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L'ADDICTION 2 - Une question d'estime de soi ?

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Deleted-1

Guest
ESTIME DE SOI ET ADDICTION


Cet article est une recomposition de paragraphes prélevés dans différents articles, dont les sources sont dans l'introduction.

Les théories de l’attachement semblent apporter beaucoup d’éléments intéressants dans la constitution d’un narcissisme sain (avoir une bonne image de soi, ni trop ni pas assez). C’est pourquoi l'addiction ne peut se penser sans expliquer les liens avec l'estime de soi, lorsqu'il s'agit de comprendre les relations interpersonnelles de l'individu, le monde intérieur des personnes dépendantes, et quels déterminismes sociaux et comportementaux les poussent à des conduites addictives. Cet article sur l'estime de soi nous permettra de mieux comprendre les origines de l'addiction, qui seront traiter dans l'article suivant. Pour ne pas surcharger l'article, je proposerais des liens renvoyant à de précédents articles expliquant plus en détails les concepts abordés.

Mais revoyons quand même quelques bases essentielles
L’estime de soi correspond au sentiment plus ou moins favorable que chaque individu éprouve à l’égard de lui même, la considération et le respect qu’il se porte, et le sentiment qu’il se fait de sa propre valeur en tant que personne (c'est une estimation de soi, entre celui qu'on est et celui qu'on croit être, donc plus le rapport est juste et objectif, mieux l'on s'estime (sans surestimation ni dévalorisation de soi)). L’estime de soi est généralement considérée comme la composante évaluative du concept de soi, concept qui guide les individus dans leurs vies. Le sujet dit narcissique oscille entre une hypertrophie (haute estime de soi fragile, fierté et orgueil) et une carence narcissique (basse estime de soi, sentiment d'infériorité). Alors que le narcissisme sain (bonne estime de soi, avec un narcissisme modéré et équilibré) passe par trois composantes, devant être toutes trois stables, solides et moyennes : - L’amour de soi (un peu de fierté ne fait pas de mal) - La confiance en soi (l'assurance est indispensable à chacun) - L’estime de soi (rester honnête avec soi-même) A propos du narcissisme : - En excès, l'individu se surestime et prend trop la confiance (fierté et orgueil abusé) - Équilibré, l'individu se sent exister sans avoir rien à prouver, il accepte les échecs et ne se vante pas de ses réussites - En manque, l'individu se sent inférieur et se dévalorise (auto-accusation, culpabilité et hontes excessives) Précisons que si les troubles de l’estime de soi et les défaillances narcissiques permettent de comprendre les mécanismes psychologiques de l'addiction, elles ne sont pas des composantes constantes dans la pathologie addictive. Il s'agit d'une grille de lecture comme une autre que nous allons voir plus en détail. DEGRÉ ET SOLIDITÉ DE L'ESTIME DE SOI L’estime qu’un sujet se porte possède trois caractéristiques importantes : son degré, sa stabilité et sa solidité : - Le degré de cette estime n’est jamais d’une justesse et d’une impartialité absolue. Le plus souvent, elle est plutôt favorable et indulgente mais elle peut aussi être exigeante et sévère. Elle reste saine tant qu’elle est modérée et proche de l’objectivité. Elle devient pathologique quand elle s’en écarte trop, soit vers l’inflation (surestimation de soi), soit vers l’effondrement (dévalorisation de soi). - La stabilité : le sujet sain a une appréciation de lui-même constante, il peut, par moment, être fier d’une réussite ou regretter une erreur qu’il a commise, cela entraînant des oscillations passagères de ses affects (réactions émotionnelles normales) mais ne bouleversant pas son appréciation générale. L'aspect pathologique se retrouve quand le sujet est trop fier de lui, ou qu'il se morfond régulièrement pour pas grand chose. - La solidité est un paramètre encore plus important. L’estime de soi est soumise à des facteurs externes puissants : l’échec et la critique l’ébranlent ; à l’opposé, le succès et les compliments la renforcent. Le sujet sain souffre des premiers mais ne s’effondre pas, et apprécie les seconds mais sans illusion, il ne se vante pas en se surestimant. Lorsque le narcissisme est déséquilibré, la solidité de l'estime de soi du sujet est fragile et peut entrainer des comportements excessifs dans les extrêmes. Chez le sujet sain l’estime de soi est relativement adaptée à la réalité, elle est stable, moyenne et solide. L’estime de soi pathologique n’est ni moyenne, ni stable, ni solide. Elle oscille entre les positions extrêmes de l’inflation et de l’écroulement. Instable et fragile, elle est très sensible aux influences extérieures et les oscillations sont extrêmes. Origine du trouble de l'estime de soi Si il s'agit d'un traumatisme ou de l'accumulation de petits traumatismes à l’origine de la perturbation du narcissisme, il est d’origine externe. L’enfant est naturellement confronté aux déceptions apportées par l’environnement qui, ne satisfaisant pas totalement ses besoins, le laisse démuni. Il met alors en jeu des mécanismes de défense (refoulement, déni, idéalisation, etc) qui le rendent capable de supporter cette perte de toute puissance avec un retrait progressif des ses exigences narcissiques (ses envies et besoins affectifs). Mais si la carence est trop brutale, trop intense ou trop fréquente, elle dépasse ses possibilités défensives et provoque une fragilité narcissique. Cette fragilité se manifeste par un trouble de l’estime de soi. Pour comprendre les troubles de l’estime de soi, il est utile de se pencher sur la question psychanalytique