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Guest
Cet article est une composition de copier/coller et réécriture de différents paragraphes issus de différents articles. Je l'ai constitué pour proposer une approche simpliste mais se voulant la plus complète des instances freudiennes, revues par plusieurs générations de psychanalystes jusqu'à aujourd'hui. Les instances psychiques sont des élaborations métaphysiques faisant parties de l'appareil psychique, et offrant un système d'interprétation des mécanismes de l'esprit.
Article introducteur
ORIGINES
Lors d’un premier essai d’explication physiologique de l'esprit, Freud repère l’existence d’une « instance » dont la présence entrave le passage des quantités énergétiques (le "flux mental") lorsque ce flux est accompagné de souffrance ou de satisfaction. C’est alors ce qu’il appelle le Moi, constitué à tout moment de la totalité des investissements, qu’il cherche à satisfaire ou, par l’inhibition, à éviter s’il s’agit d’une expérience douloureuse.
Son rôle initial est d'établir un système défensif et adaptatif entre la réalité externe et les exigences pulsionnelles.
Il est à la fois conscient, préconscient et inconscient. Il n'apparaît que progressivement en se développant dans les premiers mois de la vie, d'abord sous la forme d'un « pré-moi » au début, puis il s'organise et se dégage du narcissisme en même temps que l'objet libidinal. il y a donc une conception duelle du Moi, distinguant d'un côté le Moi primaire comme étant une partie inconsciente de la vie mentale et qui trouve son origine psychique dans l’enfance, et d'un autre côté le Moi secondaire, lié à la perception consciente. Si le terme désigne dans un premier temps le siège de la conscience, le Moi est aussi en grande partie inconscient. On peut encore remarquer que le système préconscient-conscient est nettement séparé de l’inconscient, tandis que le ça est conçu de telle sorte que le moi en fait partie : « Je propose d’appeler moi l’entité qui a son point de départ dans le système préconscient et qui est, en premier lieu, préconscient, et je réserve la dénomination de ça à tous les autres éléments psychiques dans lesquels le moi se prolonge en se comportant d’une manière inconsciente ».
À l'origine, le nourrisson découvre sa mère comme objet total, et non comme fragments dispersés sans cohérence. Le Moi sera remanié tout au long de la vie, par des processus d'introjection et de projection, c’est-à-dire qu'il y aura un travail d'appropriation et de rejet d'images formées sur des objets extérieurs à soi, par le biais d'identifications, comme l'identification projective (lorsque l'on s'identifie à un de ses parents par exemple, et que l'on se construit par rapport à l'image que l'on s'en fait). Le développement du moi consiste alors à s’éloigner du narcissisme primaire (investissement de soi dans un auto-érotisme, dont on se sort via le narcissisme secondaire, en investissant des objets extérieurs, autres que soi), mais malgré tout le Moi a une aspiration intense à recouvrer ce narcissisme primaire quand il est fragilisé. Cet éloignement dans un narcissisme secondaire se produit par le moyen du déplacement de la libido sur un Idéal du Moi imposé de l’extérieur, et par le fait de tirer de la satisfaction par l’accomplissement de cet idéal.
LE MOI ET LA RÉALITÉ
Le moi se construit sur l’épreuve de la réalité. Il est l'instance qui distingue réalité interne et réalité externe, et à la première frustration, s’ébauche le Moi qui progressivement ne cessera plus de se construire tout au long de sa vie. Il s’adapte à la réalité en équilibrant la vie psychique de l’individu et ses pulsions. il fait référence à la raison, le Moi des enfants étant fragile, ils ne sont donc pas toujours raisonnables. La construction et l’édification du Moi sont indispensables à l’équilibre psychique, au travers de désillusions, quand la prise de conscience des réalités garantit une certaine solidité psychique. L’individu n’est pas tout-puissant donc ses désirs ne peuvent pas être tous satisfaits.
Le Moi s'efforce de faire régner l'influence du monde extérieur sur le Ça, puisque c'est la partie de la personnalité la plus consciente, toujours en contact avec la réalité extérieure. Soumis au principe de réalité, il a un rôle de régulateur et de médiateur. Ses opérations sont inconscientes (mécanismes de défense). Il est issu du ça confronté à la réalité extérieure, et se forme à partir d'identifications, de frustrations et de gratifications successives. Le refoulement par exemple, est un des nombreux mécanismes de défense du Moi. Il se manifeste lorsque le désir et les pulsions ne peuvent être acceptés et doivent être dérivés de leur Objet. Dans cette redoutable complexité, où situer la souffrance telle qu'elle est ressentie, si ce n'est dans le Moi, cette « pauvre créature » qui doit « servir trois maîtres » et subit, de ce fait, « la menace de trois dangers : de la part du monde extérieur, des exigences du Ça, et de la sévérité du surmoi ». Du point de vue de la restriction pulsionnelle, de la moralité, on peut dire : le ça est totalement amoral, le moi s'efforce d'être moral, le surmoi peut devenir hyper-moral et alors aussi cruel que seul le ça peut l'être.
Le Moi et la libido.
Il demeure le point d’ancrage défensif par rapport aux excitations internes et externes, son rôle est en outre de mettre un frein aux déchaînements passionnels du Ça et de substituer le principe de réalité à celui de plaisir. C’est le lieu d’un système pulsionnel où les pulsions sexuelles se différencieront pour devenir complètement distinctes. Les pulsions du Moi sont au service de l’autoconservation de l’individu. Par la suite, le concept de narcissisme, donne au Moi une place de premier plan. L’étude des psychoses permet d’établir l’existence d’une libido du Moi (centrée sur le sujet propre), opposée à la libido d’objet ( il y a d’ailleurs un équilibre entre les deux ), celui-ci peut donc être investit par la libido, comme n’importe quel objet extérieur. Du fait de la distinction entre narcissisme primaire et secondaire, le Moi devient entre autre un réservoir de libido. Par ailleurs, le moi est affecté, dans sa constitution même, par le processus d’identification : celle-ci transforme le Moi sur le modèle de l’autre. En 1923, le Moi est nanti d’un dualisme pulsionnel nouveau, opposant les pulsions de vie et les pulsions de mort.
