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LeMonde : XP mystique en labo

  • Auteur de la discussion Auteur de la discussion Quetzal
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Quetzal

Holofractale de l'hypervérité
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19/5/08
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Article parut dans Lemonde

Baltimore, envoyée spéciale - Le professeur Griffiths reçoit dans le salon qui sert aux expériences. C'est une petite pièce capitonnée, au coeur de l'unité des sciences comportementales de la faculté de médecine Johns Hopkins, à Baltimore. Un divan et un tableau psychédélique invitent à l'introspection. Sur une table, l'urne mazatèque dans laquelle les gélules de psilocybine (substance hallucinogène) sont présentées au sujet. L'expérience est "de l'ordre du sacré", prévient Roland Griffiths. Elle s'inscrit dans un rituel millénaire que l'on retrouve dans plusieurs civilisations d'Amérique latine.

Le professeur a lui-même une allure d'ascète. Long, osseux, parfois étrangement joyeux, il a fait sa carrière à Johns Hopkins, où il étudie depuis quarante ans la pharmacologie des drogues et la manière dont elles modifient le comportement. "Il y a quinze ans, j'ai commencé la méditation, explique-t-il. Cela m'a ouvert une fenêtre de spiritualité. C'est une façon très intéressante d'explorer la nature de l'esprit." Cette pratique l'a conduit à se replonger dans la littérature des années 1950 et 1960 sur les hallucinogènes classiques (mescaline, psilocybine, LSD). Puis à essayer de découvrir par quels mécanismes l'état de conscience est altéré dans le cerveau.

En 2006, Roland Griffiths a été le premier à relancer les expériences à la psilocybine, l'ingrédient actif présent dans les champignons hallucinogènes et isolé en 1958 par le chimiste suisse Albert Hofmann. Les études avaient été interdites de facto depuis les années 1960 et les expériences de Timothy Leary, neuropsychologue et gourou de la contre-culture qui a été expulsé de Harvard en 1963. "Tout le monde était nerveux. C'était la première fois en trente ans qu'on donnait de la psilocybine. L'idée s'était développée que c'était trop dangereux pour les humains", se souvient-il. Il a fallu convaincre les agences nationales chargées des médicaments et de la lutte antidrogue (FDA, DEA) du sérieux de l'expérience. Et surtout combattre les réticences du comité d'éthique de l'université.

Après avoir créé un protocole de sécurité rigoureux (publié en 2008 dans le Journal of Psychopharmacology et adopté depuis par d'autres laboratoires), l'équipe a passé une annonce dans la presse locale : "Recherchons des personnes intéressées par le développement spirituel pour une étude sur l'état de conscience." Pour la première expérience, le professeur recherchait plutôt des non-malades, des gens attirés par le mysticisme ou la spiritualité, des religieux, des adeptes de la méditation. Les sujets de ce type lui paraissaient mieux armés pour interpréter l'expérience mystique dans laquelle ils allaient embarquer.

L'étude s'est ensuite orientée vers les patients atteints de cancer ou de dépression. L'expérience actuelle, un projet pilote, porte sur quatre fumeurs qui n'arrivent pas à briser leur dépendance au tabac. Là aussi, le professeur Griffiths essaie de développer scientifiquement les observations inachevées des années 1960 sur la manière dont l'expansion de la conscience, sous l'effet de l'agent actif des "champignons magiques", aide à traiter les addictions à l'alcool ou à l'héroïne.

En cinq ans, de 2006 à 2011, 120 volontaires ont participé à l'expérience au cours de 250 séances. Le professeur, qui s'intéresse à ce qui est devenu la "neurothéologie", a eu très vite la confirmation qu'il cherchait : l'agent actif des champignons magiques peut induire des expériences mystiques identiques à celles que les religieux ou les adeptes de la méditation ont décrites : "Une sensation d'unité, de connexion avec toutes choses, d'amour infini", décrit-il. C'était "la première démonstration scientifique en quarante ans que des états de mysticisme profond peuvent être produits en toute sécurité en laboratoire".

