réguler ton état psychique entre tes pulsions qui te travaillent de l'intérieur, et les exigences de la réalité extérieure.

Voilà encore un exemple où, tout en sachant -- je crois bien l'avoir vu -- que tu parles d'un mécanisme inconscient, tu sembles en faire un outil dont le conscient peut se saisir pour en user à sa guise (ce qui serait -- si tu confirmais que tu y attribues une valeur d'outil -- le contresens le plus extrême sur tout le phénomène).

j'y comprenais rien, enfin je ne voyais pas le lien avec la dissociation, jusqu'à ce que je me rende compte que ce qu'on appelle communément la disso ici, c'est le clivage, avec ses mécanismes bien particuliers qui dans leurs explications détaillées, vont bien plus loin que la simple dissociation corps/esprit.

Bon, au moins la camarade est-elle honnête : elle précise n'avoir pas, sur ces sujets, une expérience propre de pensée personnelle déroulée sur des années et des années.

à l'état dit "dissocié". On ne se reconnait plus, on galère à se repérer dans l'espace et dans le temps, on bouge bizarrement, on fait des gestes et des actions aussi sensées que incohérentes, aussi précises que désordonnées, aussi réfléchies qu'impulsives. Les idées fusant à 1000 à l'heure, on alterne des phases d'assurance et des phases de perdition dans notre for intérieur, c'est un peu comme un délire bi-polaire, en alternant les phases maniaques et déprimantes

Aah ! Bon, au moins -- là, c'est flagrant -- tu t'efforces honorablement de faire ce que je disais plus haut, c'est-à-dire présenter tous les faits. Et donc, tu décris en partie -- et opportunément sur un mode d'avertissement sans ambiguïté -- ce pourquoi je tiens à contester que les produits dissociatifs nous soient, en quelque façon que ce soit, bénéfiques. Merci.

oOo​

Le mot "clivage", dans ce contexte psychologique, peut se résumer, sans entrer dans les détails psychanalytiques techniques, comme ceci :

Je ne suis pas "unifié", cohérent dans mes intentions et dans mes actes. Une part de moi est saine, fidèle à ma nature, une autre part de moi -- qui a eu à traverser des traumas affectifs dont l'origine est dans l'enfance -- est "couturée" de partout, a refoulé des évènements ou sentiments qu'il serait préférable de considérer en face pour les traiter mais qui se sont avérés trop douloureux pour ce faire. Ils ont donc été refoulés dans les profondeurs de notre "âme", dans notre "inconscient" (merci, Freud).

L'incohérence de notre être entraînée par ces mécanismes nous empêche d'agir en toute connaissance de cause pour notre bien. La structure psychique devient complexe, parce que cette incohérence nous apparaît parfois, et il est difficile d'en faire sens, puisque le principe même de tout le truc, c'est de nous cacher à nous-mêmes des faits difficilement supportables affectivement. Heureusement, nous les humains sommes très doués pour nous "raconter des histoires". Alors nous "brodons" pour nous redonner une apparence de cohérence. Et nous nous créons des mécanismes ou des fictions de "compensation". Et puis parfois, notre part saine, celle qui cherche absolument à ce que nous soyons le plus honnête possible avec nous-mêmes, prend le dessus, brièvement (c'est puissant, un inconscient, motivé par une question de survie psychique !). Et nous commettons un "acte manqué". Cette appellation est un peu trompeuse : ce qui est "manqué", dans ces cas-là, c'est le camouflage habituel de ce dont je ne veux absolument pas que ça sorte, que ça se voie, c'est le "paraître" protecteur. (Ex. : on s'apprête à dire "T'es vraiment bon, toi !", surtout pour se conformer à ce qu'on est censé dire dans cette conjonction des "paraître" collectifs et individuels, et ce qui sort de la bouche, c'est "T'es vraiment con, toi !" : un concours de circonstances a permis à la vérité intime de traverser ponctuellement le mur du paraître.)

Une forme encore plus poussée -- mais plus rare -- de percée au jour de la vérité en dépit des refoulements s'appelle "catharsis" (au sens freudien). Dans ces cas-là, des circonstances très particulières (un mot, un son, une image, produite par nous ou par quelqu'un d'autre, a le pouvoir soudain de dissoudre momentanément toutes nos constructions d'ordre refoulant) nous font remonter au conscient notre vérité nue, soit globale, soit concernant un domaine affectif particulier. C'est saisissant, hyper-émotionnant, il y a une part de ravissement (on se retrouve "entier") et une part terrible ("c'est pas vrai, je me mens à ce point en permanence ?! Quelle tristesse !").

Si on fait le boulot de "quête personnelle", d'auto-analyse, sérieusement et dans la durée (possiblement aidé par certains produits -- voir ma réponse à Berrocca), il faut avoir la ressource et le courage de s'appuyer sur ces phénomènes d'irruption de notre vérité, ces "actes manqués" et ces épisodes de "catharsis" s'ils se produisent. De s'en souvenir et de repartir de ces nouveaux éléments de notre vérité qui se sont fait jour. Si j'en parle, c'est parce que c'est ce que j'ai fait. Mais dans le cas des épisodes de catharsis que j'ai pu voir (rarement) se produire chez mes proches, j'ai constaté qu'ils ont été insoutenables, c'est-à-dire que la personne n'a supporté d'être dans la pleine lumière de sa vérité qu'une minute, pas plus. Et tout de suite, vite, vite, oublier, reprendre l'apparence normale, reprendre l'écheveau de vérité et de mensonge de protection habituel. :(


oOo​

Dis donc, je vais finir par faire aussi long que toi, Laura, et personne ne pourra me lire en entier ! ;-)

Bref : Le PLUS important, pour le bien de chacun de nous, c'est de se consacrer à cette quête de libération de nos névroses. Le mieux, c'est que l'usage de substances soit abordé pour servir ce but.

Je vois immensément trop de contributions, globalement sur Psychonaut, qui s'expriment hors de ce cadre et en inconscience au moins partielle de celui-ci. À chaque fois que je vois (je résume et caricature un peu) des propos du genre "Ouais, on s'est éclaté la tête grave, je ne savais carrément plus où j'habitais", je tressaille, je suis triste.

D'où ce pavé ! ;)

Cher camarade psychonaute, si tu es parvenu jusqu'ici, je t'en remercie et me tiens prêt à préciser ou à débattre quoi que ce soit qui mérite à tes yeux de l'être, dans un esprit constructif. :)

PS :

jusqu'à ce que je me rende compte que ce qu'on appelle communément la disso ici, c'est le clivage, avec ses mécanismes bien particuliers qui dans leurs explications détaillées, vont bien plus loin que la simple dissociation corps/esprit

Après, un facteur de confusion dans le débat, c'est en effet le sens qu'on donne aux mots. Pour moi, le sens assez clair de "dissociatif", c'est "qui te dissocie de ton être". C'est une expérience que je trouve dangereuse, sur les terrains psychiques somme toute très fragiles qui sont les nôtres à tous et dont je viens de parler, de "ne plus être soi". ("Chuis moi ou chuis l'Univers ou chuis Rien, là, je sais plus, je ne sens plus l'ancrage habituel qui était déjà un peu branlant, qu'est-ce qu'il faut que je fasse, je sais encore moins qu'avant ! [et d'ailleurs, qui c'est ce "je" qui est en train de penser, là ??]")

Alors déjà que ce n'est pas une mince affaire de "se trouver" (pour moi, ça a pris plus de 50 ans, et je suis particulièrement sérieux dans la démarche), franchement, c'est chercher une double dose d'emmerdes !!
 
Lee-O a dit:
Laura Zerty en particulier (je peux en conclure que tu es une fille, ou pas ?) !

Ah non uhu, Laura est une chose humanisée tout à fait masculine ^^

Je passe en mode bibliothéquaire méchant. Si tu pouvais juste utiliser le bouton "éditer" en bas de ton premier message si tu veux rajouter quelque chose au lieu de poster à nouveau ça arrangerait la team du fofo, ça prend du temps de fusionner les double posts. Thanks!
 
Ah oui, pardon, j'avais oublié ce point particulier du règlement du forum. Pas de problème, snap2, je m'y conformerai de nouveau, maintenant.

En revanche, je me souvenais plus ou moins qu'il convenait d'être circonspect concernant les indications de sexe des pseudos,^^ d'où ma question, et je te remercie d'y avoir répondu.

Et sur le fond du débat, qu'en penses-tu ?
 
Merci pour les commentaires :D

PaRaLLeL a dit:
Intéressant, étant moi même diagnostiqué "dissocié". Terme qui en psychanalyse n'a rien à voir avec la prise de produits dits "dissociatifs".

Imaginez bien mon amour des drogues dissociatives et ma gueule quand elle m'a annoncé (la psy) que j'étais dissocié. J'ai éclaté de rire et lui ai expliqué directement que je prenais beaucoup de dissociatifs, pensant faire un PaRaLLeL. Mais non, les deux n'ont strictement rien à voir.

Chez moi, la dissociation en terme de psychanalyse c'est que je tourne en boucle et recréé les mêmes schéma, surtout négatifs. Et je le vérifie encore dans mes prises de produits, qui font des hauts et des bas perpétuellement parce qu'inconsciemment j'aimerais me détacher de mes addictions, mais étant en contradiction intérieurement je recommence toujours et encore. Et ça se répète. Ces schémas se retrouvent dans mes relations avec autrui également. Cette pathologie, selon la psy, me fait également faire/dire l'inverse de ce que je voudrais vraiment. Et tout ça je ne m'en rend pas compte, enfin un peu plus depuis cette thérapie, mais en vrai je m'en branle et j'ai décidé d'en faire un trait de caractère (en écrivant ça je me dis que j'suis un vrai timbré, mais c'est pas grave).

Enfin bref, tout ça pour dire qu'entre dissociation au sens psychanalytique et la dissociation au travers de produits il n'y a aucun rapport. Vraiment.

Pour ma part j'y vois un lien, dans le sens où lorsque l'on parle de dissociation au travers de produits, j'y vois un clivage de l'esprit d'après le mécanisme décrit par la psychanalyse. Mais après je peux me gourer.

Mon idée est que le clivage n'est qu'un mécanisme, un concept, alors que la dissociation comme on l'entend ici est la conséquence du clivage. Par exemple si tu clives la drogue comme un bon objet (le plaisir que t'en tire) et comme un mauvais objet (le mal que la conso te fait), mais que t'en reste à idéaliser inconsciemment la drogue comme un bon objet plutôt qu'un mauvais, et bien tu continues de proder, même si tu connais les conséquences que sont l'addiction et la répétition de schémas plutôt négatifs parce que destructeurs (avec en plus le fait de faire/dire l'inverse de ce qu'on veut vraiment, puisqu'on bascule sans cesse d'un côté ou de l'autre du déni, dans le sens où un coup on dés-idéalise la drogue et on prend les meilleures résolutions qui soit pour ne plus en être dépendant, quand d'un autre côté selon son humeur et ses tensions pulsionnelles, on idéalise de nouveau la drogue comme un bonne pour soi, ce qui peut être partiellement vrai, et on consomme sans modération avec les conséquences plus ou moins néfastes qui s'en suivent.

