Schrödinger
Neurotransmetteur
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Il y a deux semaines, Kaos et moi avons découvert le surprenant combo 2C-D + THC. Nous rassemblons tous les deux notre TR respectif au sein de ce thread pour que l'on puisse en discuter plus facilement, mon post sera donc suivi du TR de Kaos. Bonne lecture amigos !
L’avant
J’ai initié Kaos au 2C-D il y a quelques mois de cela avec un trip à 2x30mg, accompagné d’un petit joint. J’avais été marqué par la dose de 60mg, et le joint avait un peu relancé les visuels, mais rien de plus.
Depuis, on a eu envie de tripper à nouveau ensemble, et on a fini par trouver un week-end pour qu’il vienne chez moi. De mon côté, j’ai fini mes partiels le jour-même, je suis un peu fatigué par une semaine de révisions intenses mais j’ai la satisfaction d’être tombé sur le seul chapitre que j’avais révisé dans une matière à gros coefficient, et d’avoir plutôt bien réussi l’ensemble alors que je n’avais pratiquement pas été en cours du semestre. On se retrouve donc ce week-end pour fêter la fin de mon année.
Les conditions
Set : Je suis un peu fatigué mais euphorique d’avoir terminé mon année, et content de revoir mon pote, j’ai une bonne envie de fêter tout ça.
Setting : Kaos et moi, dans mon petit 9m2, avec mon Mac pour mettre de la musique. On a très très bien mangé, et bu à peu près l’équivalent de deux pintes chacun.
Dose : 50mg chacun et un joint de sa weed.
Le trip
20h (T - 4h45) : Kaos arrive vers 20h, on se pose chez moi avec un peu de musique pour discuter, et il sort un pochon de weed alors qu’il m’avait dit n’avoir trouvé que du shit, c’est ma petite surprise ! J’apprécie d’autant plus le cadeau qu’il m’annonce qu’elle est très très bonne. Je roule un spliff pour plus tard et on file rejoindre un couple d’amis en ville pour une grosse bouffe pour fêter la fin des partiels.
23h (T - 1h45) : Nos amis rentrent chez eux, on décide d’aller boire un coup pour démarrer la soirée. On descend quelques verres, on se balade un peu autour pour voir s’il y a du monde, puis on finit par rentrer à l’appart.
0h (T - 45min) : Arrivés chez moi, on installe son matelas, puis je lui demande quelle dose il veut. On se met d’accord sur 50mg chacun, en se laissant la possibilité de redropper derrière si l’envie nous en prend, on a toute la journée du lendemain pour se reposer.
0h45 (T = 0) : On prend tous les deux notre para de 50mg. On continue de discuter tranquillement en regardant des clips.
1h30 (T + 45min) : Kaos me dit que ça commence à monter. De mon côté, je ne sens vraiment pas grand-chose. Compte tenu de nos gabarits, ça devrait plutôt être l’inverse ! Je suis un peu blasé tout en en riant, comme souvent lorsque j’ai bu. Je plaisante pas mal, avec un air désabusé.
2h (T + 1h15) : Je sens enfin la montée, alors que Kaos commence à être bien dedans. On s’amuse sur une vidéo où je crois discerner des lettres derrière la couverture de l’album qui sert d’illustration à la musique : est-ce que c’est réel, de la poussière sur l’écran, des visuels ? Je bidouillerais l’exposition de l’image demain, pour le moment Kaos part plutôt mal. Je lui attrape une feuille pour qu’il note ce qui lui passe par la tête. Il a l’air d’avoir un peu de mal à encaisser la montée, je le rassure en lui disant qu’on n’a rien à craindre et juste à profiter.
2h30 (T + 1h45) : Je suis arrivé au plateau, les visuels sont là, les mécanismes de ma pensée sont altérés aussi, mais je gère facilement. Je me fais un peu le sitter de mon ami qui se ressaisit plusieurs fois pour ne pas partir en bad, je le rassure et j’essaie de lui changer les idées.
2h45 (T + 2h) : Pour le faire sortir un peu de son état d’angoisse, je lui mets l’album de Kilo Kish, du chillout tranquille avec une voix bien sexy. Ca a l’air d’aller mieux de son côté, je m’allume le joint que j’ai roulé plus tôt.
