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A propos d'ayahuasca...

  • Auteur de la discussion Auteur de la discussion Doctorcito
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Doctorcito

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8/11/04
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Salut,

Lorsqu'il est question d'ayahuasca, il n'est pas inhabituel de me voir rappliquer. Normal, l'ayahuasca, ses pratiques et les discours de membres d'instances ou institution qu'elle mobilise en Occident (par ex. juges, experts légaux, scientifiques) constituent mon sujet de recherche depuis 6-7 ans (et c'est bien de recherche dite académique ou universitaire qu'il s'agit). Je peux donc dire aujourd'hui sans exagération ou prétention que l'ayahuasca est un sujet que je connais bien, et qu'il est vraiment compliqué.

Les témoignages et discussions sur ce forum à son propos m'ont un peu décontenancé. A dire vrai je ne sais pas très bien comment m'y prendre pour communiquer avec vous sans froisser au passage quelques susceptibilités, ce que je ne souhaite pas. Mettons que si tout le monde y met un peu du sien on devrait y arriver... (dans la mesure où cela vous intéresse bien sûr).

Bon, il y a deux points à propos desquels il vaut mieux que je sois clair dès le départ : je ne viens pas ici pour promouvoir ou encourager quelque pratique que ce soit et je me montrerai réservé sur tout ce qui touche à la préparation d'infusions ayahuasca tant que la justice n'aura pas tranché au sujet du statut légal de l'ayahuasca en France.

En attendant, ceux qui veulent en savoir plus sur ce dernier point et lisent l'anglais peuvent aller consulter avec profit ce qui se fait de mieux sur le web, que l'on trouve sur ce Forum.

Bon, je vais commencer par une remarque pour telodo :
si le but est de découvrir l'ayahuasca, il est un peu dommage d'ajouter des graines de Peganum harmala à la liane Banisteriopsis caapi. En effet, il ne s'agit pas d'avaler un IMAO-A (autant gober du moclobémide) mais d'entrer dans un rapport de connaissance intime avec une plante, à bien des points de vue unique en son genre. Or il existe des différences notables entre la liane et l'harmel, différences chimiques, pharmacologiques et expérientielles. Chacune des plantes a sa propre "personnalité". Pourquoi alors "brouiller le message" en les mélangeant ?
 
Bonne intervention et remarque pertinente !

On dit que "Deux tetes valent mieux qu'une...". Donc une troisieme tete ne serait elle pas la bienvenue ?

Effectivement je comprend ton intervention sur ce forum a propos de l'Ayahuasca. Ici nous en parlons comme ci c'etait un vulgaire billet de train, qu'on decouvrirait plein de choses une fois qu'on sera dans son "wagon" ...etc.

IL ne faut vraiment pas prendre l'Ayahuasca a la legere. J'ai fait une fois l'experience (j'avais ajouter le Peganum Harmala, car tout simplement j'avais lu des documents comme quoi ces graines entraient dans la preparation de la boisson). Je pense pouvoir dire que l'Ayahuasca n'est pas une simple boisson, un Esprit est vraiment a l'interieur et c'est cet Esprit qui communique avec vous tout a long du voyage "spirituel". Si cet Esprit vous "accepte" il vous communiquera des connaissances...

Pour en revenir aux personnalites des plantes... Y a t'il vraiment UNE boisson dites 'Ayahuasca' ? Avec une recette bien definie ? Les peuples Amazoniens n'ont-ils pas chacuns leur croyance a propos de cette plante et ne la prepare t'il pas differement les uns des autres ?
 
Il y a autant de recette d'Ayahuasca qu'il y a de tribu dit-on. Outre les deux éléments de base (B.Caapi+P.Viridis) il est souvent ajouter d'autre plantes suivant ce que le shaman veut soigner (tabac sauvage, Brugmansia, datura, ... ).
Je pense que cette boisson est une clé pour ouvrir des portes intérieures, en aucun cas il ne s'agit d'un truc festif à gober à la légère. Voilà 20 ans que je prends des produits et je ne me sens prêt que maintenant pour essayer. Soyez prudent ... ces produits ont été interdits essentiellement à cause d'abus chez des jeunes personnes. (cf. l'histoire de Razer et de son pote ... 12 gouttes ... faut être malade). :frown:
 
telodo :
Y a t'il vraiment UNE boisson dites 'Ayahuasca' ? Avec une recette bien definie ? Les peuples Amazoniens n'ont-ils pas chacuns leur croyance a propos de cette plante et ne la prepare t'il pas differement les uns des autres ?

silmendil :
Il y a autant de recette d'Ayahuasca qu'il y a de tribu dit-on.

