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DU TOUT AU UN, DU UN AU TOUT
Il s’agit dans cet article de traiter du questionnement du rapport de l’individu à son environnement, à la nature environnante, au cosmos, au Tout. C’est le dernier de la série traitant du narcissisme, et cet article introduit le sujet du Tout, autrement appelé la matrice par certains psychonauts. Avant d’aborder différentes manières d’accéder au Tout, il nous faut voir quelques aspects philosophiques du narcissisme, pour gagner une construction métaphysique permettant de créer des passerelles dans son esprit, entre ses pensées et idées, pour élargir ses réflexions jusqu’aux origines de sa propre personne, au delà de ses apparences.
NARCISSISME ET TOUT
Origine du narcissisme
Le narcissisme primitif prendrait sa source dans la matière vivante, dès la conception du fœtus, et serait lié à une cénesthésie prénatale (sensibilité organique, émanant de l'ensemble des sensations internes, qui suscite chez l'être humain le sentiment général de son existence, indépendamment du rôle spécifique des sens). Autrement, le narcissisme désigne l’investissement libidinal de sa propre personne, et surtout l’idée/impression que le moi se fait de lui-même. Il est le garant de son moi/ego, de l’opinion, de la confiance et de l’estime que l’on a de soi. Si le narcissisme est souvent mal connoté, il ne s'agit pas de le dénoncer, au contraire celui-ci est indispensable à notre équilibre interpersonnel et relationnel, mais plutôt de prévenir le danger de se rapporter au monde comme si le réel ne pouvait être appréhendé qu’à travers l’illusion des apparences subjectives de l’ego, qu’au travers de ses propres perceptions/interprétations/opinions, sans plus de discernement, de réflexion et d’objectivité. La notion de narcissisme implique toujours le double, l’écho, le reflet, les apparences dans lesquelles miroitent notre personnalité via notre ego.
Selon Lou Andreas Salomé : « Le narcissisme accompagne toutes les couches de notre expérience et indépendamment d’elles ; ce n’est pas seulement un stade immature qu’il s’agit de surmonter, mais aussi un compagnon de vie et qui se renouvelle toujours. »
Dans ses travaux, Lou Andreas Salomé a eu besoin que l’inconscient soit plus que le réceptacle des matériaux psychiques refoulés, et elle a posé l’équation : Inconscient = la Vie = le Tout. Cette pensée de la totalité est tirée de la substance infinie de Spinoza, du vouloir vivre pré individué de Schopenhauer, et de la volonté de puissance de Nietzsche, trois auteurs ayant travaillé sur le développement de soi en acceptant le réel tel qu’il est, et non tel qu’on voudrait qu’il soit. Cette notion de rechercher la vérité et non un idéal est très importante, on comprendra plus tard pourquoi.
Le narcissisme et la totalité, une approche psycho-philosophique
Le narcissisme est la voie principale vers une dimension ontologique de l’Inconscient, c’est à dire vers l’ensemble des vérités fondamentales de l'être (autant vis-à-vis des êtres humains et des animaux, que du vivant existant comme étant en devenir). Le narcissisme participerait à la volonté de puissance de chacun, comme l’expérience narcissique est compréhension naïve et originelle de la réalité, d’une union entre l’individu et le Tout : le narcissisme est ici le nom de cette union réelle. Le narcissisme nous connecte au Tout. Cette indifférenciation entre l’individu et le monde signale la totalité elle même, l’essence du monde, dont l’origine théorique connue est l’hypothétique point nommé Big bang (en vérité on ne sait pas vraiment ce qu’il y a derrière le mur de Planck, on s’est fait à l’idée d’un Big bang, même si celle-ci est remise en question aujourd’hui, avec les notions de Bing Crunch et de multivers).
Le narcissisme comme double direction
Le narcissisme a souvent deux orientations, ici on s’intéressera sur ses directions centrifuge en se décentrant de sa personne (ouverture au monde extérieur), et centripète en se recentrant dans un certain repli sur soi (dans les illusions de son ego). Le narcissisme ne se limite pas à un stade de la libido, parce qu’il « accompagne tous les stades » de la vie (développement physique, intellectuel, moral, etc), du stade fœtal jusqu’à la mort, et plus si croyance. En restant sur terre, il y aurait quelque chose dans le narcissisme qui s’oppose à la personne elle-même telle qu’elle est devenue, et « la renvoie à cet état d’avant la conscience où elle était là pour tout comme tout était là pour elle ». Autrement dit, le narcissisme à ce pouvoir de permettre à l’individu d’embrasser spirituellement dans une (dé)connexion corps/esprit ou une (re)connexion à soi, la totalité du cosmos en percevant intuitivement le Tout, la matrice universelle, comme lorsque l’on voit les fils derrière la grande broderie de la vie, comment tout ça est fait. Reste à savoir si l’on atteint ce fameux Tout en se décentrant de son moi (de son ego) via une prise de recul permettant de comprendre qu’on fait partie d’un tout (dans une dynamique centrifuge du narcissisme), ou au contraire en s’auto-centrant sur sa personne, pour accéder à soi.