A partir de là je me dis que le clivage est un mécanisme inconscient, qui amène à des effets et ressentis conscients (perte de repères identitaire, spatial et temporel), avec son lot de tendances et de caractères (déni ou refoulement - la base de la défonce quoi, mais aussi des actions impulsives et répétitives, saupoudré de dépersonnalisation et de déréalisation). De ce que je comprends, ce sont ces tendances et caractères qu'on nomme dissociation, dissociation qui n'est que le résultat du clivage du Moi ou de l'objet. Le truc qui n'est pas évident à saisir, c'est que le clivage est multiforme et opère dans tout plein de domaine et de direction, et vu qu'il est inconscient on a du mal à se le représenter. Mais en faisant le lien entre le mécanisme clivant et les tendances et caractères du "dissocié", je pense qu'il y a moyen de comprendre plus en détails le phénomène dissociatif, par le biais de la psychanalyse (c'est l'objet de mon travail). Je vais essayer de montrer que ce qu'on appelle la dissociation, est une idée qui englobe le mécanisme du clivage et ses conséquences.

Par exemple, quand on dit je suis dissocié, pour moi ça veut dire qu'un clivage important c'est effectué dans l'esprit, et qu'il a entrainé un phénomène de dépersonnalisation ou de déréalisation (et on a accès qu'aux conséquences, quand on les conscientise en s'en rendant compte par le biais de nos ressentis suite aux effets de la dissociation).


Lee-O a dit:
Boulot fort trapu, bravo, et intelligente mise en scène pédagogique avec le concours d'un "Jamy" virtuel familier à la plupart d'entre nous. Sauf que, pour moi, le fond du propos est irresponsable.

J'y ai écrit notamment :

Essaye de ne rien prendre qui soit "dissociatif". C'est comme dire, "En fait, je m'en branle de la quête, de savoir qui je suis, autant m'éparpiller façon puzzle, mes souffrances en seront raccourcies" !

Pour tout dire, je suis cohérent : les conseils que je donne, je les suis moi-même, donc je n'ai quasiment pas d'expérience des "dissociatifs". Je me souviens néanmoins d'un trip au 2C-P assez terrible (et looooong, bordel !), et je ne sais pas si ceux qui connaissent cette catégorie de produits classent ce dernier dans les "dissociatifs", mais pour moi, l'effet que ça m'a fait correspondait plutôt bien au mot. Et cet effet n'était vraiment ni utile ni dépourvu de risques psychologiques plutôt graves.

Le boulot que tu as fait est vraiment assez sérieux, Laura, même s'il est un peu trop "scolaire" et pas assez complété d'éléments de CR subjectif sur ces sujets pour faire pièce à la théorie, d'une voix qui parle d'expérience. Du coup, en sortant de sa lecture pas complète mais mettons de 60% de ton texte, mon hypothèse privilégiée, c'est que ta démarche -- que tu en sois consciente ou pas --, c'est de justifier l'intérêt d'user de ces produits. Pas de faire un vrai point sur ces questions, un point objectif parlant du point de vue de "l'utilisateur de prods" mais aussi, plus généralement, de celui de l'être humain face à ses problèmes existentiels, ou encore de celui du thérapeute en nous, notamment d'ordre freudien.

Yop, je vois que tu as ta vision de la dissociation, pas mal de convictions et une faculté à l'interprétation. Je vais essayer de répondre point par point pour éclairer mon propos.
Si j'ai bien compris, tu penses que le fond de mon propos est irresponsable parce tu as mal vécu un état dissociatif, et parce que tu crois que je justifie l'intérêt de consommer des produits dissociatifs dans ma démarche. Si c'est le cas, je pense que ton engagement contre la prise de produit dissociatif te fait surinterpréter mes propos, et tu y vois ce que tu veux, en l'occurrence une justification de prise de disso.

Le truc c'est que je n'ai pas parlé de drogue dans mon article (d'où le fait qu'il n'y est pas de CR......), donc je ne comprends pas vraiment comment tu peux en venir à dire que je justifie la prise de disso...enfin si j'ai bien compris que tu as associé le clivage à la prise de disso, et que tu as adopté une grille de lecture erronée quand aux propos de l'article. Pour expliquer la confusion je vais citer PaRaLLeL :

PaRaLLeL a dit:
"dissocié". Terme qui en psychanalyse n'a rien à voir avec la prise de produits dits "dissociatifs".

Donc il faudrait qu'on parte sur les mêmes bases de compréhension, qui sont que le clivage est un mécanisme psychique opérant dans l'esprit, et n'a rien avoir avec la consommation de stupéfiant. Donc lorsque la psychanalyse dit que le clivage est utile au développement de l'individu, je ne dis pas qu'il lui est utile de se droguer. Pour ce qui est de la forme du texte, si tu le trouves trop scolaire ou pas assez objectif, je t'invite à nous présenter un travail selon tes goûts et envies, et tu verras qu'il y aura toujours quelqu'un pour te dire que tu aurais du faire comme lui voyait la chose lol.

Vis à vis du 2c-P, c'est un psyché très puissant, qui a comme toutes les drogues très puissantes un fort potentiel à dissocier l'usager. On retrouve aussi le phénomène de dissociation lors d'abus ou de bad trip. Psychiquement, le clivage permet de dissocier l'individu de ses émotions pour s'en détacher lorsque l'angoisse se fait trop présente. Le clivage peut donc être ton ami.


Lee-O a dit:
Grâce à la capacité de discrimination et d'attention qu'il établit, le clivage normal permet l'organisation des émotions, des sensations et des pensées ou encore des objets, [...]
son rôle est éminemment positif dans la structuration de la psyché comme dans l'instauration des modes relationnels. [...] Il s&#8217;agit de trouver un équilibre en soi, pour s&#8217;adapter au mieux en se dissociant de certains affects dans certaines situations.

Là, ça commence à coincer, pour moi, parce que tu fais une présentation trop positive de ce dispositif psychologique humain standard. C'est un des éléments qui m'ont fait penser que ta motivation infraconsciente est de justifier positivement l'utilisation de ces prods, alors qu'à mon sens, c'est le contraire qu'il faut faire (en décourager fortement l'usage). (Et à ce compte, je suis content que les circonstances m'aient permis d'intervenir avant la publication de ta Partie 2. ;->)

J'ai peut être du mal avec mon "infraconscience" (faudra m'éclairer sur le sujet), mais ce que je sais c'est que je ne suis là ni pour encourager une conso, ni pour décourager un usager de consommer. T'es dans ton délire anti dissociatif, et désolé de ne pas le partager, mais je vais continuer de tacher à rester objectif en me contentant de décrire des phénomènes psychologiques, plutôt que de juger ou moraliser des comportements. Le clivage comme la dissociation ne sont ni bon ni mauvais, parce que ce ne sont que des concepts, et je ne juge pas les concepts. Pour ce qui est des conséquences des états dissociatifs, il me semble avoir fait la part des choses en présentant le clivage "normal" et le clivage "pathologique" dans mon article, en espérant que ce passage ne fasse pas partie des 40%..?


Lee-O a dit:
Plutôt que de dire que ce mécanisme est "éminemment positif", je dirai que c'est un pis-aller, qu'il évite que notre psychè s'effondre (au sens de "perdre dangereusement en vitalité"). Autrement dit (et franchement, pas la peine de s'intéresser à Freud si l'on ne comprend pas ça), le refoulement n'est en rien constructif pour la personne ; c'est un mécanisme de défense du Moi, de l'égo, une mesure "conservatoire". Plus on a besoin de refouler, et plus, pour avancer positivement dans le sens de la libération (des noeuds névrotiques) et de l'accomplissement de soi, on aura de travail ultérieurement pour annuler et comprendre ces mensonges que l'on a été contraint de se faire à soi-même pour se préserver face à des évènements traumatiques (par la méthode freudienne et aucune autre).

J'aurais tendance à croire que l'on se construit sur le refoulement, pour ne pas se subir ou succomber à soi-même. Maintenant qu'il faille dépasser ses croyances et illusions pour s'émanciper et gagner en maturité, je te rejoins là dessus.


Lee-O a dit:
Là, c'est encore plus flagrant que tu ne maîtrises pas tant que ça ce dont tu parles (<-- ça n'est pas une agression de ma part, on cause, j'essaye d'établir des faits par l'argumentation en raison). En effet, par la formulation "Mais poussé à l&#8217;extrême et utilisé trop fréquemment...", tu donnes bien trop l'impression que le sujet est aux commandes de ce mécanisme (--> "Tu sais, je trouve que tu clives trop, ces derniers temps ; le refoulement, c'est utile, mais c'est comme pour tout... pas d'excès, please !" ;D). Bon, alors c'est peut-être une maladresse de formulation, tu me diras. Les faits, comme toi et "Jamy" l'avez tout de même établi sous différentes formules dans ton texte, c'est que c'est un mécanisme inconscient sur lequel notre conscient n'a pas de prise.

Effectivement on peut y voir une maladresse dans la formulation, mais en écrivant l'article à partir de bouts d'articles, je ne me suis pas dis que les lecteurs joueraient autant sur les mots...

Pour ce qui est du phénomène inconscient, ce qui a de bien c'est qu'aujourd'hui que l'on connait très bien les mécanismes du déni et du refoulement, on a quelques moyens de s'en rendre compte chez soi et chez autrui, comme tu l'a présenté dans ton exemple caricatural. On peut donc très bien dire à quelqu'un, ou se dire à soi-même, qu'il serait bon de moins refouler ou moins dénier la réalité quand on connait ses torts. Si tout le monde n'a pas des aptitudes à analyser théoriquement les phénomènes psychologiques, je me dis qu'il ne faut pas prendre les gens pour des idiots, parce qu'ils sont largement apte à reconnaitre les masques que chacun présente, et qu'il présente eux-mêmes...maintenant que chacun se cache pour se préserver, y a rien de plus naturel.


Lee-O a dit:
Alors, ça, c'est marrant à lire, parce que, pour moi, la réalité, c'est quasiment le contraire de ce que tu avances là ! La société, les discours publics, surtout actuellement, sont en gros déficit de vérité et l'interprétation "instrumentalisée" des faits est un "sport" très répandu

Mon propos sur la société du paraitre était ironique, il ne fallait pas l'interpréter au premier degré. Je suis d'accord sur le fait que la vérité est bafouée et que les gens se rassurent avec des illusions.