Oui, la variété des plantes alliées et des modalités de préparation indiennes et métisses est sidérante. Toutefois le point commun de toutes les infusions ayahuasca, leur base, est Banisteriopsis caapi (ou plus précisément une de ses variétés).

Certains groupes indiens, comme les Tukano de Colombie orientale ou les Esse'eja situés à la frontière entre Pérou et Brésil, n'utilisent d'ailleurs que la liane. D'autre part, dans les langues indiennes ce sont les termes qui servent à désigner la liane qui sont généralement employés pour nommer les mélanges : ayahuasca, caapi, natem, kamarampi, nishi pae, etc. (au passage une précision pour silmendil : "tribu" correspond à une organisation sociale et politique assez précise en anthropologie et nombre de peuples indigènes d'Amazonie ne présentent pas ce type d'organisation. Le plus souvent il s'agit de "groupes" ou de "chefferies". "Groupe" est l'appellation générique la plus adéquate).

On peut aussi se rappeler que le terme ayahuasca lui-même peut être correctement traduit du quechua en "liane des esprits" ou "liane avec une âme" (huasca signifie "corde" ou "liane").

Une des toutes premières choses à réaliser lorsqu'on souhaite découvrir l'ayahuasca est ce rôle central, primordial de la liane : beaucoup disent qu'en elle réside la "force" du breuvage ou encore qu'elle est l'élément qui "ancre dans la terre". Mon expérience de terrain m'a appris que plusieurs des effets attribués aux mélanges sont déjà présents avec la liane seule.

Accorder toute l'importance qu'elle mérite à cette liane signifie concrètement d'être attentif à sa qualité, tout spécialement lorsqu'on souhaite préparer soi-même une ayahuasca. Tous les pratiquants expérimentés s'accordent à dire que la liane pulvérisée ou finement déchiquetée est à fuir : l'idéal ce sont les tronçons, que l'on écrase soi-même, ou, si l'on est sûr de la qualité, la liane grossièrement déchiquetée. Dans tous les cas la variété et la provenance doivent être connues/affichées (la variété cielo de la région de Pucallpa au Pérou a une très bonne réputation, à mon avis justifiée).
 
Merci de toutes ces précisions utiles ! Heu ... tu n'organiserai pas une WE découverte par hasard ? :grin:
 
L'Ayahuasca prepare par le Chaman est tres differente de celle preparer a la maison. Nous n'avons pas de produit frais... Nous n'avons pas les connaissances necessaires pour en faire une bonne preparation... Nous ne faisons pas de rituel... Bref, nous ne faisons qu'etablir une premiere rencontre avec cette liane. Pour ma part, des que j'en aurais les moyens financiers, je souhaiterais partir au Perou pour une duree indeterminee (1 semaine ? 1 mois ? 1 an ?) et faire la connaissance de ces peuples qui peuplent le bassin Amazonnien.
 
Certains groupes indiens, comme les Tukano de Colombie orientale ou les Esse'eja situés à la frontière entre Pérou et Brésil, n'utilisent d'ailleurs que la liane.

Je pensais que les tryptamines contenue dans la liane n'étaient pas actives oralement sans la présence d'une autre plante (inhibiteur MAO) ?
 
Je suis d'accord avec telodo
une premiere approche peut etre en elle meme tres positive, tres instructive, meme si elle ne respecte pas les traditions liées a cette boisson...
 
telodo :
des que j'en aurais les moyens financiers, je souhaiterais partir au Perou pour une duree indeterminee (1 semaine ? 1 mois ? 1 an ?) et faire la connaissance de ces peuples qui peuplent le bassin Amazonnien.
Un beau projet que je te souhaite de mener à bien.

L'Ayahuasca prepare par le Chaman est tres differente de celle preparer a la maison. Nous n'avons pas de produit frais... Nous n'avons pas les connaissances necessaires pour en faire une bonne preparation... Nous ne faisons pas de rituel...
Il y a plusieurs thèmes enchevêtrés dans ce que tu dis là. Grosso modo j'en discerne trois principaux :
- l'un est ta représentation de type contraste ou opposition entre un "nous" et un "eux" ("chamane", "peuples d'Amazonie"), les deux termes de l'opposition étant plutôt abstraits, laissés dans le flou. Cela m'intéresse que tu développes ce thème, si cela te convient (par ex. comment te représentes-tu ce "nous" et ce "eux", à partir de quoi ?)