Il n’y a pas de réponse évidente à cette question, puisque la synchronicité des dynamiques du narcissisme fait que les directions centrifuge et centripète sont les deux faces de la même médaille. Aussi à partir du moment où le Tout se gagne en passant par le soi, dans un décentrement de son moi, il faut inévitablement dépasser son moi, donc les barrières de l'ego et ses mécanismes de défense qui clivent la personnalité pour la protéger d’elle-même. Et il faut aussi prendre en compte que le soi n’existe pas, parce qu’il est l’émergence de l’interprétation de toutes ses sensations et perceptions à un instant donné (disons la plus grande illusion de soi qui nous fait nous sentir vivant et existant au plus profond de notre être). La conscience émerge de ce système chaotique, et il y a là une dialectique qui se joue dans l’esprit pour atteindre le Tout, en devant passer de la conscience à l’inconscient, en dépassant les illusions de son ego et de soi, tout en étant conscient pour s'en rendre compte...bref il faudrait alors atteindre un état de supra-conscience extraneuronale, mais après on commence à mettre un pied dans le mysticisme, et c’est pas vraiment mon délire). Pour le moment je vous propose de moins se triturer la tête en restant sur des bases plus concrètes, et de voir quelles tangentes permettent de pénétrer sa psyché via un dialogue intérieur, pour accéder à soi, à une forme de sagesse, de Nirvana.
En résumé du problème énoncé, une part du narcissisme joue contre un autre aspect de lui-même lorsqu’il fait alterner l’individu d’une position centrifuge à une position centripète, lui permettant de prendre du recul sur sa position dans le cosmos (décentrement infini quand on est soi), ou à l’opposé de se croire au centre de tout (auto-centré dans son ego). La résolution de ce paradoxe étant de trouver un point d'équilibre entre une prise de recul sur soi pour ne pas se sous ou surestimer, et un ego juste assez fort pour rester confiant et s'adapter sans problème à son environnement. Il y aurait donc un point d’équilibre à trouver entre ses pulsions de vie et ses pulsions de mort, entre son narcissisme de vie et de mort. Les pulsions de vie recherchant la reproduction par l'autre, alors que les pulsions de mort recherche l’annihilation de l'autre pour rester l'unique gagnant dans le combat du vivant.
EXPÉRIENCE DE REPLI OU D’OUVERTURE
Les limites de l’individualité agissent selon le refoulement, et la partie latente et inconsciente du narcissisme qui est connectée avec le Tout, n’est que très peu accessible à l’individu parce que refoulée, ou déniée. La restriction de la personnalité s’opérant alors lorsque l’individu voit les variations et frontières de son moi s’amenuiser en empêchant toute ouverture à une dimension plus phénoménale et spirituelle (dans un manque de reconnaissance et de reconnexion avec sa part instinctive animale, la nature, le cosmos). On retrouve là une vision scientifique du monde, sans artéfact et sans croyance, mais gare à la vanité d'un monde sensible dévalorisé et déshumanisé par la technique. Le but serait donc de ne pas chercher à tout maitriser en faisant de la science l'unique vérité, comme on peut le voir dans certains cas aujourd'hui (Monsanto a inventé la graine qui ne germe qu'une fois, ils ont réussi à tuer le vivant), mais de tout comprendre pour s’adapter au mieux au réel, en ne le déniant pas. Dépasser sa propre dénégation est le pas essentiel pour atteindre le sublime dans son esprit, cet émerveillement indispensable à son état de bien-être.
Il faut prendre beaucoup de recul pour accéder à la matrice.
Il s’agit bien de ce moment où l’on a la sensation de tout comprendre, de tout saisir, d’accueillir l’univers tout entier dans son corps en harmonie avec son esprit, qui n’est plus borné par des limites et frontières autant psychiques que physiques (le tout dans un déverrouillage de ses affects, de ses émotions, de ses intuitions, de ses sensations, de ses impressions, de ses interprétations, de ses réflexions, il s’agit d’une libération totale de soi, la fin temporaire de l’emprise du moi sur sa personne, lorsque l'on a détrôné son ego dans son propre esprit).
