D
Deleted-1
Guest
- Bonjour cher Psychonaut -
J'estime aujourd'hui que tout travail intellectuel portant sur l'être humain, ne peut faire l'économie du narcissisme. Il est partout, acteur, vecteur et moteur de l'individu, et je tiens à vous le présenter pour que vous découvriez quelques mécanismes de l'étendue complexe de l'esprit humain. Aussi tu t'apprêtes à lire un grand thread sur le narcissisme, plus précisément une introduction à cette instance psychique, dans une optique psychonautique. Voici ce que j'entends présenter dans cette série de cinq articles :
- En introduction nous commencerons par des généralités, une mise en contexte dans un très rapide historique du narcissisme, de l'affirmation du moi, par le " Je ". S'en suive les multiples et différentes orientations du narcissisme, ainsi que ses dimensions, ce qui ouvre quelques perspectives de l'esprit humain.
- Secondement, nous verrons la puissance du narcissisme que j'ai brièvement associé à la volonté de puissance nietzschéenne, cette puissance intérieure poussant à étendre son être autant que son devenir le peut. Puis il sera question de découvrir quels sortes de nœuds bloquent les individus dans leur émancipation personnelle, dans leur individuation, et quel est le rôle du narcissisme dans ses blocages.
- Ensuite nous balayerons quelques troubles liés au narcissisme, afin de voir en quoi et comment il nous fait défaut, dans la suite logique des nœuds vus précédemment.
- Le quatrième volet portera sur les différents affects narcissiques, pour mieux comprendre et appréhender le narcissisme dans la vie de tous les jours, c'est à dire comment il influence notre manière d'être, nos comportements et attitudes, de notre esthétique apparente à notre façon de penser morale.
- Et enfin le cinquième article introduira la notion du Tout, ce Graal recherché par les psychonauts, cet état d'union quasi mystique si ce n'est divin, avec l'univers, le cosmos et son (propre) infini.
A partir de là, une fois que nous saurons ce qu'est le Tout, et quel lien il opère avec le narcissisme, nous largueront les amarres vers des articles traitant des différentes manières d'atteindre ce Tout, pour en arriver à la dynamique des matrices périnatales dans le phénomène de perte d'ego. Ayant déjà traité dans un article précédent le phénomène de vie/mort/renaissance, je vais ce coup-ci mettre la loupe sur le moment exact où l'on ego disparait, si il disparait...disons que nous verrons à quel moment la drogue amène le psychonaut à franchir le point nodal de son existence, cet état de non retour où l'on passe derrière le grand miroir, et où le tragique du réel nous apparait aussi cruelles que sont les vérités de notre monde.
Je rassure les plus peureux, en ayant lu mes précédents articles, la désillusion devrait être moins grande, et si ça se trouve vous n'apprendrez rien de plus que ce que vous ne savez déjà, la lecture de mon travail vous amenant à vous en rendre compte...
Une fois qu'on en sera arrivé là, je présenterais mon travail sur l'addiction, et le risque qu'il y a à devenir dépendant de son néant en recherchant son absolu idéal dans une démarche introspective et psychonautique. Bien sur nous verrons l'addiction d'un point de vue plus large, où de nombreux types de personnalités addicts seront présentées, l'idée étant de bien comprendre qu'entre se gaver de prods et de jeux-vidéos, la logique addictive est sensiblement la même. Mais d'une même cause, le sens de la compulsion est-il toujours la même ? La réponse au pourquoi du comment de l'essence même du désir du psychonaut réside peut-être là ?
Narcissisme 2 - La puissance et les noeuds narcissiques
Narcissisme 3 - Quelques troubles liés narcissisme (-16)
Narcissisme 4 - Les affects narcissiques, de l'extase à l'indignation
Narcissisme 5 - Du Tout au Un, du Un au Tout
Narcissisme 2 - La puissance et les noeuds narcissiques
Narcissisme 3 - Quelques troubles liés narcissisme (-16)
Narcissisme 4 - Les affects narcissiques, de l'extase à l'indignation
Narcissisme 5 - Du Tout au Un, du Un au Tout
L’INSTANCE NARCISSIQUE
Le narcissisme n’est ni l’amour de soi, ni l’estime de soi, qui sont tous deux nécessaires pour survivre, créer, travailler et aimer. Le narcissisme, c’est l’amour de sa propre apparence, de cette image virtuelle que l’on se fait de soi-même, cette représentation mentale substituée à son vécu réel. Il y a dans le narcissisme, une certaine perte de contact avec la réalité, avec l’autre, avec l’altérité, quand on se focalise sur son nombril. Le problème du narcissisme pathologique, est que l’on ne fait que se regarder tout en niant autrui, au point de se noyer dans son propre reflet, dans ses illusions et fantasmes.
