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Salut, j’ai appris récemment que le 2C-B avait été commercialisé comme enthéogène à l’intention des guérisseurs d’Afrique du Sud, sous le doux nom d’« Ubulawu Nomathotholo ». Cherchant à en savoir plus, je suis tombé sur cet article publié en 1996 sur Erowid.org.
Je ne vous traduis pas le début, qui raconte en gros comment Shulgin a synthétisé le 2C-B, puis l’a propagé dans son cercle d’intellectuels en vantant ses mérites thérapeutiques et érotiques, si bien que de nombreux psychologues ont commencé à l’utiliser en consultation ; comment la substance, vendue sans ordonnance, a été commercialisée sous le nom de « Nexus » (= "connexion") comme aphrodisiaque, et rapidement détournée par les fêtards pour ses vertus euphorisantes, jusqu’à son bannissement aux USA 1993, et les pressions subséquentes pour son bannissement dans plusieurs pays d’Europe et en Afrique du Sud.
Pour autant, bien entendu, le 2C-B (que l’auteur(ice?) appelle « Nexus » tout au long de l’article) continue d’être consommé sous le manteau. Vous en savez quelque-chose, bande de drogués.
Traduction
« L'un des développements les plus intéressants de la scène du Cap [capitale de l'Afrique du Sud, bande d'incultes] est que le Nexus est l'ingrédient actif d'un médicament appelé Ubulawu Nomathotholo (une expression Xhosa [la deuxième langue du pays, après le zoulou] qui se traduit approximativement par "médecine des ancêtres qui chantent"). Jusqu'à récemment, l'Ubulawu Nomathotholo était disponible dans diverses herboristeries africaines où il était vendu comme un support de guérison traditionnelle.
Selon les informations écrites à l'intérieur du pack : "Ubulawu Nomathotholo ouvre l'esprit aux messages, visions et rêves des esprits ancestraux. Cela en fait un excellent remède à utiliser par les guérisseurs traditionnels africains lors de l'intlombe (1), du xhentsa (2), du vumisa (3), de la divination, de la guérison et du thwasa (4)". »
Pause lexicale :
(1) L’intlombe est une danse traditionnelle, pratiquée par les guérisseuses traditionnelles du peuple Xhosa, les Amagquira, pendant les cérémonies initiatiques. Elle implique des mouvements saccadés du haut du corps et des piétinements (pieds nus). Elle est accompagnée de tambours, de clappements des assistants et d’une musique vocale lente.Vidéo
(2) Le Xhentsa est la même chose, mais dansé par de jeunes filles pendant les cérémonies.
(3) L’(Uku)vumisa serait une pratique divinatoire impliquant le chant. Son étymologie est liée à l’art de l’éloquence, qui permet de maintenir ou de rétablir l’harmonie.
(4) « La littérature des années 1970 décrit le phénomène de Thwasa/Intwaso, un état qui a été défini comme une "crise existentielle ... [et une] maladie créatrice", comme la première étape pour devenir un thérapeute Xhosa. Cela peut apparaître comme une période de désintégration où la personne ne se perçoit plus comme un tout et fait l'expérience d'une communication avec ses ancêtres. Les rêves et les visions s'accompagnent souvent de divers symptômes somatiques. Ces symptômes peuvent paraître si extrêmes que les psychiatres occidentaux risquent de les interpréter comme les manifestations d'une psychose. Cependant, les Xhosa les voient comme un cadeau : "Ce type de maladie, la maladie thwasa, est un cadeau que l'on reçoit de ses ancêtres, de ses grands-pères, que l'on ne connaît pas mais dont on a hérité du nom de famille." » source
On devine comment le 2C-B a pu s’insérer dans ces pratiques médico-magiques. Je pense à l’importance de la musique, et aussi au thwasa qui s’accommoderait bien des altérations du sentiment de « soi » typique des psychédéliques. Reprenons :
« Ubulawu Nomathotholo est commercialisé par une société basée au Lesotho, Inkwazi. Mais selon un porte-parole de la société, M. Solomon Daba, en raison de l'interdiction en Afrique du Sud de l'ingrédient actif de leur médicament, celui-ci n'est plus vendu dans la République.
"C'est très regrettable", a déclaré M. Daba. "Le problème auquel sont confrontés de nombreux sangomas [praticiens traditionnels] en Afrique du Sud est que, parce qu'ils vivent dans les agglomérations, loin de la campagne, ils ne peuvent pas se procurer les nombreuses plantes et herbes utilisées dans la divination, les cérémonies d'initiation et la guérison. L'Ubulawu Nomathotholo est une alternative sûre et efficace à certains médicaments traditionnels à base de plantes qui affectent l'esprit, mais que de nombreux sangomas des villes ne peuvent plus se procurer. Nous aimerions que son interdiction soit levée en Afrique du Sud, mais le Medical Control Council de Pretoria nous a informés qu'il s'agirait d'un processus long et coûteux, avec peu de chances de succès."