Le narcissisme est ce qu’il y a de plus profond en nous-mêmes
L’individu mène une double existence en tant qu’il est à lui-même sa propre fin, et en tant que maillon d’une chaîne à laquelle il est assujetti contre sa volonté à l’influence du culturel (comme si on devait absolument fonder une famille pour se reproduire). Il est malgré lui connecté à son inconscient, à différentes strates d’inconscients collectifs, par la conscience de soi, la position réflexive que l'on recherche ici. De ce fait il est en lien permanent avec le Tout environnant, en tant que partie prenante de la nature, rouage de la matrice. L’humain étant dans la nature, il est nature. D’où l’importance de le reconnaitre pour ne pas en pâtir, en étant dissocié de ce qui fait son intériorité, sa part instinctive naturelle et primordiale animale, c'est-à-dire ce qui relie l’individu à son environnement en lui permettant de comprendre qui il est, et de définir quelle est sa place dans ce monde dont il est partie intégrante. Il faut qu’il esquisse un mouvement de réappropriation dans l’image de soi-même pour que l’amour lui soit possible, l’amour de soi, d’autrui, de la nature, du cosmos qui est son habitat (je ne parle pas d'un amour narcissique où " je t'aime " équivaut à un " je veux te posséder ", mais à un amour universel lorsque l'on respecte les choses et les êtres tels qu'ils sont, et non tels qu'on voudrait qu'ils soient). Ce n’est pas en se voulant maitre et possesseur de la nature (vision égotique +++), c'est-à-dire en détruisant l’équilibre naturel de son environnement, que l’être humain s’estimera positivement et se sentira heureux d’exister en profitant « momentanément » des richesses naturelles qu’il fait sienne.
L’investissement de tout objet serait fondamentalement narcissique, au sens de retrouvailles avec le « Tout »
Dans la relation aux objets, Lou Andreas-Salomé accentue ce que dit Freud du sentiment d’appauvrissement du moi qui accompagne l’investissement amoureux d’un objet. Elle parle en termes d’excès : « Comme dans le “j’aimais l’amour” de Saint-Augustin, les objets apparaissent fondamentalement comme de simples occasions pour y décharger un excédent d’amour qui se rapporte à nous-mêmes et qui, pour ainsi dire, n’a pas trouvé à se placer ». « J’aimais l’amour » étant à prendre comme « j’aime l’idée que j’aime l’amour », on est dans la spirale narcissique de l’investissement sur soi de libido, quand on se prend pour son propre idéal. Pour reprendre l'exemple courant d’amour narcissique lorsque l’on dit à quelqu’un « je t’aime , et qui signifie « je te veux, je veux te posséder pour me satisfaire, me compléter ». A ce moment là on aime chez l’autre ce qu’on y a projeté d’après ce que l’on aime ou aimerait voir chez soi (dans le sens où l’on voit en l’autre un idéal de complétude, quand à ses propres manques, la position mégalo étant d'imaginer qu'avec lui on serait enfin un être fini). L’amour est donc avant tout narcissique, et cela se comprend parce que dans sa tête on est un se divisant en plusieurs facettes (« Je est un nous »), donc le filtre amoureux passe d’abord par un amour de soi (UN) avant d’être projeté sur autrui (L’AUTRE) (« Je est un autre »), en qui nous trouverions une ressemblance de ce que nous apprécions chez soi, et avec qui l’on aurait intérêt à traiter pour se complaire d’après ses manques et vulnérabilités (dans le sens où le couple est l’union de deux individus pas finis, recherchant chez l’autre une béquille afin qu’ensemble ils se tiennent debout).
DU UN AU TOUT, OU DU TOUT AU RIEN
En revenant dans une perspective de développement, une fois l’individu mâture et à même de s’affirmer de lui-même par le langage, le champ d’action du narcissisme se retrouve dans trois domaines spécifiques que sont le volume, la surface et le point. Il s’étend donc dans :
- un volume qu’est le corps, grandissant et évoluant dans les trois dimensions de l’espace
- une surface reflétant l’illusion de soi, en tant que projection de l’image de son moi, de son ego (l’idée que l’on se fait de sa personne)
- un point, la limite minimale d’existence (on se développe d’un microscopique point dans une cellule, avant d’en revenir à un minuscule point lorsque le corps s’est décomposé en poussière suite à sa mort)
Sorti du néant, et de l’étau de la conscience, l’esprit de l’être humain vivant et narcissisé s'étend jusqu’à l’infini (au plus profond de lui), même si l’individu n’en est pas conscient puisqu’il n’a pas accès à son inconscient, qui est en perpétuelle connexion avec le Tout. Si le corps et l’image de soi sont les parties les plus matérielles et palpables de l’individu (même si l’image de soi est une construction métaphysique), le point de non retour narcissique serait quand à lui inaccessible à la conscience, autrement que par l’expérience d’une mort imminente. Il faudrait mourir pour aller voir au delà de soi, de son ultime illusion, mais c’est dommage de risquer de se sacrifier pour s’approcher du Tout.
