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Les voies d'accès au Tout 1 - La culture et le sexe

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Deleted-1

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LES VOIES D’ACCÈS AU TOUT

Qu’est ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini ? Un tout à l’égard du néant, ou un milieu entre rien et tout ? Ce qui est sur c’est qu’il n’est pas un empire dans un empire, en dehors de la nature comme il aimerait se croire supérieur à elle, parce qu’il en fait bel et bien partie prenante, tel un fragment dans la fractale composant les myriades de la matière. De multiples façons de se percevoir et de se concevoir, découlent plusieurs manières de se (re)connecter au Tout, en retrouvant la part naturelle et instinctive présente en chacun de nous, au-delà de notre humanité, de notre part culturelle nous distinguant des animaux restés à l’état sauvage.

Dans cet article seront abordés les voies d’accès au Tout par l’érotisme.


DE L’ORIGINEL A L’INDIVIDUALITÉ

Au fil des modernisations de notre société pro-narcissique, c’est par le biais des institutions et de la technologie que l’être humain se voit toujours plus isolé de son entourage, encouragé à l’individualisme et à une manière d’être égoïste, par la croyance d’être unique en soi (valorisation de l’UN au détriment de l'AUTRE). Ainsi éduqué, cultivé, autocentré et urbanisé en mettant à distance autrui, l’individu ne peut plus rester enraciné dans l’univers, étant aussi déconnecté de la nature l’entourant (aujourd’hui à cause de la pollution atmosphérique et lumineuse, un tiers des habitants du monde ne voit plus la voie lactée...). Effectivement l’individu avide de possession ne regarde plus ni les cieux, ni le sol sur lequel il vit, trop occuper à accumuler, consommer, se divertir en se mirant dans le reflet de ses apparences, qu’il s’efforce de partager vainement, d'un splendide orgueil.

Mais avant de critiquer le mode de vie qu’impose notre société marchande dans un abandon nihiliste du cosmos, se pose la question de ce qu’il en est de l’origine de l’individu, de cet état prénatal de bien être essentiel et absolu, où le fœtus baignant inconsciemment dans le cosmos, était en lien direct avec l’univers, en symbiose dans le Tout. Cette origine est un bien précieux que l’humain ne peut préserver, puisque le fait même de venir au monde le sépare inéluctablement du confort universel auquel il appartenait avant la naissance, ce fond primitif de la vie inconscient qu’il cherchera toujours à retrouver, malgré lui.

L’entrée de l’enfant dans la vie se fait donc au prix de la rupture du lien qui le rattachait à la totalité

Du tout inanimé dans l’éternité d’une osmose éthérée, à la naissance du bébé dans un monde où tout est manque et besoin, envie et désir, c’est l’expérience de ce choc qui détermine sa relation au monde terrestre (la naissance pouvant être plus ou moins traumatisante/angoissante). Le nourrisson est dorénavant un être déficient et son seul objectif consiste à reconstituer cette entité qu’il formait avec l’univers, d’où un ego se développant avec son moi lui donnant l’impression d’exister, d’être unique et unifié dans son intériorité, dans son sentiment d’existence. Même si paradoxalement, l’ego a plutôt tendance à dissocier l’homme de sa part naturelle et originelle, dans son for intérieur. Être de contradictions, l’humain est aussi dès sa naissance l’être de la disparition (celle de la totalité universelle), événement qui le laisse amputé d’une part de lui-même. Il est ainsi un être différencié, individualisé, obligé de s’éloigner de l’état originel/primitif pour parvenir à l’état de conscience et de culture, second support contradictoire de la problématique anthropologique (animal vs humain). L'enfant doit apprendre à aprler, à penser, à vivre en autonomie.


ÉVOLUTION PAR LA CULTURE – A la recherche de sa part animale

A partir de la connaissance physiologique puis psychique de la nature humaine et de ses contradictions évidentes, entre sa part instinctive animale et sa part humaine, la connaissance pragmatique se fonde sur le cheminement de la pensée humaine : l’évolution de l’état primitif à l’état de conscience, et de civilisation, implique la nécessité d’affiner par l’éducation l’individualité, soit le « je » (et non pas l’ego qui serait plutôt le « me », qui est aujourd’hui banalisé dans une volonté permissive d’appropriation en tout genre). Après l’affirmation de la conscience de soi une fois le stade du miroir dépassé, dans un dialogue intérieur à ne pas perdre, l’être humain doit se livrer à la connaissance de soi en se cultivant et en acquérant le langage. La connaissance du monde vient seulement ensuite. La question kantienne « Qu’est-ce que l’homme ? » devient ainsi « Qu’est-ce que l’homme fait de lui-même, et comment ? ». L’éducation fait de l’individu un être « humain » en palliant ses imperfections (au sens de celui qui discipline ses mauvais penchants et ses instincts, à la différence de l’animal amoral et moins réfléchi consciemment).