Les "cobayes" ont admis la présence d'effets positifs de longue durée. A 80 %, ils ont rapporté que l'expérience avait été l'une des "cinq plus importantes de leur vie". Quatorze mois plus tard, quand l'équipe a publié ses conclusions dans le Journal of Psychopharmacology, 60 % des participants continuaient à faire état d'une amélioration significative de leur existence et de leurs relations avec autrui, élément corroboré par des entretiens avec leurs proches. "Cela fait quarante ans que je suis ici. Je travaille le week-end. Aucune de mes grandes expériences ne s'est déroulée ici. Le fait que les gens parlent de celle-ci en termes positifs nous a fait penser que c'était une piste à poursuivre", raconte le médecin, assis sur le divan surplombé d'une sculpture de champignon magique.

L'expérience dure plus de cinq heures. Le sujet est invité à apporter des éléments de son univers familier, photos de proches, objets préférés, dont il va discuter en attendant que la drogue fasse effet. L'équipe partage quelques moments solennels avec lui avant qu'il n'absorbe la dose avec un verre d'eau (30 milligrammes de psilocybine de synthèse produite par le laboratoire du professeur David Nichols, à l'université Purdue, située dans l'Indiana). Seuls deux "guides" restent dans la pièce, assis par terre sur le tapis oriental. Ils sont là pour accompagner le voyage, rassurer le sujet si nécessaire et l'encourager à aller aussi loin que possible. Il ne s'agit pas d'une partie de plaisir. Le cobaye a un cache sur les yeux. Il n'est pas censé bouger. Il doit intérioriser. "Nous encourageons les gens à se tourner vers l'intérieur, à entrer en eux-mêmes et à se concentrer sur leur propre expérience", explique le professeur.

Tout est fait, jusqu'à l'aspect non médicalisé du salon, pour limiter les réactions négatives (dans une expérience où le décor était celui d'un laboratoire, les sujets ont eu la désagréable impression que des extraterrestres leur faisaient passer des examens médicaux). Les guides sont de sexes opposés, pour éviter ce qui pourrait biaiser la réaction. Dans leur casque, les volontaires ont droit à des morceaux de musique surtout classiques (et ils peuvent garder le CD pour méditer chez eux).

Richard Boothby a participé aux séances de 2007, quand l'équipe de Johns Hopkins essayait de mesurer les perceptions en fonction des doses. Doyen du département de philosophie à l'université Loyola de Baltimore, il s'était toujours intéressé aux drogues psychédéliques, ayant étudié Les Portes de la perception, d'Aldous Huxley, écrit en 1954 sous l'effet de la mescaline. Malgré tout, il ne repense pas à ses cinq séances de psilocybine (quatre, en fait, et un placebo) sans une sorte de crainte mystique. "J'ai beaucoup aimé", avoue-il. Avant d'ajouter : "C'était quand même terrifiant par moments." La première dose était la plus forte, pense-t-il. "C'était comme les étapes du doute de Descartes. J'ai eu l'impression que j'avais perdu la tête. Pendant un moment, j'ai cru que j'étais mort." Il se souvient d'une musique somptueuse qui l'a rendu "accro" à ce nocturne dans lequel il était maintenu. Et, depuis, il collectionne les masques qui obscurcissent la vue. "J'ai eu des pensées sur la nature de Dieu. Une sorte de révélation, dit-il. Je suis désormais plus enclin qu'avant à dire que je crois en Dieu."

Selon le professeur, entre 30 % et 40 % des sujets ont des crises d'anxiété. "Cela peut être visuel, comme des monstres, ou se traduire par l'impression qu'ils vont mourir. Ou se situer à des niveaux prosaïques, comme le fait de ne pas supporter la musique." Les accompagnateurs les encouragent à "approcher le monstre". Il s'agit de leur faire comprendre qu'il n'existe que parce qu'ils lui donnent ce pouvoir. "La psilocybine permet aux gens d'affronter les monstres, mais aussi ces pensées dans leur vie qui ont pris le pas sur eux, comme "je ne peux pas arrêter de fumer"".

