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Littérature hallucinée, sous effet du San Pedro

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Neurotransmetteur
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28/6/08
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J'ai lu les règles du forum. Elles m'ont amenés à initier un sujet afin de contenter (j'espère) CaptnBlood comme il postait ici. A son idée, j'ai produit du texte "sous l'effets du San Pedro" et je vous livre cette production littéraire hallucinée et sur-réaliste.



Ainsi parlait Saint Pierre




Comme j'ingurgitais, à 16h30 de l'après-midi d'hier, la soupe amer obtenue par un mélange d'eau chaude et de poudre de cactus hallucinogène (San Pedro), je me donnais à l'expérience initiatique, philosophique, métaphysique, sensitive, surréaliste, littéraire, artistique et autistique, « existentielle » profondément intense. C'est à l'ivresse, aux délires allègres et inconfortables, et à l'exercice (de style) d'une production littéraire sous effets que je me suis livré.

En effet, j'ai préféré cet exercice, qui retourne de la présentation, à celui, peu authentique, d'une re-présentation. Si je m'étais retourné, j'aurais produit l'oeuvre d'une statue de sel. Si j'avais seulement re-présenté littérairement, j'aurais parlé de mirage, de souvenir et de vent :

Si je n'ai jamais su traduire l'existence, je crois avoir, par une apostrophe au moins, traduit la réalité du délire ; réalité que j'ai été tenté d'identifier à celle-là même de l'existence, qui reposerait « entre le jour et la nuit, à la charnière du sommeil et de l'éveil ».

La plume traque le délire, l'apostrophe, le tutoie, l'accuse et puis, soudain, elle le perd de vue. S'est-il insidieusement immiscé en elle ou l'a-t-il absorbée, si elle voulait lui parler, elle devrait désormais dire « je ». A présent seulement, la plume est véritablement délirante, tant il est vrai qu'elle est délire elle-même : son propre sujet, auto-suffisante, sans mise à distance, sans différenciation, sans la fierté d'être témoin[...]

Peut-être plus artificiel que les douloureuses extases artaudiennes ; peut-être moins enflammé que la souffrance du jeune Werther ; peut-être moins proche de la trouble vérité que les photos de Cappa ; peut-être moins sensitif encore que la cruauté et la crudité arrangées d'un Clark ou d'un Pasolini ; d'un noir et blanc moins éclatant que ceux, schizo-paranoïdes, de Miller... mais son visage est moins atroce, et ce n'est pas un "masque de mort".


Tout débutait par une ivresse quasi éthylique, les couleurs vives me sautaient à la face, en particulier ce blanc irrévérencieux de l'écran d'ordinateur. Le classique : je suivais le train des montagnes russes, entre légère extase et gravité - pesanteur folle[...] Ainsi, ce que je qualifierais de « phénomène mineur » ou d'épiphénomène a pu encore être partagé sur une fenêtre de chat.

Mais le murmure du délire - lui - plus doux que le miel de l'amour et plus profond que l'abîme, cet aveu chuchotant de « je ne sais quoi » demeure profondément personnel. C'est seul que je fus appelé à dialoguer avec don Délire, tout comme, au fond, « on vit seul et on meurt seul ».

J'étais en plein dans le devenir-animal. Mon corps s'est lentement robotisé, puis je me suis retrouvé fondu aux murs crépités de l'hotel, je me suis transformé en homme-poisson, puis en simple morceau de bidoche, je me suis transformé en larve qui couvait des oeufs a l'intérieur de son long gros bide en anneau blancs[...] je nourrissais l'impression d'avoir un trou de 30cm de diamètres dans mon bide : là, je touche, et ma main se fond a mon buffet, je me retrouve incapable de la décoller, de l'arracher


Enfin cette petite introduction qui cède la dialectique à l'impatience est l'exacte figure du phénomène mineur qui précède au délire. Le désir d'aller bref au délire.


********************************


Je viens de me tâter l'estomac pour vérifier qu'il n'était pas troué. J'avais l'impression d'un trou de 30[cm] de diamètre dans mon bide.

Malgré tout, ma pensée ne colle pas assez au sensitif, elle n'y croit pas, elle est de trop.