2h50 (T + 2h05) : Je lui tends le joint et immédiatement, je sens que les molécules font leur chemin vers mon cerveau. Mais très rapidement, je me sens partir. Le THC relance avec une force incroyable mon trip. Tout l’appart se met à tourner autour de moi, les visuels envahissent mon champ de vision et je sens que je ne maîtrise plus rien. Je suis très surpris par la puissance de la synergie, et je flippe pour mon ami, j’ai peur qu’il reparte en bad et que je sois incapable de gérer quoique ce soit.
J’essaie de me ressaisir mais les effets continuent de monter. J’ai les yeux écarquillés et je sens des fourmillements dans tout mon corps, j’ai l’impression de me détacher du lieu où je suis, d’être le centre d’un vortex d’images et de sons, de flotter dans le vide. Je regarde Kaos qui a le joint entre les lèvres, et je me rends compte qu’il ne sait pas ce qui l’attend, j’ai envie de lui dire d’arrêter, j’ai peur qu’il réagisse très mal face à ce retournement complet du trip.
Je reprends le joint avec l’idée d’en fumer quelques taffes avant de l’éteindre. Mais il a l’air de réagir plutôt positivement. De mon côté, je suis scotché par la puissance de la chose, il le voit et me regarde avec un air de « Je te l’avais bien dit ! » bienveillant. J’acquiesce en disant que c’est vraiment un truc de fou. On va tirer encore un peu sur le joint avant de le reposer. Voyant que ce joint est un tournant capital du trip, je lui demande de noter l’heure, je regarde rapidement mon mac et, ayant quelques difficultés pour m’exprimer, je lui dis bêtement « Moins cinq ». On a beaucoup ri par la suite en se rendant compte qu’on n’avait absolument pas noté de quelle heure il était moins cinq !
A partir de là, je n’ai plus aucune chronologie. Une fois la montée du THC prise dans la gueule, je suis perché sur un plateau très très très haut, je me demande si ce n’est pas l’effet légèrement dissociatif du cannabis que je ressens. Nous sommes tous les deux incapables de faire quoique ce soit, tout juste bons à tripper étalés sur nos matelas. Pendant plusieurs heures, je vais répéter inlassablement des «Oh la la...» «Ah oui quand même...» «Ah ouais...» «A ce point-là...». Les craintes du début sont dissipées, et pour ma part je ris énormément de nous voir perchés à ce point.
En plus des OEV et CEV caractéristiques du 2C-D, qui sont rendues très intenses par le cannabis, j’expérimente aussi des hallucinations auditives et tactiles. La musique sonne différemment dans mes oreilles, je ressens très distinctement mes tympans, ainsi que mes yeux. J’ai la sensation qu’entre le monde et moi, il y a les stimulis (images et sons) auxquels s’ajoutent les hallucinations (OEV, CEV, déformations auditives), puis mes organes (yeux et tympans, que je perçois de façon tactile, comme le bout de mes doigts), et enfin mes ressentis physiques en général, que je visualise comme «à l’intérieur» de moi, de façon plus diffuse. Ainsi, la musique me procure des sensations que je qualifierais de tactiles dans mes oreilles (que je ressens comme une pression), qui se répercutent dans tout mon corps par des fourmillements, des picotements. J’ai la sensation que tout mon corps irradie, pulse, et que je perçois cette pulsation à la fois de façon sonore (un bruit blanc et une douleur dans les tympans) et de façon visuelle (les hallus et une légère douleur dans mes yeux). J’ai donc une bonne synesthésie visuelle + sonore + tactile, qui mélange mes ressentis physiques et les stimulis extérieurs. Je ressens aussi de façon exacerbée le moindre effleurement sur ma peau, et je me surprends à faire tourner ma tête lentement, penchée vers l’avant, penchée à droite, renversée en arrière, penchée à gauche et ainsi de suite. Le frottement de mon t-shirt sur ma nuque et mes clavicules se transforme en un grésillement dans mes oreilles, et j’ai l’impression de déplacer une énorme sphère en pierre autour de ma tête. Je sens mes sensations tactiles se déformer et se transformer, exactement de la même manière que mon champ de vision.
