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RECHERCHE DE SENSATIONS ET RÉGULATIONS DES ÉMOTIONS - L’AUTOMÉDICATION DANS LE PHÉNOMÈNE D'ADDICTION
Cet article est en grande partie un copier/coller de paragraphes.[font=Calibri, Helvetica, sans-serif] Source : https://www.cairn.info/revue-psychotrope...ge-121.htm[/font]
Le rôle des émotions dans le développement des conduites de consommation de drogues a de plus en plus été mis en évidence dans des modèles cognitifs et psychobiologiques, et ceci dans deux directions de recherche intriquées :
- D’une part, certaines modalités spécifiques de traitement des émotions pourraient constituer des facteurs de vulnérabilité à l’adoption de conduites de consommation et au développement de dépendances ; dans ce cadre, les dimensions de personnalité témoignant de telles modalités spécifiques de gestion de l’émotion pourraient elles-mêmes être des facteurs de risque.
- D’autre part, les propriétés des substances pourraient être utilisées par les sujets dépendants pour aider à ce traitement des émotions.
Dans ce cadre, Taylor et ses collaborateurs ont rappelé comment les travaux qui comprennent les addictions comme des désordres de la régulation émotionnelle ont pris leur source dans l’hypothèse d’automédication. Par exemple, l’hypothèse serait que certains sujets dépendants aux opiacés soient beaucoup plus à la recherche d’une réduction d’émotions négatives de colère et de rage susceptibles de les pousser à des comportements violents, plutôt qu’à la recherche d’effets euphorisants. D’autres auteurs observent la même recherche d’effets calmants à l’aide des opiacés, ou d’effets au contraire stimulants pour combattre des états de vide et d’ennui ainsi que le manque d’énergie associé aux états dépressifs.
Sur la base de ses recherches et de son expérience clinique, Khantzian développe alors l’hypothèse d’automédication.
Il ajoutera cependant plus tard qu’il existe de grandes variations interindividuelles dans le degré de différenciation émotionnelle, ce qui le mènera à affiner deux hypothèses relatives à la nature des liens entre émotions et addictions, hypothèses qui par ailleurs traversent toutes les théories formalisant ces relations :
- Certains sujets utiliseraient des substances ou des comportements pour réguler leurs émotions et leurs humeurs, des états dépressifs ou anxieux.
- En revanche d’autres sujets n’auraient qu’une perception relativement vague, diffuse, de leurs émotions et sentiments, et utiliseraient les substances pour lutter contre cette confusion (voir angoisse).
La difficulté à identifier et se représenter ses émotions serait palliée par l’introduction dans l’expérience du sujet, d’une forme de souffrance interprétable et compréhensible (par exemple, quand on en prend trop, on sait pourquoi on souffre, cela donne un sens à son malaise). La conduite addictive permettrait alors, dans l’alternance d’états de détresse émotionnelle et de soulagement de cette détresse, la compréhension et la maîtrise de ses émotions (voir besoin de cadre que l'on trouve dans la dépendance).
PROBLÉMATIQUE A IDENTIFIER, DIFFÉRENCIER ET EXPRIMER SES ÉMOTIONS - Confusion entre sensations et émotions
À côté de ces questions débattues à partir des conceptions neuro-physiologiques et cognitives de l’alexithymie (difficulté à identifier, différencier et exprimer ses émotions, ou parfois celles d'autrui), des hypothèses sur sa fonction défensive et son rôle dans les addictions ont été proposées dans des perspectives psychodynamiques, qui rendent compte de la dialectique recherche de sensations/évitement des émotions.
La dimension de fermeture à la fantasmatisation traverse l’ensemble des compréhensions psychanalytiques des addictions, de même que l’intolérance pour l’affect, la forclusion (mécanisme de défense à l'origine du déni) renvoyant au rejet. Au rejet non seulement de la représentation, mais aussi de l’affect intolérable qui lui est lié, conduisant à une désaffectation, une dissociation menant à des des états de dépersonnalisation, déréalisation (voir clivage).
Plutôt qu’une incapacité à ressentir ou à exprimer une émotion, c’est « l’incapacité à contenir un excès d’expérience affective », et à y réfléchir, qui sous-tend ce mode de fonctionnement, retrouvé dans la clinique psychosomatique et dans les solutions addictives. C’est également une fonction de mécanisme interne de pare-excitations face à des affects et/ou à des représentations comportant le risque de mettre en péril une organisation précaire qui est attribuée à l’alexithymie dans les troubles des conduites alimentaires, en lien avec des dysfonctionnements précoces dans la construction d’un moi psychique et somatique (ici le moi est fragile et instable, ne sachant différer les envies et besoins de satisfaction, ou endurer les aléas des situations difficiles rencontrées).
Dans ces perspectives, le recours aux sensations a pour fonction de fermer le psychisme à la dimension imaginaire, à l’expression du fantasme et des conflits internes
La recherche de sensations manifeste un contre-investissement de la réalité externe, les sensations étant ici comprises comme des expériences perceptivo-motrices s’opposant aux affects-émotions qui ne peuvent être vécus car menaçant le narcissisme du sujet (son sentiment d'existence, en lien avec son estime de soi). L’utilisation de la réalité perceptivo-motrice est donc envisagée comme une défense contre une réalité psychique interne menaçante ou défaillante. Les sensations servent à contre-investir le monde interne des émotions à cause du lien aux objets internes qu’elles véhiculent. Néanmoins le recours au perceptif ne constitue pas seulement une évacuation à l’extérieur de ce qui ne peut être toléré à l’intérieur, mais aussi un moyen de contrôle de la réalité interne, susceptible alors d’aider à son travail de représentation et de figuration (donc de signification pour donner du sens à ses affects).
Ce sont des stimulations à tonalité émotionnelle négative qui apportent les niveaux d’activation interne les plus forts (plus on angoisse, plus on s'active anxieusement)
Les amateurs de sensations présentent des seuils élevés de réactivité à la douleur et à la stimulation auditive intense, qu’ils présentent généralement une plus grande tolérance à des quantités intenses de stimulation (faut l'endurer sa nuit devant le mur de son). Se lassant plus vite dès qu’une expérience ou une situation devient répétitive et monotone, ils utilisent plus rapidement toutes les stimulations mises à leur disposition, quitte à développer des addictions par ailleurs. Si aucune ne s’avère disponible, ils auront alors tendance à en développer par imagerie mentale, ce qui peut entrainer une dépendance à ses rêveries.
Ce que suggère l’ensemble de ces études, c’est une préférence pour des stimulations présentant des critères de nouveauté, de variété, et de complexité, quelle que soit leur nature émotionnelle agréable ou douloureuse. C’est la raison pour laquelle il nous a toujours semblé plus rigoureux d’employer le terme de recherche de stimulations avant d’inférer du côté du sujet une quelconque expérience subjective : stimulations dont rien n’est moins sûr qu’elles apportent du plaisir au sujet, stimulations dont rien n’est dit a priori de leur traitement interne et de leur qualification subjective (voir la dimension masochique de l'addiction).