Dans un processus de culture longue, la morale occidentale moderne a marqué une rupture fondamentale dans l’éthique de base de l’humanité, depuis qu’elle existe. L’humanité, au temps des sociétés primitives, fonctionnait sous un régime qui était pour autrui : « Je me met entre parenthèse pour l’autre » était le principe de base de l’humanité. Les modernes depuis Descartes et son « Cogito ergo sum », ont inventé une nouvelle morale, où le souci de soi, l’écoute et l’exploration de soi, ont acquis une légitimité sans précédent. L’autonomie du sujet était devenue le socle de la vérité, et l’individualisme allait pouvoir faire loi, autant dans les cercles littéraires que philosophiques (romantisme et développement personnel), que dans les cercles politiques et économiques (capitalisme et libéralisme).
Lorsque le groupe manquera de mystique, il restera toujours le narcissisme des petites différences.
Aujourd’hui l’image est au cœur de l’exposition de soi, elle est devenue centrale dans notre existence, en tant qu’indice légitime de la réalité : ce qui n’est pas vu, n’existe pas. Si il n’y a pas d’image d’un évènement, c’est comme si il n’avait pas eu lieu. Le narcissisme contemporain est donc un narcissisme qui s’expose. Narcisse a besoin des autres pour s’estimer, il ne peut vivre sans un public qui l’admire (en bien comme en mal, l’important étant d’être vu et reconnu). Le soi que les modernes ont mit au centre de la morale s’expose avec des photos, aussi vaines et éphémères que des snapchats, et se contemple dans des images présentant ses apparences au regard d’autrui. Il y a là un déplacement du narcissisme, quand le Narcisse d’antan se mirait lui-même dans son reflet, alors qu’aujourd’hui, Narcisse 2.0 s’affiche pour être vu par autrui, parce qu’il lui faut être visible pour avoir le sentiment d’exister. L’humain moderne est aux prises avec lui-même depuis la fin des grandes transcendances, et n’a qu’un temps très court pour marquer l’histoire de son empreinte, afin que sa vie lui semble avoir du sens. Ce besoin de signification essentiel le pousse à utiliser les nouvelles technologies, pour s’affirmer en mettant en exergue son image aux yeux du plus grand nombre, sur des réseaux sociaux. Autrement, la philosophie occidentale est narcissique, elle ne reconnaît pas l’importance de la philosophie orientale, mettant de côté le soi pour ne pas prôner le moi.
LE NARCISSISME, UNE ILLUSION DE SOI ?
Le narcissisme est très actif au début de la vie, à cette époque, il représente pour ainsi dire tout le fonctionnement psychique du nourrisson. Après l’illusion narcissique du début de la vie du nourrisson, le narcissisme donnera naissance au self (personnalité), qui jouera un rôle majeur dans la construction du sentiment d’identité. Le narcissisme aide à l’élaboration et à la perception du monde quand il permet à l’individu d’investir des objets extérieurs, c'est-à-dire son environnement. Grâce à lui, un certain degré d’illusion ne nous abandonnera jamais. Et, pour autant que l’amour de l’autre se développe ultérieurement, l’amour de soi en restera une pièce maîtresse : il sera au fondement de la confiance en soi, du goût pour l’intimité, du désir de se protéger, de se préserver ; il soutiendra les convictions, donnera assurance et courage au sujet. L’amour de soi (l’orgueil), est interdépendant du narcissisme.
Le narcissisme est donc une instance psychique innée, fondée sur les pulsions du Moi, et permettant de s’aimer, ainsi que d’aimer autrui. Il garantit l’estime de soi sur laquelle repose le sentiment d’identité, et la confiance en soi. Nécessaire au maintien de la vie, il permet de donner aux individus un sentiment d’existence, en les protégeant des sentiments de vide et de néant, de l’absence de sens et de la mort. Autrement dit il est porteur de valeurs significatives, et dans une éthique idéale, le narcissisme protègerait les individus du nihilisme, du « à quoi bon ? » qui les pousse à se désintéresser de leur vie, en se satisfaisant de leurs images entretenues par vanité, au détriment du politique et de leur responsabilité citoyenne. Mais dans les faits, le narcissisme et sa valeur identitaire ne sont ni figés ni inaltérables, aussi les évènements du quotidien peuvent le renforcer lors d’acquis et d’expérience gratifiante, autant que l'ébranler lors de crises successives, ou d’un traumatisme. On parlera alors de failles narcissiques.