En plus des hallucinations dans mes sens, je perçois aussi des hallucinations dans ma notion du temps. Je sens le temps se découper en une multitude de petits instants figés, comme les 24 images par seconde du cinéma (chose que j’avais déjà expérimenté en mélangeant MXE et 2C-D). Je ressens ça à la fois visuellement avec les effets de rémanence qui accompagnent les mouvements de mes mains ou ceux de Kaos, mais aussi dans la musique et tous les autres bruits que j’hallucine, qui se découpent distinctement (en plus des modifications de timbre et de texture) et aussi dans mes ressentis physiques, qui se découpent de la même manière. Avec l’euphorie du cannabis, cela me pousse bien vite à éclater de rire devant la puissance écrasante et incapacitante des effets. Cet éclat de rire ralentit le temps et me permet de décomposer encore davantage les hallucinations : j’entends mon rire se transformer en une bouillie de sons métalliques (un peu à la manière des effets du N2O), j’entends comme un larsen entrecoupé dans mes oreilles, mon champ de vision (yeux ouverts ou fermés) devient entièrement stroboscopique, et tout cela se ralentit et suit le rythme de mon rire. Pour couronner le tout, j’ai aussi la sensation physique de plonger dans un vortex hors de la réalité, comme si je tombais à l’intérieur de moi-même, et je conçois aussi dans mon esprit les sons et la musique se décomposer et se transformer en 3D, sans réellement les visualiser mais j’en ai une représentation mentale - idem pour mes ressentis physiques.
Cet état hautement modifié de conscience dure longtemps. Je regarde l’heure plusieurs fois, et je me rends compte que le trip n’en finit pas. A 4h, le trip est toujours aussi fort. A 5h, je m’attendais à entrevoir une descente, mais pas l’ombre d’une. Lorsque l’on ne trippe pas chacun de notre côté, Kaos et moi tapons de gros délires sur n’importe quoi, comme mon portable que je perds à de nombreuses reprises, et que je crois avoir renversé comme de l’eau - ou encore l’idée que celui-ci quitte l’appart, pour aller faire ses études ailleurs, et que je lui dis au revoir avec un signe de la main, ce qui nous fait tous les deux beaucoup rire. Ou tout bêtement enchaîner les exclamations de surprise et d’étonnement devant la rouste qu’on prend. On est comme des gosses, à s’amuser dans un super manège avec tout ce qui nous passe sous la main : un écran de téléphone pour Kaos, des étagères pour moi, des albums d’électro psyché, nos visages dans le miroir...
~ 6h (T + 5h15) : Les effets commencent à diminuer en intensité, mais restent encore clairement supérieurs à un plateau de 50mg de 2C-D seul. La descente se fait par vagues, que l’on perçoit très clairement : des phases où l’on revient un peu sur l’expérience extraordinaire qu’on a vécu, et d’autres où l’on replonge totalement dans le trip.
~ 7h30 (T + 6h45) : On est bien descendus, même si je continue de flotter pas mal et que j’ai toujours des visuels. Le soleil se lève doucement, nous sommes bercés par la guitare de The Xx. Je ressens les notes à travers mon corps, j’en ai des douleurs dans les tympans. Ce que j’imagine être des percussions, et que je visualise clairement comme tel, se retourne pour me montrer qu’il s’agit en fait du grattement d’un mediator contre une corde de guitare. Je vois la corde vibrer, le son osciller comme elle, tourner en trois dimensions dans ma tête, les doigts du guitaristes enchaîner les slides sur le manche, passer de touche en touche, l’echo de la pédale d’effet résonne dans mon esprit et démultiplie mes visions, à la fois comme les images se mêleraient en fondus sur une vidéo, et comme les reflets de deux miroirs face-à-face. Peu à peu, je m’endors, paisible.
After effect : On s’est réveillés vers 14h, et on a glandé tout l’aprèm. On a bien la tête dans le cul, et on met quelques heures à avoir l’air passables. Je fume quelques clopes qui n’aident pas à refaire surface, mais je m’en fous, on ne part que le lendemain matin. On ira se faire un bon gros Mac Do vers 19h, là on se sent plus clairs. Et puis de retour à l’appart, on finira notre joint puis on en roulera un petit bien moins dosé, juste avant de dormir. Gros coup de flemme, mais pas de retour de la magie phénétylaminique. Les jours suivants, j’ai quelques résiduels de temps en temps. Souvent en fumant une clope. Une semaine après, je n’avais presque plus rien, juste les très légers visuels qui peuvent revenir quand je suis très fatigué, mais c’est devenu habituel désormais.