du concept de narcissisme. Malgré une diversité théorique, une notion est commune à tous les auteurs : au départ l’enfant a une expérience de plénitude narcissique (il se sent exister sans problème) et, à un moment donné, un traumatisme vient perturber l’évolution ultérieure de son narcissisme et donc de son estime de soi, parce que sa confiance en soi dépend de la qualité de son narcissisme. Ces troubles de l’estime de soi - par inflation ou effondrement – se manifestent par des affects narcissiques que l’on retrouve souvent chez les patients souffrant de conduites addictives. Ainsi, le sujet peut présenter six symptômes en particulier : l’exaltation, la dépersonnalisation, un vécu dépressif, la honte, la rage narcissique, l’indignation ; cette liste n’étant évidemment pas exhaustive. IDÉAL D'ABSOLU ET ESTIME DE SOI - Une question d'image de soi, en soi Plus à propos des problèmes d'estime de soi, il s'agit donc d'un décalage entre le sujet et la perception qu'il a de lui-même : Ce dont il est dépendant, c’est de ce qui lui permet de correspondre à une forme « aliénante » de lui-même, une forme idéalisée, enviée, attendue par l’Autre ou par lui-même (il y en lui un idéal parental intériorisé : " soit comme ça mon enfant "). La rencontre avec le produit a un effet d’insight (solution à un problème), de disparition de la partie insupportable, mais aussi de reconnexion avec lui-même dans l'apparition d’une correspondance à ce que le sujet voudrait être idéalement (forme de déni de ce que l'on ne veut pas voir chez soi, de refoulement de ce qu'on ne veut pas ressentir (angoisses, etc)). La béance narcissique apparaît comme support de toutes les identifications, on se croit être tel que l'on s'idéalise, et l'on se prend pour plus que l'on est. Le sujet dévalorisé et en état de déréliction (solitude morale), bascule lorsqu'il consomme vers un état d’élation (élévation de soi), de sécurité, de bonheur ; alors il éprouve un sentiment momentané de suffisance, de satisfaction immédiate. L’addiction serait alors une forme d’automédication qui permettrait de faire face à la négativité de soi, de dépasser un phénomène déplaisant, la conduite addictive provoquant ainsi une élation et un soulagement. On peut voir ici combien la stabilité et la solidité de l’estime de soi prend toute son importance avec le manque « d’homéostasie » chez le sujet addict. Brusset parle d’une « indifférenciation » qui serait à l’origine d’un moi idéal, il s'agit là de se replier dans une illusion de soi enfantine, pour se protéger d'une réalité menaçante (forme de régression vers un état antérieur, pour protéger son estime de soi, une image idéalisée de soi). Le sujet oscille ainsi entre élation (inflation narcissique, omnipotence) et défaillance narcissique en basculant d’un état à l’autre « grâce » à l’objet d’addiction. L'objet d'addiction est son support, un appui sur lequel il tente de se supporter et ainsi encaisser la dure réalité. L'addiction est donc une forme de régression vers un état de dépendance à son environnement, comme lorsque l'on est enfant (état idéal de déresponsabilisation, d'innocence et d'ignorance rêvé). ABSOLU ET SOI GRANDIOSE - La problématique de se représenter son objet d'addiction Tous les patients soufrant de conduites addictives arrivent à dire qu’il existe bien un état de bascule lors de la prise du produit ; bascule vers un sentiment de bonheur transitoire, vers un état de confort absolu, d’élation… Nous pouvons ainsi appeler cet état, en utilisant les termes de Kohut, le « Soi-grandiose ». On renoue avec sa grandeur passée, lorsqu'on était sa majesté le bébé au centre des attentions, et fort de ses illusions de grandeur (idéal de soi, nostalgie de l'enfance). Addiction = pathologie de l’attachement, du lien, et de la transitionnalité (transition de l'enfance à l'âge adulte, et de tout ce que cela implique au niveau psychique et physique) Le problème est donc de rester attaché à cette illusion de soi grandiose, de chercher à retrouver ce sentiment de toute puissance infantile, au travers d'objets d'addiction comme la drogue, le sexe, le net, les achats, etc (tout ce qui va abaisser notre anxiété, satisfaire nos pulsions). Chez le sujet addict, ce sont les objets d’addiction que nous pouvons rapprocher de ces Soi-Objets, lorsque l'on s'approprie l'objet de sa dépendance (Lou Reed à propos de l'Heroin : "It's my wife, It's my life" ). En effet les Soi-Objets sont indispensables à la survie du sujet souffrant de troubles narcissiques (il en a besoin pour se soutenir), mais ils n’ont pas de représentation précise, or nous savons bien à quel point il est difficile pour le sujet addict de décrire, de se représenter son objet d’addiction. L'addict a fait sien l'objet de son addiction, il est dans une fusion/confusion avec cet objet . Grâce au Soi-Objet – objet d’addiction en l’occurrence – le sujet bascule vers un Soi-grandiose, vers son idéal inscrit en lui, et qu'il cherche à recouvrer dans une volonté d'absolu (retrouver le Soi-Grandiose). Le vide psychique est souvent observé chez les sujets souffrant de conduites addictives (difficulté à mentaliser ses affects ou les choses). Le narcissisme pathologique se caractérise par un moi lacunaire par incomplétude narcissique, une sorte de poche trouée, avec une revendication affective inépuisable, une insatisfaction irréductible, une quémande permanente (le vide n'est jamais comblé). Le sujet a une image de soi faible et fragile qui oscille entre des tentatives d’élation narcissique - parfois grâce à la drogue - et de déréliction. Il y a là une notion de vacuité : « Avec la cocaïne, j’ai trouvé ce qu’il me manquait ».