Lee-O a dit:
Disons qu'avec la dissociation tu peux réguler ton état psychique entre tes pulsions qui te travaillent de l'intérieur, et les exigences de la réalité extérieure.

Voilà encore un exemple où, tout en sachant -- je crois bien l'avoir vu -- que tu parles d'un mécanisme inconscient, tu sembles en faire un outil dont le conscient peut se saisir pour en user à sa guise (ce qui serait -- si tu confirmais que tu y attribues une valeur d'outil -- le contresens le plus extrême sur tout le phénomène).

j'y comprenais rien, enfin je ne voyais pas le lien avec la dissociation, jusqu'à ce que je me rende compte que ce qu'on appelle communément la disso ici, c'est le clivage, avec ses mécanismes bien particuliers qui dans leurs explications détaillées, vont bien plus loin que la simple dissociation corps/esprit.

Bon, au moins la camarade est-elle honnête : elle précise n'avoir pas, sur ces sujets, une expérience propre de pensée personnelle déroulée sur des années et des années.

Oui j'y vois un outils, qui comme tout outils demande une phase de découverte, d'apprentissage, d'appropriation, d&#8217;exercice, et de savoir pour le pratiquer. J'ai cru comprendre que tu trouvais "vraiment ni utile ni dépourvu de risques psychologiques plutôt graves " la mécanique dissociative, maintenant si je te rejoins sur le fait que pratiquer la dissociation en décomposant les rouages de son esprit est un jeu risqué, pour ma part j'y vois un grand intérêt, ne serait-ce que pour ce qui est de la découverte de soi, dans une démarche psychonautique.

Tu comprendras donc que je vais continuer à théoriser ma pensée personnelle, déroulée sur des années et des années d'expérience...encore une fois t'interprète les choses selon ce qui t'arrange, puisque j'ai juste précisé que je n'y connaissais rien en psychanalyse et en clivage, néanmoins ça fait des années que je consomme des dissos donc je crois avoir deux ou trois connaissances sur le sujet. Maintenant je n'ai que 26 ans, donc c'est sur que je ne peux pas avoir "d'expérience propre de pensée personnelle déroulée sur des années et des années"...mais si c'est le cas pour toi, je veux bien que tu nous en dises plus sur ce que tu connais de la dissociation, notamment ce qui te fait penser qu'elle n'est pas utile.


Lee-O a dit:
à l'état dit "dissocié". On ne se reconnait plus, on galère à se repérer dans l'espace et dans le temps, on bouge bizarrement, on fait des gestes et des actions aussi sensées que incohérentes, aussi précises que désordonnées, aussi réfléchies qu'impulsives. Les idées fusant à 1000 à l'heure, on alterne des phases d'assurance et des phases de perdition dans notre for intérieur, c'est un peu comme un délire bi-polaire, en alternant les phases maniaques et déprimantes

Aah ! Bon, au moins -- là, c'est flagrant -- tu t'efforces honorablement de faire ce que je disais plus haut, c'est-à-dire présenter tous les faits. Et donc, tu décris en partie -- et opportunément sur un mode d'avertissement sans ambiguïté -- ce pourquoi je tiens à contester que les produits dissociatifs nous soient, en quelque façon que ce soit, bénéfiques. Merci.

Comme préciser dans le préambule, le premier article traite du clivage et non de drogue, et le second article portera sur la dissociation lors d'une prise de stupéfiant, donc j'y ferais évidemment mention des désagréments liés à cette pratique, comme je l'ai fait pour le clivage à caractère pathologique.


Lee-O a dit:
Si on fait le boulot de "quête personnelle", d'auto-analyse, sérieusement et dans la durée (possiblement aidé par certains produits -- voir ma réponse à Berrocca), il faut avoir la ressource et le courage de s'appuyer sur ces phénomènes d'irruption de notre vérité, ces "actes manqués" et ces épisodes de "catharsis" s'ils se produisent. De s'en souvenir et de repartir de ces nouveaux éléments de notre vérité qui se sont fait jour.

C'est bien d'avoir ouvert la discussion sur une approche introspective de la dissociation. Ton approche résume ce que j'ai dis dans mon article pour ce qui est du clivage, et quand au fait de se servir des produits pour gagner en connaissance de soi, je pense qu'il est utile de maitriser la dissociation pour se maitriser soi-même, et ne pas pâtir de ses consommations, de ses angoisses ou de son manque à vivre. On rentre là dans un processus d'individuation demandant de se confronter à son ego, à sa part d'ombre (la part clivée que l'on ne veut pas voir en la refoulant ou la déniant), avant d'en émerger plus mâture et plus fort une fois que l'on a éprouvé et accepté ce qui nous fait défaut...avec parfois la possibilité de travailler notre matière psychique, afin de se construire selon ses choix et envies, plutôt que de toujours se rendre compte après coup de ce que l'on a fait de soi, quand le masque tombe.
 
Ba ba ba, "I'm impressed" ! :)

Merci beaucoup d'avoir pris un temps certainement considérable et de m'avoir répondu avec un maximum de sérieux et d'esprit constructif, en parallèle avec de la réponse à PaRaLLeL, camarade ! Te lire en entier -- s'agissant d'une contribution très substantielle et très bien organisée, abordant aussi bien le fond que la "méta-réflexion" incontournable sur le thème, "Faudrait préciser mieux de quoi on parle, parce que là..." ;) -- a été un grand plaisir très stimulant pour moi.

Il me semble que ce qu'il convient que je fasse, "at this point", ce n'est pas (en tout cas pas tout de suite) relire ton texte dense que j'ai lu ce matin au lit et tenter d'y répondre point par point ou à certains points. Mais plutôt, me fonder sur ce que j'ai retenu en première lecture pour avancer sur le méta-thème, "Mais de quoi on parle, en fait" et faire quelques considérations annexes qui pourraient être utiles.
oOo​

Matières complexes et auditoires de destination

D'abord : broder un peu autour de ma surprise épatée, l'impression de ne pas avoir lu le même auteur la 1ère fois et la 2nde, pour dégager un peu d'intelligence supplémentaire sur les échanges en forum, surtout quand ils abordent des matières denses et complexes.

1ère piste : effet "Neymar au PSG". Dit comme ça, ça verse pour partie dans l'auto-flatterie, de ma part, donc gaffe, Lionel. ;) Restons-en plutôt à la notion générique ramenant un peu de modestie dans le propos de "Hausser son niveau de jeu". Qui vaut tout autant pour moi.

Hier matin, je me suis dit, "Bon, si on cause, il serait sérieux que je rafraîchisse mes notions comme il l'a fait lui". J'ai googlé une bonne heure, voire 1h30. Et mon sentiment principal, après ça, c'était "Dis donc, mon gars [moi, voix intérieure], t'es quand même un peu léger d'aller contribuer un pavé sur la base de ta sauce perso sur tous ces sujets constituée au fil des décennies". Et ensuite, "En fait, là, je pourrais moi-même aller reprendre toute une part de ce que j'ai écris comme je l'ai fait pour lui, si on veut être juste". ;)

Voilà, déjà : je fais ma part de l'évacuation du volet polluant "confrontation d'égos", comme tu l'as fait toi en me faisant en retour ce genre de remarques (justifiées, donc) tout en n'insistant pas là-dessus et en faisant au contraire tout ce qu'il faut pour favoriser l'émergence d'un dialogue constructif. Compliments pour ça.

2ème piste (en fait un autre angle de vue sur la 1ère, il me semble) : lorsque nous nous efforçons de poser un propos assez complexe, la formulation (ou la "mise en scène") change considérablement selon l'auditoire auquel il s'adresse. Parfois, l'écart de culture spécifique entre l'auteur et ses lecteurs est tellement marqué que le projet didactique généreux initial est en fait irréaliste et que l'effort pour le rendre possible aboutit à dégrader la qualité ou la forme du propos.

Ça me semble être le facteur principal de ma surprise à la lecture de ton texte ci-dessus. Et de mon côté, je pourrais dire que l'équivalent, c'est ce souci débordant que j'ai de tenter d'aménager les "niveaux de lecture" de mes textes profus, foisonnant à l'excès, avec des soulignés, des gras, des italiques, des couleurs, des sous-titres dans tous les sens, qui finissent par faire ressembler mes contribs à des sortes d'Arbre de Noël textuels clignotant de jolies couleurs, mais d'une monstruosité assez marquée. :D (Du coup, je fais pénitence, là, m'en tiens au strict minimum d'usage des italiques, gras, soulignés. ;) )
oOo​

Ma documentation d'hier

Voici ce sur quoi je suis tombé qui m'a paru pertinent pour cette discussion :


http:// suzannev.chez.com/notes/psyclinique/lecon8.html
Des notes de cours très synthétiques pour poser brièvement les différentes notions (1999 !).

www .leconflit.com/article-le-clivage-du-moi-ou-de-l-objet-comme-mecanisme-de-defense-70119488.html
Un excellent article recensant et résumant tout ce qui a pu s'écrire de majeur sur le "clivage", possiblement consulté par toi avant ta Part1, car j'y retrouve en dernier point de vue commenté celui d'Arnold Goldberg, apparemment l'inventeur de la distinction clivage horizontal/vertical (je n'étais pas trop au jus du clivage vertical). (2011)

www .cairn.info/revue-psychothérapies-2005-2-page-81.htm
Un résumé bien consistant d'un livre intitulé "Essai de (re)définition des mécanisme du clivage" par son auteur, un Belge, qui écrit clair, modeste et bien vulgarisé.

www .psychoweb.fr/articles/psychanalyse/344-le-deni.html
Un billet dispensable sur le Déni de 2008, mais qui peut ajouter du fond dans la démarche de documentation.

www .freud-lacan.com/index.php/fr/44-categories-fr/site/556-le-deni-au-lieu-du-refoulement
Un extrait sur le Déni -- avec corrélation utile entre problématique locale (le sujet) et globale (la société et son évolution) -- d'un dialogue bien vulgarisé qui compose un bouquin qu'il va falloir que je finisse par acheter, "L'homme sans gravité", de Charles Melman.

[PS : Punaise, les trucs qu'il faut faire pour ne pas se prendre un ERR_BLOCKED_BY_XSS_AUDITOR à répétion alors que tu viens de passer 3h à plancher et qu'au premier "Prévisualiser", les liens HTML ne posaient pas de problème !! Espace à supprimer dans chaque lien proposé]


Les spécialistes sont des humains névrosés comme les autres

Ça me semble important à rappeler : la psychanalyse n'est pas vraiment une science au sens strict, une "hard science", dans laquelle la rigueur rationnelle et la méthode cartésienne sont à dérouler simplement pour faire sens.