Lou Andreas Salomé : « Le narcissisme accompagne toutes les couches de notre expérience et indépendamment d’elles ; ce n’est pas seulement un stade immature qu’il s’agit de surmonter, mais aussi un compagnon de vie et qui se renouvelle toujours. »
Présent dès le stade fœtal, le narcissisme prend naissance dans la relation parentale, et plus particulièrement avec la mère. Il est cette instance psychique qui relie l’individu au tout universel, à l’infini absolu, au cosmos dans lequel nous baignons tous. Sa nature dépend de la représentation que l'on se fait de soi (estime de soi) et de l'image que les autres nous renvoient, mais aussi de ses apparences corporelles et de la qualité de ses échanges sociaux, ainsi que du succès ou des échecs de nos expériences. En bref, il est partout, agissant à chaque instant en nous pour nous donner la volonté d’être et devenir, dans un sentiment plus ou moins puissant d’existence. Au fil de nos vies et des évolutions de sa personne, le narcissisme peut être plutôt sain et équilibré, ou au contraire déséquilibré en présentant des manques ou des excès, selon ses difficultés et vulnérabilités propres (besoin de se montrer fort parce que l’on se sent faible, ou besoin de se soumettre faute d’oser affirmer ses forces et sa puissance).
Il varie donc dans des orientations différentes en fonction de ses actions bénéfiques ou dommageables, de ses abandons dans des régressions et stagnations, ou ses résiliences et ambitions quand on va de l’avant. Qu’importe la direction que l’on suit, il nous y détermine en nous y accompagnant, donc vaut mieux faire avec en se respectant, plutôt que chercher à le dominer en se nuisant d’une quelconque manière. S’il faut être maitre de soi-même, ça sera seulement en ayant comprit qui l’on est et donc comment son narcissisme nous influence, et nous guide dans sa propre vie.
Le narcissisme désigne l’investissement libidinal de sa propre personne et surtout de « l’idée », la représentation mentale que le moi se fait de lui-même.
Il ne s'agit pas de dénoncer l’amour de soi, un peu d’orgueil étant indispensable à notre équilibre, mais bien le danger de se rapporter au monde comme si le réel ne pouvait être appréhendé qu’à travers l’illusion de ses apparences, qu’au travers de notre propre perception/opinion, de nos interprétations influencés par notre ego et notre intellect. Comprenons que le narcissisme influence directement le moi de l’individu, en l’investissant d’énergie libido, ce qui l’anime de l’intérieur et le pousse à agir ou réagir selon les situations. Le moi de l’individu est cet ego tant fustigé, et tout comme le narcissisme, l’ego est indispensable à son équilibre mental et psychique. Sans ego, l’individu ne serait qu’un être sans personnalité distincte, incapable d’affirmer ses spécificités et différences, son essence propre. Les problèmes dits narcissiques étant alors de faire preuve de trop, ou de pas assez d’ego, quand on se met trop, ou pas assez en avant.
NORMAL (simple construction de soi) VS PATHOLOGIQUE (orgueil, vanité, égocentrisme et mégalomanie)
Un narcissisme sain et équilibré structurerait un moi fort et peu influençable, grâce à une estime de soi stable et assurée, ce qui donnerait une personnalité organisée autour d’un ego sage et mesuré en ne tartinant pas du « Moi je » à chaque intervention (dans l’idéal toujours). Aussi l’amour de soi coexiste avec l’amour des autres dans le meilleur des cas, donc l’amour de soi n’exclut pas l’amour des autres, bien au contraire. Plus l’amour de soi aura pu s’épanouir grâce à un juste investissement du moi en narcissisme, plus le sujet sera en condition de partager sa libido, ses passions et ses intérêts avec les autres. Nous devons nous rappeler que ce que nous aimons dans l’autre, c’est aussi ce que nous avons été, ce que nous aimerions être, ou encore ce que nous possédons dans notre for intérieur. Et inversement ce que nous déprécions chez l’autre, c’est ce que l’on n’apprécie pas chez soi, d’où le fait de projeter ses propres torts et contradictions sur autrui, afin de s’en déresponsabiliser.
Le narcissisme est le « ciment qui maintient l’unité de moi ».