Conclusion
J’ai vraiment été surpris par la puissance de ce combo. J’imaginais que le cannabis ne ferait que relever un peu les effets du 2C-D, et il m’a propulsé à un tout autre niveau. J’ai expérimenté très clairement des hallucinations non seulement visuelles mais aussi auditives et même tactiles, une fragmentation du temps marquée, le tout relié par une jolie synesthésie. Ces trois sens ne faisaient vraiment plus qu’un en moi, et différencier les sons des images ou des sensations me semblait aussi peu pertinent que de séparer les graves des aigus ou le jaune du rouge : des façons différentes de percevoir une même chose, qui ici était probablement le monde ou la réalité. J’ai l’impression d’avoir entrouvert les Portes de la Perception l’espace de quelques heures, d’être allé au-delà de mes sens pour percevoir et ressentir.
Mon mental a aussi été affecté mais principalement par les effets distincts du cannabis, qui m’a rendu euphorique et hilare, et du 2C-D, qui a amené mon cerveau à construire des raisonnements sur une logique alternative. Mais pas de remises en question ou d’introspection, peut-être juste quelques réflexions sur la marche du monde et les liens entre les gens, l’art, les drogues, la société, notre époque...
Je suis heureux d’avoir partagé cette énorme claque avec Kaos. Si au début j’avais le sentiment de m’occuper de la soirée et de lui, de jouer un rôle d’initiateur, de sitter, après avoir fumé je nous voyais davantage comme deux marins embarqués sur un même navire en pleine tempête kaléidoscopique. Son cadeau a rendu ce trip magique, comme le premier trip que je n’ai pas fait, puisque j’ai découvert les psyché par palliers, une démarche prudente mais qui ne laisse place ni à la surprise, ni à la magie que nous avons vécu ce soir-là. Si je reste un débutant avec bien plus de théorie que d’expérience en tête - knowledge is power - je pense qu’il s’agit de mon premier contact avec le psychédélisme.
Et maintenant, place à Kaos !
L’avant
J’ai initié Kaos au 2C-D il y a quelques mois de cela avec un trip à 2x30mg, accompagné d’un petit joint. J’avais été marqué par la dose de 60mg, et le joint avait un peu relancé les visuels, mais rien de plus.
Depuis, on a eu envie de tripper à nouveau ensemble, et on a fini par trouver un week-end pour qu’il vienne chez moi. De mon côté, j’ai fini mes partiels le jour-même, je suis un peu fatigué par une semaine de révisions intenses mais j’ai la satisfaction d’être tombé sur le seul chapitre que j’avais révisé dans une matière à gros coefficient, et d’avoir plutôt bien réussi l’ensemble alors que je n’avais pratiquement pas été en cours du semestre. On se retrouve donc ce week-end pour fêter la fin de mon année.
Les conditions
Set : Je suis un peu fatigué mais euphorique d’avoir terminé mon année, et content de revoir mon pote, j’ai une bonne envie de fêter tout ça.
Setting : Kaos et moi, dans mon petit 9m2, avec mon Mac pour mettre de la musique. On a très très bien mangé, et bu à peu près l’équivalent de deux pintes chacun.
Dose : 50mg chacun et un joint de sa weed.
Le trip
20h (T - 4h45) : Kaos arrive vers 20h, on se pose chez moi avec un peu de musique pour discuter, et il sort un pochon de weed alors qu’il m’avait dit n’avoir trouvé que du shit, c’est ma petite surprise ! J’apprécie d’autant plus le cadeau qu’il m’annonce qu’elle est très très bonne. Je roule un spliff pour plus tard et on file rejoindre un couple d’amis en ville pour une grosse bouffe pour fêter la fin des partiels.
23h (T - 1h45) : Nos amis rentrent chez eux, on décide d’aller boire un coup pour démarrer la soirée. On descend quelques verres, on se balade un peu autour pour voir s’il y a du monde, puis on finit par rentrer à l’appart.