L’éthique et la morale pour se distancer de sa part animale

De la présentation de la nature humaine comme un ensemble réunissant des contradictions (originel inconscient/conscient, primitif/culturel), et la disparition de la totalité originelle, un autre problème est alors de constater au travers de sa souffrance, l’abandon de ses espérances et croyances en des idéaux et des valeurs symboliques fortes, et sur lesquelles s'appuyer (il y là l'émergence d’un nihilisme contemporain généralisé suite à la déchristianisation de la société). Est aussi constater le fait de subir la menace de retourner à l’état primitif, en délaissant le bénéfice des années d’éducation au point de redevenir un animal délivré de la douleur d’être un homme, conscient de lui-même.

Perdre ses acquis en renonçant au confort

Paradoxalement c’est ce que rechercherait l’individu poussant l’altération de sa conscience jusqu’à un état de régression avancé (au-delà de la simple désinhibition), dans une perte du langage et de sa motricité, de sa mémoire et de sa propre image de lui-même, c'est à dire le plus grand oubli qui soit, dans la déchéance de soi. Aussi la disparition via l’achèvement de l’état prénatal, a pour conséquence la perte de l’identité originelle, quand inévitablement on grandit le temps passant. L’être réagit alors au morcellement de l’existence, quand perdu dans la réalité consciente, il doit faire face à la scission de son identité, après son passage de « sujet », en dedans de lui-même, en « objet » au dehors de lui-même, selon la formule de Lou Andreas-Salomé. C'est à dire lorsque l'individu prend conscience de son corps, de sa personne, comme lors du stade du miroir par exemple. Pour dépasser ce clivage que l'on garde toute sa vie au plus profond de soi, la réunion de sa réalité mentale et spirituelle, à sa vie corporelle, est un enjeu que l’être humain doit remporter pour s’accomplir, et ne pas sombrer dans le nihilisme et l’autodestruction (dans des schémas répétitifs nocifs, où plus rien ne fait sens, ni n'a de valeur).

Découverte de l’inter-connectivité, de tout ce qui compose la réalité, autant physique/matérielle, que psychique/spirituelle.

Cette étape philosophique de mise en culture de sa personne est essentielle quand à la construction de soi, et à son positionnement individuel dans le monde. Il s’agit de prendre du recul intuitivement sur la totalité du monde, sur ses tenants et aboutissants, et de conscientiser ses intuitions et perceptions de l’essence intimes des choses et de soi, pour mieux en comprendre le fonctionnement, et se situer par rapport à son environnement à des échelles macros et microscopiques, c'est-à-dire en se référant à des structures, des systèmes et des institutions composant notre société passée et contemporaine, mais aussi à des déterminismes édifiant psychologiquement et physiquement les individus. Si l’on est tel quel, c’est suite à une édification précise de sa personne, au travers d’un processus culturel plus ou moins déterminé.

Suite à cette prise de conscience de tous les liens possibles et imaginables entre les choses, les idées et les gens, l’individu peut au fil de sa vie et de son individuation revoir et affiner ses interprétations et réflexions quand à sa réalité, par une ouverture d’esprit nécessaire à la satisfaction de mettre des mots sur ce que l’on comprend d’après nos perceptions du réel, afin de les transformer en idées et pensées adéquates, c’est à dire qui seront utiles à son bien être. Bien sur ces créations de nouvelles idées et nouveaux points de vue, grâce à une nouvelle façon d’envisager les choses, n’est pas à associer à une intellectualisation abusive dont est friand le mental en se détachant du réel, parce que le rapport au Tout passe avant tout par ses intuitions en surfant dans ses couches subliminales inconscientes, et non en mettant consciemment des mots sur tout ce à quoi on pense pour satisfaire son ego. L'intellect n'est pas une voie d'accès au Tout.

La connexion au Tout est une affaire de spiritualité (pas forcément religieuse), et non de vanité intellectuelle.

En appréhendant puis acceptant le réel via une meilleure compréhension de celui-ci, l’individu peut réunir différentes visions en une, passant d’une approche intellectuelle matérialiste de la réalité à une dimension spirituelle, donc moins conceptuelle et théorique, moins idéologique. On peut ainsi voir le monde de manière atomique en se demandant comment il est fait, de quoi il se compose, et après avoir répondu au comment (en recherchant les causes), poursuivre sa réflexion philosophique en se demandant pourquoi les choses sont telles quelles (pour donner du sens aux causes trouvées). Qu’est-ce qui les organise et engendre la vie en les animant depuis leurs origines, pour progressivement pénétrer l’essence des choses en les ressentant et en les éprouvant émotionnellement, une fois qu’on les a comprise intellectuellement par le biais de ses sensations et connaissances ? La compréhension du Tout se faisant par le passage d’une vision matérialiste et scientifique, à une vision métaphysique et spirituelle, lorsque l’on reconnecte à soi, à ses émotions, en allant et revenant du comment au pourquoi des choses et de soi, via des pensées structuralistes et déterministes.