Un exemple moins tragique serait ce moment où l’on s’endort, lorsque l’on passe d’un état conscient à un état de veille pendant le sommeil, caractérisé par l’absence de toute relation à l’entourage (dans un désinvestissement narcissique du moi qui ne fait plus tampon entre le réel extérieur et notre intérieur). Dans le sommeil, on peut voir une reproduction de cet état de vie intra-utérine à jamais perdue, c’est alors l’état inconscient comme béatitude.
Arriver à distinguer le moment exact où l’on s’endort
Pour aller plus en avant dans la recherche de son narcissisme, et afin de comprendre quel est son rôle pratique dans son sentiment d’existence, l’exemple de l’endormissement est compréhensible par tous. Qui n’a jamais essayé de voir, sans succès, à quel moment il s’est endormi ? Au mieux on se rappelle avoir commencé à sombrer dans les bras de Morphée, en percevant de moins en moins sa réalité extérieure et intérieure, et en se sentant redevenu un petit enfant innocent et presque inconscient au travers de rêveries étranges et subconscientes. Il y a là un état de félicité que l’on gagne paradoxalement dans un désinvestissement narcissique de sa personne, lorsque le narcissisme n’investit plus le moi de l’individu, et que les frontières du moi ne sont plus attentionnées à son environnement. Le paradoxe étant qu’en se décentrant de son ego, de son moi, on atteint le Tout en soi, mais sans s’en rendre compte, puisque l’on n’est plus conscient lorsque l’on dort.
Alors comment atteindre le Tout, tout en étant conscient et lucide ?
Aller au-delà du point nodal de son sentiment d’existence au centre de soi, ce point totalement inconscient, serait en un sens la solution finale à ses angoisses, quand en disparaissant derrière l’horizon de son devenir, lieu du vide existentiel le plus total au delà de toute illusion, l’individu perdrait sa vie intellectuelle et ses facultés mentales. En pénétrant une dimension plus spirituelle comme l’essence de soi tout en perdant son ego, il serait question d’un état de mort psychique et d’une perte définitive de son sentiment d'existence, de son moi (l’instance permettant de percevoir et appréhender la réalité, en coordonnant extériorité et intériorité). Cet état de mort intellectuelle signifie un morcellement complet de la personnalité et une perte de sa motricité ainsi que de ses aptitudes psychiques réflexives, alors il n’y aurait plus de devenir, mais juste un état d’être inerte, comme lorsqu’on est mort, comme cela est arrivé à Nietzsche suite à une attaque cérébrale (après avoir mis rudement à l’épreuve son moi en souhaitant toujours plus se sublimer et se dépasser, il a passé les dix dernière années de sa vie tel un légume, au moins il ne souffrait plus...).
Sans aller jusqu’à dépasser ce point de non retour en sombrant dans son propre trou noir, et en comprenant que ses angoisses traumatiques sont un produit des énergies non liées dans son esprit, c’est en remontant le champ d’action du narcissisme, que l’on peut dans une reconnexion avec soi et le Tout, retrouver du sens en soi, dans la totalité perdue suite au morcellement de son identité et de sa personnalité (par exemple lors de la naissance, ou d’évènement traumatique). Idéalement, il s’agit là de (re)parcourir les liaisons entre les trois domaines d’action du narcissisme en partant du point que l’on aurait atteint au travers d'une réflexion en allant voir au plus profond de soi, puis d’en passer par la surface en allant au delà du miroir de ses propres apparences (après avoir dépasser ses hontes et culpabilités masquées par ses illusions) pour s’avouer tel que l’on est et non tel que l’on voudrait être, et ainsi s’accepter en retrouvant son âme dans une harmonie entre corps et esprit (au lieu de s’en tenir à un idéal inatteignable et culpabilisant).
Il s'agit donc dans les articles à venir, d'affronter ses angoisses en comprenant et dépassant certains schémas internes répétitifs et nocifs, en se sublimant dans la création de sa propre personne, suite à une expression et reconnaissance de soi. L’idée étant de peindre un tableau où nos énergies seraient liées et produiraient alors du sens en allant de l’avant, au lieu de nous faire tourner en rond, dans des causes éparses dont on ne sait que faire...au point de vouloir se fuir ou se détruire.
«Si tu savais combien de fois, la caméra de ton visage,
a vu imagé le paysage,
tu viendrais de ce côté là,
de ce côté du grand miroir,
et qui tu es tu l’oublieras,
qu’une fois tu pénètres la glace, viens
tu verras tout à deux faces,
je dis casse, casse la glace »
Téléphone - Ne me regarde pas
Voici deux schémas permettant de comprendre un peu tout ce mic mac pas évident à appréhender au départ.