- Le second, que tu lies étroitement au premier et qu'il me paraît possible de traiter séparément sans perdre de vue l'ensemble concerne l'aspect pratique, le savoir-faire lié aux préparations. Réussir une ayahuasca digne de ce nom avec des plantes séchées de qualité est tout à fait possible et à la portée de tous.

J'y ai réfléchi et je crois que je vais partager mes connaissances à ce sujet avec celles et ceux qui le souhaitent. Ma position est la suivante : ma tâche d'ethnoscientifique n'est ni d'encourager ni de décourager de nouvelles pratiques ayahuasca mais de les décrire et de les réfléchir. En revanche, à partir du moment où ces pratiques existent, c'est à dire que certains d'entre vous préparent et ingèrent de l'ayahuasca ou un analogue, le "bout" de moi qui est thérapeute (il y a plusieurs cordes à mon arc) me dit que, dans la mesure de mes moyens et du raisonnable, je peux contribuer à 1) faire en sorte que ces expériences prennent sens, 2) optimiser leur accomplissement pratique, 3) les rendre plus sûres et enrichissantes (si un ou plusieurs autres forum(s) francophone(s) vous paraissent aussi ou plus approprié(s) que celui-ci pour cela, ne vous privez-pas de me le(s) faire connaître).

- Le dernier thème, qui d'une certaine manière lie les deux autres, est celui des rituels. Connaissant maintenant assez bien tant l'histoire des pratiques ayahuasca que ce qui se fait dans le monde aujourd'hui, mon opinion est qu'il n'y a aucun complexe à faire quant au type de rituel : le tout est de trouver celui dans lequel on se sent bien, quitte à l'inventer (ou le réinventer). Bien sûr les rituels ne prennent tout leur sens qu'en groupe mais beaucoup de ceux qui pratiquent seuls (tout en échangeant par l'Internet) ont des rituels à eux, aussi bien pour la préparation que pour la "session".

Personnellement, j'ai pris une fois de l'ayahuasca seul, pour comparer. J'ai trouvé cela beaucoup moins intéressant et enrichissant qu'en groupe. Just my opinion...

JO :
Je pensais que les tryptamines contenue dans la liane n'étaient pas actives oralement sans la présence d'une autre plante (inhibiteur MAO) ?
C'est l'inverse : c'est la N,N-diméthyltryptamine contenue dans les feuilles de Psychotria viridis, de Diplopterys cabrerana ou dans les racines de Mimosa hostilis qui est inactive par voie orale sans l'apport des bêta-carbolines de la liane, en particulier de l'harmine.
 
C'est l'inverse : c'est la N,N-diméthyltryptamine contenue dans les feuilles de Psychotria viridis, de Diplopterys cabrerana ou dans les racines de Mimosa hostilis qui est inactive par voie orale sans l'apport des bêta-carbolines de la liane, en particulier de l'harmine.

Autant pour moi, en plus je le savais...

Bon alors, pr noel, panoramix nous prepare un grand ayahuasca, on se retrouve tous ensemble qq part, pendant plusieurs jours, pour se preparer mentalement physiquement et :pint:
et apres on en cause ts ensemble
 
Je met une barriere tres net entre "nous" et "eux". Je developpe :

"Nous" : Nous vivons dans une grande societe, nous avons une hierarchie politique, nous avons un systeme judiciaire. Nous utilisons la technologie et nous evoluons avec la technologie. Nous avons des bases de vie, des reperes, des principes et donc une mentalite bien particuliere. En option j'ajouterais meme que notre technologie a depasse notre humanite !

"Eux" : Ils vivent general par petit groupe, sans vrai organisation politique (un simple chef), ni systeme judiciaire (qui est aussi le chef). Ils vivent au contact de la nature et depandent d'elle. Leurs vision de la Nature n'est donc pas la meme que nous, pour eux la Nature tiens une grande place !

La difference entre "nou" et "eux" est tout simplement le point d'attache. Notre point d'attache est la 'technologie' tandis que pour eux ce serait la 'nature'. Nous possedons autant de medicament que eux possedent de plantes. Vois-tu le contraste que j'essaye de marquer ?