Une autre personne qui souhaiterait voir l'interdiction levée est le Dr Manton Hirst (Ph.D), anthropologue au Kaffrarian Museum de King William's Town et l'une des principales autorités du pays en ce qui concerne les formes traditionnelles de guérison Xhosa.
Selon le Dr Hirst, qui étudie et écrit sur la guérison traditionnelle en Afrique du Sud depuis 20 ans : "Les devins et les herboristes Xhosa, comme d'autres chamans dans le monde, utilisent des plantes et des substances psychoactives pour induire des états de conscience modifiés chez les initiés qui sont formés et introduits dans la profession. Les plantes psychoactives sont très appréciées comme moyen de communiquer avec les ancêtres et d'avoir un aperçu du monde des esprits. Cependant, de nos jours, les plantes traditionnellement utilisées pour induire des expériences visionnaires chez les novices sont très difficiles à trouver. Cela est dû à la combinaison de plusieurs facteurs, tels que la surutilisation des ressources végétales sauvages par les vendeurs d'herbes et les guérisseurs, la sécheresse, et le surpâturage. Cependant, même lorsque ces plantes sont disponibles, elles sont assez toxiques. Par conséquent, l'empoisonnement, et même la mort, peuvent survenir à la suite d'un mauvais dosage, que même les guérisseurs expérimentés ont parfois du mal à estimer".
Au cours de ses voyages sur le terrain, le Dr Hirst a rencontré un certain nombre de devins ayant utilisé le Nexus comme substitut aux plantes traditionnelles. Aux doses recommandées sur les paquets d'Ubulawu Nomathotholo, il ne semble pas y avoir de toxicité ou d'inconfort physique, et certains des résultats thérapeutiques sont impressionnants. Une initiée à qui son professeur avait administré cinq comprimés Nexus a rapporté qu'elle s'était ensuite trouvée transportée dans une magnifique forêt, où elle avait rencontré des antilopes sauvages et des carnivores qui lui avaient révélé être les messagers de ses ancêtres tribaux. Selon le Dr Hirst : "Cette expérience transcendante a eu un effet profondément bénéfique sur cette initiée qui, jusqu'alors, avait manqué de confiance en elle et en sa vocation de guérisseuse".
Un autre cas relaté par le Dr Hirst est celui d'un homme devin qui est devenu pathologiquement dépressif après la mort tragique d'un de ses enfants. Même après la fin de la période traditionnelle de deuil, il continuait à être morose et évitait tout contact avec ses patients, les adressant plutôt à ses collègues. Ce devin a raconté au Dr Hirst qu'après avoir pris Nexus, il a eu une expérience visionnaire dans laquelle il s'est retrouvé face à face avec uDali (le Créateur) qui lui a révélé la signification sous-jacente de la mort de son enfant. Sa foi et sa confiance retrouvées, il a poursuivi son travail de guérisseur traditionnel avec succès.
Des esprits ancestraux sous la forme d'animaux sauvages, des rencontres visionnaires avec uDali - voilà des choses que le Blanc moyen d'Afrique du Sud aura probablement du mal à comprendre. Cependant, pour des millions de Noirs, en particulier dans les zones rurales du pays, ces questions spirituelles sont essentielles à la vie.
Et si le Nexus était vraiment une alternative sûre et efficace aux rares et souvent dangereuses plantes médicinales ? Et si cette substance mettait réellement les guérisseurs africains en contact avec les royaumes magiques et mystérieux de la conscience qui constituent la pierre angulaire des croyances africaines depuis des milliers d'années ? Et si les dizaines de milliers de guérisseurs traditionnels d'Afrique du Sud demandaient collectivement que ce médicament soit mis à leur disposition ? Ce qui est probablement certain, c'est que Nexus va susciter de nombreuses controverses au cours des mois et des années à venir. »
Quelques travaux de Manton Hirst :
A river of metaphors: Interpreting the Xhosa diviner's myth
Dreams and Medicines: The Perspective of Xhosa Diviners and Novices in the Eastern Cape, South Africa
Interpretative Reflections on Nomzi’s Story
Image du packaging d'Ubulawu Nomathotholo :
J'aimerais bien qu'on m'explique l'étoile de David et les reprises graphiques d'égypte antique. Je ne pensais pas que cette iconographie "magique" était aussi généralisée à l'échelle de la planète.