MOI FORT ET MOI FAIBLE
Plus le sujet grandit, plus son Moi se renforce. Plus son Moi est fort, plus le sujet est capable de tolérer, d’accepter, d’appréhender les oppositions et difficultés de la réalité. L’équilibre psychologique et la socialisation de l’individu dépendent de la solidité de son Moi. Un Moi fort et solide garantit une adaptation positive à la vie et à autrui. De la fiabilité du moi dépend la capacité à vivre en société, à tolérer les différences, à accepter les divergences. Tout comme Lacan distingue deux sous-parties dans le Moi, cette notion très large semblerait pouvoir se subdiviser en un Moi-jugeant et un Moi-jugé.
La souffrance est donc fonction de la force et de la solidité de notre Moi, elle dépend de l’aptitude ou l’inaptitude individuelle à composer avec la réalité.
- De la force et de la solidité du moi dépend la capacité à tolérer la réalité et de ne pas systématiquement être l’objet de nos désirs ou de nos émotions.
- Si son moi est faible, le sujet prendra ses désirs pour des réalités, cherchera à obtenir coûte que coûte, par la contrainte, ce qu’il souhaite (illusion précaire de toute puissance).
LE MOI ET L’IDENTITÉ
Le nouveau-né ne fait pas nettement la distinction entre lui-même et le monde extérieur. Il considère sa mère comme une partie de lui-même, le sein une continuité de son propre corps. Il ne dissocie pas le Moi du Non-Moi, autre dimension du Moi qui est en relation avec la constitution de l’identité. Le Moi, rappelle Freud, est avant tout un Moi corporel, mais il ajoute : « Il n’est pas seulement un être de surface, il est lui-même la projection d’une surface ».
La métaphore du miroir
Comme dans un jeu de miroir, « Moi et Non-Moi » se renvoie l'un à l'autre, et ce n'est pas pour rien que Johann Fichte emprunte à l'optique la notion de réflexion, pour témoigner des illusions, projections et autres identifications du Moi, qui en se trompant lui-même révèlerait l'existence d'un Non-Moi (ce que l'on est pas). Dans ce jeu de miroir, la multiplicité des prismes dont peut user l'esprit humain pour s'avouer ou se leurrer, laisse à penser que cette réflexion intérieure est sans fin. Le « Moi » des philosophes a toujours été conçu comme un « miroir ». Une réflexion sur le sujet véritable doit donc partir d'une critique du « Moi » imaginaire (l'image du miroir reste aveugle parce que le miroir ne voit pas contrairement à l'individu sujet se voyant comme un objet dans la glace). La question sera donc celle de savoir « qui voit et qui tient ce miroir », le sujet se prenant pour un objet (donc lui-même comme l'objet de son désir), ou le sujet sachant qu'il est face à un objet ne reflétant que son image, virtuelle...
Derrière le sujet de la réflexion, il y aurait ainsi un autre sujet qui peut s'identifier à l'image aveugle de l'autre en se confondant avec l'objet virtuel de la projection du sujet. Donc le Moi traditionnel de la philosophie est un Moi perçu ; un Moi qui fait disparaître celui qui le perçoit derrière son image, qui devient alors la réalité alors qu'elle n'est qu'un reflet, une apparence. Aussi il faut croire que nos élans narcissiques et nombrilistes ne nous aident pas à différencier le sujet de l'objet, le réel du virtuel, l'objet de notre désir, qui ne serait en fin de compte que notre propre personne...vous reprendrez bien un selfie ?
LE MOI EST IMAGINAIRE ET POSSÈDE DEUX FACETTES
Le Moi, selon Lacan, est une instance du registre imaginaire : il est l'aliénation même. Le sujet se voit dans le Moi, qui n'est qu'un arrêt sur image de la fonction sujet. Sa formation implique une première triangulation, entre la mère, l'enfant et l'objet du manque, tous trois imaginaires. L'enfant est assujetti à sa mère en tant qu'il ne peut au début se distinguer d'elle, tant que son individualité n'a pas émergé de sa personne. Pour se différencier de sa mère, l'enfant en viendra à se reconnaître ailleurs, en l'Idéal du Moi, qui lui est symbolique. Mais le Moi demeurera instance d'aliénation, de captation imaginaire.
On peut lui associer deux facettes que sont le Moi idéal et l'Idéal du Moi.
Le Moi Idéal se rapporte au sujet se percevant comme idéalisé, en étant le lieu du fantasme héroïque, lieu dans lequel le sujet se voit accomplissant maintes merveilles. Le moi idéal s'exprime par exemple dans le rêve, ou la rêverie diurne, exprimant toute la force du sujet qui se voit plus grand, plus fort, plus puissant qu’il ne l’est. C’est un idéal de toute-puissance narcissique forgé sur le modèle du narcissisme infantile, trouvant son origine dans le stade du miroir, et appartenant au registre de l’imaginaire. C'est le surhomme auquel le Moi s'identifie alors qu'il accomplit des actions héroïques fantasmées.
L'Idéal du Moi est un absolu que l'individu tente ou non d'atteindre, mais considère comme étant l'incarnation de sa vision de l'Homme parfait (notion extrêmement relative et subjective). C'est le lieu psychique porteur de l’idéal que le sujet établit en lui, auquel il mesure son moi actuel, et qui serait, à côté du moi, la condition du refoulement. Lacan le conçoit comme une instance symbolique, issue logique de l'œdipe, et dépassement de la structure imaginaire du Moi (Moi Idéal). L’Idéal du Moi est une instance de la personnalité résultant de la convergence du narcissisme (idéalisation de son Moi) et des identifications aux parents, à leurs substituts et aux idéaux collectifs. En tant qu’instance différenciée mais complémentaire du Surmoi, l’Idéal du Moi constitue un modèle critique auquel le sujet cherche à se conformer.
LE MOI MÉDIATEUR, LE MOI ET SES DÉFENSES
La principale tâche du moi étant de gérer les échanges entre les instances psychiques et la réalité extérieure, il est dans une position difficile entre Ça et Surmoi, entre le monde intérieur de l’esprit et le monde matérielle de la réalité extérieure. Pour se protéger contre les pressions constantes qui s’exercent sur lui, le Moi dispose de mécanismes de défenses plus ou moins élaborés, qui sont révélés par la dimension inconsciente du Moi. Les mécanismes de défense sont donc des processus élaborés par le Moi sous la pression du Surmoi et de la réalité extérieure, et permettant de lutter contre l'angoisse. Ces mécanismes psychiques préservent le Moi et le protègent aussi des exigences pulsionnelles du Ça. Mais ce dont le Moi se protège en priorité, c'est de l'angoisse. Par exemple, une représentation inconsciente va être incompatible avec les exigences du Surmoi. Cette représentation inconsciente du Ça apporte du plaisir mais provoque aussi du déplaisir, alors le Moi, pour se défendre contre cette représentation, va utiliser divers procédés que l'on réunit sous le terme de "mécanismes de défense du Moi".
