Tridimensionnel
Cheval théorique
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En premier lieu, je n'encourage nullement la consommation de zolpidem, car: 1) le trip n'a rien de spécifiquement agréable. 2) ça vous mettra dans des situations socialement embarrassantes, car vous croirez être dans un rêve et vous en rappellerez comme tel, jusqu'à ce que votre entourage vous apprenne que, oui, vous avez vraiment fait cela. 3) les benzodiazépines et assimilés augmentent significativement le risque de maladie dégénérative… et vous n'avez pas envie de vous taper Parkinson. 4) le risque d'accrochage est réel et le sevrage, dangereux.
Le contexte: depuis quelques semaines je vis un épisode dépressif avec des pulsions suicidaires. Ce soir-là je décide de m'accorder une pause et de prendre un somnifère. Comme j'ai beaucoup d'intérêt pour la zone grise entre sommeil et veille, j'ai déjà exploré plusieurs fois l'effet induit par le zolpidem (souvent à mes dépends).
L'un des effets habituels c'est des hallucinations hypnagogiques où mon ego se fragmente et où au lieu d'être un seul je suis une vingtaine de personnages, de tous métiers et de tous âges, sexes… Autant le dire tout de suite, rien de cohérent de sort jamais de cette phase, les personnages eux-même ne sont pas figés, et les dialogues ressemblent plus souvent à «faut vraiment être con hein» «ta gueule vieux schlague» «pour qui tu te prends grognasse» qu'à «oh, toi, telle part de ma personnalité, pourquoi es-tu en conflit avec telle autre part de ma personnalité?». Donc, la plupart du temps, intérêt philosophique = 0.
Cette fois-ci, parce que je suis dans un mal pas possible, je décide de faire l'effort de passer par-dessus ce bordel pour explorer un peu mon inconscient. Qui sait, ça pourrait marcher. Donc, j'attends que l'effet s'installe, et lorsque ça commence à être bien le souk dans ma tête, je rassemble «tout le monde» dans une pièce, «je» me pose devant et «je» demande: «alors, on fait quoi?».
«Je», à ce moment, c'est seulement ma conscience en tant narratrice, puisque toute ma personnalité est diffractée et étalée devant moi. Et, dans cette taverne où une dizaine de personnages éclectiques disent des conneries en faisant la moue, «je» est une sorte de structure métallique, un squelette rouillé. Je «me» vois de dos, mes côtes se sont ouvertes comme des battants de porte ; comme si j'étais l'enveloppe qui contenait tout le reste et que je «les» avais laissés sortir de moi-même, et que c'est ainsi ouvert et vide d'eux que je m'adressait à eux.
Mes personnages, comme d'hab, ne disent rien de constructif, de toute façon le zolpi c'est pas bon pour l'intellectualité, je ne le répéterai jamais assez. En gros ils boivent des litres de bière d'un air méditatif et laissent entendre que le problème est intéressant.
(quand je raconte on dirait que la scène était précise, mais en fait, ça n'étaient que des impressions très confuses que je rationalisais au fur et à mesure).
Bref je me concentre pour maintenir ce pseudo-pow-pow et alors je vois que de cette armature métallique est sorti, toujours reliée à elle mais excentrée maintenant, une sorte de colonne vertébrale dans laquelle est incrustée une gemme verte, de forme assez allongée, ou un tube en verre rempli de liquide vert et luminescent. Cette gemme a l'air prisonnière de son «corps», en soi elle est belle, mais ce qui l'entoure et la retient est pesant, et sans valeur esthétique. J'ai la brusque intuition que cette gemme est la seule chose cruciale présente dans cette pièce, et que la solution, c'est de la libérer de cette masse métallique. Mes personnages sont d'accord avec ça, l'un d'eux fait même le geste d'attraper la pierre pour l'arracher de la colonne vertébrale.
Bon, après ça je m'endors.