Aussi quand il devient une issue devant les contraintes pesant sur le moi en construction (difficultés personnelles entre les exigences de la réalité et ses exigences pulsionnelles et passionnelles propres), il peut devenir une calamité qui a tout l’air d’une condamnation à perpétuité. Parce que même si nous en avons rarement conscience, le narcissisme est au centre de nos attitudes et de nos comportements, et il peut revêtir une dimension négative en amenant l’individu à des comportements égotiques. Mais heureusement, il possède en parallèle une dimension plus constructive, favorisant nos pulsions de vie à nos pulsions de mort. Lorsque cette dimension positive est bien ajustée au reste de l’âme, du corps et de l’esprit de l’individu, elle crée en chacun de nous une harmonie intérieure (sentiment d’être à soi) mais aussi des attitudes positives envers autrui et la nature (sentiment d’être en osmose avec la nature). Cette volonté intrinsèque permet de se tourner vers autre chose que soi-même, d’investir d’autres objets extérieurs, en s’ouvrant au reste du monde. L’individu étant une partie du tout environnant, son narcissisme lui permet donc autant de s’auto-centrer sur sa partie, que de s’intéresser à toutes les autres parties composant le réel, autour de soi.
Le concept de Narcisse est devenu très utile pour expliquer et résoudre nos difficultés subjectives.
Le narcissisme est à l’origine de nombreux troubles psychiques, en lien avec l’estime de soi, tels que l’égoïsme, l’orgueil, l’égocentrisme et la vanité. Le conflit narcissique des individus s’exprime en trop ou en pas assez, lorsque les individus ont un excès de narcissisme, ou un manque, c'est-à-dire qu’ils font preuve de trop ou pas assez d’ego. Autrement dit, il faut trouver la juste mesure entre ces deux polarités que sont le repli sur soi (action de se préserver) et l’expansion (se tourner vers les autres). Le narcissisme est donc à l’origine de troubles et autres pathologies quand il surinvestit ou désinvestit le moi de l’individu. Par ailleurs, le narcissisme équilibré assure au sujet une bonne adaptation à son environnement, lorsqu’il se montre stable dans ses relations sociales, et qu’il vit sainement sa vie en autonomie et sans dépendre d’objet extérieur.
Le propre du narcissisme serait de créer un champ d’opposition en son sein, d’où la double nature du narcissisme.
Si un individu se sent exister uniquement dans le regard des autres, par leurs appréciations, avis, opinions, jugements, leurs autorisations ou leurs « tolérances », il est sans cesse soumis à la nécessité de croire vitale le fait de s’adapter à leurs demandes. A l’inverse, si le même individu s’appuie sur ses ressentis (sensations, perceptions, émotions, sentiments) pour construire son sentiment d’identité et élaborer une pensée personnelle, il ne dépend plus des autres et peut alors entrer en relation libre et paritaire avec eux, sans chercher à les manipuler, à les utiliser tels des objets, ou à tirer profit de leur contact, comme le font les personnalités narcissiques (attention, il ne s’agit pas de pervers narcissique).
LA DOUBLE ORIENTATION DU NARCISSISME
L’impression générale résultant de l'ensemble des sensations narcissiques traduit précisément l’état exaltant de l’infini, de l’illimité, quand il nous contacte à notre enfant intérieur, et offre un dialogue avec soi-même pour explorer notre for intérieur. A partir de cette nature infinie en chacun de nous, chaque individu mène une double existence en tant qu’il est à lui-même sa propre fin, et en tant qu’il est un maillon d’une chaîne humaine à laquelle il est assujetti contre sa volonté, ou du moins sans trop se demander si il a le choix d’y participer ou pas : l’individu se reproduit culturellement comme si c’était un devoir, et instinctivement comme si il était obligé de par lui-même. Le narcissisme est ce qu’il y a de plus profond en nous-mêmes, il nous connecte avec l’inconscient, avec le tout, par la conscience de soi.
L’existence individuelle et l’existence fusionnelle
L’une des orientations est le fait de chercher à tout prix à s’individualiser, l’autre étant de vivre dans une relation fusionnelle permanente avec autrui. Entre ces deux opposés que sont l’Un unitaire et l’Autre absolu, se distingue la position du Neutre, qui reviendrait à un état de tension zéro, de Nirvana. Aussi le narcissisme est un facteur dialectique qui ne peut exister à l’état pur, il doit obligatoirement s’associer à d’autres instances psychiques comme le moi, pour s’exprimer dans un mode harmonieux ou conflictuel (l’ego étant le liant de la personnalité grâce au narcissisme).