Par exemple le refoulement est un filtre incité par le Surmoi et opéré par le Moi pour que du matériel psychique ne passe pas de l'inconscient au conscient.
Le conscient accède à l'inconscient comme les organes des sens accèdent à la réalité extérieure. Il y a eu constitution d'un "grenier" inconscient où sont engrangées toutes les informations vécues, et l'individu peut faire appel à un moment précis à ces vécus. Ces faits sont dits "refoulés". Tout ce qui est refoulé devient inconscient mais l'inconscient n'est pas constitué que de cela. Il y a aussi des contenus innés qui ne sont jamais passés par la conscience. L'inconscient obéit aux processus primaires que sont le déplacement (changement d'Objet) et la condensation (plusieurs Objets en un). Ces deux processus primaires obéissent au principe de plaisir. Les désirs sont mobiles et essaient de s'extérioriser, provoquant le refoulement. Le symptôme est le produit du refoulement qui consiste en un retour du refoulé sur le plan somatique. Il sert à échapper à l'angoisse. Il est le substitut d'une satisfaction pulsionnelle qui n'a pas eu lieu. Ce qui aurait du être plaisir devient déplaisir. Les défenses du Moi soutiennent la vie psychique, si une partie du Moi est consciente, ses défenses sont inconscientes. Quand elles s'effondrent (on parle alors de décompensation) il y aura possibilité de dépression.
Le moi intervient dans la dualité des pulsions sexuelles et d'autoconservation. Il est le représentant de ces dernières et fonctionne à leur service, c'est-à-dire en déclenchant le refoulement qui détourne la représentation psychique censurée et la renvoie dans l'inconscient. Il est à noter qu’une partie du Moi est tout à fait inconsciente. L’expérience psychanalytique démontre précisément combien il est difficile de ramener dans le conscient ces résistances enracinées dans le Moi qui se comportent comme le refoulé.
D'autres exemples de mécanismes de défense :
- Clivage du Moi : une partie est acceptée, une autre est déniée (rejetée). La plus grande intensité s'imposera, en cas de refoulement, l'intensité du Surmoi agit, en cas de perversion, c'est le ça qui l'emporte sur le Surmoi
- Notion de refoulement : mécanisme de défense du Moi, avec attrait + censure
- Exigences pulsionnelles : ce sont les pulsions infantiles (affect et représentation)
TEMPORALITÉ DU MOI - AGIR ET RÉPÉTITION
C'est avec la constitution du Moi qu'apparaît le temps vécu du parcours subjectif, l'Histoire du sujet avec ses repères de passé, présent et futur. Les événements psychiques seront dès lors décrits comme des mouvements du corps, et le langage usuel ne permet pas de décrire autrement le temps : c'est le parcours d'un corps à travers l'espace qui mesure pour nous le temps. Ici, il nous faut définir le concept d'acte, bien différent du comportement observé chez l'animal, car lié à l'existence de la dimension du langage, chez l'homme.
Agir, c'est "retraduire la Logique (du signifiant) dans le Lieu (du corps)". Le corps existant dans le réel, il s'ensuit que tout acte fait apparaître du nouveau dans ce Réel. Mais du fait que l'acte est une répétition liée à des signifiants, à du Symbolique, il peut également être décrit comme réalisant de l'ancien. Le Moi méconnaît qu'il n'est que le jouet de cette répétition signifiante. Il s'imagine exclusivement créateur de nouveau, agent de changement, architecte de l'univers subjectif. Au fil de ses actes, il pense laisser le passé derrière lui, être en route vers l'avenir. Il existe donc une distinction essentielle entre changement apparent (perçu dans la temporalité linéaire du Moi) et changement structural (celui qui met fin à la répétition). On comprendra alors mieux qu'un désir de changement (apparent) puisse n'être qu'une résistance de plus au changement (structural).
En d'autre terme, plus croit changer, plus on se conforte dans un modèle déterminé, et dont on cherchait au départ à s'éloigner. On en revient aux apparences liées à l'identité imaginée et virtuelle que le Moi figure à l'individu, en s'y référant on se leurre soi-même sans même s'en rendre compte, puisque l'on est persuadé d'effectuer un changement structural alors qu'il n'est qu'apparent. Un peu comme lorsqu'en changeant sa photo de profil, on croit avoir changé de personnalité ou d'attitude, alors que dans les faits et dans le fond on reste le même. Et en croyant changer, on ne fait que résister à un véritable changement, en perdurant dans des actes répétitifs, dont nous ne sommes pas toujours conscients (addictions et autres dépendances amenant à réagir au lieu d'agir, tout en croyant que l'on agit de part sa propre et seule volonté).
LE MOI ET LE DISCOURS DU LANGAGE - La constitution du Moi est dépendante à tous les niveaux du langage.
- C'est le langage, à travers la demande des parents, qui conduit le sujet, pour trouver un signifié (le Moi) à ce signifiant particulier qu'est l'Idéal du Moi, à prendre comme référent l'image spéculaire (Qui réfléchit la lumière comme un miroir) qu'est le Moi Idéal (l'image idéalisée que l'on se fait de soi, et qu'ainsi l'on préfère regarder dans le miroir des apparences, plutôt que de pénétrer la dure vérité que l'on cache sous des masques esthétiques et fait de belles paroles).
- C'est ensuite le langage qui va fournir au Moi, instance imaginaire, tous ses mécanismes de défense, qui sont des figures de rhétorique, des tropes, exerçant sur le discours de l'inconscient (gouverné par les déterminations signifiantes du sujet) une censure.
- C'est enfin dans et par le langage que le corps fantasmé va parler : à travers les métaphores mettant en jeu l'image et la géométrie du corps, les pulsions partielles vont se satisfaire dans le cadre du fantasme, le Moi du sujet gardant l'illusion de conduire l'opération (oh que je suis beau dans ses habits tout neuf, c'est comme si j'étais une nouvelle personne, mais que nenni, cela n'empêche pas de réitérer les mêmes erreurs du passé).
le Moi est ainsi le lieu de réception des traces mnésiques laissées par les mots, il est au cœur du système de perception. Aidé par le Surmoi, il participe à la censure. En dépit de ses fonctions importantes (en vertu de sa relation au système perceptif, il établit l’ordonnancement temporel des processus psychiques et soumet ceux-ci à l’épreuve de la réalité), il n’en reste pas moins très fragile face aux menaces du monde extérieur, mais aussi intérieur, avec les exigences du Ça et la sévérité du Surmoi.