En ce qui concerne la preparation de l'Ayahuasca... Pour un simple internaute comme moi, je vais aller sur un site et Ayahuasca cette fameuse liane (Banisteriopsis Caapi). Le probleme c'est que cette liane se presente sous forme de poudre. C'est un peu comme le pain de grande surface, il n'est pas bon ! On prefere l'acheter chez un vrai boulanger. Pour la liane c'est la meme chose, c'est mieux d'utiliser des produits frais la "saveur" (la puissance) n'est pas la meme... Voila pourquoi je suppose qu'ils nous est impossible de faire un "Ayahuasca" 'authentique'.



En ce qui concerne les rituels... Je suis tout a fait d'accords chacuns peut avoir le sien ! Mais je sais que je ne crorais pas en mes gestes et en mes paroles si je fais un quelquonque rituel chez moi. L'Ayahuasca chez soit est totalement different de l'Ayahuasca fait en groupe en plein de milieu de la foret et de la nuit. C'est pour cela que le faire a la maison, ce n'est que faire une petite approche ou on pourrait meme dire etablir un premier contact avec celle-ci.

Pour ma part l'Ayahuasca est une boisson mystique. Elle renferme beaucoup de croyance, de connaissance, elle a aussi une histoire. Elle est l'opposition meme de l'Homme civilise, celui qui pollus son milieu de vie et celui qui extermine les animaux. Pour moi l'Ayahuasca est un peu un livre d'or qui denonce ces actes de destruction massive de notre environnement. En induisant les effets de l'Ayahuasca j'ai appris beaucoup, ou du moins les "Etres" avec qui j'ai discuter et je dirais plutot les "Etres" que j'ai ecoute m'en ont appris beaucoup sur moi meme. Moi meme, en tant qu'Homme. Mais je pense en avoir plus appris sur l'environnement dans lequel je vis et sur ses realites. Donc en resume pour moi l'Ayahuasca est un peu un retour aux sources, et m'a aussi "lave" de tous mes mauvais actes et mauvaises pensees. Ca m'a permis d'avoir une ouverture d'esprit plsu large, d'acquerir un peu plsu de sagesse, et de SAVOIR que je ne suis qu'un SIMPLE HOMME. Ma vie ne vaut pas plus que celle d'un 'tigre des neiges' vivant en Syberie. Chaques Etres vivant a le droit de vie et l'un ne le merite pas plus que l'autre. Bien trop souvent les Hommes se superiorisent et pensent qu'ils sont plus precieux qu'un animal. Mais l'animal lui ne tu que pour manger, le reste du temps il est en paux avec lui meme...
 
Cela dit "nous" étions comme "eux" il n'y a pas si longtemps. Et aujourd'hui nous sommes encore à 99.99 % identiques. Les références ne sont que de l'éducation ... du vernis. Un bébé amazonien élevé ici sera formaté en européen ... mais il pourra toujours faire le chemin vers un retour à ses origines. Et un petit européen perdu dans la jungle deviendra un excellent chamane ... La clé reste la connaissance.

l'ayahuasca est une de ces petites clés. Selon moi ces clés permettent d'entrer en contact avec son inconscient et son subconscient. C'est comme si on pouvait changer la longueur d'onde de nos récepteurs. D'autre part je suis persuadé qu'il y a autre chose encore ... pourquoi pas un moyen de se souvenir de ce que nos brins d'ADN ont vécu ? :think:

Et prendre cette boisson mystique - et mythique - pour se payer du bon temps est une illusion. C'est même une insulte. Sans compter avec les risuqes importants d'être incapable de gérer sans s'être bien préparer à l'avance.
 
Re ! Bien je vais me lancer dans la préparation de la potion. J'ai un once de B.Caapi "cielo" (jaune) et une once P.Viridis, séchés tous les deux. Est-ce suffisant ? Dois-je rajouter du M.Hostilis (j'ai 16 grammes).

Je vais également laisser chaque ingrédient macéré 24 heures dans de l'eau avant de commencer la cuisson. Je ferai trois ébullition de 3 heures. Est-il mieux de séparer les cuissons ou peut-on tout mélanger sans autre ?

Merci à toi Doctorcito ... :truce:
 
Pour ma part je vais induire les effets de l'Ayahuasca une nouvelle fois pour Noel. Lors de mon premier 'voyage' (a paques), ils m'ont accepte et m'ont dit que je devais revenir. Revenir avec 'plus' de boisson...
 