Les "pros" sont ceux qui approfondissent les concepts, qui s'y consacrent de la façon la plus poussée, mais bon, ils y vont avec leur biais névrotique propre, comme nous les autodidactes. Théoriquement, ils sont censés avoir fait eux-mêmes une analyse, et tout le monde a intérêt à ce qu'on reste discret sur les issues et qu'on fasse comme si, OK, ils sont qualifiés, clairs à eux-mêmes à hauteur de ce qui convient. Ce n'est pas le cas général. Bon, la plupart ont la déontologie de se surveiller dans leur pratique, d'autant que l'accent est lourdement mis, à juste titre, sur les phénomènes de "contre-transfert". Mais...

...j'ai toujours trouvé scandaleux, notamment, que cette discipline dont l'invention par Sigmund Freud -- qui parvient à "s'auto-analyser" de façon poussée pour en tirer de l'universel convaincant sans avoir eu à disposition la masse énorme de réflexions dans ce champ dont nous bénéficions, nous, depuis un siècle -- scandaleux que cette discipline, disais-je, puisse produire les "batailles de chiffoniers" vraiment indignes qui ont pu avoir lieu entre freudiens, lacaniens, "C'est moi qui représente légitimement l'héritage freudien et personne d'autre", "Non, c'est moi, et je vais te faire un procès" !... Où on va, là, si les soignants sont aussi "fous" que leurs patients ?? ;->

Bref, gardons-nous d'entretenir l'idée qu'il y a des sachants officiels et qu'il nous manquerait toujours quelque chose pour parler de ces sujets à la même hauteur.

oOo​

Bon, alors, de quoi on parle ?

Trop marrant, toujours, les "projections" -- je lis ce que je veux lire, pas ce qu'il y a vraiment écrit ! Bon, je ne ressens pas le besoin, pour l'instant, de retourner voir ce qui s'est joué dans ma lecture subjective de ton 1er texte ou ce que tu as pu y faire toi qui y a contribué.

Je sais avoir développé un syndrome de "sauveur", assez christique d'inspiration, ça a joué ici à l'évidence.

Reprenons, étant entendu que c'est toi qui détient la vérité de référence sur la nature de ce projet :

1) En psychanalyse, la dissociation, comme nous l'a rappelé PaRaLLeL, qui apparemment "consulte" pour ça, c'est -- selon ce que j'ai compris -- la distance que crée le sujet entre l'instance en lui qui agit et l'instance qui considère et juge les conséquences de ses actions. Cette dissociation est problématique, pathologique du point de vue des rapports humains, parce que les actes dont nous parlons sont des actes de, mettons, "retour de refoulé", qui sont dommageables aux personnes qui en sont l'objet. Et le problème, c'est que lorsque le sujet juge a posteriori (ou dans l'instant de leur commission, bien sûr, a fortiori) ces actes, il se sent tenu de trouver à perdre en sens empathique et en responsabilité morale (parce qu'en tant qu'être humain normalement empathique et éthique, il ne peut pas assumer sans danger pour son intégrité psychique ce qu'il a fait).

Tu valides, PaRaLLeL ?

En matière de substances psychoactives, les produits "dissociatifs", ce sont ceux qui contribuent à nous dissocier de notre être, à faire que nous ne nous sentons plus "les deux pieds" plus ou moins bien chaussés dans ce que nous avons construit (péniblement) jusque là de "chaussures" singulières valant comme extériorisation à peu près fidèle de ce que nous sommes à l'intérieur.

À ce sujet, merci de m'avoir confirmé que le 2C-P a en effet un volet d'effet dissociatif.

Mon souci, dans ce contexte, tu l'as compris, c'est que je trouve hyper-dangereux pour le sujet de jouer avec ça, que c'est déjà hyper-ardu de se trouver, de se construire, et que je ne vois absolument pas quel peut être le moindre bénéfice réel d'une telle expérience, alors que j'en vois très bien les grands risques.

Un des intervenants dans l'une des pages Web que j'ai cité (Melman ?) cite finement Rimbaud : "Je est un autre". Ce que je comprends (enfin mieux ! jamais vraiment accroché à Rimbaud, c'est Baudelaire qui me transporte !). Ce que je comprends : "Ni la langue, ni tous les mécanismes humains de construction de soi ne peuvent jamais rendre compte finement de la complexité que je ressens quant à la nature de celui qui est en train de penser, là". 350 ans plus tôt, un philosophe qui a particulièrement compté chez nous et pour le monde entier s'attaquait à peu près à cette question de façon beaucoup plus constructive : "Je pense, donc je suis". On repart d'une évidence irréductible et on avance rigoureusement. Arrivés en 1900, la démarche semble dangereusement inverse : "À quoi bon ?! [la quête de connaissance, de soi et du monde] Le réel est indicible !".

À toi et aux autres éventuellement !
 
Lee-O a dit:
www .leconflit.com/article-le-clivage-du-moi-ou-de-l-objet-comme-mecanisme-de-defense-70119488.html
Un excellent article recensant et résumant tout ce qui a pu s'écrire de majeur sur le "clivage", possiblement consulté par toi avant ta Part1, car j'y retrouve en dernier point de vue commenté celui d'Arnold Goldberg, apparemment l'inventeur de la distinction clivage horizontal/vertical (je n'étais pas trop au jus du clivage vertical). (2011)

www .cairn.info/revue-psychothérapies-2005-2-page-81.htm
Un résumé bien consistant d'un livre intitulé "Essai de (re)définition des mécanisme du clivage" par son auteur, un Belge, qui écrit clair, modeste et bien vulgarisé.

Pour ce qui est de l'article trouvé sur leconflit.com, j'ai fait un copier/coller des travaux de Goldberg dans la dernière partie de mon article, juste avant les schémas.

Merci pour le second article, je vais lire ça prochainement.


Lee-O a dit:
Mon souci, dans ce contexte, tu l'as compris, c'est que je trouve hyper-dangereux pour le sujet de jouer avec ça, que c'est déjà hyper-ardu de se trouver, de se construire, et que je ne vois absolument pas quel peut être le moindre bénéfice réel d'une telle expérience, alors que j'en vois très bien les grands risques.

Un des intervenants dans l'une des pages Web que j'ai cité (Melman ?) cite finement Rimbaud : "Je est un autre". Ce que je comprends (enfin mieux ! jamais vraiment accroché à Rimbaud, c'est Baudelaire qui me transporte !). Ce que je comprends : "Ni la langue, ni tous les mécanismes humains de construction de soi ne peuvent jamais rendre compte finement de la complexité que je ressens quant à la nature de celui qui est en train de penser, là". 350 ans plus tôt, un philosophe qui a particulièrement compté chez nous et pour le monde entier s'attaquait à peu près à cette question de façon beaucoup plus constructive : "Je pense, donc je suis". On repart d'une évidence irréductible et on avance rigoureusement. Arrivés en 1900, la démarche semble dangereusement inverse : "À quoi bon ?! [la quête de connaissance, de soi et du monde] Le réel est indicible !".

J'ai pour idée que la pratique de la dissociation avec certains produits, sert à passer au delà de quelques censures psychiques et de dépasser quelques mécanismes de défense tel le déni et le refoulement, en prenant un certain recul sur soi, pour mieux accéder à Soi après s'en être séparé (sortir de son égocentrisme et de sa raison trop raisonnante, poussant à dire "je" et tout intellectualiser au lieu d'éprouver ses ressentis et faire qu'un avec son corps).

Effectivement c'est un jeu dangereux, mais Rimbaud n'a pas du écrire "Je est un autre" en sirotant un panaché, il a du morfler de sa condition d'être extra vivant, et en arriver à comprendre que pour accéder à soi, à cerner ce "je" qui parle sans arrêt pour soi et d'ainsi arriver à le dépasser, il faut en passer par l'altérité, donc par la reconnaissance via l'autre.

D'où l'intérêt d'être empathique, et ça tombe bien puisque la dissociation offre une phase d'empathie quand elle ne rend pas apathique.

Il y a donc un processus d'individuation que l'on pourrait résumer comme allant du Moi au Toi, pour en arriver au Soi.

Autrement dit, on est tous bloqué dans notre Moi, complètement égocentré en niant autrui dans des dynamiques individualistes, et jamais on est soi parce qu'on ne rencontre pas autrui en faisant preuve d'altérité. Ce moment où l'on rencontre autrui, c'est lorsqu'il nous offre un reflet de soi, qui nous fait sortir de notre Moi, et alors on accède à son Soi, on découvre une face de sa personnalité vraie qui nous était inconnue comme on se leurrait dans notre Moi, ce Moi constitué du reflet de nos apparences que nous renvoient autrui.

Donc "Je est un autre", parce qu'il n'est qu'une projection de notre imagination, de notre Moi, une image idéalisée de soi que l'on construit à coup de rêverie, de fantasme et qu'on entretient dans une illusion d'être ce que l'on croit être (à savoir comment on se travestit en s'habillant ainsi ou en paraissant tel quel, avec un langage bien rôdé pour satisfaire et entretenir nos délires par le biais de la vanité et la flatterie d'autrui, toujours pour préserver notre Moi, notre ego).

Pour ce qui est du "Je pense donc je suis" de Descartes, on est typiquement dans la justification égocentrique de l'affirmation du Moi, de l'ego par dessus tout le reste (donc rien d'irréductible et de rigoureux, puisque Descartes s'est trompé à plusieurs reprise dans ses raisonnements). Aujourd'hui n'importe quel philosophie basée sur quelques spiritualité honnête sait que plus on pense, moins on est, parce que l'intellect et le mental nous éloigne de notre être, de notre essence. Du Soi au Moi, il y a la jactance d'un ego qui comble le vide pour tenter de rester dissocié dans la lumière, dans la partie présentable et brillante de sa personne, se Moi reluisant que l'on présente par orgueil ou vanité, faisant comme si on gérait et contrôlait tout, alors qu'en fait on ne fait que masquer ses angoisses et ses défauts, sa part obscure derrière une parure bancale le plus souvent...les trompeuses apparences quoi.