CONCLUSION

Pour résumer il faut comprendre que lors des tentatives d’élation narcissique, pour retrouver sa confiance en soi le sujet pense qu’il ne craint rien parce qu'il est dans la maîtrise, en effet le produit (drogue/alcool) lui confère un sentiment de toute puissance, de sécurité, de bonheur. Et c'est lui qui gère car il a l'impression de décider quand et quoi consommer, ce qui lui procure une confiance en soi aveugle, factice et précaire, mais qu'il prend pourtant pour acquit le temps de son trip.

Maintenant reste à détailler tout ça pour y voir plus clair :)
 
Il y à aussi un aspect extérieur et biologique.

Le corps à besoin d'exulter ses pulsions avec une connexion au réel. On ne peut pas avoir d'estime de soi en restant allongée plusieurs heures sur un lit à comater sa défonce.

Plus le corps est au repos, plus l'esprit à tendance à fantasmer un "soi-grandiose" pour reprendre ton expression. En cela pour ce qui concerne le phénomène de l'addiction je ne suis pas fervent d'une dualité corps/esprit comme on peut le constater dans la psychanalyse.
 
Yop,

j'ai pas de données biologique mais on parlera bien sur du rôle de l'environnement dans les autres articles oui.

Pour le corps c'est sur qu'il doit satisfaire ses exigences pulsionnelles en partie, et sublimer les autres si il ne veut pas somatiser, et c'est une évidence que resté en ko technique chez soi n'apporte rien de bon lol. Enfin je ne sais pas ce que tu signifies par comater sa défonce, là il est plutôt question d'addiction comme on la vit au jour le jour, donc sans avoir besoin de sa dose pour entretenir sa déconnexion toute les heures. C'est plutôt une vision d'un individu dépendant à un objet drogue, qui y revient régulièrement dans une répétition d'actes (tous les week end par exemple, où tous les soirs, ou tous les mois, ou toutes les dix minutes, etc). Tout dépend de quel produit on parle, de quel type d'individu on parle, et ça peut aussi correspondre à n'importe autre objet d'addiction, genre l'envie de jouer aux jeux-vidéos dès le réveil, ou de rouler à fond avec sa voiture pour se sentir relax au taffe en arrivant.