Merci telodo pour tes développements : c'est fort intéressant et j'y reviendrai.

Dans un premier temps c'est sur le thème des préparations que je vais intervenir puisqu'il est devenu d'une actualité brûlante avec silmendil.

Quelques considérations générales d'abord :

1) La notion d'"ayahuasca standard"
Au cours des 80 dernières années, les pratiques ayahuasca ont connu une expansion sans précédent. D'une part on a assisté à l'apparition et au développement de nouvelles pratiques, parfois appellées néoreligieuses, dans des zones géographiques et culturelles de plus en plus éloignées des contextes indigènes (notamment au Brésil), de l'autre un nombre croissant de citadins occidentaux (ou vivant à l'occidentale) s'intéressent aux pratiques ayahuasca et y prennent part.

Complémentaires et liés, ces deux phénomènes ont entraîné ce qu'il me paraît judicieux de nommer une standardisation des préparations ayahuasca : le mélange tiges de B. caapi + feuilles de P. viridis (plus rarement de D. cabrerana; ou encore l'écorce des racines de M. hostilischez les Occidentaux branchés "psychonautisme" [acronyme en VO : mhrb, en VF : ermh]) s'est imposé un peu partout, y compris chez des Indiens, comme modèle, comme standard de l'ayahuasca. C'est pourquoi il me semble justifié de parler d'ayahuasca ou de mélange "standard" lorsqu'il est question de cette version et d’employer le terme ayahuasca seul quand il s’agit d’évoquer les préparations ayahuasca dans toute leur diversité.

2) Un peu de pharmacocinétique
Les résultats convergents de récentes expérimentations pharmacologiques, que ce soit avec des animaux humains et non-humains ou avec des préparations in vitro, confirment ce que certains pratiquants éclairés soupçonnaient depuis quelques années : l’ayahuasca standard est très sensible au métabolisme individuel.

En effet, à l’exception de la tétrahydroharmine (THH), les bêta-carbolines contenues dans la liane sont largement métabolisées dans le foie par plusieurs enzymes (parfois appellées "de détoxification") dont la variabilité interindividuelle et interethnique est notoire. C'est tout particulièrement le cas avec l'harmine, l'alcaloïde dominant dans caapi : selon le profil métabolique de chacun, elle peut être plus ou moins complètement et rapidement métabolisée en harmol dans le foie. Cela va bien entendu retentir sur sa capacité à inhiber la métabolisation de la DMT par la monoamine oxydase-A, également dans le foie. La même chose vaut, en un peu moins prononcé, pour l'harmaline, qui de toutes façons est souvent présente en quantités à la limite du négligeable dans les préparations (c'est une des différences majeures avec l'harmel).

Maintenant, à propos de la préparation de silmendil :
J'ai un once de B.Caapi "cielo" (jaune) et une once P.Viridis, séchés tous les deux. Est-ce suffisant ? Dois-je rajouter du M.Hostilis (j'ai 16 grammes).
Est-il besoin de rappeller qu’en dehors des USA le système métrique a été universellement adopté ?
Tu as donc une trentaine de grammes de cielo ayahuasca et de feuilles de chacruna. En raison du point 2) traité ci-dessus, il est difficile de te répondre avec certitude en ce qui concerne la liane. Mettons que 30 g de caapi représentent une quantité suffisante pour les personnes qui ne métabolisent pas trop et trop rapidement l’harmine. C’est en fait le bas de la fourchette : la dose optimale de caapi pour un mélange standard se situe entre 30 et 80 g, en fonction du métabolisme de chacun, 50 g constituant une dose qui convient pour 70-75 % des personnes.

Trente grammes de P. viridis est une dose un peu juste quand on ne connaît pas la qualité de la plante : 40-50 g constituent l'optimum. En revanche, 16 g d'ermh représentent une dose très forte : 8-10 g sont considérés comme tout à fait satisfaisant par la plupart des pratiquants expérimentés. Additionner 30 g de P. viridis à 16 g d'ermh relèverait de l'irresponsabilité pour une expérience non supervisée par une personne expérimentée.

Avec les feuilles séchées, il est fortement conseillé de procéder à une pulvérisation préalable : moulin à café ou mixer un peu costaud font l'affaire.