Maintenant libre à chacun de rester cliver dans la partie de lui qu'il préfère voir, souvent dans son ego qui se veut rassurant en le berçant d'illusion, mais alors t'es dissocié de toi sans même t'en rendre compte, puisque tu avances dans le déni ou dans le refoulement d'une névrose qui t'individualise et te fait te travestir pour plaire à autrui, parce qu'en tant qu'individu égocentré, tu ne t'aimes pas, tu as donc besoin de t'estimer d'une manière conditionnée par le regard d'autrui, dans des modes et codes précis. Sauf qu'au lieu de te servir du regard d'autrui dans un mouvement d'altérité, tu choisis de n'y voir que ce qui te plait en te disant que tu plais, et c'est une dynamique de régression narcissique qui s'opère en toi ("moi je m'aime"), toujours sans le savoir. Pour moi ce manque à être, cette volonté d'avoir, cette façon de non exister est le fond commun de tous les occidentaux qui ont grandi dans une société libérale.

Pour ma part je me suis rendu compte de ça après quelques expériences dissociatives, qui m'ont permit de m'avouer ce que je redoutais chez moi et chez autrui, en étant détaché de ma personne et plus apte à voir mes défauts et ceux des autres une fois que j'avais capté les miens ou les leurs (jeux de miroirs). A partir de là j'essaye de travailler sur mon égocentrisme, à &#339;uvrer dans un processus d'individuation plutôt que d'individualisation, et donc en acceptant la part d'ombre en moi, cette part clivée qui nécessite une seconde dissociation pour passer au delà du reflet de mes apparences, au delà du miroir dans lequel je m'auto-satisfait, il y a là une double réflexion à avoir, pour critiquer la petite voix intérieure qui lorsque je me critique, me rassure. Cette phase de réassurance est à dépasser pour commencer à entrevoir la vérité selon moi, et je sais qu'avec certains produits amenant à un certain état de dissociation, il y a moyen d'assez fragmenter son esprit pour en faire une analyse spectrale, disons que c'est comme découper ses pensées au scalpel, c'est incisif et pas fait pour les personnes ayant peur de tomber dans le vide de leur propre néant, parce que si le réel nous est inaccessible, c'est qu'il est terrible. Donc quand on en arrive à cet état de mort intérieure, de décompensation totale où son système nerveux est complètement déprimé...à ce niveau là soit tu restes "bloqué" ou "perché" dans ton Ça, dans ton inconscient loin de la réalité en ayant coupé tous les ponts avec ton Moi (apathie totale), soit tu retrouves ton Moi en ayant pris conscience d'un nouveau point de vue sur ta personne (avec ce que ça implique de ré-appropriation de soi et d'assimilation des connaissances découvertes dans des phases d'égocentrisme avant d'acquérir l'humilité recherchée d'une transe méditative, en plus des phases de déprime liées aux dures vérités que tu auras pu découvrir). Il y a effectivement beaucoup de chance d'y laisser quelques plumes, quand on se prend pour Icare à vouloir rayonner toujours plus haut dans le ciel des idées.

Bref soit t'es un aventurier, soit tu restes dans les sentiers battus. Ce que j'en pense c'est que l'aventure est dangereuse et la routine ennuyeuse, donc libre à chacun d'oser le hors piste, mais alors gare aux avalanches...
 
Respect pour ta quête, camarade, c'est déjà bien de s'en être choisi une, et tu en parles de façon... parlante, claire et passionnée|hâbitée.

Cela dit, il se révèle au fur et à mesure de notre conversation que nos quêtes respectives relèvent largement des deux options principales qui s'opposent dans ce domaine. Et nous sommes tous deux bien structurés et cohérents dans chacun son option, apparemment, puisqu'il me paraît logique que tu sois intéressé par les produits dissociatifs et que moi, je m'en tienne éloigné.

Après ma première lecture de ton texte, hier soir, une référence s'est imposée à moi spontanément pour qualifier la tonalité de ton discours et la posture que tu adoptes : Nietzsche. En moins véhément (mais je suis sûr que tu n'es pas syphillitique ;>). Une passion centrale qui est, pour aller vite, l'amour déçu des hommes. Et qui conduit donc à vouloir, pour faire cesser ce chagrin existentiel tragique, changer les hommes en les fustigeant pour leur faiblesse et en les invitant instamment et puissamment à "tuer" (moralement) leur être actuel et à renaître sous une forme censément plus forte, accomplissant mieux les potentialités bonnes de l'être humain. C'est uniquement ainsi que le chagrin quasi insoutenable de Nietzsche pourra prendre fin.

Pourtant, quand Zarathoustra commence à descendre de sa montagne, la première personne qu'il rencontre -- un vieux saint, qui est donc aussi, s'il est là où il est, c'est-à-dire en retraite, un "sage" au sens antique ["Ce que j'ai appris est incommunicable aux autres, qui doivent faire leur propre chemin, donc je n'ai rien à leur dire"] --, le prévient que ce n'est pas dans cet état d'esprit qu'il faut descendre parler aux hommes. Zarathoustra se dit in petto, "Ce fou croit encore en Dieu alors que Dieu est mort !" et cette réflexion lui suffit pour juger que la parole du saint est sans valeur.

Si cette analogie te convient, je pourrai poursuivre le raisonnement "parabolique", mais je ne vais peut-être pas le faire tout de suite pour ne pas faire trop long et ne pas y passer du temps s'il s'avère que ça ne te parle pas.

[PS2|Indice: Tout ce qu'a imprimé "Dieu" en nous de l'ordre du souci de nous conduire vertueusement subsiste, reste "vivant", après sa "mort" (= quand on ne peut plus croire au surnaturel) ; c'est le saint qui voit et parle juste.]

oOo​

Vu de chez moi, et toujours pour aller vite et toujours en respectant mon interlocuteur, ces deux options, ce sont Eros et Thanatos (comme on se retrouve !). Au passage, notons que Thanatos est au coeur des mots les plus forts de Nietzsche, et même d'une logique qu'on peut y lire : Dieu est mort (il n'y a plus "d'espérance", d'horizon positif), donc l'Homme tel qu'il est doit mourir et laisser la place au Surhomme (pour peut-être les retrouver, ou plutôt, ne plus en avoir besoin).

C'est radical, quand même, et putain de risqué, comme on disait déjà.

Il y a, depuis l'après guerre mondiale et le summum exterminateur de la "solution finale" -- et on peut comprendre pourquoi -- un fil qui n'a cessé de s'épaissir de "haine de soi" qui nous habite dans des proportions variables. Haine de soi-espèce, haine de soi-Occident + pour chez nous, haine de soi-nation. Thanatos se fait plus présent.

Ce phénomène a eu des conséquences "structurelles", notamment : si on ne s'aime plus soi-civilisation, il faut aller voir chez les autres pour espérer pouvoir aimer à nouveau. Ça a donné, pour ma génération, et impulsé par les Américains, un élan fort pour aller voir du côté des philosophies et spiritualités asiatiques, avec le Bouddhisme comme "temple de ressourcement" central.

Or -- et les contre-argumentations éventuelles sont les bienvenues, bien sûr -- le bouddhisme renferme évidemment bien des bouts de sagesse que la mentalité d'ici ne pouvait pas produire, mais il est fondamentalement du côté de Thanatos, puisqu'il prescrit de tuer Eros en nous, arguant qu'ainsi, nos souffrances disparaîtront. Dans les mots grecs, c'est le choix de "l'atharaxie", étouffer ses émotions et son désir pour ne pas en connaître les souffrances correspondantes qui y sont consubstantiellement liées.

Il n'est pas inutile de faire remarquer que cette culture n'a pas produit de progrès notables pour ceux qui en participent. Et que la nôtre, méditerranéo-européenne, privilégiant l'option "Acceptons-nous dans notre nature", plutôt Eros souffrant que pas d'Eros du tout, a produit un enchaînement de progrès à peine croyable sur une durée très courte à l'échelle des phénomènes humains, dont une certaine généralisation fait vivre la planète entière aujourd'hui. Thanatos ne produit rien. Eros souffre mais produit.

D'ailleurs, ça vaut pour la pensée en général. Le bouddhisme et les philosophies orientales n'ont pas produit de sommes de connaissances et les concepts y sont restés plutôt primaires. Ce caractère primaire a logiquement contaminé les discours de ceux d'ici qui s'en réclamaient. "Il faut perdre son égo" -- Ah la la la, non mais c'est vrai ça, oublions tout ce qui a été développé ici des siècles durant en matière de pensée et de connaissance, régressons à un vocabulaire de 2000 mots dont, en plus, on n'est pas trop sûr du sens !

(Puisque tu as du goût pour la matière freudienne et t'es baladé récemment avec intérêt dans la masse des concepts produits, des questions posées, etc., comment peux-tu reprendre cette acception "bas du front" et peu définie du mot créé par Freud ?)

Alors bien sûr, si la perfection était de ce monde, ça se saurait. Il y a des tares lourdes inhérentes à cet essor civilisationnel canon : la logique s'emballant à mesure que la technologie gagne en puissance de façon quasi exponentielle, nous nous retrouvons "aliénés", c'est-à-dire que nous ne pouvons plus être tout à fait nous-mêmes car vivant de plus en plus "hors sol", dans des structures urbaines denses qui n'en finissent plus de grandir, et qui au lieu de nous permettre de nous ressourcer tranquillement dans un milieu naturel, nous conditionne à suivre le rythme de plus en plus insoutenable des machines techniques. C'est aussi un des grands facteurs qui ont poussé une partie d'entre nous à "aller voir ailleurs" (en matière d'idées), dans des régions du monde non encore devenues demi-folles (il n'y en a plus beaucoup !).

Pour moi, quelles que soient les tares qui affectent notre modèle, issu du Berceau méditerranéen -- et il faut s'efforcer de ne pas voir que le négatif d'où nous en sommes, peu de gens le font --, on ne quitte pas son terroir d'origine quand il y a le feu, on s'efforce d'aider à l'éteindre. Quand on fait voeu d'abjurer sa loi et sa culture (ce qui ne manifeste déjà pas le meilleur esprit humain, donc), eh bien on peut souvent (pas toujours mais souvent) se retrouver définitivement "clivé", "dissocié" de cette origine.

De mon côté, la fidélité ne fait pas l'objet d'un choix, c'est l'engagement le plus fort et le plus souvent le plus positif pour l'être humain. L'Autre (dans notre propos, l'Asiatique philosophant) a une sagesse dont certains aspects ne nous ont pas été accessibles du fait de notre modèle ? J'y vais voir et je prends tout ce qui me semble pouvoir l'être. Mais mon corpus de base, ce à quoi j'agrège les bouts de sagesse de l'autre, c'est la culture méditerranéo-européenne et l'assez prodigieuse civilisation que ses caractères et choix de base ont permis. Il faut savoir "où l'on habite".

oOo​

Pour ce qui est du "Je pense donc je suis" de Descartes, on est typiquement dans la justification égocentrique de l'affirmation du Moi, de l'ego par dessus tout le reste (donc rien d'irréductible et de rigoureux, puisque Descartes s'est trompé à plusieurs reprise dans ses raisonnements).