Il s’agit dans cet article de traiter du questionnement du rapport de l’individu à son environnement, à la nature environnante, au cosmos, au Tout. C’est le dernier de la série traitant du narcissisme, et cet article introduit le sujet du Tout, autrement appelé la matrice par certains psychonauts. Avant d’aborder différentes manières d’accéder au Tout, il nous faut voir quelques aspects philosophiques du narcissisme, pour gagner une construction métaphysique permettant de créer des passerelles dans son esprit, entre ses pensées et idées, pour élargir ses réflexions jusqu’aux origines de sa propre personne, au delà de ses apparences.
NARCISSISME ET TOUT
Origine du narcissisme
Le narcissisme primitif prendrait sa source dans la matière vivante, dès la conception du fœtus, et serait lié à une cénesthésie prénatale (sensibilité organique, émanant de l'ensemble des sensations internes, qui suscite chez l'être humain le sentiment général de son existence, indépendamment du rôle spécifique des sens). Autrement, le narcissisme désigne l’investissement libidinal de sa propre personne, et surtout l’idée/impression que le moi se fait de lui-même. Il est le garant de son moi/ego, de l’opinion, de la confiance et de l’estime que l’on a de soi. Si le narcissisme est souvent mal connoté, il ne s'agit pas de le dénoncer, au contraire celui-ci est indispensable à notre équilibre interpersonnel et relationnel, mais plutôt de prévenir le danger de se rapporter au monde comme si le réel ne pouvait être appréhendé qu’à travers l’illusion des apparences subjectives de l’ego, qu’au travers de ses propres perceptions/interprétations/opinions, sans plus de discernement, de réflexion et d’objectivité. La notion de narcissisme implique toujours le double, l’écho, le reflet, les apparences dans lesquelles miroitent notre personnalité via notre ego.
Selon Lou Andreas Salomé : « Le narcissisme accompagne toutes les couches de notre expérience et indépendamment d’elles ; ce n’est pas seulement un stade immature qu’il s’agit de surmonter, mais aussi un compagnon de vie et qui se renouvelle toujours. »
Dans ses travaux, Lou Andreas Salomé a eu besoin que l’inconscient soit plus que le réceptacle des matériaux psychiques refoulés, et elle a posé l’équation : Inconscient = la Vie = le Tout. Cette pensée de la totalité est tirée de la substance infinie de Spinoza, du vouloir vivre pré individué de Schopenhauer, et de la volonté de puissance de Nietzsche, trois auteurs ayant travaillé sur le développement de soi en acceptant le réel tel qu’il est, et non tel qu’on voudrait qu’il soit. Cette notion de rechercher la vérité et non un idéal est très importante, on comprendra plus tard pourquoi.
Le narcissisme et la totalité, une approche psycho-philosophique
Le narcissisme est la voie principale vers une dimension ontologique de l’Inconscient, c’est à dire vers l’ensemble des vérités fondamentales de l'être (autant vis-à-vis des êtres humains et des animaux, que du vivant existant comme étant en devenir). Le narcissisme participerait à la volonté de puissance de chacun, comme l’expérience narcissique est compréhension naïve et originelle de la réalité, d’une union entre l’individu et le Tout : le narcissisme est ici le nom de cette union réelle. Le narcissisme nous connecte au Tout. Cette indifférenciation entre l’individu et le monde signale la totalité elle même, l’essence du monde, dont l’origine théorique connue est l’hypothétique point nommé Big bang (en vérité on ne sait pas vraiment ce qu’il y a derrière le mur de Planck, on s’est fait à l’idée d’un Big bang, même si celle-ci est remise en question aujourd’hui, avec les notions de Bing Crunch et de multivers).
Le narcissisme comme double direction
Le narcissisme a souvent deux orientations, ici on s’intéressera sur ses directions centrifuge en se décentrant de sa personne (ouverture au monde extérieur), et centripète en se recentrant dans un certain repli sur soi (dans les illusions de son ego). Le narcissisme ne se limite pas à un stade de la libido, parce qu’il « accompagne tous les stades » de la vie (développement physique, intellectuel, moral, etc), du stade fœtal jusqu’à la mort, et plus si croyance. En restant sur terre, il y aurait quelque chose dans le narcissisme qui s’oppose à la personne elle-même telle qu’elle est devenue, et « la renvoie à cet état d’avant la conscience où elle était là pour tout comme tout était là pour elle ». Autrement dit, le narcissisme à ce pouvoir de permettre à l’individu d’embrasser spirituellement dans une (dé)connexion corps/esprit ou une (re)connexion à soi, la totalité du cosmos en percevant intuitivement le Tout, la matrice universelle, comme lorsque l’on voit les fils derrière la grande broderie de la vie, comment tout ça est fait. Reste à savoir si l’on atteint ce fameux Tout en se décentrant de son moi (de son ego) via une prise de recul permettant de comprendre qu’on fait partie d’un tout (dans une dynamique centrifuge du narcissisme), ou au contraire en s’auto-centrant sur sa personne, pour accéder à soi.