Quand on dispose de plantes séchées, souvent onéreuses, utiliser de l'eau distillée ou déminéralisée légèrement acidifiée permet d'améliorer le rendement de la préparation. Pour 50 g de tiges de caapi grossièrement déchiquetées + 50 de feuilles de chacruna pulvérisées, une macération d'une vingtaine d'heures dans 1,5 litre d'eau déminéralisée à laquelle on aura ajuté 1 % de vinaigre de cidre (bio de préférence) convient parfaitement.

La cuisson peut se faire en plusieurs étapes : après avoir transvasé le tout dans un récipient en céramique ou en inox (alu à éviter), faire boullir à très petit feu jusqu'à réduire au quart du volume initial. Transvaser (avec filtration) le liquide dans autre récipient (un bocal à conserve en verre est idéal). Ajouter 0,5 l d'eau déminéralisée au matériau végétal resté dans l'ustensile de cuisson et répéter le type de cuisson/réduction. Une troisème étape est optionnelle. Une fois cette étape accomplie, se débarrasser des restes végétaux et mettre l'ensemble du jus de cuisson, filtré, à réduire à la limite de l'ébullition jusqu'à obtention d'un volume de 60-80 ml (un grand verre à liqueur ou les 2/3 d'un verre à thé à la menthe). Dans tous les cas il est préférable que le volume final ne dépasse pas les 100 ml, sous peine d'augmenter la probabilité de vomissement prématuré (plus le volume est important, plus l'estomac est sollicité).


Pour finir quelques recommandations pratiques en vrac :

- Faire macérer et cuisiner séparément ou ensemble ?
Une bonne ayahuasca standard se fait en mélangeant les plantes dès le départ. Toutefois lorsqu'on débute, avec des ressources limitées, il peut être intéressant de séparer les préparations pour indentifier la dose de caapi qui convient à chacun.

- Jeûner ou pas avant et après ?
Jeûner complètement le jour de la prise n'est pas forcément une bonne idée. Il vaut mieux être attentif à ce que l'on mange pendant 2-3 jours avant en privilégiant légumes, fruits, riz, pâtes, volaille ou poisson grillés, et manger quelque chose 4 heures avant la prise (des fruits et/ou des légumes).

La prise est a privilégier en début de soirée (19-21 h), Il est recommandé de ne rien absorber jusqu'au lendemain 11 h. Là encore, consommer de préférence des fruits et éviter les aliments contenant de la tyramine (c'est après que c'est important) comme salami, sauce bolognaise et parmesan, bière, etc.

- Vomir ?
Une fois que les effets deviennent perceptibles, il n'y a plus à redouter de vomir, bien au contraire : vomir (prévoir un seau ou équivalent à cet effet) fait intégralement partie de l'expérience ayahuasca, appellée non sans raison "la purge" en castillan. Car on ne vomit ni automatiquement, ni n'importe quand : aussi étrange que cela paraîsse, les épisodes de vomissement sont liés à des images ou des contenus psychiques négatifs, que littéralement on expulse. Cela peut faire un bien fou…

- Que faire si cela devient "trop fort" ?
Comme pour d'autres substances visonnaires, la meilleure attitude est de se laisser traverser par ce qui se passe, d'éviter de résister (ce qui n'empêche pas, le cas échéant, d'affronter par tous les moyens des entités imaginales dont les intentions paraissent clairement hostiles). Ne pas hésiter à chanter, fredonner ou siffloter : les sons constituent d'extraordinaires moyens de contrôle et de guidage.
 
Cependant si le voyage s'annonce mal, il faut etre fort et endurer ce mal etre qui ne peut durer que quelques minutes ou quelques heures (le temps n'existe plus sous Ayahuasca). Je me souviens que dans mon voyage, au tout debut la Plante m'a montre de quoi elle etait capable. Elle m'a bien dit qu'a present c'etait elle qui controlait (qui "me" controlait ?)... Ensuite elle m'a dit que je n'avais rien a craindre, et la les "Serpents" (des sorte de Leviathans, ils etaient deux) m'ont dit qu'ils m'acceptaient et qu'il me recompenseraient de mon long trajet (du fait que j'ai fait le premier pas vers eux) et ils m'ont appris certaines choses tout en me disant bien que ca ne representerait qu'un infime pourcentage de la "Vie" et que je devrais revenir prepare a savoir d'autre veritee... Certaines personnes peuvent avoir peur de vivre ce genre de passage mais il faut aller plus loni que notre peur, il faut avoir confiance en soit. Et si vraiment c'est tres dur, insupportable et que l'on se sent 'mourir' eh bien je conseillerais de vomir... Si biensur vous en etes encore capable (a rappeler que pendant 3h je ne pouvais plus utiliser mon corps, j'etais allonge sans bouge toujorus dans la meme position). La boisson restante dans le ventre sera alors expulse et donc votre Voyage se terminera plsu tot que prevus (c'est la digestion de la boisson qui vous fait faire ce Voyage, des qu'il n'y aura plus rien dans le ventre alors il n'y aura pas d'alcaloides supplementaires qui viendront se cumuler a ceux deja absorbes !?). C'est mon hypothese pour s'en sortir plus vite...
 