0h (T - 45min) : Arrivés chez moi, on installe son matelas, puis je lui demande quelle dose il veut. On se met d’accord sur 50mg chacun, en se laissant la possibilité de redropper derrière si l’envie nous en prend, on a toute la journée du lendemain pour se reposer.
0h45 (T = 0) : On prend tous les deux notre para de 50mg. On continue de discuter tranquillement en regardant des clips.
1h30 (T + 45min) : Kaos me dit que ça commence à monter. De mon côté, je ne sens vraiment pas grand-chose. Compte tenu de nos gabarits, ça devrait plutôt être l’inverse ! Je suis un peu blasé tout en en riant, comme souvent lorsque j’ai bu. Je plaisante pas mal, avec un air désabusé.
2h (T + 1h15) : Je sens enfin la montée, alors que Kaos commence à être bien dedans. On s’amuse sur une vidéo où je crois discerner des lettres derrière la couverture de l’album qui sert d’illustration à la musique : est-ce que c’est réel, de la poussière sur l’écran, des visuels ? Je bidouillerais l’exposition de l’image demain, pour le moment Kaos part plutôt mal. Je lui attrape une feuille pour qu’il note ce qui lui passe par la tête. Il a l’air d’avoir un peu de mal à encaisser la montée, je le rassure en lui disant qu’on n’a rien à craindre et juste à profiter.
2h30 (T + 1h45) : Je suis arrivé au plateau, les visuels sont là, les mécanismes de ma pensée sont altérés aussi, mais je gère facilement. Je me fais un peu le sitter de mon ami qui se ressaisit plusieurs fois pour ne pas partir en bad, je le rassure et j’essaie de lui changer les idées.
2h45 (T + 2h) : Pour le faire sortir un peu de son état d’angoisse, je lui mets l’album de Kilo Kish, du chillout tranquille avec une voix bien sexy. Ca a l’air d’aller mieux de son côté, je m’allume le joint que j’ai roulé plus tôt.
2h50 (T + 2h05) : Je lui tends le joint et immédiatement, je sens que les molécules font leur chemin vers mon cerveau. Mais très rapidement, je me sens partir. Le THC relance avec une force incroyable mon trip. Tout l’appart se met à tourner autour de moi, les visuels envahissent mon champ de vision et je sens que je ne maîtrise plus rien. Je suis très surpris par la puissance de la synergie, et je flippe pour mon ami, j’ai peur qu’il reparte en bad et que je sois incapable de gérer quoique ce soit.
J’essaie de me ressaisir mais les effets continuent de monter. J’ai les yeux écarquillés et je sens des fourmillements dans tout mon corps, j’ai l’impression de me détacher du lieu où je suis, d’être le centre d’un vortex d’images et de sons, de flotter dans le vide. Je regarde Kaos qui a le joint entre les lèvres, et je me rends compte qu’il ne sait pas ce qui l’attend, j’ai envie de lui dire d’arrêter, j’ai peur qu’il réagisse très mal face à ce retournement complet du trip.
Je reprends le joint avec l’idée d’en fumer quelques taffes avant de l’éteindre. Mais il a l’air de réagir plutôt positivement. De mon côté, je suis scotché par la puissance de la chose, il le voit et me regarde avec un air de « Je te l’avais bien dit ! » bienveillant. J’acquiesce en disant que c’est vraiment un truc de fou. On va tirer encore un peu sur le joint avant de le reposer. Voyant que ce joint est un tournant capital du trip, je lui demande de noter l’heure, je regarde rapidement mon mac et, ayant quelques difficultés pour m’exprimer, je lui dis bêtement « Moins cinq ». On a beaucoup ri par la suite en se rendant compte qu’on n’avait absolument pas noté de quelle heure il était moins cinq !
A partir de là, je n’ai plus aucune chronologie. Une fois la montée du THC prise dans la gueule, je suis perché sur un plateau très très très haut, je me demande si ce n’est pas l’effet légèrement dissociatif du cannabis que je ressens. Nous sommes tous les deux incapables de faire quoique ce soit, tout juste bons à tripper étalés sur nos matelas. Pendant plusieurs heures, je vais répéter inlassablement des «Oh la la...» «Ah oui quand même...» «Ah ouais...» «A ce point-là...». Les craintes du début sont dissipées, et pour ma part je ris énormément de nous voir perchés à ce point.