Oups ! Le camarade dépasse de façon visible sa limite de compétence. Tu aurais pu au moins aller lire 2-3 paragraphes sur Descartes avant de commettre cette incongruïté anachronique, c'est-à-dire juger sans savoir de la contribution de Descartes, en bonne partie au prisme de cette pensée dégradée des bouddhistes occidentaux. Pourquoi penses-tu que le nom de Descartes et son apport sont toujours aussi présents aujourd'hui, ont donné l'adjectif courant "cartésien", et a ouvert sur tous les progrès scientifiques depuis le milieu du XVIIe siècle ?

Descartes n'en avait rien à battre du Moi, on ne pensait pas comme ça à cette époque. Quand il écrit cette phrase, il n'est pas en train de se masturber, du tout. Il cherche à refonder les outils de la connaissance et la grande question qui se pose à lui, pour ce faire, c'est "De quoi puis-je repartir, de quoi suis-je sûr comme connaissance de base ?". Et là, il la joue très honnête et très modeste, il ne se raconte pas d'histoire, il "pense contre lui", comme on doit pour avancer. Et honnêtement, il constate qu'il ne peut être rigoureusement sûr de rien. Gros flip, pour le dire anachroniquement. ;> Et à force de mouliner, il trouve. Je suis sûr d'une seule chose : si je suis en train de penser, c'est qu'il y a de l'être (conscient réflexif, humain).

Tu passes à côté d'un mouvement de pensée génial, là, c'est dommage. À partir de là, il ré-avance à petit pas pour fonder "la méthode scientifique", les fondements rationnels de tous les progrès scientifiques ultérieurs.

oOo​

Vu de chez moi, il y a une contradiction au coeur de ton propos : tu parles de façon lyrique de l'altruisme, de l'attention et de la présence vraies à l'autre, et pour autre chose que sa fonction miroir de moi (qui a pourtant sa part de noblesse, tu galvaudes, je trouve), et en même temps, je te trouve hyper-dur pour tes prochains, caricatural, même. Ton discours est tout de même largement charpenté sur l'argument que la plupart des gens ne font pas ce qu'ils doivent, tu les considères plutôt bien mal, comme des indécrottables Narcisse qui ne s'intéressent qu'à eux-mêmes et qui ne méritent que mépris sous tes mots (rapprochement avec Nietzsche).

Bien entendu, je ne me reconnais pas dans cette caricature, personnellement, je ne ressemble pas à ce noir portrait de tes prochains que tu brosses.

Maintenant libre à chacun de rester cliver dans la partie de lui qu'il préfère voir, souvent dans son ego qui se veut rassurant en le berçant d'illusion, mais alors t'es dissocié de toi sans même t'en rendre compte, puisque tu avances dans le déni ou dans le refoulement d'une névrose qui t'individualise et te fait te travestir pour plaire à autrui, parce qu'en tant qu'individu égocentré, tu ne t'aimes pas, tu as donc besoin de t'estimer d'une manière conditionnée par le regard d'autrui, dans des modes et codes précis.

Bien sûr qu'il y a des éléments de justesse dans ton constat. Mais tu noircis et réduit énormément.

Franchement, notamment, ça ne parle pas de moi du tout, ton "imprécation". ;> Déjà, s'il y a un truc qui a contribué à me garder sauf et à m'amener jusqu'ici, c'est que je m'aime -- je n'aurais voulu en aucun cas vivre la vie d'un autre -- et que ça, au moins, n'a jamais été en doute une seule minute des 34 millions que j'ai déjà vécues. ;) Merci Maman, au moins, cette part-là s'est déroulée de façon idéale !

Ensuite, je suis engagé et putain de sérieusement depuis plus de 50 ans dans mon auto-analyse... qui vient enfin de me permettre de parvenir à LA réponse qu'il fallait, et qui est à la fois le truc plus tristissime qui m'ait été révélé dans ma vie, et le truc le plus libérateur et débouchant sur un nouveau moi, très largement allégé de son tourment. :D

Pour ça, il m'a fallu faire le contraire du comportement caricatural que tu te plais à fustiger. Le principe freudien de base, pour cette démarche d'introspection, c'est, "Quand je m'attache à cette quête et crois trouver une réponse... je me mens à moi-même" ! Bien entendu. Ton inconscient veille, de là où il est. Entre lui et le conscient, on fait aisément affaire pour empêcher les curieux d'aller où ils semblent vouloir aller.

Il faut plusieurs itérations pour trouver une vraie ouverture, sur chaque question. On a tendance à utiliser l'image de l'oignon, pour ça. Tu enlèves une couche, c'est-à-dire tu trouves une réponse qui semble se tenir à la question psychologique (de rapport aux autres, de comportement, etc.) que tu cherchais à élucider. C'est celle qui t'arrange le mieux, en fait, genre, "Ah, OK, ben alors tout va bien". Bon, c'est là où on peut se référer à ton discours critique pour juger que celui qui s'arrête là, ouais, c'est clair, il ne fait pas le boulot, il est léger -- il fait du tourisme, ou quoi ? ;>

Au bout de 3-4 couches, et dans un esprit qui est pile le contraire de celui que tu dis, on finit par tomber sur la bonne explication. En général, c'est celle qui est la moins flatteuse pour toi. ;) "Pile le contraire" parce que bien entendu, pour s'engager dans une "descente aux enfers" de ta douleur, il faut être prêt à en prendre plein la gueule de l'égo dont tu parles.

Voilà, à mesure que j'avance dans mon propos, je trouve au moins plusieurs points de contact avec ton discours, avec maintenant celui-ci en plus : quand tu fais cette démarche, tu dois être dans l'humilité la plus grande, tout près de l'humus... je ne suis rien, a priori ; le quelque chose, la substance [PS2: de ton être] et sa vraie nature (psychologique, existentielle, morale) reste à établir.

[PS2: En termes de "prods", 1) tes dissociatifs désorientent sévèrement l'égo, OK ; mais est-ce bien l'objet de la démarche dont nous parlons ? N'avons-nous pas, toi d'abord et moi ensuite, bien établi que c'est l'inconscient qui est un puissant Cerbère décourageant toutes nos tentatives d'auto-élucidation, qui nous barre de nous-même (égo n'étant qu'un acolyte dans ce procès) ? Et est-ce que quiconque a cherché à établir si les dissociatifs gênent le travail de cet inconscient ? 2) La MD, confiée par Shulgin à des psy californiens anticonformistes, a fait des miracles pendant 2-3 ans pour "détourmenter" et ouvrir des analysants ou consultants en 1 séance ; pour moi, il est évident que c'est le "prod" exceptionnel qui peut aider le plus dans la démarche]

oOo​

Enfin, pour aborder la part en partie juste à mes yeux de ton discours sur "la perte de l'égo" (pour parler en termes post-bouddhiques ;>).

Il y a des mots pour ça chez nous, et on y perd -- j'en ai déjà un peu parlé -- à aller prendre les mots moins évolués des autres pour parler d'un phénomène.

C'est Lacan qui a bien fini de caractériser la chose. Nous nous tenons nous-mêmes sous l'emprise de la nécessité du désir ou de la reconnaissance de l'autre (en gros c'est pareil) pour juger que la satisfaction est là. Je ne sais pas si tu le voies, mais c'est déjà "altruiste", en un sens : je donne à l'autre un pouvoir sur moi, c'est lui qui déterminera mon "heur", bon ou mal. [PS2: Le narcissisme avec lequel je te trouve trop sévère n'est pas une origine, c'est une conséquence de ce choix de dépendre du regard de l'autre (miroir, ô mon miroir, suis-je suffisamment séduisant{e} pour le capter, ce regard ?)]

Et il y a encore plus altruiste, empathique dans ce noeud névrotique majeur : je veux me comporter comme cet être que j'aime le voudrait, je veux le ou la satisfaire. En réalité, il faudrait dire "comme je me figure que cet être que j'aime le voudrait". Et ça ne correspond souvent pas à la réalité.

"Perdre l'égo", donc-- puisqu'il me faut taper N fois dans cet exercice cette expression quasi synonyme de bêtise humaine ! --, c'est se détacher de ce lien funeste que l'on se crée dans la dépendance au désir ou au regard de l'autre. C'est revenir à l'attitude la plus saine : chercher à se comporter dans la nature de son être, sans se créer des noeuds dans la tête à n'en plus finir à chercher à deviner le désir de l'autre -- il faut le lui demander ! -- ou bien à complaire à l'autre pour (censément) être accompli.

oOo​

Finalement, il me semble qu'on parle des mêmes choses, faisons des considérations parallèles, mais ce qui nous sépare, c'est le chemin à prendre pour y parvenir. Qu'en penses-tu ?

Bonne soirée et A+ !

[PS de 00h11 : Punaise, merci, Man, tu m'as stimulé grave et j'espère que je continue à te stimuler aussi !]

[PS2: Petits rajouts éclairants - merc. 23/08, 13h55]
 
Lee-O a dit:
Pourtant, quand Zarathoustra commence à descendre de sa montagne, la première personne qu'il rencontre -- un vieux saint, qui est donc aussi, s'il est là où il est, c'est-à-dire en retraite, un "sage" au sens antique ["Ce que j'ai appris est incommunicable aux autres, qui doivent faire leur propre chemin, donc je n'ai rien à leur dire"] --, le prévient que ce n'est pas dans cet état d'esprit qu'il faut descendre parler aux hommes. Zarathoustra se dit in petto, "Ce fou croit encore en Dieu alors que Dieu est mort !" et cette réflexion lui suffit pour juger que la parole du saint est sans valeur.

Si cette analogie te convient, je pourrai poursuivre le raisonnement "parabolique", mais je ne vais peut-être pas le faire tout de suite pour ne pas faire trop long et ne pas y passer du temps s'il s'avère que ça ne te parle pas.

[PS2|Indice: Tout ce qu'a imprimé "Dieu" en nous de l'ordre du souci de nous conduire vertueusement subsiste, reste "vivant", après sa "mort" (= quand on ne peut plus croire au surnaturel) ; c'est le saint qui voit et parle juste.]

L'analogie me convient, elle me semble très bien choisie d'ailleurs ! la radicalité de Zarathoustra représente autant sa force que ses faiblesses en matière de communication, et comme l'a dit Nietzsche lui-même, de tels propos ne pourront être compris que 100 années plus tard. Et je crois que lors de ce dernier siècle, on les a en partie bien compris, et en partie très mal compris, mais de cette ambivalence tient le génie de la pensée nietzschéenne en correspondant à toutes les idéologies et entreprises humaines, qu'elles soient bonnes ou mauvaises dans leurs actions.