A noter que si l'ego est synonyme du Moi, le "Je" est différent du Moi, il est le pilote à l’intérieur du Moi, celui qui dans l’analyse cherchera qui il est.
MOI PHYSIQUE ET MOI PSYCHIQUE DANS L’ÉLABORATION DES FRONTIÈRES DU MOI - STADE DU MIROIR
Il faut bien savoir que le nourrisson ne se vit pas distinct de sa mère, et donc qu'il n'a pas conscience de son propre corps. Ce n'est que progressivement qu'il va prendre conscience de lui-même au travers du stade du miroir qui constitue la matrice et l'ébauche de ce que sera le Moi. Puis il va intégrer les limites de ce corps qui est à lui et différent des autres. Il distinguera ainsi ce qui est de l'ordre du Moi et ce qui ne l'est pas.
L’étape du stade du miroir a une grande valeur symbolique dans l'évolution psychique de l'enfant. Elle le force à prendre conscience qu'il est différent de sa mère, puis des autres. Elle lui donne des limites dans la vision de ce corps "limité" par un contour, et aussi par une taille. Il se perçoit comme un tout, unique, et aussi comme extériorité. Il découvre les parties de son corps qu'il ne connaissait pas encore : le schéma corporel se construit et la vision de soi aussi. La relation affective que l'enfant entretient avec les autres, de symbiotique (relative à un soutien mutuel) devient anaclitique (conscience de ce soutien dans une forme de dépendance). Désormais l'enfant sait qu'il a besoin de la mère. C'est une période très importante de distinction, que ce soit extérieur/intérieur ou Moi/Autre (le "Moi" se forme en même temps que se forme l'Objet extérieur, l'un n'existant que par rapport à l'autre).
- Entre 4 et 6 mois : si on place l'enfant devant un miroir, il ne se reconnaît pas. L'être en face de lui a sa réalité propre.
- Entre 6 et 8 mois : il découvre que l'autre n'est qu'une image et non un être réel. C'est un leurre, l'enfant passe du réel à l'imaginaire.
- Vers 1 an : il comprend que l'image du miroir, c'est son propre corps. Il se perçoit comme un tout et aussi comme extériorité.
C'est alors la première fois qu'il voit son corps en entier et s'identifie à l'image réfléchie. C'est la mère qui, le regardant dans la glace en lui disant : "c'est toi, là !", lui ouvre la voie de l'identification à l'image (sans discerner le réel du virtuel, il prend son reflet pour la réalité). L'enfant perçoit bien l'admiration de l'image de la mère pour son image à lui. Il y perçoit aussi du désir. Cette image, pour l'enfant, c'est son Moi (c'est par le regard de l'autre que nous nous formons, en nous identifiant à l'image que l'autre a de nous). L'enfant s'aliène dans cette image aimée par la mère. Il y devient autre. S'il en restait là, il deviendrait psychotique. Ce qui va mettre un terme à cette relation aliénante, c'est le père (ou le langage, ou la place que le père a dans le discours de la mère). Le père mettra une distance entre la mère et l'enfant.
Autonomie et affirmation du Moi au stade anal.
De la fin de la première année jusqu'à sa troisième année, l’enfant décide, dispense son bon-vouloir, dirige son corps. L’estime de soi dépend de l’estime des autres pour soi : si la mère insiste trop sur la socialisation, l’enfant aura l’impression de subir, de ne pas décider pour (et par) lui-même, d’avoir un Moi dévalorisé. Si la mère insiste surtout sur le plaisir, l’enfant aura l’impression qu’avant de faire quelque chose pour quelqu’un d’autre, il le fait pour lui. Il décide de sa vie, de son plaisir, affirme son Moi. Son autonomie n’est pas diminuée si de son propre chef il décide de faire plaisir à la personne qu’il aime. Quand l'enfant décide de donner ou de ne pas donner ses matières fécales (conduites excrémentielles), il montre sa toute-puissance car il a le choix de s'opposer à sa mère, par exemple en ne déféquant pas dans le pot alors qu'elle le lui demande. C'est au travers de la frustration et de l'attente que naît un Objet extérieur d'où vient la gratification. Sans cette frustration et cette attente, il n'y a pas de limites entre le Moi et le non-Moi.
LE MOI, L’ANGOISSE ET L’AGRESSIVITÉ
L'angoisse est liée à la pulsion. Un excès de tension crée une surcharge d'énergie qui ne peut se libérer et provoque l'angoisse. L'angoisse est secondaire à la non-utilisation de l'énergie, elle est liée à une perte de la représentation et est le résultat d'un conflit entre le ça et le Surmoi, le ça et le Moi ou le Surmoi et le Moi. C'est le Moi qui vit l'angoisse, comme un signal d'alarme émit par lui face à un désir incompatible. L'angoisse a une fonction d'auto- conservation.
Le Moi et l'agressivité
L'origine de l'agressivité est pulsionnelle. Elle est la résultante de la projection de la pulsion de mort sur le mauvais Objet. Elle est liée par la libido pour la préservation du Moi (sexualité, reproduction, défense du territoire, emprise sur le monde, affirmation de soi). Elle est sublimée, déplacée. Elle contribue, au sortir de l’œdipe, à la formation du Surmoi. Avant l’œdipe, l'agressivité s'exprimait à travers la projection, le clivage. Après l’œdipe elle sera sublimée et s'exprimera en partie sous le contrôle du Surmoi. C'est une opération du Moi qui a transformé l'agressivité du ça en Surmoi.
Voici un schéma explicatif regroupant les instances psychiques, que j'ai replacé dans une échelle de temps où l'on voit les différents stades de notre évolution enfantine, toujours d'après les théories de Freud, mais aussi d'après d'autres psychanalystes. Il s'agit d'un schéma vulgarisé comme cet article et ceux vers lesquels il renvoie pour tenter de comprendre l'organisation de notre psyché, d'un point de vue psychanalytique.
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Article introducteur
Le Moi constitue l’individualité du sujet, dans sa personnalité qui s’affirme en excluant les autres. C'est instance qui permet une défense de l’individu contre la réalité et les pulsions (synonyme de « ego »), relevant selon Freud du narcissisme infantile, et selon Lacan, de l’imaginaire.