En plus des OEV et CEV caractéristiques du 2C-D, qui sont rendues très intenses par le cannabis, j’expérimente aussi des hallucinations auditives et tactiles. La musique sonne différemment dans mes oreilles, je ressens très distinctement mes tympans, ainsi que mes yeux. J’ai la sensation qu’entre le monde et moi, il y a les stimulis (images et sons) auxquels s’ajoutent les hallucinations (OEV, CEV, déformations auditives), puis mes organes (yeux et tympans, que je perçois de façon tactile, comme le bout de mes doigts), et enfin mes ressentis physiques en général, que je visualise comme «à l’intérieur» de moi, de façon plus diffuse. Ainsi, la musique me procure des sensations que je qualifierais de tactiles dans mes oreilles (que je ressens comme une pression), qui se répercutent dans tout mon corps par des fourmillements, des picotements. J’ai la sensation que tout mon corps irradie, pulse, et que je perçois cette pulsation à la fois de façon sonore (un bruit blanc et une douleur dans les tympans) et de façon visuelle (les hallus et une légère douleur dans mes yeux). J’ai donc une bonne synesthésie visuelle + sonore + tactile, qui mélange mes ressentis physiques et les stimulis extérieurs. Je ressens aussi de façon exacerbée le moindre effleurement sur ma peau, et je me surprends à faire tourner ma tête lentement, penchée vers l’avant, penchée à droite, renversée en arrière, penchée à gauche et ainsi de suite. Le frottement de mon t-shirt sur ma nuque et mes clavicules se transforme en un grésillement dans mes oreilles, et j’ai l’impression de déplacer une énorme sphère en pierre autour de ma tête. Je sens mes sensations tactiles se déformer et se transformer, exactement de la même manière que mon champ de vision.
En plus des hallucinations dans mes sens, je perçois aussi des hallucinations dans ma notion du temps. Je sens le temps se découper en une multitude de petits instants figés, comme les 24 images par seconde du cinéma (chose que j’avais déjà expérimenté en mélangeant MXE et 2C-D). Je ressens ça à la fois visuellement avec les effets de rémanence qui accompagnent les mouvements de mes mains ou ceux de Kaos, mais aussi dans la musique et tous les autres bruits que j’hallucine, qui se découpent distinctement (en plus des modifications de timbre et de texture) et aussi dans mes ressentis physiques, qui se découpent de la même manière. Avec l’euphorie du cannabis, cela me pousse bien vite à éclater de rire devant la puissance écrasante et incapacitante des effets. Cet éclat de rire ralentit le temps et me permet de décomposer encore davantage les hallucinations : j’entends mon rire se transformer en une bouillie de sons métalliques (un peu à la manière des effets du N2O), j’entends comme un larsen entrecoupé dans mes oreilles, mon champ de vision (yeux ouverts ou fermés) devient entièrement stroboscopique, et tout cela se ralentit et suit le rythme de mon rire. Pour couronner le tout, j’ai aussi la sensation physique de plonger dans un vortex hors de la réalité, comme si je tombais à l’intérieur de moi-même, et je conçois aussi dans mon esprit les sons et la musique se décomposer et se transformer en 3D, sans réellement les visualiser mais j’en ai une représentation mentale - idem pour mes ressentis physiques.
Cet état hautement modifié de conscience dure longtemps. Je regarde l’heure plusieurs fois, et je me rends compte que le trip n’en finit pas. A 4h, le trip est toujours aussi fort. A 5h, je m’attendais à entrevoir une descente, mais pas l’ombre d’une. Lorsque l’on ne trippe pas chacun de notre côté, Kaos et moi tapons de gros délires sur n’importe quoi, comme mon portable que je perds à de nombreuses reprises, et que je crois avoir renversé comme de l’eau - ou encore l’idée que celui-ci quitte l’appart, pour aller faire ses études ailleurs, et que je lui dis au revoir avec un signe de la main, ce qui nous fait tous les deux beaucoup rire. Ou tout bêtement enchaîner les exclamations de surprise et d’étonnement devant la rouste qu’on prend. On est comme des gosses, à s’amuser dans un super manège avec tout ce qui nous passe sous la main : un écran de téléphone pour Kaos, des étagères pour moi, des albums d’électro psyché, nos visages dans le miroir...