De cette double orientation, le narcissisme anime l’individu dans son essence, et le pousse à être ou agir de manière :
- Saine en étant mesuré, ou pathologique en étant déséquilibré (répétition de symptômes plus ou moins néfastes)
- Mature en assumant ses responsabilités, ou immature en se justifiant (déresponsabilisation)
- Fondu dans la pulsion, ou opposé à elle quand il s’agit de respecter une norme morale qui lui est contraire (pulsion de vie/mort)
- Centrifuge en se décentrant de lui-même (altérité), ou centripète en se recentrant dans un certain repli sur soi (autocentré sur soi)
- Primaire en n’investissant que sa personne, ou secondaire en s’ouvrant à d’autres personnes ou objets
- Positif en étant intégré et assumé quand à son rôle (vecteur de réussite), ou négatif en étant culpabilisé et dévalorisant (vecteur d’échec)
Ces différences dualistes s’appliquent dans de multiples dimensions chez les individus :
- Le narcissisme intellectuel est l’amour de sa maitrise intellectuelle, souvent en lien avec une insensibilité affective (la raison prend le dessus sur l’émotion).
- Le narcissisme physique est l’amour de la représentation que l’on se fait de son propre corps, de ses apparences physiques.
- Le narcissisme moral est un désir d’héroïsme, de sacrifice et de renoncement, avec la conviction d’œuvrer pour le bien d’autrui et du monde, en sachant mieux que les autres ce qui est bon pour eux, quitte à leur imposer son propre idéal (reconnaissable dans la fausse morale contradictoire du « faites ce que je dis, mais pas ce que je fais »).
- Le narcissisme matériel est reconnaissable chez ceux qui s’identifient à leurs possessions : voiture, animaux de compagnie, etc.
- Le narcissisme sexuel-créatif cherche le plaisir, et est procuré par la masturbation (seul ou accompagné), afin de reconnecter à une jouissance passée, en lien avec le tout.
- Le narcissisme culturel est à la recherche du Même. Si nos génies scientifiques sont des narcissiques au niveau de l’intellect. Pourquoi dans l’univers existerait-il qu’un seul type d’intelligence ? Et bien sûr ce serait la nôtre. Même lorsque nous imaginons Dieu, nous aimons l’imaginer à notre propre échelle humaine dans un parfait anthropomorphisme…
- Le narcissisme social revient à faire partie d’un groupe social où l’individu y trouve son équilibre. L’adhésion, voire l’abandon à l’idéal du groupe, se substitue aux exigences individuelles dont la pression s’amoindrit. La cohésion de l’individu se trouve alors assurée par la soumission aux normes du groupe.
- Le narcissisme positif, c’est quand nous prenons beaucoup de plaisir à aider les gens. Quelque-chose de très positif qui soigne les autres. Le narcissisme négatif est l’inverse.
En tenant compte de l’essence du narcissisme et en l’observant tel qu’il apparaît dans ses dérivés, on peut dire provisoirement que le narcissisme est à la fois :
- Le souvenir d’un état élationnel privilégié et unique intra-utérin (lorsque fœtus, on n’avait ni besoin ni désir en étant en prise constante avec le cosmos)
- Le bien-être lié à ce souvenir en tant que complétude et toute-puissance
- Le désir de retrouver ce paradis perdu, et la culpabilité éprouvée suite à la honte du désir d’être loué
- La fierté de l’avoir vécu, liée par ailleurs à l’illusion de l’unicité qui pendant la vie fœtale était réelle (position mégalomaniaque à laquelle se rattache la notion de valeur personnelle, d’orgueil)
- Une certaine relation objectale à la fois négative et positive, dans une quête éperdue de liens fusionnels, d’une relation en miroir quand on recherche son double, le Même
- Les notions de « perte narcissique » quand le facteur narcissique dans son essence est mis en échec
- La « blessure narcissique » infligée au moi par l’intermédiaire d’un idéal du moi (narcissique) déçu
- La « mortification narcissique » qui consiste en la honte du moi, de n’avoir pas pu maîtriser activement ce qu’il a subi passivement
TROIS FORMES DE NARCISSISME - Le point de vue psychanalytique
Le narcissisme primaire (dimension de l’imaginaire) - « Je me vois être un héros, tel celui que j’aimerais être »
En premier lieu à s’affirmer chez l’individu, il y a le narcissisme primaire qui prend pour objet d’amour l’image de son corps (stade du miroir, dans une dimension imaginaire). Ici il n’y a pas de distinction entre le Soi et le Non-Soi, entre le dedans et le dehors. C’est un état précoce de l’organisation des pulsions de l’enfant qui investit la totalité de son énergie psychique (sa libido) sur lui-même, dans un investissement de son moi idéal. C’est un idéal de toute puissance narcissique, forgé sur le modèle narcissique de toute puissance infantile. Le sujet se perçoit comme idéalisé, il est prisonnier de l’image mentale qu’il s’est fait ou qu’il a reçue de son environnement, dans un délire d’omnipotence (« Je suis le meilleur, je possède le monde, quand je cri j’ai ce que je veux »).