Le Soi-Grandiose est une expression de Kohut, qu'il faudrait développer, je l'ai placé là pour remplir cet article qu'il faut voir comme une fiche indiquant des possibilités théoriques, enfin tu vois bien que ce n'est pas approfondi. Mais ça permet d'introduire la suite qui sera très psychanalytique (l'article suivant), et après les autres articles seront plus classiques.

Vis à vis de la " dualité corps/esprit comme on peut le constater dans la psychanalyse " je ne vois pas de quoi tu parles, d'autant plus que la branche de Kohut, la Gestalt est le genre de branche psychanalytique à fondre le psychique dans le soma, pour accéder au plus près du réel et de toute ses complexités, bref au plus éloigné de la dualité corps/esprit qui est plutôt scientifique au contraire (genre on cloisonne tout et c'est ça la vérité).
 
Je parlais enfaite plus concrètement de la thérapie (et je parle bien de thérapie, après en théorie toutes les informations sont bonnes à prendre) psychanalytique qui exclue souvent des causes liés au corps pour justifier parfois une sur-analyse du passé et des concepts liés à l'inconscient qui je trouve ne sont si ce n'est pas toujours justifiés (je ne me permettrais pas, n'ayant pas assez de recul sur la question pour en parler sérieusement) au moins souvent peu productive. Après il ne s'agit pas de ne prendre que les infos qu'on veut entendre bien sur (aka le déni du tox), mais de travailler sur toutes les parties dégradés par l'addiction (le corps et l'esprit donc).

C'est comme cela qu'on peut constater aussi que chez grand nombre d'usagers addicts il n'y à jamais un seul problème, mais une problématique globale d'hygiène de vie corporelle, de malbouffe, d'inactivités physiques, de misère sexuelle et même parfois de réelles douleurs chroniques.

La substance particulière et les traumas psychiques ne sont pas la seules causes, mais aussi tous les traumas physiques (et aussi existentielles ((deuil, toc, dépressions)), mais c'est encore une autres histoire) qui ont eu lieu avant et qui sont entretenus (et exacerbés souvent) par l'addiction.

Tout cela pour en venir que parfois, surtout chez les personnes "intellectuelles" ou ayant une tendance à tout intellectualiser (les addicts de classe moyenne et bourgeoise souvent, on voit rarement le vieux prolo accro au pinard arrêter d'aller sur le chantier pour cause d'addiction, et puis il n'a pas les moyens de la séance), il existe un déni total du corps et de ses besoins vitaux (besoins indispensables pour bien faire fonctionner le cerveaux et donc l'introspection nécessaire, ainsi que la mise en pratique d'un éventuel sevrage).

Laura Zerty a dit:
là il est plutôt question d'addiction comme on la vit au jour le jour, donc sans avoir besoin de sa dose pour entretenir sa déconnexion toute les heures. C'est plutôt une vision d'un individu dépendant à un objet drogue, qui y revient régulièrement dans une répétition d'actes (tous les week end par exemple, où tous les soirs, ou tous les mois, ou toutes les dix minutes, etc).

Oui je suis d'accord. Je ne suis pas un relativiste (de l'addiction du moins). Quand on parle d'addiction il faut bien différencier le masturbateur compulsif du mec de 60 piges héroïnomane depuis 30 ans. Ils n'ont pas les mêmes problématiques physiques et sociales, et ce même si la base psychique résultait d'un même trauma. Mais la je fais moi même la distinction que je regrette. (bougre d'esprit cartésien).

Laura Zerty a dit:
Enfin je ne sais pas ce que tu signifies par comater sa défonce

Si tu veux comprendre par la sensation, je crois que Lou Reed communique bien cette ivresse du néant dans la chanson que tu as posté.

Et si je puis me permettre à mon tours d'apporter mon sillon à l'édifice.

[video=youtube]
 
Oki tu parles de thérapie en fait. Vu que j'y connais rien là dedans, je me contente d'un apport théorique comme tu le dis, et je pense qu'il est intéressant de voir les liens avec sa petite enfance, ses parents, et remonter jusqu'à son environnement pour comprendre une addiction (en mettant le soma au centre de l'équation bien sur, tout par du corps que l'on oublie trop souvent).
Merci pour la chanson :)
 
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