~ 6h (T + 5h15) : Les effets commencent à diminuer en intensité, mais restent encore clairement supérieurs à un plateau de 50mg de 2C-D seul. La descente se fait par vagues, que l’on perçoit très clairement : des phases où l’on revient un peu sur l’expérience extraordinaire qu’on a vécu, et d’autres où l’on replonge totalement dans le trip.
~ 7h30 (T + 6h45) : On est bien descendus, même si je continue de flotter pas mal et que j’ai toujours des visuels. Le soleil se lève doucement, nous sommes bercés par la guitare de The Xx. Je ressens les notes à travers mon corps, j’en ai des douleurs dans les tympans. Ce que j’imagine être des percussions, et que je visualise clairement comme tel, se retourne pour me montrer qu’il s’agit en fait du grattement d’un mediator contre une corde de guitare. Je vois la corde vibrer, le son osciller comme elle, tourner en trois dimensions dans ma tête, les doigts du guitaristes enchaîner les slides sur le manche, passer de touche en touche, l’echo de la pédale d’effet résonne dans mon esprit et démultiplie mes visions, à la fois comme les images se mêleraient en fondus sur une vidéo, et comme les reflets de deux miroirs face-à-face. Peu à peu, je m’endors, paisible.
After effect : On s’est réveillés vers 14h, et on a glandé tout l’aprèm. On a bien la tête dans le cul, et on met quelques heures à avoir l’air passables. Je fume quelques clopes qui n’aident pas à refaire surface, mais je m’en fous, on ne part que le lendemain matin. On ira se faire un bon gros Mac Do vers 19h, là on se sent plus clairs. Et puis de retour à l’appart, on finira notre joint puis on en roulera un petit bien moins dosé, juste avant de dormir. Gros coup de flemme, mais pas de retour de la magie phénétylaminique. Les jours suivants, j’ai quelques résiduels de temps en temps. Souvent en fumant une clope. Une semaine après, je n’avais presque plus rien, juste les très légers visuels qui peuvent revenir quand je suis très fatigué, mais c’est devenu habituel désormais.
Conclusion
J’ai vraiment été surpris par la puissance de ce combo. J’imaginais que le cannabis ne ferait que relever un peu les effets du 2C-D, et il m’a propulsé à un tout autre niveau. J’ai expérimenté très clairement des hallucinations non seulement visuelles mais aussi auditives et même tactiles, une fragmentation du temps marquée, le tout relié par une jolie synesthésie. Ces trois sens ne faisaient vraiment plus qu’un en moi, et différencier les sons des images ou des sensations me semblait aussi peu pertinent que de séparer les graves des aigus ou le jaune du rouge : des façons différentes de percevoir une même chose, qui ici était probablement le monde ou la réalité. J’ai l’impression d’avoir entrouvert les Portes de la Perception l’espace de quelques heures, d’être allé au-delà de mes sens pour percevoir et ressentir.
Mon mental a aussi été affecté mais principalement par les effets distincts du cannabis, qui m’a rendu euphorique et hilare, et du 2C-D, qui a amené mon cerveau à construire des raisonnements sur une logique alternative. Mais pas de remises en question ou d’introspection, peut-être juste quelques réflexions sur la marche du monde et les liens entre les gens, l’art, les drogues, la société, notre époque...
Je suis heureux d’avoir partagé cette énorme claque avec Kaos. Si au début j’avais le sentiment de m’occuper de la soirée et de lui, de jouer un rôle d’initiateur, de sitter, après avoir fumé je nous voyais davantage comme deux marins embarqués sur un même navire en pleine tempête kaléidoscopique. Son cadeau a rendu ce trip magique, comme le premier trip que je n’ai pas fait, puisque j’ai découvert les psyché par palliers, une démarche prudente mais qui ne laisse place ni à la surprise, ni à la magie que nous avons vécu ce soir-là. Si je reste un débutant avec bien plus de théorie que d’expérience en tête - knowledge is power - je pense qu’il s’agit de mon premier contact avec le psychédélisme.
Et maintenant, place à Kaos !