Je ne vous traduis pas le début, qui raconte en gros comment Shulgin a synthétisé le 2C-B, puis l’a propagé dans son cercle d’intellectuels en vantant ses mérites thérapeutiques et érotiques, si bien que de nombreux psychologues ont commencé à l’utiliser en consultation ; comment la substance, vendue sans ordonnance, a été commercialisée sous le nom de « Nexus » (= "connexion") comme aphrodisiaque, et rapidement détournée par les fêtards pour ses vertus euphorisantes, jusqu’à son bannissement aux USA 1993, et les pressions subséquentes pour son bannissement dans plusieurs pays d’Europe et en Afrique du Sud.
Pour autant, bien entendu, le 2C-B (que l’auteur(ice?) appelle « Nexus » tout au long de l’article) continue d’être consommé sous le manteau. Vous en savez quelque-chose, bande de drogués.
Traduction
« L'un des développements les plus intéressants de la scène du Cap [capitale de l'Afrique du Sud, bande d'incultes] est que le Nexus est l'ingrédient actif d'un médicament appelé Ubulawu Nomathotholo (une expression Xhosa [la deuxième langue du pays, après le zoulou] qui se traduit approximativement par "médecine des ancêtres qui chantent"). Jusqu'à récemment, l'Ubulawu Nomathotholo était disponible dans diverses herboristeries africaines où il était vendu comme un support de guérison traditionnelle.
Selon les informations écrites à l'intérieur du pack : "Ubulawu Nomathotholo ouvre l'esprit aux messages, visions et rêves des esprits ancestraux. Cela en fait un excellent remède à utiliser par les guérisseurs traditionnels africains lors de l'intlombe (1), du xhentsa (2), du vumisa (3), de la divination, de la guérison et du thwasa (4)". »
Pause lexicale :
(1) L’intlombe est une danse traditionnelle, pratiquée par les guérisseuses traditionnelles du peuple Xhosa, les Amagquira, pendant les cérémonies initiatiques. Elle implique des mouvements saccadés du haut du corps et des piétinements (pieds nus). Elle est accompagnée de tambours, de clappements des assistants et d’une musique vocale lente.Vidéo
(2) Le Xhentsa est la même chose, mais dansé par de jeunes filles pendant les cérémonies.
(3) L’(Uku)vumisa serait une pratique divinatoire impliquant le chant. Son étymologie est liée à l’art de l’éloquence, qui permet de maintenir ou de rétablir l’harmonie.
(4) « La littérature des années 1970 décrit le phénomène de Thwasa/Intwaso, un état qui a été défini comme une "crise existentielle ... [et une] maladie créatrice", comme la première étape pour devenir un thérapeute Xhosa. Cela peut apparaître comme une période de désintégration où la personne ne se perçoit plus comme un tout et fait l'expérience d'une communication avec ses ancêtres. Les rêves et les visions s'accompagnent souvent de divers symptômes somatiques. Ces symptômes peuvent paraître si extrêmes que les psychiatres occidentaux risquent de les interpréter comme les manifestations d'une psychose. Cependant, les Xhosa les voient comme un cadeau : "Ce type de maladie, la maladie thwasa, est un cadeau que l'on reçoit de ses ancêtres, de ses grands-pères, que l'on ne connaît pas mais dont on a hérité du nom de famille." » source
On devine comment le 2C-B a pu s’insérer dans ces pratiques médico-magiques. Je pense à l’importance de la musique, et aussi au thwasa qui s’accommoderait bien des altérations du sentiment de « soi » typique des psychédéliques. Reprenons :
« Ubulawu Nomathotholo est commercialisé par une société basée au Lesotho, Inkwazi. Mais selon un porte-parole de la société, M. Solomon Daba, en raison de l'interdiction en Afrique du Sud de l'ingrédient actif de leur médicament, celui-ci n'est plus vendu dans la République.
"C'est très regrettable", a déclaré M. Daba. "Le problème auquel sont confrontés de nombreux sangomas [praticiens traditionnels] en Afrique du Sud est que, parce qu'ils vivent dans les agglomérations, loin de la campagne, ils ne peuvent pas se procurer les nombreuses plantes et herbes utilisées dans la divination, les cérémonies d'initiation et la guérison. L'Ubulawu Nomathotholo est une alternative sûre et efficace à certains médicaments traditionnels à base de plantes qui affectent l'esprit, mais que de nombreux sangomas des villes ne peuvent plus se procurer. Nous aimerions que son interdiction soit levée en Afrique du Sud, mais le Medical Control Council de Pretoria nous a informés qu'il s'agirait d'un processus long et coûteux, avec peu de chances de succès."