L'équipe de Johns Hopkins n'est pas la seule à utiliser la psilocybine aux Etats-Unis. "Il y a eu un changement profond dans l'approche des expériences sur les hallucinogènes ", se félicite Roland Griffiths. D'autres expériences ont été approuvées, à Harvard, à l'université d'Arizona et à l'université de Californie de Los Angeles (UCLA). Mais les maigres financements publics témoignent des réticences qui continuent. Il y a quelques mois, le professeur Griffiths a perdu la bourse accordée par les National Institutes of Health (NIH), institutions s'occupant de la recherche médicale. Les recherches sont désormais financées par des associations privées.

De telles expériences ne risquent-elles pas d'encourager la consommation de stupéfiants ? Les scientifiques de Johns Hopkins citent le Dr Herbert Kleber, professeur de psychiatrie à l'université Columbia à New York, l'une des sommités de la lutte contre la dépendance. "Avec Internet, les jeunes sont inondés de comptes rendus glorieux sur les effets de ces drogues, souligne-t-il. Cela ne risque pas de changer grand-chose." Mais il serait "irréfléchi scientifiquement" de ne pas poursuivre les recherches sur des substances qui peuvent aider les malades en phase terminale.

Le professeur Griffiths insiste, lui, sur la dimension ontologique. "Nos recherches montrent que, dans des conditions adéquates, tout le monde peut avoir ce genre d'expérience mystique. Cela veut dire que nous sommes formatés pour la générosité ou la compassion envers les autres, qui sont fondamentales dans les religions. Cette vérité première semble être inscrite dans nos gènes. C'est réjouissant. En tant qu'espèce, il faut que nous réussissions à comprendre la nature de ces sensibilités si nous voulons survivre. Si nous ne dépassons pas nos instincts agressifs et d'autodéfense, nous allons nous détruire, et la planète avec."

http://www.lemonde.fr/planete/article/2 ... _3244.html


Dans un sens, c est trés bien. Mais dans un autre, c est vraiment ridicule ! Quesqu on essaye de prouver ? Ce qu on sait deja, et en moins bien ! Tu m etonne qu ils ont du améliorer le set&setting parce que les gens pensaient qu ils se faisaient sodomiser par des extraterrestres...
Je ne comprend pas pourquoi vouloir passer par la science pour developper le Mystique . Ce sont des experiences personelles qui doivent se concevoir par l individu dans un contexte personel. Ils me font bien rire avec leur "securité de laboratoire" ... si on developpait une vraie conscience et une vraie pratique DANS la societe et POUR la societe (ce qui ne veut pas dire generalisée...), et pas dans l illegalité et la desinformation, on en aurait que faire de leur laboratoire sans meme une plante verte !

Allez, je suis un peu vache, c est un premier pas...
 
Quetzal a dit:
Quesqu on essaye de prouver ? Ce qu on sait deja, et en moins bien !

Oui mais pour faire faillir la citadelle de la loi, l'approbation de celle de la science est nécessaire (bien que clairement non suffisante). Nous on le sait que les drogues psychédéliques ne sont pas obligatoirement le sentier de la perdition et qu'on en retire des choses positives, importantes. En tout cas on a de bonnes raisons de le croire. Mais le non-initié, à part "c'est de la drogue" il en pensera souvent pas grand-chose (notez qu'en plus le français ne nous aide pas, la drogue, rien que la grammaire les met toutes dans le même panier).

Quand je défends le sujet, j'essaie au maximum de parler de philosophie, de théologie au sens large, voire du peu de science que je connais. Et de montrer à mes contradicteurs qu'ils manquent grandement de connaissances. Même si dans les faits la personne ne démordra souvent pas de si tôt de son "ces trucs ça grille le cerveau", pouvoir citer un article de ce style ça peut pas faire de mal.