Le narcissisme secondaire (dimension du symbolique) - « Puisque je ne peux pas posséder tout ce que je veux, je vais être comme tel »
Puis vient le narcissisme secondaire, influençant cet amour de soi qui succède à la découverte de la réalité extérieure, et à ses propres limites quand on se rend compte qu’on n’est pas aussi fort qu’on le croyait dans son aveuglement infantile. Le moi s’enrichit des relations de l’enfant avec l’extérieur via des identifications projectives et introjectives, et la libido se répartit entre le moi et les objets extérieurs. Il y a alors différenciation entre le Soi et le Non-Soi, entre le dedans et le dehors. Le narcissisme secondaire s’investit dans un idéal du moi afin de définir un idéal à atteindre selon qui l’on voudrait être, et auquel l’enfant va se mesurer et tenter de se conformer d’un point de vue symbolique. Il est question d’incorporer des valeurs parentales et sociétales, auxquelles l’enfant va tendre pour satisfaire son narcissisme et se réaliser tel qu’il se voit en lui (on retrouve ici l’ambition en chacun de nous).
Le narcissisme anobjectal (dimension du réel)
En parallèle le narcissisme anobjectal s’investit sur le langage pour exprimer sa perception du réel (par le moyen du « Je »). Selon Lacan, les associations de mot et leurs sens forment des suites de signifiants et de signifiés, et le réel est ce qui nous est inaccessible. Par le langage l’individu étaye ses perceptions, sa réalité interprétée selon son vécu et ses propres sensibilités, afin de chercher à coller au réel, ou à s’en distancer en le déniant.
Pour remettre le développement des différents stades du narcissisme dans un contexte du développement de l’enfant :
Entre 4 et 6 mois : si on place l'enfant devant un miroir, il ne se reconnaît pas. L'être en face de lui a sa réalité propre.
Entre 6 et 8 mois : il découvre que l'autre n'est qu'une image et non un être réel. C'est un leurre, l'enfant passe du réel à l'imaginaire.
Vers 1 an : il comprend que l'image du miroir, c'est son propre corps. Il se perçoit comme un tout et aussi comme extériorité. C'est la première fois qu'il voit son corps en entier. Il s'identifie à l'image réfléchie. C'est la mère qui, le regardant dans la glace en lui disant: "c'est toi, là !", lui ouvre la voie de l'identification à l'image. L'enfant perçoit bien l'admiration de l'image de la mère pour son image à lui. Il y perçoit aussi du désir. Cette image, pour l'enfant, c'est son Moi. C'est effectivement par le regard de l'autre que nous nous formons, quand nous nous identifions à l'image que l'autre a de nous. L'enfant s'aliène dans cette image aimée par la mère. Il y devient autre. S'il en restait là, il deviendrait psychotique en sachant pas qui il est, faute de différencier son identité de celle de sa mère. Ce qui va mettre un terme à cette relation aliénante, c'est le père et le langage (la place symbolique que le père a dans le discours de la mère). Le père mettra une distance entre la mère et l'enfant.
Article suivant : Les nœuds narcissiques, et la puissance du narcissisme
Narcissisme 2 - La puissance et les noeuds narcissiques
Narcissisme 3 - Quelques troubles liés narcissisme (-16)
Narcissisme 4 - Les affects narcissiques, de l'extase à l'indignation
Narcissisme 5 - Du Tout au Un, du Un au Tout
Narcissisme 2 - La puissance et les noeuds narcissiques
Narcissisme 3 - Quelques troubles liés narcissisme (-16)
Narcissisme 4 - Les affects narcissiques, de l'extase à l'indignation
Narcissisme 5 - Du Tout au Un, du Un au Tout