Il n’y a pas de réponse évidente à cette question, puisque la synchronicité des dynamiques du narcissisme fait que les directions centrifuge et centripète sont les deux faces de la même médaille. Aussi à partir du moment où le Tout se gagne en passant par le soi, dans un décentrement de son moi, il faut inévitablement dépasser son moi, donc les barrières de l'ego et ses mécanismes de défense qui clivent la personnalité pour la protéger d’elle-même. Et il faut aussi prendre en compte que le soi n’existe pas, parce qu’il est l’émergence de l’interprétation de toutes ses sensations et perceptions à un instant donné (disons la plus grande illusion de soi qui nous fait nous sentir vivant et existant au plus profond de notre être). La conscience émerge de ce système chaotique, et il y a là une dialectique qui se joue dans l’esprit pour atteindre le Tout, en devant passer de la conscience à l’inconscient, en dépassant les illusions de son ego et de soi, tout en étant conscient pour s'en rendre compte...bref il faudrait alors atteindre un état de supra-conscience extraneuronale, mais après on commence à mettre un pied dans le mysticisme, et c’est pas vraiment mon délire). Pour le moment je vous propose de moins se triturer la tête en restant sur des bases plus concrètes, et de voir quelles tangentes permettent de pénétrer sa psyché via un dialogue intérieur, pour accéder à soi, à une forme de sagesse, de Nirvana.
En résumé du problème énoncé, une part du narcissisme joue contre un autre aspect de lui-même lorsqu’il fait alterner l’individu d’une position centrifuge à une position centripète, lui permettant de prendre du recul sur sa position dans le cosmos (décentrement infini quand on est soi), ou à l’opposé de se croire au centre de tout (auto-centré dans son ego). La résolution de ce paradoxe étant de trouver un point d'équilibre entre une prise de recul sur soi pour ne pas se sous ou surestimer, et un ego juste assez fort pour rester confiant et s'adapter sans problème à son environnement. Il y aurait donc un point d’équilibre à trouver entre ses pulsions de vie et ses pulsions de mort, entre son narcissisme de vie et de mort. Les pulsions de vie recherchant la reproduction par l'autre, alors que les pulsions de mort recherche l’annihilation de l'autre pour rester l'unique gagnant dans le combat du vivant.
EXPÉRIENCE DE REPLI OU D’OUVERTURE
Les limites de l’individualité agissent selon le refoulement, et la partie latente et inconsciente du narcissisme qui est connectée avec le Tout, n’est que très peu accessible à l’individu parce que refoulée, ou déniée. La restriction de la personnalité s’opérant alors lorsque l’individu voit les variations et frontières de son moi s’amenuiser en empêchant toute ouverture à une dimension plus phénoménale et spirituelle (dans un manque de reconnaissance et de reconnexion avec sa part instinctive animale, la nature, le cosmos). On retrouve là une vision scientifique du monde, sans artéfact et sans croyance, mais gare à la vanité d'un monde sensible dévalorisé et déshumanisé par la technique. Le but serait donc de ne pas chercher à tout maitriser en faisant de la science l'unique vérité, comme on peut le voir dans certains cas aujourd'hui (Monsanto a inventé la graine qui ne germe qu'une fois, ils ont réussi à tuer le vivant), mais de tout comprendre pour s’adapter au mieux au réel, en ne le déniant pas. Dépasser sa propre dénégation est le pas essentiel pour atteindre le sublime dans son esprit, cet émerveillement indispensable à son état de bien-être.
Il faut prendre beaucoup de recul pour accéder à la matrice.
Il s’agit bien de ce moment où l’on a la sensation de tout comprendre, de tout saisir, d’accueillir l’univers tout entier dans son corps en harmonie avec son esprit, qui n’est plus borné par des limites et frontières autant psychiques que physiques (le tout dans un déverrouillage de ses affects, de ses émotions, de ses intuitions, de ses sensations, de ses impressions, de ses interprétations, de ses réflexions, il s’agit d’une libération totale de soi, la fin temporaire de l’emprise du moi sur sa personne, lorsque l'on a détrôné son ego dans son propre esprit).