[…]
Spontanément, me sont venues deux interprétations. Toutes deux partent de la même base: l'armature-boîte-squelette, c'est le «corps», c'est-à-dire le point de rencontre entre ce que je suis et le monde réel, entre l'interne et l'externe ; ma mémoire, mon expérience, ma diversité étant représentées dans les personnages, et les leitmotiv de celles-ci étant donc cette cage, ce cadre, qui me forme, me constitue, modèle mon comportement en tant qu'être humain actif. La gemme, c'est l'«âme», c'est-à-dire ce que je suis au niveau le plus primaire, peut-être tel que j'étais avant même de naître, ou le radical de toutes mes personnalités passées et futur, bref, ce qui fait de moi un être unique avant même que la vie ne se charge de me donner un parcours unique.
Mais visiblement, cette âme supporte mal son corps ; difficile de dire si elle a seulement assez de vie propre pour désirer autre chose, je la vois plus comme un principe, un moteur, mais un moteur attaché à une machine inadaptée, d'où une grosse dissonance, et d'où l'envie de l'en détacher.
Mais que signifie l'en détacher? Première version: changer de «corps», c'est-à-dire envoyer bouler tout ce qui me conditionne actuellement, me composer un présent qui compense le passé, faire tout péter, couper les ponts, changer de vie, devenir moine ou ermite, avoir plein de potes et boire de la vodka autour d'un feu de camp, …
Seconde version: abandonner mon «corps», c'est-à-dire… mourir. Oui, mais ça fait disparaître aussi la gemme? Je ne sais pas. Au fond de moi je ne crois pas que la mort nous efface du monde. Notre conscience est terminée, mais le fragment de vie qui nous a été alloué retourne au Tout, et nous continuons à être, d'une certaine façon, en chaque molécule. Ou alors, qui sait! Y'a peut-être un paradis quelque-part? (j'y crois pas trop maybon) Bref dans cette vision, ça n'avait pas l'air de poser problème pour l'âme d'être séparée de son corps, ça la privait de «vie» au sens mortel mais ça ne l'annihilait pas. Cette seconde interprétation est aussi en accord avec mes pulsions suicidaires (= découragement à tenter de changer les choses).
Voilà, qu'en pensez-vous? Est-ce que ça fait naître en vous des réflexions, des idées? Des concepts à y rattache? De la curiosité?
(ceci n'est pas un appel à l'aide masqué, j'ai conscience que mon état est morbide et je consulterai dès que cela me sera matériellement possible. C'est au niveau intello que j'ai envie de réfléchir à cette «vision»)
Le contexte: depuis quelques semaines je vis un épisode dépressif avec des pulsions suicidaires. Ce soir-là je décide de m'accorder une pause et de prendre un somnifère. Comme j'ai beaucoup d'intérêt pour la zone grise entre sommeil et veille, j'ai déjà exploré plusieurs fois l'effet induit par le zolpidem (souvent à mes dépends).
L'un des effets habituels c'est des hallucinations hypnagogiques où mon ego se fragmente et où au lieu d'être un seul je suis une vingtaine de personnages, de tous métiers et de tous âges, sexes… Autant le dire tout de suite, rien de cohérent de sort jamais de cette phase, les personnages eux-même ne sont pas figés, et les dialogues ressemblent plus souvent à «faut vraiment être con hein» «ta gueule vieux schlague» «pour qui tu te prends grognasse» qu'à «oh, toi, telle part de ma personnalité, pourquoi es-tu en conflit avec telle autre part de ma personnalité?». Donc, la plupart du temps, intérêt philosophique = 0.
Cette fois-ci, parce que je suis dans un mal pas possible, je décide de faire l'effort de passer par-dessus ce bordel pour explorer un peu mon inconscient. Qui sait, ça pourrait marcher. Donc, j'attends que l'effet s'installe, et lorsque ça commence à être bien le souk dans ma tête, je rassemble «tout le monde» dans une pièce, «je» me pose devant et «je» demande: «alors, on fait quoi?».