S'il est clair que la transcendance du catéchisme catholique est encore très/trop imprégnée dans notre société à tendance patriarcale, d'un côté je pense que respecter une forme d'autorité est nécessaire pour tenir un certain ordre moral, éthique, politique et civique, quand d'un autre côté la soumission d'une servitude moderne qui en découle peut être des plus révoltante...et c'est en ça que je juge utile de secouer mes chers contemporains pour leur dire de ne pas se laisser aliéner par un modèle libérale sur fond de corruption...et de possiblement rechercher un état des choses moins vertical, mais plus horizontal en gagnant en immanence, mais aussi en sortant d'une pensée dualiste et donc réductrice (genre le FN sont les méchants, donc même si on est en démocratie, vous devez voter Macron sinon vous êtes dans le camp des méchants...).



Lee-O a dit:
Vu de chez moi, et toujours pour aller vite et toujours en respectant mon interlocuteur, ces deux options, ce sont Eros et Thanatos (comme on se retrouve !). Au passage, notons que Thanatos est au coeur des mots les plus forts de Nietzsche, et même d'une logique qu'on peut y lire : Dieu est mort (il n'y a plus "d'espérance", d'horizon positif), donc l'Homme tel qu'il est doit mourir et laisser la place au Surhomme (pour peut-être les retrouver, ou plutôt, ne plus en avoir besoin).

C'est radical, quand même, et putain de risqué, comme on disait déjà.

Nietzsche n'était pas là pour distraire ses contemporains, c'était un mégalo en puissance qui avait cette volonté de dépasser la condition humain pour effectivement refonder les valeurs morales et éthiques de toute une civilisation...vaste programme qui l'a rendu fou, mais son concept du surhomme très peu abordé dans ses écrits a de quoi laisser rêveur, et n'est pas si mythique quand on l'associe à l'éthique de la philosophie de Spinoza (que Nietzsche a kiffé), quand il s'agit de travailler ses passions joyeuses en connaissant et agissant sur ses passions tristes. Il s'agit là de tirer le meilleur de soi, et cette idée me plait, si cela peut favoriser mes pulsions de vie (Eros) créatrices, plutôt que mes pulsions de mort (Thanatos) destructrices. Même si la création passe souvent par la destruction, enfin après ça devient complexe.

Si Nietzsche a plutôt bossé sur l'opposition Dionysos et Apollon, plutôt que sur Eros et Thanatos qui est plutôt lié aux travaux de Freud (mais je ne suis ni un spécialiste de Nietzsche, ni de Freud), en tout cas pour ce qui est du risque, c'est sur que ce n'est pas en entretenant sa vanité dans un comportement nihiliste des plus passif, que l'on va tout un chacun et donc ensemble se sortir du mal-être de notre civilisation, des inégalités et autres institutions qui détruisent les liens sociaux et les chances d'une émancipation naturelle à l'échelle de l'humanité.




Lee-O a dit:
Or -- et les contre-argumentations éventuelles sont les bienvenues, bien sûr -- le bouddhisme renferme évidemment bien des bouts de sagesse que la mentalité d'ici ne pouvait pas produire, mais il est fondamentalement du côté de Thanatos, puisqu'il prescrit de tuer Eros en nous, arguant qu'ainsi, nos souffrances disparaîtront. Dans les mots grecs, c'est le choix de "l'atharaxie", étouffer ses émotions et son désir pour ne pas en connaître les souffrances correspondantes qui y sont consubstantiellement liées.

Il n'est pas inutile de faire remarquer que cette culture n'a pas produit de progrès notables pour ceux qui en participent. Et que la nôtre, méditerranéo-européenne, privilégiant l'option "Acceptons-nous dans notre nature", plutôt Eros souffrant que pas d'Eros du tout, a produit un enchaînement de progrès à peine croyable sur une durée très courte à l'échelle des phénomènes humains, dont une certaine généralisation fait vivre la planète entière aujourd'hui. Thanatos ne produit rien. Eros souffre mais produit.

D'ailleurs, ça vaut pour la pensée en général. Le bouddhisme et les philosophies orientales n'ont pas produit de sommes de connaissances et les concepts y sont restés plutôt primaires. Ce caractère primaire a logiquement contaminé les discours de ceux d'ici qui s'en réclamaient. "Il faut perdre son égo" -- Ah la la la, non mais c'est vrai ça, oublions tout ce qui a été développé ici des siècles durant en matière de pensée et de connaissance, régressons à un vocabulaire de 2000 mots dont, en plus, on n'est pas trop sûr du sens !

Je n'ai jamais rien lu ou entendu quand à d'éventuels liens entre les pulsions de mort et le bouddhisme, c'est peut être un peu radicale comme approche, alors que la philosophie/religion bouddhiste me semble plus nuancée. Non pas qu'il est question de tuer ses pulsions de vie, mais plutôt de rechercher un état de neutralité, de nirvana. André Green a proposé des travaux sur le narcissisme, où il place entre le Même et l'Autre, l'état de Neutre. C'est à dire entre la rencontre de l'Autre dans l'altérité, et la confusion de sa personne dans le Même que l'on voit en face de soi. Donc entre la recherche narcissique du Même, de ce que l'on veut voir chez autrui en niant tout ce qui ne nous ressemble pas, et la rencontre essentielle avec autrui (l'Autre), il place le Neutre, état similaire à un ni ni, où il y aurait une forme d'ataraxie, mais pas d'apathie, ce qui pourrait suggérer une possible forme d'empathie, mais sans réponse sympathique envers autrui. Donc le bouddhiste "Neutre" ne nierait pas l"Autre", sans pour autant le reconnaitre comme un "Même" (c'est une hypothèse).

Pour ce qui est de du bouddhiste cherchant à perdre son ego, je ne sais pas si il s'agit d'un cliché entretenu par des occidentaux aux egos surdimensionnés, mais effectivement l'idée semble vouée à l'échec, parce qu'on ne peut vivre sans ego, ou alors c'est la mort de l'esprit, que Nietzsche a expérimenté en décompensant totalement au point de devenir un légume...J'y connais pas grand chose sur le sujet, donc je préfère en rester au fait que le bouddhiste cherche à se détacher de l&#8217;intellect, du mental qui parle et parle sans arrêt, et en rester à une vie plus contemplative en posant un minimum de mot pour dire un maximum de chose.




Lee-O a dit:
(Puisque tu as du goût pour la matière freudienne et t'es baladé récemment avec intérêt dans la masse des concepts produits, des questions posées, etc., comment peux-tu reprendre cette acception "bas du front" et peu définie du mot créé par Freud ?)

Je ne sais pas de quelle expression tu parles.





Lee-O a dit:
Oups ! Le camarade dépasse de façon visible sa limite de compétence. Tu aurais pu au moins aller lire 2-3 paragraphes sur Descartes avant de commettre cette incongruïté anachronique, c'est-à-dire juger sans savoir de la contribution de Descartes, en bonne partie au prisme de cette pensée dégradée des bouddhistes occidentaux. Pourquoi penses-tu que le nom de Descartes et son apport sont toujours aussi présents aujourd'hui, ont donné l'adjectif courant "cartésien", et a ouvert sur tous les progrès scientifiques depuis le milieu du XVIIe siècle ?

Descartes n'en avait rien à battre du Moi, on ne pensait pas comme ça à cette époque. Quand il écrit cette phrase, il n'est pas en train de se masturber, du tout. Il cherche à refonder les outils de la connaissance et la grande question qui se pose à lui, pour ce faire, c'est "De quoi puis-je repartir, de quoi suis-je sûr comme connaissance de base ?". Et là, il la joue très honnête et très modeste, il ne se raconte pas d'histoire, il "pense contre lui", comme on doit pour avancer. Et honnêtement, il constate qu'il ne peut être rigoureusement sûr de rien. Gros flip, pour le dire anachroniquement. ;> Et à force de mouliner, il trouve. Je suis sûr d'une seule chose : si je suis en train de penser, c'est qu'il y a de l'être (conscient réflexif, humain).

Tu passes à côté d'un mouvement de pensée génial, là, c'est dommage. À partir de là, il ré-avance à petit pas pour fonder "la méthode scientifique", les fondements rationnels de tous les progrès scientifiques ultérieurs.

Je commence à me demander si tu ne serais pas un pur produit du moule cartésien lol. Dans le genre il n'y a que la raison qui compterait...

Franchement faudrait que nous autres Français arrêtions notre masturbation orgueilleuse avec Descartes et la Révolution Française, comme si il n'y avait que les Français qui seraient les premiers et les seul à avoir fait une révolution en coupant la tête du roi et en proposant des coordonnés polaires avec un raisonnement basé sur le doute...que nenni ! Si Descartes a révolutionné la pensée scientifique en proposant une méthode rigoureuse pour rationaliser et calculer les choses, c'est très bien pour ce qui est des mathématiques. Pour ce qui est du reste, sa pensée a justifiée et permise une surabondance d'ego, faisant que les humains via l'essor technologique de l'époque jusqu'à aujourdh'ui, se sont appropriés le monde comme si ils en étaient les big boss, et voila aujourd'hui le constat : nous vivons dans une société ultra technologique et pro-narcissique, où l'on se met en avant même si l'on est le plus grand crétin qui soit parce que ça fait rire d'autres crétins qui s'en croient supérieurs (la belle affaire), et cela fait oublier à la masse que la nature est en péril, que l'on vit désormais a crédit quand aux ressources animales, végétales, minérales, tant on a exploité notre planète...donc non pas qu'il faille accuser Descartes de ces conséquences négatives, mais on ne va non plus le féliciter pour autant en faisant comme si c'était la super star des philosophes.

Enfin n'importe quelle pointure en philosophie remet Descartes en cause, quand il s'agit de sa pensée dualiste vis à vis de la substance des choses...parce que quand tu prônes le rationalisme et que t'en vient à parler d'animal-machine, c'est que t'as pas vraiment saisi ce que qu'était l'essence de la vie et de sa diversité sur terre......... l'humain ne vaut pas mieux qu'un animal, et Nietzsche via son idée de Grande raison du corps face à la Petite raison de l'esprit, explique bien que l'homme moderne est une fiotte qui a perdu tout son potentiel instinctuel, bref il ne lui reste plus que son intellect et son orgueil pour se croire au dessus de tout, et dominer tout ce qu'il peut pour satisfaire son ego de sa soif de conquête et de savoir, sur fond de vérité scientifique, la seule qui vaille hein. Maintenant tu sais ce que pense Nietzsche de cette grand idée qu'est la vérité...