C’est le terme utilisé en philosophie et en psychologie pour désigner la personne humaine en tant qu’elle est consciente d’elle-même et objet de la pensée, et c’est plus précisément, dans la deuxième topique freudienne, « la partie du ça qui a été modifiée sous l’influence directe du monde extérieur par l’intermédiaire du système perception-conscience ». Freud ajoutera par la suite que le Moi est siège des mécanismes de défense, que sa partie consciente est avant tout "corporelle", puisqu’elle se génère à partir de la découverte de soi et des différences avec les autres. C’est aussi, et cela détermine sa caractéristique défensive, un régulateur de structures psychiques complexes telles que les fantasmes, les pulsions, les motivations.
ORIGINES
Lors d’un premier essai d’explication physiologique de l'esprit, Freud repère l’existence d’une « instance » dont la présence entrave le passage des quantités énergétiques (le "flux mental") lorsque ce flux est accompagné de souffrance ou de satisfaction. C’est alors ce qu’il appelle le Moi, constitué à tout moment de la totalité des investissements, qu’il cherche à satisfaire ou, par l’inhibition, à éviter s’il s’agit d’une expérience douloureuse.
Son rôle initial est d'établir un système défensif et adaptatif entre la réalité externe et les exigences pulsionnelles.
Il est à la fois conscient, préconscient et inconscient. Il n'apparaît que progressivement en se développant dans les premiers mois de la vie, d'abord sous la forme d'un « pré-moi » au début, puis il s'organise et se dégage du narcissisme en même temps que l'objet libidinal. il y a donc une conception duelle du Moi, distinguant d'un côté le Moi primaire comme étant une partie inconsciente de la vie mentale et qui trouve son origine psychique dans l’enfance, et d'un autre côté le Moi secondaire, lié à la perception consciente. Si le terme désigne dans un premier temps le siège de la conscience, le Moi est aussi en grande partie inconscient. On peut encore remarquer que le système préconscient-conscient est nettement séparé de l’inconscient, tandis que le ça est conçu de telle sorte que le moi en fait partie : « Je propose d’appeler moi l’entité qui a son point de départ dans le système préconscient et qui est, en premier lieu, préconscient, et je réserve la dénomination de ça à tous les autres éléments psychiques dans lesquels le moi se prolonge en se comportant d’une manière inconsciente ».
À l'origine, le nourrisson découvre sa mère comme objet total, et non comme fragments dispersés sans cohérence. Le Moi sera remanié tout au long de la vie, par des processus d'introjection et de projection, c’est-à-dire qu'il y aura un travail d'appropriation et de rejet d'images formées sur des objets extérieurs à soi, par le biais d'identifications, comme l'identification projective (lorsque l'on s'identifie à un de ses parents par exemple, et que l'on se construit par rapport à l'image que l'on s'en fait). Le développement du moi consiste alors à s’éloigner du narcissisme primaire (investissement de soi dans un auto-érotisme, dont on se sort via le narcissisme secondaire, en investissant des objets extérieurs, autres que soi), mais malgré tout le Moi a une aspiration intense à recouvrer ce narcissisme primaire quand il est fragilisé. Cet éloignement dans un narcissisme secondaire se produit par le moyen du déplacement de la libido sur un Idéal du Moi imposé de l’extérieur, et par le fait de tirer de la satisfaction par l’accomplissement de cet idéal.
LE MOI ET LA RÉALITÉ
Le moi se construit sur l’épreuve de la réalité. Il est l'instance qui distingue réalité interne et réalité externe, et à la première frustration, s’ébauche le Moi qui progressivement ne cessera plus de se construire tout au long de sa vie. Il s’adapte à la réalité en équilibrant la vie psychique de l’individu et ses pulsions. il fait référence à la raison, le Moi des enfants étant fragile, ils ne sont donc pas toujours raisonnables. La construction et l’édification du Moi sont indispensables à l’équilibre psychique, au travers de désillusions, quand la prise de conscience des réalités garantit une certaine solidité psychique. L’individu n’est pas tout-puissant donc ses désirs ne peuvent pas être tous satisfaits.
Le Moi s'efforce de faire régner l'influence du monde extérieur sur le Ça, puisque c'est la partie de la personnalité la plus consciente, toujours en contact avec la réalité extérieure. Soumis au principe de réalité, il a un rôle de régulateur et de médiateur. Ses opérations sont inconscientes (mécanismes de défense). Il est issu du ça confronté à la réalité extérieure, et se forme à partir d'identifications, de frustrations et de gratifications successives. Le refoulement par exemple, est un des nombreux mécanismes de défense du Moi. Il se manifeste lorsque le désir et les pulsions ne peuvent être acceptés et doivent être dérivés de leur Objet. Dans cette redoutable complexité, où situer la souffrance telle qu'elle est ressentie, si ce n'est dans le Moi, cette « pauvre créature » qui doit « servir trois maîtres » et subit, de ce fait, « la menace de trois dangers : de la part du monde extérieur, des exigences du Ça, et de la sévérité du surmoi ». Du point de vue de la restriction pulsionnelle, de la moralité, on peut dire : le ça est totalement amoral, le moi s'efforce d'être moral, le surmoi peut devenir hyper-moral et alors aussi cruel que seul le ça peut l'être.
Le Moi et la libido.
Il demeure le point d’ancrage défensif par rapport aux excitations internes et externes, son rôle est en outre de mettre un frein aux déchaînements passionnels du Ça et de substituer le principe de réalité à celui de plaisir. C’est le lieu d’un système pulsionnel où les pulsions sexuelles se différencieront pour devenir complètement distinctes. Les pulsions du Moi sont au service de l’autoconservation de l’individu. Par la suite, le concept de narcissisme, donne au Moi une place de premier plan. L’étude des psychoses permet d’établir l’existence d’une libido du Moi (centrée sur le sujet propre), opposée à la libido d’objet ( il y a d’ailleurs un équilibre entre les deux ), celui-ci peut donc être investit par la libido, comme n’importe quel objet extérieur. Du fait de la distinction entre narcissisme primaire et secondaire, le Moi devient entre autre un réservoir de libido. Par ailleurs, le moi est affecté, dans sa constitution même, par le processus d’identification : celle-ci transforme le Moi sur le modèle de l’autre. En 1923, le Moi est nanti d’un dualisme pulsionnel nouveau, opposant les pulsions de vie et les pulsions de mort.