Et pour le coup, rien à foutre d'être pédant. Quand j'avais 15 ans et que des bouffons auditeurs d'NRJ et Fun Radio me disaient que "le metal c'est du bruit" (sauf Nightwish bien sûr), c'était la même chose, des gens sans culture musicale au sens large prenant leurs goûts bien ploucasses pour la norme, voire le nec plus ultra. Pareil avec les true-metalleux qui connaissent rien passé leur style de prédilection et qui me prennent pour un traître indigne parce que j'adore le rap. Pareil avec les cinéphiles bien comme il faut pour lesquels un goût pour les zombies et la violence "gratuite" c'est douteux. Pareil, toujours pareil. Face aux incultes qui en sont fiers, aucune honte à étaler la sienne de culture. Donc même si cet article ne nous apprend rien, ce sera toujours ça à envoyer dans la tronche de certains.

Dr Herbert Kleber a dit:
"Avec Internet, les jeunes sont inondés de comptes rendus glorieux sur les effets de ces drogues, souligne-t-il. Cela ne risque pas de changer grand-chose."

CEY DE NOTRE FAUTE.
 
Je ne comprend pas où tu veux en venir Quetzal, tu préfères que la prohibition et l'interdiction de la recherche sur les psychédéliques continuent?

Sincèrement, est-ce que tu crois que les gars qui bouffent de l'acide en teuf ca les rend plus intelligent? Taper du pied par terre avec une bouillie psychée à la place du cerveau ça sert vraiment à rien.
Je veux dire, toutes les drogues ont le droit d'être utiles, et pas seulement d'être récréatives.
Demande aux personnes qui souffrent de maux de tête chronique si ils sont pas content que de nouveaux médicaments puissent enfin soigner ces maladies incurables.

Après je suis d'accord, la construction d'une pensée mystique ne devrait pas se faire avec un médecin. Cela devrait être inné de naturellement vouloir développer sa conscience. Seulement on vit dans un monde de total soumission à la réalité. Responsabilité, "réussir sa vie", sa famille, facebook, apple, tout ca, pour moi, c'est autant d'élément qui font que les gens ne méditent plus, ils planifient , s'affairent, s'agitent, etc. Et je pense qu'il faudra longtemps avant que les gens soient prêts, c'est pour ca qu'une approche scientifique est je pense la meilleure façon d'introduire les psychédéliques dans la société.
 
Je ne comprend pas pourquoi vouloir passer par la science pour developper le Mystique .

C'est la manière la plus tangible que les êtres humains de notre société ont trouvés pour étudier les phénomènes qu'ils constatent dans leur vie.

Ce sont des experiences personelles qui doivent se concevoir par l individu dans un contexte personel.

Là, je suis d'accord, pourquoi ces expériences ne se déroulent-elles pas chez le sujet qui ingère la drogue, ou, en forêt si ça lui fait plaisir.

En tout cas, je suis plutôt content que ce genre d'études aient lieux, et qui sait, les conclusions qui en ressortiront seront peut-être passionnantes, même plus, d'une certaine utilité...
 
Je le dis a la fin de mon premier post, je suis un peu vache... ca avait pour but de faire reflechir, parce que tout le monde ici est capable de se réjouir de cette info; Mais il faut aussi voir un peu plus loin.

Je suis trés conscient de la valeur de la science pour le developpement de l acceptation de la vraie valeur d un phenomene (ici les psyché) par la société. Juste qu elle a ses limites, et pas qu un peu.

C'est la manière la plus tangible que les êtres humains de notre société ont trouvés pour étudier les phénomènes qu'ils constatent dans leur vie.

Notre société n est pas la seule sur terre; Enfaite, ma critique pour etre vraiment comprise devraient etre accompagné d une bonne page d explication sur ce que je découvre ici en amérique latine ; Mais je suis encore incapable de réalisé un tel résumé. En gros, ca parle d une autre forme d emergence et de developpement de la connaissance... Et c est passionnant !
Justement, dans ce cas ci, ca me parait spécialement pertinent... Je vais voir ce que je peux faire pour faire passer le message :p
 
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