«Je», à ce moment, c'est seulement ma conscience en tant narratrice, puisque toute ma personnalité est diffractée et étalée devant moi. Et, dans cette taverne où une dizaine de personnages éclectiques disent des conneries en faisant la moue, «je» est une sorte de structure métallique, un squelette rouillé. Je «me» vois de dos, mes côtes se sont ouvertes comme des battants de porte ; comme si j'étais l'enveloppe qui contenait tout le reste et que je «les» avais laissés sortir de moi-même, et que c'est ainsi ouvert et vide d'eux que je m'adressait à eux.
Mes personnages, comme d'hab, ne disent rien de constructif, de toute façon le zolpi c'est pas bon pour l'intellectualité, je ne le répéterai jamais assez. En gros ils boivent des litres de bière d'un air méditatif et laissent entendre que le problème est intéressant.
(quand je raconte on dirait que la scène était précise, mais en fait, ça n'étaient que des impressions très confuses que je rationalisais au fur et à mesure).
Bref je me concentre pour maintenir ce pseudo-pow-pow et alors je vois que de cette armature métallique est sorti, toujours reliée à elle mais excentrée maintenant, une sorte de colonne vertébrale dans laquelle est incrustée une gemme verte, de forme assez allongée, ou un tube en verre rempli de liquide vert et luminescent. Cette gemme a l'air prisonnière de son «corps», en soi elle est belle, mais ce qui l'entoure et la retient est pesant, et sans valeur esthétique. J'ai la brusque intuition que cette gemme est la seule chose cruciale présente dans cette pièce, et que la solution, c'est de la libérer de cette masse métallique. Mes personnages sont d'accord avec ça, l'un d'eux fait même le geste d'attraper la pierre pour l'arracher de la colonne vertébrale.
Bon, après ça je m'endors.
[…]
Spontanément, me sont venues deux interprétations. Toutes deux partent de la même base: l'armature-boîte-squelette, c'est le «corps», c'est-à-dire le point de rencontre entre ce que je suis et le monde réel, entre l'interne et l'externe ; ma mémoire, mon expérience, ma diversité étant représentées dans les personnages, et les leitmotiv de celles-ci étant donc cette cage, ce cadre, qui me forme, me constitue, modèle mon comportement en tant qu'être humain actif. La gemme, c'est l'«âme», c'est-à-dire ce que je suis au niveau le plus primaire, peut-être tel que j'étais avant même de naître, ou le radical de toutes mes personnalités passées et futur, bref, ce qui fait de moi un être unique avant même que la vie ne se charge de me donner un parcours unique.
Mais visiblement, cette âme supporte mal son corps ; difficile de dire si elle a seulement assez de vie propre pour désirer autre chose, je la vois plus comme un principe, un moteur, mais un moteur attaché à une machine inadaptée, d'où une grosse dissonance, et d'où l'envie de l'en détacher.
Mais que signifie l'en détacher? Première version: changer de «corps», c'est-à-dire envoyer bouler tout ce qui me conditionne actuellement, me composer un présent qui compense le passé, faire tout péter, couper les ponts, changer de vie, devenir moine ou ermite, avoir plein de potes et boire de la vodka autour d'un feu de camp, …
Seconde version: abandonner mon «corps», c'est-à-dire… mourir. Oui, mais ça fait disparaître aussi la gemme? Je ne sais pas. Au fond de moi je ne crois pas que la mort nous efface du monde. Notre conscience est terminée, mais le fragment de vie qui nous a été alloué retourne au Tout, et nous continuons à être, d'une certaine façon, en chaque molécule. Ou alors, qui sait! Y'a peut-être un paradis quelque-part? (j'y crois pas trop maybon) Bref dans cette vision, ça n'avait pas l'air de poser problème pour l'âme d'être séparée de son corps, ça la privait de «vie» au sens mortel mais ça ne l'annihilait pas. Cette seconde interprétation est aussi en accord avec mes pulsions suicidaires (= découragement à tenter de changer les choses).
Voilà, qu'en pensez-vous? Est-ce que ça fait naître en vous des réflexions, des idées? Des concepts à y rattache? De la curiosité?
(ceci n'est pas un appel à l'aide masqué, j'ai conscience que mon état est morbide et je consulterai dès que cela me sera matériellement possible. C'est au niveau intello que j'ai envie de réfléchir à cette «vision»)