MOI FORT ET MOI FAIBLE
Plus le sujet grandit, plus son Moi se renforce. Plus son Moi est fort, plus le sujet est capable de tolérer, d’accepter, d’appréhender les oppositions et difficultés de la réalité. L’équilibre psychologique et la socialisation de l’individu dépendent de la solidité de son Moi. Un Moi fort et solide garantit une adaptation positive à la vie et à autrui. De la fiabilité du moi dépend la capacité à vivre en société, à tolérer les différences, à accepter les divergences. Tout comme Lacan distingue deux sous-parties dans le Moi, cette notion très large semblerait pouvoir se subdiviser en un Moi-jugeant et un Moi-jugé.
La souffrance est donc fonction de la force et de la solidité de notre Moi, elle dépend de l’aptitude ou l’inaptitude individuelle à composer avec la réalité.
- De la force et de la solidité du moi dépend la capacité à tolérer la réalité et de ne pas systématiquement être l’objet de nos désirs ou de nos émotions.
- Si son moi est faible, le sujet prendra ses désirs pour des réalités, cherchera à obtenir coûte que coûte, par la contrainte, ce qu’il souhaite (illusion précaire de toute puissance).
LE MOI ET L’IDENTITÉ
Le nouveau-né ne fait pas nettement la distinction entre lui-même et le monde extérieur. Il considère sa mère comme une partie de lui-même, le sein une continuité de son propre corps. Il ne dissocie pas le Moi du Non-Moi, autre dimension du Moi qui est en relation avec la constitution de l’identité. Le Moi, rappelle Freud, est avant tout un Moi corporel, mais il ajoute : « Il n’est pas seulement un être de surface, il est lui-même la projection d’une surface ».
La métaphore du miroir
Comme dans un jeu de miroir, « Moi et Non-Moi » se renvoie l'un à l'autre, et ce n'est pas pour rien que Johann Fichte emprunte à l'optique la notion de réflexion, pour témoigner des illusions, projections et autres identifications du Moi, qui en se trompant lui-même révèlerait l'existence d'un Non-Moi (ce que l'on est pas). Dans ce jeu de miroir, la multiplicité des prismes dont peut user l'esprit humain pour s'avouer ou se leurrer, laisse à penser que cette réflexion intérieure est sans fin. Le « Moi » des philosophes a toujours été conçu comme un « miroir ». Une réflexion sur le sujet véritable doit donc partir d'une critique du « Moi » imaginaire (l'image du miroir reste aveugle parce que le miroir ne voit pas contrairement à l'individu sujet se voyant comme un objet dans la glace). La question sera donc celle de savoir « qui voit et qui tient ce miroir », le sujet se prenant pour un objet (donc lui-même comme l'objet de son désir), ou le sujet sachant qu'il est face à un objet ne reflétant que son image, virtuelle...
Derrière le sujet de la réflexion, il y aurait ainsi un autre sujet qui peut s'identifier à l'image aveugle de l'autre en se confondant avec l'objet virtuel de la projection du sujet. Donc le Moi traditionnel de la philosophie est un Moi perçu ; un Moi qui fait disparaître celui qui le perçoit derrière son image, qui devient alors la réalité alors qu'elle n'est qu'un reflet, une apparence. Aussi il faut croire que nos élans narcissiques et nombrilistes ne nous aident pas à différencier le sujet de l'objet, le réel du virtuel, l'objet de notre désir, qui ne serait en fin de compte que notre propre personne...vous reprendrez bien un selfie ?
LE MOI EST IMAGINAIRE ET POSSÈDE DEUX FACETTES
Le Moi, selon Lacan, est une instance du registre imaginaire : il est l'aliénation même. Le sujet se voit dans le Moi, qui n'est qu'un arrêt sur image de la fonction sujet. Sa formation implique une première triangulation, entre la mère, l'enfant et l'objet du manque, tous trois imaginaires. L'enfant est assujetti à sa mère en tant qu'il ne peut au début se distinguer d'elle, tant que son individualité n'a pas émergé de sa personne. Pour se différencier de sa mère, l'enfant en viendra à se reconnaître ailleurs, en l'Idéal du Moi, qui lui est symbolique. Mais le Moi demeurera instance d'aliénation, de captation imaginaire.
On peut lui associer deux facettes que sont le Moi idéal et l'Idéal du Moi.
Le Moi Idéal se rapporte au sujet se percevant comme idéalisé, en étant le lieu du fantasme héroïque, lieu dans lequel le sujet se voit accomplissant maintes merveilles. Le moi idéal s'exprime par exemple dans le rêve, ou la rêverie diurne, exprimant toute la force du sujet qui se voit plus grand, plus fort, plus puissant qu’il ne l’est. C’est un idéal de toute-puissance narcissique forgé sur le modèle du narcissisme infantile, trouvant son origine dans le stade du miroir, et appartenant au registre de l’imaginaire. C'est le surhomme auquel le Moi s'identifie alors qu'il accomplit des actions héroïques fantasmées.
L'Idéal du Moi est un absolu que l'individu tente ou non d'atteindre, mais considère comme étant l'incarnation de sa vision de l'Homme parfait (notion extrêmement relative et subjective). C'est le lieu psychique porteur de l’idéal que le sujet établit en lui, auquel il mesure son moi actuel, et qui serait, à côté du moi, la condition du refoulement. Lacan le conçoit comme une instance symbolique, issue logique de l'œdipe, et dépassement de la structure imaginaire du Moi (Moi Idéal). L’Idéal du Moi est une instance de la personnalité résultant de la convergence du narcissisme (idéalisation de son Moi) et des identifications aux parents, à leurs substituts et aux idéaux collectifs. En tant qu’instance différenciée mais complémentaire du Surmoi, l’Idéal du Moi constitue un modèle critique auquel le sujet cherche à se conformer.
LE MOI MÉDIATEUR, LE MOI ET SES DÉFENSES
La principale tâche du moi étant de gérer les échanges entre les instances psychiques et la réalité extérieure, il est dans une position difficile entre Ça et Surmoi, entre le monde intérieur de l’esprit et le monde matérielle de la réalité extérieure. Pour se protéger contre les pressions constantes qui s’exercent sur lui, le Moi dispose de mécanismes de défenses plus ou moins élaborés, qui sont révélés par la dimension inconsciente du Moi. Les mécanismes de défense sont donc des processus élaborés par le Moi sous la pression du Surmoi et de la réalité extérieure, et permettant de lutter contre l'angoisse. Ces mécanismes psychiques préservent le Moi et le protègent aussi des exigences pulsionnelles du Ça. Mais ce dont le Moi se protège en priorité, c'est de l'angoisse. Par exemple, une représentation inconsciente va être incompatible avec les exigences du Surmoi. Cette représentation inconsciente du Ça apporte du plaisir mais provoque aussi du déplaisir, alors le Moi, pour se défendre contre cette représentation, va utiliser divers procédés que l'on réunit sous le terme de "mécanismes de défense du Moi".