Je voyais le monde en pixels qui s'effondrent.

Abandonne-toi au délire d'être robotisé ; on me dit.

Bloub bloub.

Quand tu prends le stylo, c'est l'émergence du rêve.

C'est dans la réalité qu'un type parle, moi j'entendais sourdement, j'étais sous l'eau, poisson moi-même.

Stop la lettre va dans le délire, il manque au verbal.

- La tête appuyée contre ma main, les yeux fermés, en suspens, de dépit, du délire...

Ce n'est pas seulement sensitif, tu as une pensée qui colle au corps.

Le délire est trop fort, entre-coupe.

N'entre-coupe pas le devenir-poisson.

Ma main est fondue dans mon ventre.

Le sublime moment, c'est l'entre-deux songes.

Sensation d'être affamé.

La croupe aux monstres.

Je suis le bâtiment, et cette chambre vide mon ventre vide.

Mais ce n'est pas vrai, c'est ma chambre, je suis dedans, c'est pas mon ventre.

Quand le délire est trop fort, j'écris, il recommence après.

La lettre du délire, le délire à la lettre... s'effiloche.

Je voudrais pouvoir dormir sans délirer : sortir de la mine.

Il y a une tension délire/pas-délire mais je suis fatigué du délire, si je m'y laisse, je me transforme.

J'ai enlevé le pantalon parce qu'il me sert à la taille, il y a un poids, mes transformations sont liées.

Je suis un morceau de viande, ils acclament en dessous, ils en veulent à ma peau.

Il y a comme une paranoïde attachée aux sons, mais la peur est réelle et juste là, je suis en guerre.

J'ai plus de corps, j'ai que du son.

C'est larvaire, c'est en larve que je vais dormir. Le long gros ventre en anneau blancs-transparents. Je couve des oeufs.

Cette gestation, elle est peut-être musicale, saloperie de techno, et ces cris de poulailler.

Le délire est à chercher dans un schéma narratif, dans un processus narratif, une grammaire folle, des mots inventés, mal placés ou délirés.

Cherche le délire dans le verbe, là ou portant les mots n'ont plus court. Dans l'insensé d'un mot, la place pour le délire.

J'ai dit presque comme si l'éveil était un rêve, et que de l'éveil qui est un rêve à la nuit qui est un rêve, à la charnière des deux, la réalité du délire.

Enfin la tête hors de l'eau, je ne suis plus en phase de devenir poisson. Le délire est calmé, je vais pouvoir dormir tout comme lui mais sans lui.

J'avais l'impression d'utiliser un mot vide de sens : délire, délire, délire. On m'aurait dit "qu'est-ce que le délire ?" j'aurais répondu "je ne sais pas mais je suis en plein dedans, je ne sais pas mais tout est délire !" - c'est l'indifférenciation, la fin de la tension, le réel délire.

0h19 ; je prenais la poudre à 16h30 ; bonne nuit.

Je me disais "laisse ton esprit et ton estomac tranquilles" tant c'était un délire d'estomac.

Je crois que le cactus a été le moteur et le motif d'une production littéraire délirante.

Quand l'analyse cédait au délire, la tension s'effaçait, le délire était total. 0h32.

Le délire est retombé mais je profite d'une phase éthérée, laiteuse, ouateuse ou cotonneuse pour quelques mots encore.

Je crois presque comme si le délire était littéraire.

La plume qui ne se différencie pas du délire mais qui, au contraire, est absorbée et assimilée par lui, la plume qui ne témoigne pas en faveur d'une tension, pour un esprit plus clair, la plume qui n'en n'est plus une mais qui est tout entière délire, la plume qui est un doigt, celle-ci seule est véritablement délirante et traduit le vrai délire.
 
" N'entre-coupe pas le devenir-poisson. "

Fiou , éprouvant...
 
salut personne; franchement stylé, et je trouve ta démarche vraiment interessante...ton texte demande plusieurs lecture pour être assimilé mais montre bien la puissance du "délire"...en tout cas merci pour ce TR très sympas et instructif

@ + l'ami 8)
 
Trés plaisant a lire, autant l'intro que le texte lui même !
Merci beaucoup :)
 
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