SEXUALITÉ ET INTIMITÉ, LA VOIE D’ACCÈS A LA DIMENSION DU TOUT EN DÉPASSANT LA CONSCIENCE HUMAINE

Sur le trajet de l’enfance à la vieillesse, les êtres traversent les tempêtes de la libido (énergie psychique, ici à caractère sexuelle), qui expriment la séparation individuée d’avec le Tout. Le sexe est source de désir et le Tout n’est accessible que lorsque l’on ne désir rien. En vue d’un épanouissement dans une décharge des tensions libidinales, par une recherche du plaisir en se libérant d’un déplaisir, l’expérience érotique et esthétique guide l’individu vers la communion avec l’univers afin de réparer le traumatisme de la naissance, quand la décharge émotionnelle lors de la libération des tensions sexuelles, au moment de l’orgasme, l’amène à un état de transe, où il est momentanément satisfait et comblé, connecté à soi. Relevons un nouveau paradoxe, lorsque le désir éloigne du Tout, alors que le temps de l’orgasme nous y connecte brièvement...ou alors il faudrait en conclure que pendant l'orgasme, nous ne désirerions plus rien du tout, nous serions dans notre absolu, ayant atteint la jouissance totale mais que momentanée.

Que faire de toute cette jouissance ?

Dans cet état d’extase où l’individu s’investit narcissiquement en libido (disons qu’il est focalisé sur lui-même dans le laps de temps de l’orgasme), il y a d’abord cette nouvelle altérité que le sujet ne sait comment « aborder » : celui-ci a l’impression que cette présence le sépare de son partenaire, que leur union spirituelle s’évanouit soudain sous l’emprise d’une nouvelle force qui le submerge (le plaisir orgasmique apparait comme insaisissable mais absolue).
« Quand notre esprit et notre âme sont engagés dans l’amour, nous pouvons être victimes de l’étrange illusion de planer, d’être “délivrés du corps”, comme unis au-delà de lui ». Dans cette extase, le sujet ne se sent plus dominé par le pouvoir de la conscience. Le corps est à la fois l’instance unifiante et « éclatée », la décharge dopaminergique étant alors des plus transcendante dans une abolition de ses limites psychiques et physiques qui cernaient la présence de l’individu dans l’univers, et ainsi son esprit s'étend à l'infini en lui. Il y a là un oubli de soi au profit d’une reconnexion avec sa nature la plus primitive, avec l’univers, dans une impression de retrouver le Tout originel. C’est alors que l’union érotique et/ou spirituelle donne au sujet la force de transgresser les frontières de son être en dépassant son ego et sa vision de soi unique, pour s’oublier totalement dans une fusion corps/esprit, comme lorsqu’il était à l’état fœtal et connecté avec le cosmos.

Le sujet vit davantage l’union des corps (sexuelle ou spirituelle) comme l’expérience d’un retour au moi originel, les limites de son propre corps disparaissent pour laisser l’âme s’enivrer d’une émotion supérieure dont il ne maîtrise plus la puissance : ce qui pourrait être le plaisir érotique devient chez Lou Andreas-Salomé « l’entrée la plus profonde en soi ». Elle conçoit aussi que la relation érotique puisse être une chimère car ce bonheur de la totalité retrouvée dans l’acte sexuel est éphémère et illusoire. Mais lorsque le sujet recouvre cet état de félicité, « c’est à un enfant qu’il ressemble alors, et il est en effet redevenu enfant, dans cette égalité originelle du corps et de l’esprit ». Il crée alors de nouveau le moi des origines, comblé et satisfait, inconscient.

Si l’amour de l’autre conduit aux retrouvailles avec le moi profond, l’amour de soi devient inévitable, permettant alors l’amour d’autrui et ainsi de suite.

Ces deux dimensions que sont l’ouverture à l’univers et l’approfondissement de l’intimité, coexistent toujours, puisque ce sont les deux pôles d’une seule circulation. Il apparait alors indispensable de connaitre son intimité, son corps en relation avec son esprit, pour saisir l’infini des choses, l’essence universelle de sa personne et des objets que l’on investit par intérêt et par passion, ce qui nous amène à une seconde manière d’accéder au Tout, par la sublimation artistique.
 
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