Par exemple le refoulement est un filtre incité par le Surmoi et opéré par le Moi pour que du matériel psychique ne passe pas de l'inconscient au conscient.
Le conscient accède à l'inconscient comme les organes des sens accèdent à la réalité extérieure. Il y a eu constitution d'un "grenier" inconscient où sont engrangées toutes les informations vécues, et l'individu peut faire appel à un moment précis à ces vécus. Ces faits sont dits "refoulés". Tout ce qui est refoulé devient inconscient mais l'inconscient n'est pas constitué que de cela. Il y a aussi des contenus innés qui ne sont jamais passés par la conscience. L'inconscient obéit aux processus primaires que sont le déplacement (changement d'Objet) et la condensation (plusieurs Objets en un). Ces deux processus primaires obéissent au principe de plaisir. Les désirs sont mobiles et essaient de s'extérioriser, provoquant le refoulement. Le symptôme est le produit du refoulement qui consiste en un retour du refoulé sur le plan somatique. Il sert à échapper à l'angoisse. Il est le substitut d'une satisfaction pulsionnelle qui n'a pas eu lieu. Ce qui aurait du être plaisir devient déplaisir. Les défenses du Moi soutiennent la vie psychique, si une partie du Moi est consciente, ses défenses sont inconscientes. Quand elles s'effondrent (on parle alors de décompensation) il y aura possibilité de dépression.
Le moi intervient dans la dualité des pulsions sexuelles et d'autoconservation. Il est le représentant de ces dernières et fonctionne à leur service, c'est-à-dire en déclenchant le refoulement qui détourne la représentation psychique censurée et la renvoie dans l'inconscient. Il est à noter qu’une partie du Moi est tout à fait inconsciente. L’expérience psychanalytique démontre précisément combien il est difficile de ramener dans le conscient ces résistances enracinées dans le Moi qui se comportent comme le refoulé.
D'autres exemples de mécanismes de défense :
- Clivage du Moi : une partie est acceptée, une autre est déniée (rejetée). La plus grande intensité s'imposera, en cas de refoulement, l'intensité du Surmoi agit, en cas de perversion, c'est le ça qui l'emporte sur le Surmoi
- Notion de refoulement : mécanisme de défense du Moi, avec attrait + censure
- Exigences pulsionnelles : ce sont les pulsions infantiles (affect et représentation)
TEMPORALITÉ DU MOI - AGIR ET RÉPÉTITION
C'est avec la constitution du Moi qu'apparaît le temps vécu du parcours subjectif, l'Histoire du sujet avec ses repères de passé, présent et futur. Les événements psychiques seront dès lors décrits comme des mouvements du corps, et le langage usuel ne permet pas de décrire autrement le temps : c'est le parcours d'un corps à travers l'espace qui mesure pour nous le temps. Ici, il nous faut définir le concept d'acte, bien différent du comportement observé chez l'animal, car lié à l'existence de la dimension du langage, chez l'homme.
Agir, c'est "retraduire la Logique (du signifiant) dans le Lieu (du corps)". Le corps existant dans le réel, il s'ensuit que tout acte fait apparaître du nouveau dans ce Réel. Mais du fait que l'acte est une répétition liée à des signifiants, à du Symbolique, il peut également être décrit comme réalisant de l'ancien. Le Moi méconnaît qu'il n'est que le jouet de cette répétition signifiante. Il s'imagine exclusivement créateur de nouveau, agent de changement, architecte de l'univers subjectif. Au fil de ses actes, il pense laisser le passé derrière lui, être en route vers l'avenir. Il existe donc une distinction essentielle entre changement apparent (perçu dans la temporalité linéaire du Moi) et changement structural (celui qui met fin à la répétition). On comprendra alors mieux qu'un désir de changement (apparent) puisse n'être qu'une résistance de plus au changement (structural).
En d'autre terme, plus croit changer, plus on se conforte dans un modèle déterminé, et dont on cherchait au départ à s'éloigner. On en revient aux apparences liées à l'identité imaginée et virtuelle que le Moi figure à l'individu, en s'y référant on se leurre soi-même sans même s'en rendre compte, puisque l'on est persuadé d'effectuer un changement structural alors qu'il n'est qu'apparent. Un peu comme lorsqu'en changeant sa photo de profil, on croit avoir changé de personnalité ou d'attitude, alors que dans les faits et dans le fond on reste le même. Et en croyant changer, on ne fait que résister à un véritable changement, en perdurant dans des actes répétitifs, dont nous ne sommes pas toujours conscients (addictions et autres dépendances amenant à réagir au lieu d'agir, tout en croyant que l'on agit de part sa propre et seule volonté).
LE MOI ET LE DISCOURS DU LANGAGE - La constitution du Moi est dépendante à tous les niveaux du langage.
- C'est le langage, à travers la demande des parents, qui conduit le sujet, pour trouver un signifié (le Moi) à ce signifiant particulier qu'est l'Idéal du Moi, à prendre comme référent l'image spéculaire (Qui réfléchit la lumière comme un miroir) qu'est le Moi Idéal (l'image idéalisée que l'on se fait de soi, et qu'ainsi l'on préfère regarder dans le miroir des apparences, plutôt que de pénétrer la dure vérité que l'on cache sous des masques esthétiques et fait de belles paroles).
- C'est ensuite le langage qui va fournir au Moi, instance imaginaire, tous ses mécanismes de défense, qui sont des figures de rhétorique, des tropes, exerçant sur le discours de l'inconscient (gouverné par les déterminations signifiantes du sujet) une censure.