Le narcissisme est ce qu’il y a de plus profond en nous-mêmes
L’individu mène une double existence en tant qu’il est à lui-même sa propre fin, et en tant que maillon d’une chaîne à laquelle il est assujetti contre sa volonté à l’influence du culturel (comme si on devait absolument fonder une famille pour se reproduire). Il est malgré lui connecté à son inconscient, à différentes strates d’inconscients collectifs, par la conscience de soi, la position réflexive que l'on recherche ici. De ce fait il est en lien permanent avec le Tout environnant, en tant que partie prenante de la nature, rouage de la matrice. L’humain étant dans la nature, il est nature. D’où l’importance de le reconnaitre pour ne pas en pâtir, en étant dissocié de ce qui fait son intériorité, sa part instinctive naturelle et primordiale animale, c'est-à-dire ce qui relie l’individu à son environnement en lui permettant de comprendre qui il est, et de définir quelle est sa place dans ce monde dont il est partie intégrante. Il faut qu’il esquisse un mouvement de réappropriation dans l’image de soi-même pour que l’amour lui soit possible, l’amour de soi, d’autrui, de la nature, du cosmos qui est son habitat (je ne parle pas d'un amour narcissique où " je t'aime " équivaut à un " je veux te posséder ", mais à un amour universel lorsque l'on respecte les choses et les êtres tels qu'ils sont, et non tels qu'on voudrait qu'ils soient). Ce n’est pas en se voulant maitre et possesseur de la nature (vision égotique +++), c'est-à-dire en détruisant l’équilibre naturel de son environnement, que l’être humain s’estimera positivement et se sentira heureux d’exister en profitant « momentanément » des richesses naturelles qu’il fait sienne.
L’investissement de tout objet serait fondamentalement narcissique, au sens de retrouvailles avec le « Tout »
Dans la relation aux objets, Lou Andreas-Salomé accentue ce que dit Freud du sentiment d’appauvrissement du moi qui accompagne l’investissement amoureux d’un objet. Elle parle en termes d’excès : « Comme dans le “j’aimais l’amour” de Saint-Augustin, les objets apparaissent fondamentalement comme de simples occasions pour y décharger un excédent d’amour qui se rapporte à nous-mêmes et qui, pour ainsi dire, n’a pas trouvé à se placer ». « J’aimais l’amour » étant à prendre comme « j’aime l’idée que j’aime l’amour », on est dans la spirale narcissique de l’investissement sur soi de libido, quand on se prend pour son propre idéal. Pour reprendre l'exemple courant d’amour narcissique lorsque l’on dit à quelqu’un « je t’aime , et qui signifie « je te veux, je veux te posséder pour me satisfaire, me compléter ». A ce moment là on aime chez l’autre ce qu’on y a projeté d’après ce que l’on aime ou aimerait voir chez soi (dans le sens où l’on voit en l’autre un idéal de complétude, quand à ses propres manques, la position mégalo étant d'imaginer qu'avec lui on serait enfin un être fini). L’amour est donc avant tout narcissique, et cela se comprend parce que dans sa tête on est un se divisant en plusieurs facettes (« Je est un nous »), donc le filtre amoureux passe d’abord par un amour de soi (UN) avant d’être projeté sur autrui (L’AUTRE) (« Je est un autre »), en qui nous trouverions une ressemblance de ce que nous apprécions chez soi, et avec qui l’on aurait intérêt à traiter pour se complaire d’après ses manques et vulnérabilités (dans le sens où le couple est l’union de deux individus pas finis, recherchant chez l’autre une béquille afin qu’ensemble ils se tiennent debout).
DU UN AU TOUT, OU DU TOUT AU RIEN
En revenant dans une perspective de développement, une fois l’individu mâture et à même de s’affirmer de lui-même par le langage, le champ d’action du narcissisme se retrouve dans trois domaines spécifiques que sont le volume, la surface et le point. Il s’étend donc dans :
- un volume qu’est le corps, grandissant et évoluant dans les trois dimensions de l’espace
- une surface reflétant l’illusion de soi, en tant que projection de l’image de son moi, de son ego (l’idée que l’on se fait de sa personne)
- un point, la limite minimale d’existence (on se développe d’un microscopique point dans une cellule, avant d’en revenir à un minuscule point lorsque le corps s’est décomposé en poussière suite à sa mort)
Sorti du néant, et de l’étau de la conscience, l’esprit de l’être humain vivant et narcissisé s'étend jusqu’à l’infini (au plus profond de lui), même si l’individu n’en est pas conscient puisqu’il n’a pas accès à son inconscient, qui est en perpétuelle connexion avec le Tout. Si le corps et l’image de soi sont les parties les plus matérielles et palpables de l’individu (même si l’image de soi est une construction métaphysique), le point de non retour narcissique serait quand à lui inaccessible à la conscience, autrement que par l’expérience d’une mort imminente. Il faudrait mourir pour aller voir au delà de soi, de son ultime illusion, mais c’est dommage de risquer de se sacrifier pour s’approcher du Tout.