Si un jour j'ai besoin de me rassurer parce que je doute de trop en ayant trop bédavé comme Descartes, je me pencherai sur son &#339;uvre, mais en attendant j'ai trouvé plus humain comme philosophie, et ça correspond plus à mes aspirations je t'avoue :D


Lee-O a dit:
Vu de chez moi, il y a une contradiction au coeur de ton propos : tu parles de façon lyrique de l'altruisme, de l'attention et de la présence vraies à l'autre, et pour autre chose que sa fonction miroir de moi (qui a pourtant sa part de noblesse, tu galvaudes, je trouve), et en même temps, je te trouve hyper-dur pour tes prochains, caricatural, même. Ton discours est tout de même largement charpenté sur l'argument que la plupart des gens ne font pas ce qu'ils doivent, tu les considères plutôt bien mal, comme des indécrottables Narcisse qui ne s'intéressent qu'à eux-mêmes et qui ne méritent que mépris sous tes mots (rapprochement avec Nietzsche).

Heu...c'est là où je ne sais pas où je dois m'arrêter pour rester gentil avec mes contemporains...

Autant que je sois caricatural je te l'accorde, que je suis hyper-dur c'est vrai aussi (même si je ne pense pas être plus dur avec mon entourage qu'avec moi-même, le problème étant que les gens préfèrent en général ne pas avoir lorsque moi j'adore décortiquer les esprits), mais si tu veux me comprendre, je n'ai pas lu Descartes mais Nietzsche. Aussi je n'ai pas été élevé à l'illusion d'un monde bienveillant avec pour idée que les gens sont gentils et me veulent du bien en m'acceptant tel que je suis. Quand je suis gentil, les gens en profitent, quand je suis méchant, ils se vengent. Pour moi les gens sont intéressés et recherchent le Même chez les autres pour satisfaire leur propre narcissisme et s'estimer par le regard d'autrui (en voyant chez lui ce qui leur plait chez eux). Bon ce n'est pas pour autant qu'il n'y a pas d'individu pratiquant l'altérité en rencontrant l'Autre, dans une dynamique empathique, mais c'est quand même beaucoup plus rare...Quand je regarde autour de moi je vois des gens isolés qui cherchent de la compagnie au travers d'attitude sympathique pour plaire à autrui et ainsi entretenir des relations cordiales et plaisantes, mais la véritable rencontre symbiotique entre deux individus c'est pas toujours ça. Je ne te parle pas de se voir dans le miroir des apparences que l'on présente, genre ah mais on porte les mêmes chaussures, c'est génial on est pareil...non non si on a des points communs ce n'est pas pour ça qu'il faut croire qu'on est les mêmes, c'est une illusion pour se rassurer de sa solitude ça, et c'est pour ça que je te parle d'éprouver ce qu'autrui ressent et par réflexion en arriver à comprendre sa trajectoire de vie...au lieu de le blâmer ou le moquer (et ça c'est pas facile quand on est impliqué).

Bon après on ne peut pas toujours vivre dans l'empathie (qui me semble souvent froide au premier abord), et la sympathie est indispensable aux relations humaines, tout comme l'hypocrisie et la cordiale politesse, mais quand je vois que la méchanceté prédomine souvent sur la gentillesse parce que la méchanceté est plus facile et donne des résultats plus directes, il m'arrive d'être déçu oui (et de moi-même en premier). Maintenant quand je lis Nietzsche, s'il est dur je me rends compte qu'il a néanmoins très souvent raison, et je partage son idéal d'un avenir meilleur dans un des plus grand acte de résilience qui soit à l'échelle de la civilisation : l'avènement du surhomme porteur de nouvelles valeurs morales, au delà de la dualité bien/mal, issue du christianisme et de la pensée platonicienne, dont les institutions adorent vanter les mérites comme pour le cartésianisme.

Bref quand j'ai compris la portée de la pensée nietzschéenne, j'ai compris pourquoi on ne l'enseignait pas au lycée...bien trop vaste, bien trop profonde, bien trop anarchisante...et pour former des moutons rien ne vaut des textes chiants sur le travail et la technique ou la justice et le droit...rien de plus barbant et conformiste...


Lee-O a dit:
Bien entendu, je ne me reconnais pas dans cette caricature, personnellement, je ne ressemble pas à ce noir portrait de tes prochains que tu brosses.

En parlant de tout le monde et personne tu ne peux que t'identifier à mon propos généralistes, et en le niant de la sorte Freud aurait dit que tu es dans le déni lol. Si tu me permets un constat quand à tes dires, tout ces moments où tu parles avec charme et intrigue de tes pensées et ressentis, et de ton parcours en disant être en auto-analyse depuis 50 ans, on ne peut pas faire mieux comme trait de personnalité narcissique. Je ne sais pas si t'es du genre introverti, mais si c'est le cas tu ne sais peut être pas qu'ils ont cette tendance narcissique à s'investir eux-même comme objet, et à refléter des tendances égocentriques. Et d'ailleurs tu avoues à moitié mon propos en disant que pour accéder à un toi meilleur, tu as du faire le contraire de ce que j'ai dépeins comme portrait. Parce que oui il est vrai que pour se sortir de cette tendance narcissique, il t'a surement fallu faire le contraire de ce que j'ai décris comme personnalité, à savoir aller au delà de tes propres justifications et remonter jusqu'au noyau de l'oignon qui renferme une vérité sur toi. Et c'est très bien que tu l'ai accepté, mais cela ne change pas ton comportement pour autant, et plus tu crois avoir changé, plus tu te trompes à nouveau sur toi-même, donc quand tu parles d'humilité, c'est plutôt un idéal de pratique que tu me décris, qu'une vérité en comparaison de la forme de ton discours :D

Pour ce qui est du fond du discours, effectivement on a le même dans le sens où plus on en découvre sur soi, plus on doit se mettre cher parce que ça devient de plus en plus dur de s'avouer des choses que l'on a pas enfouie au plus profond de soi pour rien. Là où je vois une divergence c'est que tu parles de "parvenir à LA réponse qu'il fallait", alors que j'aurais tendance à penser aujourd'hui que la vie étant évolutive, tous les X temps selon ce que l'on a enduré et traversé comme expérience ou épreuve de vie, il faut trouver LA réponse qui nous ira sur le moment, pour débloquer un n&#339;ud névrotique comme tu dis. Mais nos psychés étant composées d'une multitude de n&#339;uds qui se font et se défont dans le temps, mon point de vue est que si tu as trouvé LA solution du moment après 50 ans d'introspection, tu es déjà en train de t'en rassurer et de te masquer la future vérité que tu devras découvrir, parce que t'es fasciné par ta propre personne, bref l'auto-analyse ne s'arrête jamais, puisque le narcissisme est un compagnon marchant à nos côtés tout au long de notre vie. Et il nous influence inconsciemment jusqu'à ce que l'on s'en rende compte en découvrant une vérité qu'il nous masquait pour préserver notre ego, notre Moi fragilisé de ne plus reposer sur des valeurs morales et éthiques fortes.

Lee-O a dit:
[PS2: En termes de "prods", 1) tes dissociatifs désorientent sévèrement l'égo, OK ; mais est-ce bien l'objet de la démarche dont nous parlons ? N'avons-nous pas, toi d'abord et moi ensuite, bien établi que c'est l'inconscient qui est un puissant Cerbère décourageant toutes nos tentatives d'auto-élucidation, qui nous barre de nous-même (égo n'étant qu'un acolyte dans ce procès) ? Et est-ce que quiconque a cherché à établir si les dissociatifs gênent le travail de cet inconscient ? 2) La MD, confiée par Shulgin à des psy californiens anticonformistes, a fait des miracles pendant 2-3 ans pour "détourmenter" et ouvrir des analysants ou consultants en 1 séance ; pour moi, il est évident que c'est le "prod" exceptionnel qui peut aider le plus dans la démarche]


Vastes questions. Je te rejoins quand au fait que nos censures et autres mécanismes de défense nous protègent de notre propre inconscient par le biais de notre ego, maintenant pour ce qui est des dissos, tu dois en avoir une vision bien négative pour ne pas reconnaitre leur potentiel anti dépresseur. Ou alors tu n'as pas lu quelques articles ou topics expliquant que la kétamine ou le DxM par exemple, à micro dose aident certains usagers à se sortir d'une méchante déprime, ou à leur apporter un recul sur soi pour se dire qu'ils n'ont plus de raison de déprimer parce que ce recul leur a offert la possibilité de se prendre en main au travers la réalisation d'objectif de vie, une fois qu'ils ont bien fait de la merde en consommant ces produits qui peuvent faire délirer (le passage de l'auto-destruction (Thanatos) à la construction de soi (Eros)).

Idem avec le LSD et les travaux de Groff, ou comme le cannabis ou l'alcool qui aident les gens à tenir le stress du quotidien depuis des millénaires. Perso je ne vois pas le mal de picoler un soir le week end ou par-ci par là en entretenant une vie sociale dynamisante, ou bien de fumer un ou deux joints pour faire l'amour ou regarder un film. A ce niveau là chaque drogue à un intérêt introspectif et donc thérapeutique. Disons que chacun d'elle peut agir sur tels maux d'esprits, à tels âges de la vie, dans tels contextes (la MD et l'alcool pour oser (s')aimer et socialiser, les dissos et les psychés pour se confronter à soi-même, les opiacés et le cannabis pour se décontracter, les stims pour oser s'affirmer). Tant que le cadre reste thérapeutique, n'importe quelle drogue peut être bénéfique selon moi, aussi tout dépend de l'illusion ou de la désillusion qu'elle permet, selon ce dont l'usager à comme maux, et quels besoins lui seront utiles pour les dépasser.
 
Or -- et les contre-argumentations éventuelles sont les bienvenues, bien sûr -- le bouddhisme renferme évidemment bien des bouts de sagesse que la mentalité d'ici ne pouvait pas produire, mais il est fondamentalement du côté de Thanatos, puisqu'il prescrit de tuer Eros en nous, arguant qu'ainsi, nos souffrances disparaîtront. Dans les mots grecs, c'est le choix de "l'atharaxie", étouffer ses émotions et son désir pour ne pas en connaître les souffrances correspondantes qui y sont consubstantiellement liées.

Ce n'est pas dutout ça ! Il s'agit de ne pas réagir (abréaction en psychologie) face a nos tensions interne, ce qui provoque la dissipation de celles ci. Il ne s'agit pas d'étouffer, ni de fuir, mais au contraire de porter une attention équanime a ce qui se meut en nous.

Edit : En fait je suis pas d'accord avec pas mal de trucs haha, faudra que je reviennes avec plus de temps ... Mais le pétard ou la binouse du soir introspective ? Et mon cul c'est du poulet psychonautique ?
 
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