Une autre personne qui souhaiterait voir l'interdiction levée est le Dr Manton Hirst (Ph.D), anthropologue au Kaffrarian Museum de King William's Town et l'une des principales autorités du pays en ce qui concerne les formes traditionnelles de guérison Xhosa.
Selon le Dr Hirst, qui étudie et écrit sur la guérison traditionnelle en Afrique du Sud depuis 20 ans : "Les devins et les herboristes Xhosa, comme d'autres chamans dans le monde, utilisent des plantes et des substances psychoactives pour induire des états de conscience modifiés chez les initiés qui sont formés et introduits dans la profession. Les plantes psychoactives sont très appréciées comme moyen de communiquer avec les ancêtres et d'avoir un aperçu du monde des esprits. Cependant, de nos jours, les plantes traditionnellement utilisées pour induire des expériences visionnaires chez les novices sont très difficiles à trouver. Cela est dû à la combinaison de plusieurs facteurs, tels que la surutilisation des ressources végétales sauvages par les vendeurs d'herbes et les guérisseurs, la sécheresse, et le surpâturage. Cependant, même lorsque ces plantes sont disponibles, elles sont assez toxiques. Par conséquent, l'empoisonnement, et même la mort, peuvent survenir à la suite d'un mauvais dosage, que même les guérisseurs expérimentés ont parfois du mal à estimer".
Au cours de ses voyages sur le terrain, le Dr Hirst a rencontré un certain nombre de devins ayant utilisé le Nexus comme substitut aux plantes traditionnelles. Aux doses recommandées sur les paquets d'Ubulawu Nomathotholo, il ne semble pas y avoir de toxicité ou d'inconfort physique, et certains des résultats thérapeutiques sont impressionnants. Une initiée à qui son professeur avait administré cinq comprimés Nexus a rapporté qu'elle s'était ensuite trouvée transportée dans une magnifique forêt, où elle avait rencontré des antilopes sauvages et des carnivores qui lui avaient révélé être les messagers de ses ancêtres tribaux. Selon le Dr Hirst : "Cette expérience transcendante a eu un effet profondément bénéfique sur cette initiée qui, jusqu'alors, avait manqué de confiance en elle et en sa vocation de guérisseuse".
Un autre cas relaté par le Dr Hirst est celui d'un homme devin qui est devenu pathologiquement dépressif après la mort tragique d'un de ses enfants. Même après la fin de la période traditionnelle de deuil, il continuait à être morose et évitait tout contact avec ses patients, les adressant plutôt à ses collègues. Ce devin a raconté au Dr Hirst qu'après avoir pris Nexus, il a eu une expérience visionnaire dans laquelle il s'est retrouvé face à face avec uDali (le Créateur) qui lui a révélé la signification sous-jacente de la mort de son enfant. Sa foi et sa confiance retrouvées, il a poursuivi son travail de guérisseur traditionnel avec succès.
Des esprits ancestraux sous la forme d'animaux sauvages, des rencontres visionnaires avec uDali - voilà des choses que le Blanc moyen d'Afrique du Sud aura probablement du mal à comprendre. Cependant, pour des millions de Noirs, en particulier dans les zones rurales du pays, ces questions spirituelles sont essentielles à la vie.
Et si le Nexus était vraiment une alternative sûre et efficace aux rares et souvent dangereuses plantes médicinales ? Et si cette substance mettait réellement les guérisseurs africains en contact avec les royaumes magiques et mystérieux de la conscience qui constituent la pierre angulaire des croyances africaines depuis des milliers d'années ? Et si les dizaines de milliers de guérisseurs traditionnels d'Afrique du Sud demandaient collectivement que ce médicament soit mis à leur disposition ? Ce qui est probablement certain, c'est que Nexus va susciter de nombreuses controverses au cours des mois et des années à venir. »
Quelques travaux de Manton Hirst :
A river of metaphors: Interpreting the Xhosa diviner's myth
Dreams and Medicines: The Perspective of Xhosa Diviners and Novices in the Eastern Cape, South Africa
Interpretative Reflections on Nomzi’s Story
Image du packaging d'Ubulawu Nomathotholo :
J'aimerais bien qu'on m'explique l'étoile de David et les reprises graphiques d'égypte antique. Je ne pensais pas que cette iconographie "magique" était aussi généralisée à l'échelle de la planète.