telodo :
Elle [la plante] m'a bien dit qu'a present c'etait elle qui controlait (qui "me" controlait ?)
Tous les chamanes et ayahuasqueros insistent sur le fait qu'il est important de garder le contrôle sur les plantes : ce sont les humains qui ont à maîtriser ou s'allier les esprits des plantes, non l'inverse.

si vraiment c'est tres dur, insupportable et que l'on se sent 'mourir' eh bien je conseillerais de vomir... [...] La boisson restante dans le ventre sera alors expulse et donc votre Voyage se terminera plsu tot que prevus
A partir du moment où les effets se sont pleinement déployés, vomir ne change rien quant à la durée de l'expérience. En revanche cela modifie généralement son intensité et sa tonalité émotionnelle : vomir libère de phases sombres, où l'on se sent oppressé, rend les visions plus nettes et permet souvent d'accéder à un niveau plus élevé, plus spirituel.

Se sentir "mourir" est un vécu initiatique : l'expérience de mort/renaissance est une expérience chamanique par excellence. Elle n'est pas donnée à tout le monde et est à accueillir comme un inestimable présent : tout ce qui fait évoluer le rapport d'évitement, de fuite vis-à-vis de la représentation de la mort (de notre mort) que nous cultivons en Occident est une bénédiction. Apprendre que l'on peut vivre en esprit sa propre mort sans en mourir est une leçon mémorable.
 
Mais comment reussire a garder le controle sur la plante ? L'Homme ne peut pas toujours TOUS maitriser ! (On maitrise deja la Nature mais ont depand aussi d'Elle !) Enfin, je suis conscient apres ta reflexion que garder un pouvoir sur la plante est necessaire mais son pouvoir est enorme. C'est un peu comme nous plonger dans un tout autre Monde ou tous est different et immediatement maitriser ce "Monde". C'est pour cela que des Chamanes accompagnent donc des personnes induisant les effets de l'Ayahuasca, pour indirectement avoir un controle sur la plante... Je commence a mieux comprendre le deroulement !
 
C'est un peu comme nous plonger dans un tout autre Monde ou tous est different et immediatement maitriser ce "Monde". C'est pour cela que des Chamanes accompagnent donc des personnes induisant les effets de l'Ayahuasca, pour indirectement avoir un controle sur la plante... Je commence a mieux comprendre le deroulement !
C'est ça : avec ses chants, ses sifflements, son hochet de feuilles (la shacapa), sa gestuelle, le ou la chamane module, guide, oriente aussi bien le déroulement, le tempo de la session que la tonalité émotionnelle voire le contenu des visions.

Pour eux les plantes sont des alliés dont on peut recevoir et apprendre beaucoup, cette alliance conférant du pouvoir. Mais ce ne sont pas des maîtres auxquels on se soummet ou s'abandonne : un(e) chamane perçu(e) comme "possédé(e)" par une plante n'aurait plus aucun crédit.

Cette maîtrise et ce contrôle ne sont pas du même ordre que la philosophie de domination de la Nature répandue en Occident : ils ne sont pas absolus et s'accompagnent de la nécessité de respecter et se concilier les esprits des plantes qui confèrent du pouvoir. Toutes sortes de précautions rituelles sont observées à cet effet. Par exemple un bon ayahuasquero laissera une offrande de tabac au pied de l'arbre où il a coupé de la liane.
 
Je comprends mieux. Je n'ai pas senti d'hostilite particuliere dans la Plante, mais ce n'est pas pour sa qu'il faut se pose en soumission devant Elle... On doit la prendre comme un compagnon de route, un allies comme tu le dis. Le Voyage ne peut donc qu'etre meilleurs alors. J'etais un peu perdu dans ma "Science", merci de ta chandelle ! Cela m'aidera beaucoup pour mes eventuels prochains Voyages.
 
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