Un exemple moins tragique serait ce moment où l’on s’endort, lorsque l’on passe d’un état conscient à un état de veille pendant le sommeil, caractérisé par l’absence de toute relation à l’entourage (dans un désinvestissement narcissique du moi qui ne fait plus tampon entre le réel extérieur et notre intérieur). Dans le sommeil, on peut voir une reproduction de cet état de vie intra-utérine à jamais perdue, c’est alors l’état inconscient comme béatitude.
Arriver à distinguer le moment exact où l’on s’endort
Pour aller plus en avant dans la recherche de son narcissisme, et afin de comprendre quel est son rôle pratique dans son sentiment d’existence, l’exemple de l’endormissement est compréhensible par tous. Qui n’a jamais essayé de voir, sans succès, à quel moment il s’est endormi ? Au mieux on se rappelle avoir commencé à sombrer dans les bras de Morphée, en percevant de moins en moins sa réalité extérieure et intérieure, et en se sentant redevenu un petit enfant innocent et presque inconscient au travers de rêveries étranges et subconscientes. Il y a là un état de félicité que l’on gagne paradoxalement dans un désinvestissement narcissique de sa personne, lorsque le narcissisme n’investit plus le moi de l’individu, et que les frontières du moi ne sont plus attentionnées à son environnement. Le paradoxe étant qu’en se décentrant de son ego, de son moi, on atteint le Tout en soi, mais sans s’en rendre compte, puisque l’on n’est plus conscient lorsque l’on dort.
Alors comment atteindre le Tout, tout en étant conscient et lucide ?
Aller au-delà du point nodal de son sentiment d’existence au centre de soi, ce point totalement inconscient, serait en un sens la solution finale à ses angoisses, quand en disparaissant derrière l’horizon de son devenir, lieu du vide existentiel le plus total au delà de toute illusion, l’individu perdrait sa vie intellectuelle et ses facultés mentales. En pénétrant une dimension plus spirituelle comme l’essence de soi tout en perdant son ego, il serait question d’un état de mort psychique et d’une perte définitive de son sentiment d'existence, de son moi (l’instance permettant de percevoir et appréhender la réalité, en coordonnant extériorité et intériorité). Cet état de mort intellectuelle signifie un morcellement complet de la personnalité et une perte de sa motricité ainsi que de ses aptitudes psychiques réflexives, alors il n’y aurait plus de devenir, mais juste un état d’être inerte, comme lorsqu’on est mort, comme cela est arrivé à Nietzsche suite à une attaque cérébrale (après avoir mis rudement à l’épreuve son moi en souhaitant toujours plus se sublimer et se dépasser, il a passé les dix dernière années de sa vie tel un légume, au moins il ne souffrait plus...).
Sans aller jusqu’à dépasser ce point de non retour en sombrant dans son propre trou noir, et en comprenant que ses angoisses traumatiques sont un produit des énergies non liées dans son esprit, c’est en remontant le champ d’action du narcissisme, que l’on peut dans une reconnexion avec soi et le Tout, retrouver du sens en soi, dans la totalité perdue suite au morcellement de son identité et de sa personnalité (par exemple lors de la naissance, ou d’évènement traumatique). Idéalement, il s’agit là de (re)parcourir les liaisons entre les trois domaines d’action du narcissisme en partant du point que l’on aurait atteint au travers d'une réflexion en allant voir au plus profond de soi, puis d’en passer par la surface en allant au delà du miroir de ses propres apparences (après avoir dépasser ses hontes et culpabilités masquées par ses illusions) pour s’avouer tel que l’on est et non tel que l’on voudrait être, et ainsi s’accepter en retrouvant son âme dans une harmonie entre corps et esprit (au lieu de s’en tenir à un idéal inatteignable et culpabilisant).
Il s'agit donc dans les articles à venir, d'affronter ses angoisses en comprenant et dépassant certains schémas internes répétitifs et nocifs, en se sublimant dans la création de sa propre personne, suite à une expression et reconnaissance de soi. L’idée étant de peindre un tableau où nos énergies seraient liées et produiraient alors du sens en allant de l’avant, au lieu de nous faire tourner en rond, dans des causes éparses dont on ne sait que faire...au point de vouloir se fuir ou se détruire.
«Si tu savais combien de fois, la caméra de ton visage,
a vu imagé le paysage,
tu viendrais de ce côté là,
de ce côté du grand miroir,
et qui tu es tu l’oublieras,
qu’une fois tu pénètres la glace, viens
tu verras tout à deux faces,
je dis casse, casse la glace »
Téléphone - Ne me regarde pas
Voici deux schémas permettant de comprendre un peu tout ce mic mac pas évident à appréhender au départ.