- C'est enfin dans et par le langage que le corps fantasmé va parler : à travers les métaphores mettant en jeu l'image et la géométrie du corps, les pulsions partielles vont se satisfaire dans le cadre du fantasme, le Moi du sujet gardant l'illusion de conduire l'opération (oh que je suis beau dans ses habits tout neuf, c'est comme si j'étais une nouvelle personne, mais que nenni, cela n'empêche pas de réitérer les mêmes erreurs du passé).
le Moi est ainsi le lieu de réception des traces mnésiques laissées par les mots, il est au cœur du système de perception. Aidé par le Surmoi, il participe à la censure. En dépit de ses fonctions importantes (en vertu de sa relation au système perceptif, il établit l’ordonnancement temporel des processus psychiques et soumet ceux-ci à l’épreuve de la réalité), il n’en reste pas moins très fragile face aux menaces du monde extérieur, mais aussi intérieur, avec les exigences du Ça et la sévérité du Surmoi.
A noter que si l'ego est synonyme du Moi, le "Je" est différent du Moi, il est le pilote à l’intérieur du Moi, celui qui dans l’analyse cherchera qui il est.
MOI PHYSIQUE ET MOI PSYCHIQUE DANS L’ÉLABORATION DES FRONTIÈRES DU MOI - STADE DU MIROIR
Il faut bien savoir que le nourrisson ne se vit pas distinct de sa mère, et donc qu'il n'a pas conscience de son propre corps. Ce n'est que progressivement qu'il va prendre conscience de lui-même au travers du stade du miroir qui constitue la matrice et l'ébauche de ce que sera le Moi. Puis il va intégrer les limites de ce corps qui est à lui et différent des autres. Il distinguera ainsi ce qui est de l'ordre du Moi et ce qui ne l'est pas.
L’étape du stade du miroir a une grande valeur symbolique dans l'évolution psychique de l'enfant. Elle le force à prendre conscience qu'il est différent de sa mère, puis des autres. Elle lui donne des limites dans la vision de ce corps "limité" par un contour, et aussi par une taille. Il se perçoit comme un tout, unique, et aussi comme extériorité. Il découvre les parties de son corps qu'il ne connaissait pas encore : le schéma corporel se construit et la vision de soi aussi. La relation affective que l'enfant entretient avec les autres, de symbiotique (relative à un soutien mutuel) devient anaclitique (conscience de ce soutien dans une forme de dépendance). Désormais l'enfant sait qu'il a besoin de la mère. C'est une période très importante de distinction, que ce soit extérieur/intérieur ou Moi/Autre (le "Moi" se forme en même temps que se forme l'Objet extérieur, l'un n'existant que par rapport à l'autre).
- Entre 4 et 6 mois : si on place l'enfant devant un miroir, il ne se reconnaît pas. L'être en face de lui a sa réalité propre.
- Entre 6 et 8 mois : il découvre que l'autre n'est qu'une image et non un être réel. C'est un leurre, l'enfant passe du réel à l'imaginaire.
- Vers 1 an : il comprend que l'image du miroir, c'est son propre corps. Il se perçoit comme un tout et aussi comme extériorité.
C'est alors la première fois qu'il voit son corps en entier et s'identifie à l'image réfléchie. C'est la mère qui, le regardant dans la glace en lui disant : "c'est toi, là !", lui ouvre la voie de l'identification à l'image (sans discerner le réel du virtuel, il prend son reflet pour la réalité). L'enfant perçoit bien l'admiration de l'image de la mère pour son image à lui. Il y perçoit aussi du désir. Cette image, pour l'enfant, c'est son Moi (c'est par le regard de l'autre que nous nous formons, en nous identifiant à l'image que l'autre a de nous). L'enfant s'aliène dans cette image aimée par la mère. Il y devient autre. S'il en restait là, il deviendrait psychotique. Ce qui va mettre un terme à cette relation aliénante, c'est le père (ou le langage, ou la place que le père a dans le discours de la mère). Le père mettra une distance entre la mère et l'enfant.
Autonomie et affirmation du Moi au stade anal.
De la fin de la première année jusqu'à sa troisième année, l’enfant décide, dispense son bon-vouloir, dirige son corps. L’estime de soi dépend de l’estime des autres pour soi : si la mère insiste trop sur la socialisation, l’enfant aura l’impression de subir, de ne pas décider pour (et par) lui-même, d’avoir un Moi dévalorisé. Si la mère insiste surtout sur le plaisir, l’enfant aura l’impression qu’avant de faire quelque chose pour quelqu’un d’autre, il le fait pour lui. Il décide de sa vie, de son plaisir, affirme son Moi. Son autonomie n’est pas diminuée si de son propre chef il décide de faire plaisir à la personne qu’il aime. Quand l'enfant décide de donner ou de ne pas donner ses matières fécales (conduites excrémentielles), il montre sa toute-puissance car il a le choix de s'opposer à sa mère, par exemple en ne déféquant pas dans le pot alors qu'elle le lui demande. C'est au travers de la frustration et de l'attente que naît un Objet extérieur d'où vient la gratification. Sans cette frustration et cette attente, il n'y a pas de limites entre le Moi et le non-Moi.
LE MOI, L’ANGOISSE ET L’AGRESSIVITÉ
L'angoisse est liée à la pulsion. Un excès de tension crée une surcharge d'énergie qui ne peut se libérer et provoque l'angoisse. L'angoisse est secondaire à la non-utilisation de l'énergie, elle est liée à une perte de la représentation et est le résultat d'un conflit entre le ça et le Surmoi, le ça et le Moi ou le Surmoi et le Moi. C'est le Moi qui vit l'angoisse, comme un signal d'alarme émit par lui face à un désir incompatible. L'angoisse a une fonction d'auto- conservation.
Le Moi et l'agressivité
L'origine de l'agressivité est pulsionnelle. Elle est la résultante de la projection de la pulsion de mort sur le mauvais Objet. Elle est liée par la libido pour la préservation du Moi (sexualité, reproduction, défense du territoire, emprise sur le monde, affirmation de soi). Elle est sublimée, déplacée. Elle contribue, au sortir de l’œdipe, à la formation du Surmoi. Avant l’œdipe, l'agressivité s'exprimait à travers la projection, le clivage. Après l’œdipe elle sera sublimée et s'exprimera en partie sous le contrôle du Surmoi. C'est une opération du Moi qui a transformé l'agressivité du ça en Surmoi.
Voici un schéma explicatif regroupant les instances psychiques, que j'ai replacé dans une échelle de temps où l'on voit les différents stades de notre évolution enfantine, toujours d'après les théories de Freud, mais aussi d'après d'autres psychanalystes. Il s'agit d'un schéma vulgarisé comme cet article et ceux vers lesquels il renvoie pour tenter de comprendre l'organisation de notre psyché, d'un point de vue psychanalytique.
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